Règles d'une alliance

La navette se posa en douceur sur une des plates-formes du centre-ville, après avoir survolé la capitale. Dès qu’elle eût posé pied à terre, l’amirale put ressentir la légère agitation, très inhabituelle, sur la place s’étalant devant la mairie. Elle en comprit assez vite la raison en entendant rapidement une conversation, à son passage. Encore et toujours la présence dérangeante de certains étrangers en ville. Il leur en fallait peu, ce n’était pas la première fois que ça arrivait et il fallait composer avec, surtout lorsqu’une telle présence pouvait apporter certains bénéfices à l’Ascendance. C’était, bien sûr, très différent lorsque les éléments étrangers ne faisaient rien d’autre que perturber le cours normal des choses, sans rien apporter de bon. Sans oublier certains, de leur peuple, qui avaient eux aussi un certain don pour perturber la situation ambiante, et guère toujours dans le bon sens…

Dans le hall d’accueil, mis à part de discrets gardes dédiés à la sécurité du bâtiment, on ne croisait aucun uniforme, l’amirale n’était donc pas, dans son uniforme blanc, bien prête à se fondre dans le décor. L’Aristocra Beclu'doz'csapla était également maire de la ville et son Clan était en charge de la capitale, il était donc naturel de retrouver ici un grand nombre des membres de sa Famille. L’amirale ne se mêlait pas de politique mais savait les tensions sous-jacentes et les rivalités de mises entre les Csapla et les Nuruodo, consciente aussi que le Clan Csapla était farouchement contre une idée d’alliance avec l’Ordre Jedi. S’ils ne pouvaient, pour le moment, pas s’y opposer au point d’y mettre immédiatement un terme, il ne faisait aucun doute qu’ils feront tout ce qui était en leur pouvoir pour faire échouer le processus ou prouver qu’il ne servait à rien de nouer cette alliance.

Pour sa part, si elle ne savait pas vraiment encore que penser des Jedis, elle estimait que tous les moyens étaient bons à prendre, pour se prémunir contre des ennemis du même genre que ce type infect, enfermé chez eux. Il suffisait de le rencontrer une fois pour se convaincre de la menace représentée. Ce nouvel ennemi n’était à prendre à la légère, pas plus que d’autres déjà identifiés et surveillés. En grimpant au premier étage, puis au second, Ar’alani salua très brièvement quelques rares têtes connues, avant d’arriver à la petite salle de réunion où elle était attendue. Tout le monde ne devait pas déjà être présent… Revoir Mitth’ras’safis ne fut pas désagréable, malgré les circonstances et surtout les histoires tournant autour de lui actuellement. Elle ne l’avait plus croisé depuis l’affaire du Vol vers l’Infini, il y a quelques semaines. Il avait bien fait d’éviter de revenir avec sa fiancée.

« Pohn ch'at veb vah csaah. »
Contente de vous revoir.

Au fond, Ar’alani serait plutôt contente de le voir avec son fils ou sa fille, il méritait bien cela, même si cet enfant allait être un cas assez délicat à gérer. Un enfant qui ne sera pas non plus le bienvenu dans l’Ascendance, quand bien même un de ses parents en était issu. Ce qui était dommage, car finalement, mis à part le non-respect des traditions, il n’y avait rien de mal à avoir des parents issus de deux cultures différentes. En entrant dans la salle de réunion, l’amirale salua aussi formellement Sev’eere’nuruodo, toujours aussi étonnée de la voir continuer à travailler alors qu’elle devrait être sous haute surveillance médicale. Elle salua ensuite leur invité Humain, espérant intérieurement qu’il ne ressemblait pas à Nat Skywalker. Son regard était assez similaire à celui de Vanto, curieusement.

« Bienvenue sur notre monde. Je suis l’amirale Ar’alani. »

Ce ne devrait pas être trop compliqué à prononcer, même Car’das avait réussi, en son temps, lorsqu’il était venu s’écraser contre eux la première fois. L’ex-contrebandier avait décidément un don pour des arrivées quelque peu agitées, dans les Régions Inconnues. Pourchassé la première fois, arrivé à moitié mort la seconde. Elle se retourna ensuite à moitié vers Thrass, gardant un air neutre.

« Vea csarcican't tiscut'san mah csei s csavon'ehn ? »
Qui doit participer à cette réunion ?

Tout avait été restructuré et rénové, depuis don dernier passage, et Thrass finit par devoir demander son chemin pour s’y retrouver. Il n’avait pas souvenir que la mairie avait tant besoin de travaux, pourtant… Enfin, il ne s’y était jamais beaucoup rendu, son travail principal se menait avant tout au Parlement. Ce qui avait surtout changé étaient les regards lourds, très lourds, incroyables de sous-entendu, même si personne n’avait été encore assez malpoli pour venir le tancer en face. A moins qu’ils n’attendent que le Conseil ne le fasse ? L’ancien administrateur imaginait très bien les rumeurs qui devaient courir sur son dos, actuellement, et s’estimait très heureux de ne plus vivre dans les parages. Il se prendrait une telle volée de bois vert… Ignorer les regards, et parfois les chuchotements ou remarques, était en revanche un exercice plus compliqué qu’il ne l’avait cru.

Vivement qu’ils quittent cet endroit… Jamais il n’aurait cru dire ça un jour, mais vraiment, Thrass ne voulait plus qu’une chose, s’éloigner de Csilla, de l’Ascendance, des remarques pénibles, des regards… Un profond sentiment d’injustice le travaillait de plus en plus, alors qu’il avait envie de dire à tous que non, il n’avait pas choisi de revenir par ces failles et qu’il avait encore moins choisi de tomber amoureux. C’était comme ça, voilà tout ! Oui, il aurait pu ignorer ces sentiments, vivre en oubliant Lorana, mais ça n’aurait pas réglé le problème de sa sensibilité à la Force ni le fait qu’il devrait être mort depuis trente ans. Quitte à ne plus pouvoir rentrer dans aucune case ou se conformer à son ancienne vie, autant assumer parfaitement sa nouvelle situation, et par conséquent, s’autoriser à vivre auprès de Lorana et de leur futur enfant.

Ce n’est que maintenant qu’il comprenait enfin son petit frère, tiens…

Sev’eere’nuruodo était encore seule dans la salle, lorsqu’il y arriva, avec Luke. Il la salua, puis retourna vers la porte, cherchant un peu d’air avant que tout ne commence. Une ou deux minutes à peine plus tard, il vit arriver l’amirale Ar’alani, un peu surpris mais content lorsqu’elle lui dit être contente de le revoir. Au moins une que sa présence ne dérangeait pas, ça faisait du bien. Ils ‘écarta pour la laisser entrer, se tenant debout sur le côté, les mains dans le dos. A chaque fois qu’il regardait Veeren il avait envie de lui dire de rentrer chez elle pour se reposer… Elle avait les traits tirés par la fatigue, même sa posture dévoilait qu’elle n’était pas très à l’aise. Évidemment, il savait qu’elle n’était pas du genre à prendre beaucoup de repos ou soin d’elle, mais en étant enceinte, elle prenait plus de risques.

"Bienvenue sur notre monde. Je suis l’amirale Ar’alani."

Lorsqu’elle lui demanda qui d’autre devait encore venir, il murmura rapidement qu’ils attendaient sinon. Et bien… Normalement, cela devait rester un temps entre eux, avec en plus la présence du capitaine Nor'hit'sarsi, que l’Aristocra avait appelé car il devait se charger de créer un système de communications crypté et efficace, sa spécialité première. Et après cela, il faudra en passer par une étape s’annonçant déjà bien plus mouvementée, à savoir rencontrer cette fois le Conseil des Familles et leurs conseillers. Étant donné ce que la plupart d’entre eux pensaient de cette affaire… Enfin, ça restait de la politique, ils pourront s’en sortir. L’amirale n’allait pas aimer ça non plus, elle détestait la politique, même si elle était capable de la comprendre et l’expliquer aux autres, en cas de besoin.

Le capitaine se présenta très peu de temps après, visiblement un peu essoufflé, et demandant pardon d’emblée pour son retard. Après les présentations d’usage, ils purent s’installer dans la salle, et commencer par poser les bases calmement pour le capitaine et l’amirale. Le premier ne semblait pas choqué ou étonné, il avait plutôt l’air attentif du chirurgien se préparant mentalement avant une importante opération. Ar’alani avait tout de même dû chercher longtemps avant de proposer une personne qui n’ait rien contre le fait de travailler avec des personnes extérieurs, et pire encore, avec des sensitifs. Pour lui, le meilleur serait de baser le code sur leur langue, non répandue à l’extérieur, pour mieux sécuriser les messages. Mais il fallait aussi qu’au moins un ou deux Jedis l’apprennent, au cas où il disparaissait subitement et ne pouvait plus traduire.

L’hôpital avait laissé un message pour confirmer qu’ils laissaient finalement Car’das le quitter, cette fois de leur volonté. Quand elle pensait que ce type s’était sauvé, littéralement, de la salle de soins… Ou avait-il imaginé se rendre ? Dans une ville qu’il ne connaissait pas ? Il parlait leur langue, oui, mais ce n’était pas ça qui allait suffire pour partir pour de bon d’ici, surtout dans son état. Il attendait maintenant avec le second humain qui l’avait accompagné, Jinzler. Un homme qui ne cachait pas non plus son envie ardente de partir d’ici le plus vite possible. Il était la dernière famille de Lorana, si Veeren avait bien compris… Peu charmant. Veeren compatissait pour la jeune femme, avoir ça comme frère, ce n’était pas le meilleur… D’autant plus qu’il ne cachait même pas qu’il lui en voulait, pour une raison obscure.

Aujourd’hui était une journée particulière… Veeren avait voulu éviter que leur première réunion de ce matin ne se déroule au Parlement, pour y éviter la petite effervescence, précédent le rassemblement du Conseil. Elle aurait d’ailleurs préféré qu’il se tienne en petit comité, mais ça n’aurait guère été judicieux… Cette affaire commençait à peine à prendre forme, ils ne devaient pas tout gâcher. Prête à se rendre à la salle, elle s’interrompit quand deux bras glissèrent tout à coup autour d’elle, puis elle sentit un baiser dans son cou. Nyvan… Elle posa la main contre son bras, se laissant faire, les yeux fermés. Ils étaient seuls, pour le moment, c’était le genre de gestes qu’il ne se permettait pas en public, par pudeur, plus que pour donner une bonne impression. Veeren se laissa aller contre lui, pouvant se permettre ce petit temps, juste entre eux deux, elle n’était pas en retard.

Au bout de quelques instants, il finit par lui murmurer qu’il viendra la chercher, quand elle aura terminé, pour l’emmener se reposer à la maison. Le repos, une demande qu’elle entendait de plus en plus souvent… Qu’il ne s’inquiète pas… Elle allait bien devoir finir par vraiment prendre un congé, à l’approche de l’accouchement. Déjà, elle ne voyageait plus, c’était déjà bien, n’est-ce pas ? Enfin, pas la peine de l’ajouter, elle savait déjà ce qu’il en pensait. Elle resta dans ses bras encore de longues minutes avant de devoir s’en détacher et filer. Son mari n’avait pas vraiment tort, elle était réellement fatiguée, depuis deux ou trois semaines, beaucoup plus que de coutume. Même le travail le plus simple exigeait plus d’efforts. Travailler durant des heures à son bureau devenait aussi plus lassant et exigeant. Une sensation très bizarre, qu’elle n’avait pourtant pas eu en étant enceinte de ses autres enfants.

Dans la petite salle de réunion, elle ne resta pas seule très longtemps. Thrass et Luke arrivèrent quelques minutes plus tard, suivit de l’amirale Ar’alani. Veeren avait brièvement parlé à cette dernière de l’idée de Thrass, recevant en retour un certain scepticisme, bien qu’elle n’eût pas eu l’air complètement fermée. Mieux valait ne pas tout balancer d’un seul coup… Le seul fait de cette alliance était assez dur encore à avaler pour beaucoup. Le capitaine Nor'hit'sarsi vint les rejoindre avec un peu de retard, arrachant un petit soupir blasé à l’Aristocra. Cet homme avait beaucoup de qualité set de compétences, mais la ponctualité n’en avait jamais fait partie. Jamais il n’était arrivé à l’heure pour quoi que ce soit, et au sein d’une Flotte très rigoureuse et à cheval sur les détails, ce défaut lui avait déjà valu pas mal d’ennuis, en plus de ruiner l’avancement de sa carrière.

Ils passèrent assez vite dans le vif du sujet. Le capitaine était un de leurs spécialistes en encodage, ils avaient besoin de créer un système fiable, et surtout nouveau, car Veeren devinait que ses confrères n’accepteraient pas que des étrangers utilisent un des codes actuels. Thrass soulevait un bon point, s’ils partaient sur une base de leur propre langue, inconnue dans le reste de la galaxie, il serait bien que d’autres, qui ne viennent pas des failles, sachent la parler.

– Vous pouvez l’enseigner, Mitth’ras’safis, à une ou deux personnes de ce temps. Je suppose que votre propre enfant aussi apprendra à parler le Cheunh, n’est-ce pas ?

Un enfant qui ne disparaîtra pas non plus, même si ses deux parents, eux, risquaient de l’être. Cela dit, le temps que cet enfant vienne au monde et soit en âge de parler, ainsi qu’en, âge de participer à ce type d’opérations, ils avaient une bonne dizaine d’années devant eux. Le capitaine proposa d’abord quelques débuts de piste, d’une voix lente, puis se mit à griffonner sur son carnet, plus pour lui-même dans un premier temps que pour les autres. Ils passèrent du temps sur ce premier sujet, au moins pour poser assez de bases, et se donner plus d’arguments pour la réunion du Conseil qui allait suivre. De toute manière, même si le code était terminé un peu plus tard, ce n’était pas si grave, ils ne se trouvaient plus en état d’urgence absolue. Quant au fou, il était toujours bouclé et étroitement surveillé, les gardes se relayaient pour ne jamais le lâcher des yeux, quoi qu’il arrive. Un type répugnant.

– Nous allons présenter ce projet au Conseil toute à l’heure. Vous vous y connaissez un peu en politique, Skywalker ?

Plus que quelques « formalités » et ils seront finalement prêts à repartir, avec des passagers supplémentaires. Et un de moins… Le petit Nuru avait disparu, comme il était venu, comme si la Force avait attendu qu’il puisse retrouver une part de ses origines avant de le reprendre avec elle. Pour le retour, Sogua, l’homme dont avait parlé l’Aristocra des Nuruodo dès leur arrivée, allait venir avec eux, il était revenu il y a peu sur Csilla. Physiquement, il avait quelques différences notables avec les autres Chiss et il souriait plus, ça le rendait un plus sympathique. Avec lui, ils allaient aussi emmener Jorj Car’das et Dean Jinzler. Luke n’avait pas eu l’occasion de vraiment parler ni à l’un, ni à l’autre, cependant, embraqué aussitôt après le mariage dans la suite de leurs affaires. Restait à voir si ce sera plus simple que de passer inaperçu au milieu d’une foule où vous étiez le seul de l’assemblée à ne pas être de la même espèce. Il ignorait complètement comment cette journée allait bien pouvoir se passer, ni comment ne pas commettre trop d’erreurs de jugement.

Ils avaient d’abord un point à faire en privé, en quelque sorte, avant la suite des opérations. Dans une petite salle de réunion, en petit comité, à ce qui était donc la mairie de la ville. Si Luke trouvait l’endroit très beau, il était à moitié tombé malade à cause du froid et parce qu’il avait tout sauf l’habitude de ce genre d’environnement. Lorsque l’amirale Ar’alani vint les rejoindre, il nota avec un certain amusement que la couleur de son uniforme était similaire à celle des amiraux de l’Empire. Il lui rendit son salut avec politesse, en la remerciant. Son nom ne ressemblait pas vraiment à ceux des autres, ni à un surnom, mais bon, il devrait pouvoir le prononcer sans l’écorcher. Un capitaine de la Flotte les rejoignit avec un peu de retard, puis ils se mirent au travail, peaufinant d’abord quelques détails, avant de devoir présenter plus formellement toute cette affaire au Conseil de l’Ascendance. Thrass préférait que le code choisi entre eux soit basé leur langue, pour éviter au maximum les décodages. Il faudrait aussi que certains d’entre eux la connaissent, dans ce cas. Luke aurait cru qu’il avait déjà commencé à l’enseigner à Lorana. Mais peut-être qu’ils n’avaient pas eu le temps.

– Vous pouvez l’enseigner, Mitth’ras’safis, à une ou deux personnes de ce temps. Je suppose que votre propre enfant aussi apprendra à parler le Cheunh, n’est-ce pas ?

Le temps que cet enfant naisse puis grandisse, il faudra bien qu’un autre sache parler. Luke posa la main contre sa bouche et détourna la tête, toussant le plus discrètement possible, puis se redressa. Légère fièvre en cours. A mesure de l’avancée, du moins les bases, de cette partie, Luke s’aidait de Thrass pour traduire ses propositions, étant donné qu’il ne parlait pas non plus le Sy Bisti. La question que lui posa plus tard l’Aristocra le fit un peu sourciller. Il y avait un piège, là-dedans ? Ou bien leur Conseil des familles était-il une arène politique du même acabit que ne l’avait été le sénat, du temps de la République ? Il voulait bien combattre, essayer de faire de la diplomatie s’il le fallait vraiment, voire négocier, même si ce n’était pas son domaine favori, mais la politique… S’il y avait un milieu qu’il détestait franchement et qu’il n’avait pas envie d’explorer, c’était bien celui-là.

– Pas vraiment, non, je n’ai jamais eu l’occasion de tester, et pour être honnête, ça ne m’intéresse pas non plus. Donc s’il faut encore convaincre votre Conseil de la réussite de ce projet, et que je dois leur parler, ce sera plus simple… Franc, somme toute.

Autrement dit, pas la peine de compter sur lui pour la langue de bois, trouver facilement des expressions ou manières de faire qui ne froisseraient personne, ou de d’être sûr de ne pas entailler la susceptibilité de qui que ce soit. Mais ça, après tout, Thrass était formé à le faire, non ? Arrondir les angles, c’était son métier, et il connaissait très bien son peuple, il pourra intervenir si jamais il sentait que à ça pouvait déraper, ou pour trouver une autre façon de formuler les choses. Luke voulait faire des efforts, mais il y avait une limite à tout, il ne savait pas être assez diplomate pour discuter avec des politiciens.

Une minute encore… Trente secondes… Et voilà. Le capitaine Nor’hit’sarsi était encore en retard. S’il n’avait ce talent certain et rare pour l’encodage et les transmissions sécurisées, voilà bien longtemps qu’il aurait été remercié et jeté de la Flotte de Défense manu militari. L’amirale pouvait tolérer beaucoup de choses sortant des sentiers battus ou ne rentrant pas dans les procédures habituelles, à partir du moment où ils en retiraient de bons résultats. Néanmoins, il y avait en contrepartie une discipline stricte à respecter et la ponctualité en faisait partie. Il savait pourtant qu’il en nuisait seul à son avancement de carrière, mais même cela ne le touchait pas assez pour changer son attitude. Mmh… Ar’alani avait eu plusieurs membre d’équipages comme ça… Très doués dans leurs domaines respectifs mais aussi profondément bornés.

Au fond, elle n’en était pas aussi contrariée que cela, même si cela l’agaçait sur le moment. Elle avait même, parfois, une certaine affection pour certains d’entre eux. Mais jamais elle ne l’admettra à haute voix. Au moins purent-ils commencer à travailler. Inutile d’avoir suivi les tractations préliminaires pour comprendre pourquoi il avait été refusé qu’un code existant soit utilisé pour la communication avec l’Ordre Jedi, tout simplement, le besoin de « plus de sécurité » avait vraiment bon dos. Tandis qu’ils travaillaient sur ce point, et sur d’autres sujets annexes mais aussi important, vint la question de savoir s’il fallait enseigner leur langue à un ou deux membres de l’Ordre Jedi. A au moins une personne, ou deux, issues de ce temps, pourquoi pas. Quant aux enfants à naître, oui, mais ils ne pourront pas aider avant des années encore.

La distance et le manque d’antennes-relais restaient un frein pour leurs futures transmissions, ce dont elle discuta d’abord avec le capitaine et leurs invités, jetant un bref regard en biais à l’Aristocra. Elles en avaient déjà parlé, mais il sera impossible de faire installer d’autres antennes, du moins, pas tant qu’elles ne serviront que cet objectif. La méfiance envers les étrangers avait augmenté de quelques crans depuis la fin de la pandémie et il en était difficile d’en vouloir au Conseil sur ce sujet. Ar’alani pressentait comment aller se passer la rencontre, toute à l’heure, ce ne sera guère joyeux. Peut-être n’oseront-ils pas trop s’emporter, pour certains, par égard pour Veeren, afin de ne pas la fatiguer ou la stresser. C’était difficile à dire, il restait rare que des femmes soient au Conseil des Familles et plus rares encore qu’elles y restent à travailler en attendant un enfant.

« Nous allons présenter ce projet au Conseil toute à l’heure. Vous vous y connaissez un peu en politique, Skywalker ? »

« Pas vraiment, non, je n’ai jamais eu l’occasion de tester, et pour être honnête, ça ne m’intéresse pas non plus. Donc s’il faut encore convaincre votre Conseil de la réussite de ce projet, et que je dois leur parler, ce sera plus simple… Franc, somme toute. »

Comme elle aurait aimé assister à ça et admirer la tête de certains membres du Conseil lorsqu’ils auront face à une eux une personne n’hésitant pas à les renvoyer dans les clous. Quel dommage, elle devra se contenter du rapport suivant la réunion, mais pour une fois, assister à une assemblée politique ne l’aurait pas dérangée. Il suffisait d’avoir un élément apportant un peu d’énergie là-dedans. Mais restons sérieux. En temps normal, Thrass aurait pu arrondir les angles, mais…

« Mitth’ras’safis. Vous êtes habitué à ce genre d’exercices, mais étant donné votre situation actuelle, dont le Conseil est parfaitement au courant, je ne suis pas convaincue que votre présence apaisera la situation. Je n’aurai jamais cru cela possible, et pourtant, vous êtes parvenu à irriter la plupart des Aristocras bien plus que votre frère n’est jamais parvenu à le faire. »

Un « exploit » tout à fait extraordinaire et qui méritait d’être souligné. Cela dit, Thrass avait aussi eu une place importante malgré son âge, au sein de l’Alliance, avant sa mort. Un détail supplémentaire qui n’avait pu que contribuer à alimenter d’autant plus l’indignation des Familles.

« Il serait bon d’éviter de rajouter tout élément pouvant nuire à la bonne marche de cette assemblée et sa réussite. »

Thrass pourra se charger des cours de langue, ce n’était pas le souci. Quant au reste… Il faisait confiance au capitaine pour imaginer un système digne de ce nom, quitte à en refaire un entièrement neuf pour ne pas froisser la susceptibilité de quelques uns. Ça en plus d’avoir un interlocuteur, ici, permettra de lisser les relations entre les deux factions, au démarrage. Du moins, avec un peu de temps. Sev'eere'nuruodo avait déjà trouvé une personne pour ça, n’est-ce pas ? Il dissimula un petit sourire, à la réponse de Luke sur le sujet de la politique… Il ne pourra jamais faire pire ou plus rude encore que Nat Skywalker l’avait fait, peu de risques là-dessus. Même si ce n’était pas son fort, il ne semblait pas aussi bourru que son descendant, très loin de là. Tout devrait bien se dérouler, ou à peu près bien, pas d’inquiétude. Dès que ce sera passé, ils pourront préparer leur départ et filer loin d’ici. Ce ne sera d’ailleurs pas un soulagement que pour Dean Jinzler.

"Mitth’ras’safis. Vous êtes habitué à ce genre d’exercices, mais étant donné votre situation actuelle, dont le Conseil est parfaitement au courant, je ne suis pas convaincue que votre présence apaisera la situation. Je n’aurai jamais cru cela possible, et pourtant, vous êtes parvenu à irriter la plupart des Aristocras bien plus que votre frère n’est jamais parvenu à le faire. Il serait bon d’éviter de rajouter tout élément pouvant nuire à la bonne marche de cette assemblée et sa réussite."

L’ancien Administrateur eut la brûlante impression de s’être pris une gifle mentale assez monstrueuse, en restant complètement scié, sur le moment. De la part de l’amirale Ar’alani, c’était encore plus violent. Il était devenu un élément nuisible pour son propre peuple… ? Il savait déjà très bien que sa situation, comme elle le disait, ne plaisait pas, mais de là à le considérer comme un… Bon… Incapable de répondre, sur le coup, il se contenta d’un bref signe de tête, qui ne voulait rien dire, laissant se poursuivre la conversation et les préparatifs sans rien ajouter durant un long moment. Un nuisible… Thrass ne savait pas trop s’il était choqué, dégoûté ou indigné, peut-être bien un mélange des trois. Il avait toujours tout fait pour préserver leur peuple et l’équilibre de l’Ascendance, et juste parce qu’il était en couple avec une Jedi, il était devenu un nuisible ? Le Conseil lui en voulait à ce point-là ?!

Tant qu’on ne rentrait plus dans les cases bien établies, peu importe ce que vous pouviez faire pour votre peuple, vous en étiez rejeté. C’était comme ça, il le savait très bien, mais ça restait dur à encaisser. Mais ce n’était pas ça qui allait lui faire regretter ses choix pour autant et encore moins tâcher de revenir en arrière. Que son peuple comprenne ou non, qu’il accepte ou pas, peu importe, Thrass n’avait pas besoin de son avis pour continuer à mener sa vie. Puisqu’il fallait d’abord enterrer clairement le passé avant de poursuivre, très bien… Il ne dit plus grand-chose jusqu’à la fin de leur réunion, occupé à digérer la claque et tâcher d’accepter d’être rejeté par une partie des siens. Au moins, ça avait le mérite d’être clair. Avant que Luke ne parte avec Veeren, il tâcha de lui donner quelques conseils, puisqu’il devra se débrouiller seul. Ça devrait aller tout de même.

Aristocra Beclu'doz'csapla, 64 ans.

Le calme serein de cette ville était désormais bien trop souvent menacé par quelques excessifs et autres refusant obstinément de rentrer dans les rangs… Par la faute, également, de Familles aux idées trop laxistes, qui ne feront qu’entraîner la chute de l’Ascendance à court ou moyen terme. Debout près de la fenêtre, un café en main, Udozc observait la capitale avec un mélange de tristesse, vis-à-vis des malheureux événements récents, et de volonté de rectifier au maximum le tir. Pourquoi vouloir modifier l’ordre établi lorsque celui-ci était très sécuritaire et efficace ? Il ne comprenait guère cette envie de certaines des Familles, deux plus particulièrement… Ceci étant, il n’en était que d’autant plus surpris pour la Famille Chaf. Leur confrère, malgré un caractère parfois compliqué, avait toujours été très conservateur et à cheval sur les règles ! Mais depuis quelques temps…

La faute en revenait, bien sûr, à sa famille proche, agrandie par un de ces mystères liées à cette Force dégoûtante. Ce détail sel aurait dû suffire à Chaf’orm’bintrano pour rejeter ce lien, s’en éloigner, et songer tout d’abord à l’équilibre de leur société, mais non, sa réaction avait été très précisément inverse. A la stupeur de tous, il avait non seulement accueilli à bras ouverts une enfant dont tout le monde se serait très bien porté si elle avait maintenu loin d’ici, mais il avait aussi accepté que sa propre sœur aille se mêler à des affaires d’Humains sur Nirauan. Pire encore, il avait accueilli des Humains et des Jedis chez lui, sans même une hésitation. Un comportement qu’on pouvait qualifier d’extrêmement choquant, venant de sa part. Avait-il encore de mauvaises surprises d’un tel genre à leur soumettre ou auront-ils droit à un peu de répit ?

Beclu'doz'csapla était moins stupéfait par les agissements d’autres membres de leur société… La Famille Nuruodo avait souvent été hors des clous, ses membres acceptant généralement mieux les comportements troublés que d’autres Familles. Les exemples ne manquaient guère… Si l’Aristocra avait été, au départ, surpris des actes de Mitth’ras’safis après son retour involontaire des failles, l’étonnement était passé en à peine une microseconde, pour se muer en dédain, accompagné d’une certaine résignation et d’un nouveau sentiment de trahison. La trahison, oui. Après tout, lorsqu’on voyait la famille proche de l’ancien Administrateur, pourquoi s’étonner, même un instant, qu’il ait choisi cette voie ? Ils n’étaient pas frères pour rien. Comment Mitth’ras’safis osait-il même se représenter devant son peuple après cela ?

Et encore, cette union contre-nature aurait été vite oubliée, si la petite Humaine n’était pas tombée enceinte. En apprenant cela, Beclu'doz'csapla avait été d’autant plus indigné et révolté que l’exil n’ait pas été prononcé contre l’ex-Administrateur. Quel meilleur moyen, pour ce dernier, que de cracher à la figure de son propre peuple ? Peut-être n’était-il pas encore trop tard… Chaf’orm’bintrano se battait pour éviter cette sentence à sa nièce, soit, mais que pourra-t-il affirmer pour dédouaner Mitth’ras’safis ? Le petit bâtard qui allait naître était une aberration. Que sa mère soit sensible à la Force ne faisait que rajouter au dégoût entourant cette grossesse. Il serait indigne que ce bébé puisse un jour mettre les pieds dans l’Ascendance, tout comme il n’était plus question que sa mère y revienne. Et il souhaitait qu’il en soit de même pour son père.

Avant de quitter son bureau, il remit soigneusement en place sa tenue, puis se prépara pour la réunion qui allait suivre. Un autre problème les attendait… Le Conseil était très partagé, quant à cette alliance avec l’Ordre Jedi. Quatre Familles, dont la sienne bien entendu, y étaient complètement opposées. Trois étaient pour cette alliance, inutile de citer lesquelles, et deux étaient encore assez mitigées, préférant attendre et découvrir comment les choses évoluaient avant de se prononcer définitivement. Le Clan Sabosen se montrait prudent et voulait en savoir plus avant de déclarer ce qu’il songeait vraiment de cette affaire. Même son de cloche du côté du Clan Argo, qui hésitait entre demeurer sur les principes de l’Ascendance ou bien accorder leur pleine confiance aux Nuruodo pour cette petite ouverture. Il n’y avait pourtant pas à hésiter.

Il leur fallait plus que cette trop petite majorité pour repousser ce projet, hélas. Le fait que les Chaf se rangent maintenant aux avis dangereux des Nuruodo était aussi nouveau que perturbant. Chaf’orm’bintrano se laissait bien trop influencer par ses sentiments personnels, c’était indigne de lui et de son rang ! Secrètement, l’Aristocra espérait que son récent mariage allait le forcer à enfin revenir à la raison, et surtout, à se souvenir qu’il devait travailler pour le bien de l’Ascendance entière, sans se laisser mener par les intérêts de sa famille proche, peu importe qu’il s’agisse du sort de sa nièce ou même celui de sa sœur. Le changement de comportement lent, mais bien visible, de leur confrère était tout de même très inquiétant… Si ça continuait ainsi, il risquait même de soutenir le projet de Nirauan, si on n’y prenait pas garde. Ou pire encore, vouloir que sa chère nièce vienne vivre pour de bon sur Csilla.

Cette fois-ci, chacun venait aussi avec son Administrateur et parfois ses conseillers, ils n’étaient pas en petit comité, c’était une réunion publique. Les protocoles à suivre étaient, pour le chef de clan des Csapla, un réconforte certain, une façon de se mettre dans le bain mais aussi de trouver ses repères. Fiabilité, rigueur, constance, tant de qualités si indispensables et profondément ancrées. Mitth’ras’safis avait eu l’intelligence de ne pas se présenter dans cette salle, une très bonne chose… Ce n’est qu’une fois assis à sa place attribuée que Udozc détailla leur « invité » Jedi. En voilà un qui portait très bien son nom de famille. Il était jeune, plus que ce que à quoi l’Aristocra s’était attendu, pour un tel projet. Les Jedis n’auraient-ils personne de plus expérimenté sous la main ? Comme c’est curieux.

Il était visiblement malade, en plus de ça, leur climat ne devait pas lui plaire. Fragile, donc, en plus d’être si jeune. Les Humains étant matures moins vites que leurs propres enfants… Udozc patienta, le temps des formules d’usage et de la phase de présentation, sans quitter une seule seconde le jeune homme du regard. Puis il prit la parole, impassible, comme à son habitude, mais curieux d’en savoir plus sur certains points… Ainsi que pour trouver les failles qui aideront à convaincre chacun que ce projet était une mauvaise idée.

Devoir prendre une telle responsabilité, à votre âge, est sans doute… stressant. J’imagine que vous avez déjà dû participer à un autre projet du même type auparavant ?

– Pas vraiment, non, je n’ai jamais eu l’occasion de tester, et pour être honnête, ça ne m’intéresse pas non plus. Donc s’il faut encore convaincre votre Conseil de la réussite de ce projet, et que je dois leur parler, ce sera plus simple… Franc, somme toute.

L’Aristocra s’était attendue à cette réponse, quand bien même elle avait tout de même nourri un demi-espoir que quelqu’un, parmi les maîtres Jedis revenus dans ce temps, ait pu lui donner quelques rudiments de base. Mais soit, ils feront avec. Certains de ses confrères allaient bien entendu s’engouffrer dans la brèche, ça faisait partie du jeu. A eux, donc, de trouver des parades et conserver la discussion à leur avantage. Ce n’était qu’un petit jeu d’équilibriste et ils avaient déjà gagné sur des terrains plus glissant que celui-là. Le chef de clan des Mitth était, bien entendu, avec eux, pour ce débat. Également Formbi, bien qu’il ait une position plus affaiblie, depuis quelques temps et suite aux récents événements. Quant aux autres Familles, une majorité n’approuvait pas, certaines étaient encore très mitigées. Les moins traditionalistes devraient néanmoins laisser une chance.

L’amirale Ar’alani se chargea, avant que Veeren n’ait eu le temps de le faire, de poser franchement la situation, concernant leur ex-Administrateur, et lui rappeler que sa présence ne fera qu’exacerber les tensions, au sein du Conseil. C’était une façon très directe de le faire, mais le fond du message était au moins très clair. Bien. Ils poursuivirent leurs préparatifs encore un moment, avant qu’il ne soit l’heure de se rendre au Conseil. Pendant que Thrass s’occupait de donner quelques conseils à leur invité humain, Veeren en profita pour s’isoler un instant. Une légère grimace au visage, elle massa un peu son ventre, en priant son fils ou sa fille de bien vouloir cesser de lui donner des coups de pied à tout bout de champ. Si seulement cet enfant voulait bien sortir maintenant ! Elle n’en pouvait plus. Et son mari qui lui répétait d’être patiente… Tss, ce n’était pas lui qui le portait, cet enfant, il avait le beau rôle dans l’affaire.

Souffler un grand coup, se dire que tout ira bien, qu’elle rentrera chez elle ensuite se reposer un peu, et on y va. Son datapad et quelques documents dans les bras, elle attendit que le Jedi n’arrive, puis ils partirent pour le Parlement. En chemin, Veeren appliqua discrètement les exercices de respiration que lui avait conseillé son médecin. Elle avait cependant le sentiment que le bercement endormait son bébé, lorsqu’elle marchait, il était aussitôt plus calme que lorsqu’elle était assise ou allongée. Voilà qui promettait pour la suite… Ses fils, eux, avaient toujours été très calmes, même si le petit dernier était plus vif que ses grands frères, depuis le plus jeune âge. Un petit sourire lui vint, en marchant vers la petite navette qui les attendait, espérant avoir cette fois une petite fille. Ce sera sans doute son dernier enfant.

En arrivant au Parlement, Veeren remarqua tout d’abord l’attitude et le maintien assez raides de Chaf’orm’bintrano. Plus que de coutume, disons, plutôt… Il avait eu un souci ? Il devrait pourtant être détendu, il venait de se marier et aurait bientôt… Ah. Ce devait à cause de la grossesse de sa sœur, sans doute, et plus encore l’identité du père. L’Aristocra s’était bien sûr tue, sur le sujet, préférant faire comme si elle ne savait absolument rien de cette histoire. Mieux valait garder ça secret. Laissant de côté ce sujet, elle se concentra plutôt sur la réunion qui débutait, mettant assis leur invité entre elle-même et Formbi. Alors, lequel allait attaquer le premier ? Dès qu’elle eut terminé, Beclu'doz'csapla se redressa et se pencha très légèrement. A lui, donc.

– Devoir prendre une telle responsabilité, à votre âge, est sans doute… stressant. J’imagine que vous avez déjà dû participer à un autre projet du même type auparavant ?

Même si le jeune homme y connaissait peu, voire rien, en politique, Veeren se surprit à espérer qu’il fasse quand même un effort et veille à ne pas répondre trop « franchement », comme il l’avait signalé toute à l’heure…

Il fera un effort, bien sûr, autant que possible. Impossible de savoir, par contre, si cette réponse l’avait agacée, blasée ou juste laissée indifférente. Ils restaient tous si impassibles en permanence qu’il était vraiment difficile de comprendre leurs réactions ou à quoi ils pensaient. A part Feesa au Temple, souvent, et Thrass parfois, Luke n’avait vu personne sourire, sur cette planète… Maintenant qu’il y songeait, durant le laps de temps où il avait croisé l’amiral, il ne l’avait pas vu sourire non plus. C’était lorsqu’ils le faisaient qu’il fallait s’inquiéter ? Bah, après tout, il avait déjà parfois du mal à déchiffrer correctement les pensées et sentiments chez les Humains grâce à leurs expressions, inutile de tenter ici. Tout ce qu’il espérait, c’était que ça ne tourne pas trop dans les magouilles politiques ou il ne savait quoi alors que la situation de base était pourtant très claire et nette… Il se frotta un peu les yeux en regrettant que ce ne soit pas Obi-Wan ou quelqu’un maîtrisant bien la diplomatie qui se retrouve là-dedans. Il n’y connaissait rien, pourquoi son maître avait-il estimé qu’il devait faire partie de ce voyage ? A moins qu’il n’ait juste voulu l’éloigner des rebelles un moment.

– Mitth’ras’safis. Vous êtes habitué à ce genre d’exercices, mais étant donné votre situation actuelle, dont le Conseil est parfaitement au courant, je ne suis pas convaincue que votre présence apaisera la situation. Je n’aurai jamais cru cela possible, et pourtant, vous êtes parvenu à irriter la plupart des Aristocras bien plus que votre frère n’est jamais parvenu à le faire.

Luke faillit lâcher que ça n’avait pourtant pas l’air bien difficile d’énerver ce Conseil dès lors qu’on sortait un chouïa des cases établies et des traditions. D’après ce qu’il avait compris, en discutant avec Feesa ou Thrass, il suffisait d’avoir un caractère qui ne collait pas aux standards imposés. En plus de ça, ce n’était pas parfaitement dégueulasse de traiter comme ça une personne qui avait pourtant travaillé toute sa vie au bien-être et à la protection de son peuple ? Leur Conseil ne serait pas capable d’accepter Thrass même après ce qu’il avait fait pour les siens ? Il était mort pour eux, pour rappel… A côté de cet acte, une union avec une humaine était un acte si grave qu’il vaille la peine d’en oublier tout le reste ? Ce n’était pas le lieu pour lancer le débat, mais le jeune homme trouvait ça très injuste et gonflé. Il ne se tut qu’à grande peine, durant la suite de leur réunion, peut-être aussi agacé plus vite à cause de la fièvre. Du calme… Il ne pouvait pas comprendre, de toute façon, ce qui était vraiment reproché à Thrass, à ses yeux, cette accusation n’avait aucun sens.

Avant de repartir avec l’Aristocra, il échangea quelques minutes avec Thrass, qui lui donna des conseils pour l’autre réunion qui allait suivre. Luke s’efforça de tous les retenir en vitesse et les graver dans sa mémoire. Sur le chemin, il se les répéta, tout en plongeant dans une légère méditation pour commencer à soigner la fièvre. Pas assez de temps, cependant, pour faire ça tranquillement. Il y avait en plus pas mal de monde, avec ça. Durant tout le temps que dura les divers protocoles et phases de présentation, Luke ne dit quasiment rien, renonçant aussi à se faire traduire les nombreuses paroles et formules d’usage. Ils adoraient les protocoles interminables, décidément, chez ce peuple… Luke sentit quelques regards lourds et fixes posés sur lui dès le début, accompagnés par la désagréable impression qu’ils voulaient le disséquer du regard. Et non, il n’exagérait rien. Ils allaient bientôt réussir à lui faire regretter l’ambiance ressentie chez les Rebelles, à ce rythme. Ces derniers, au moins, ne donnaient pas cette impression de malaise grandissante. Faire face à ça avait le don de le piquer au vif, tant il détestait les jugements trop hâtifs, surtout sur des motifs illogiques.

– Devoir prendre une telle responsabilité, à votre âge, est sans doute… stressant. J’imagine que vous avez déjà dû participer à un autre projet du même type auparavant ?

– J’ai déjà eu à composer avec des personnes qui ne souhaitaient pas ma présence et ce sera de nouveau le cas dans très peu de temps. Personne n’oblige à apprécier des alliés, tant qu’il est possible de travailler dans un but commun. Quant à mon âge, je ne l’ai pas choisi non plus, mais sachez que ce n’est pas ça qui viendra entraver quoi que ce soit. Je sais ce que j’ai à faire.

Eux-mêmes ne considéraient pas les leurs comme matures très tôt, de toute façon, vers quinze ou seize ans ? Ils devaient comprendre que chez les Humains, autour de vingt ans et si on s’en donnait asse de peine, surtout dans des circonstances pareilles, on était aussi considéré comme un adulte. Même si certains pouvaient être encore assez immatures à vingt ans et plus, en pleine guerre, c’était dur d’en trouver. Si c’était son âge qui les dérangeaient, ils pouvaient déjà se tranquilliser. La jeunesse ne dérangeait absolument pas l’Empire, lorsqu’ils en venaient à l’affrontement.

Pour un peu, Formbi aurait pu arriver en retard… Fartha, l’Administrateur de sa Famille, l’attendait de pied ferme dans le Hall, lui lançant un regard un peu surpris, lorsqu’il arriva enfin, sans doute prêt à souligner que ce n’était pourtant pas dans ses habitudes de se présenter à une heure si tardive avant une réunion du Conseil. Il lui fit aussitôt un bref et rapide résumé, à voix basse, des opinions des autres Familles quant au sujet à traiter, alors qu’ils se rendaient au dernier étage. Pour le moment, la majorité revenait aux traditionalistes, même si elle restait faible. Un « camps » que lui-même avait quitté il y a très peu, si on pouvait dire. Très bien. Fartha finit par lui demander si tout allait bien, ralentissant un peu le pas malgré tout. Ils se connaissaient depuis longtemps, maintenant, et étaient devenus amis au fil des années, mais même à lui, Formbi ne pouvait pas vraiment tout dire.

– C’est beaucoup de changements d’un coup, rien de plus. Tout va aller bien.

– Tu n’en donnes pas l’air.

D’accord, donc il était plus qu’inquiet… Ils ne se tutoyaient d’ordinaire qu’en privé, pas durant le travail, et s’il le faisait maintenant… Mais ce n’était pas le moment, de toute façon, le Conseil était sur le point de débuter et Formbi n’était de toute manière pas certain de ce qu’il devait faire ni à qui il pouvait se permettre d’en parler. Quand bien même l’Administrateur connaissait déjà une bonne partie de l’histoire et en avait sûrement deviné plus qu’il ne le laissait entendre. Ils laissèrent ce sujet en entrant dans la salle, l’heure était venue, maintenant. Si lui avait l’air peut-être un peu tendu, Veeren, de son côté, avait très clairement l’air complètement épuisée. Au-delà du fait que ce n’était pas très sain, dans son état, ça pouvait aussi la desservir dans ce projet, elle aurait dû laisser son Administrateur tenir le rôle à sa place aujourd’hui. Cette femme était vraiment accro au travail.

Le petit Humain, quant à lui, était un peu malade, semble-t-il, même s’il faisait tout de même bonne figure. Pourvu qu’il soit plus diplomate que son descendant… L’Aristocra des Chaf n’avait pas oublié le Jedi barbu et leur première « conversation », encore moins les événements qui avaient suivi derrière. Impossible de faire encore plus franc et cynique, avait-il songé sur le moment, et voilà qu’aujourd’hui, il se demandait si l’ancêtre de ce bonhomme n’était en réalité pas pire que lui. Il rendait un sentiment plus calme, donc… Hum… Lors du protocole de début de réunion, Formbi essaya de ne pas trop le dévisager, plus intéressé par les opinions de leurs collègues sur sa venue. Si la majorité restait neutre, la désapprobation se lisait facilement dans le regard de certains. Le responsable des Csapla débuta le premier, le regard fixé sur le petit Humain. Pour le mettre à l’aise ou simplement attentif ?

– Devoir prendre une telle responsabilité, à votre âge, est sans doute… stressant. J’imagine que vous avez déjà dû participer à un autre projet du même type auparavant ?

– J’ai déjà eu à composer avec des personnes qui ne souhaitaient pas ma présence et ce sera de nouveau le cas dans très peu de temps. Personne n’oblige à apprécier des alliés, tant qu’il est possible de travailler dans un but commun. Quant à mon âge, je ne l’ai pas choisi non plus, mais sachez que ce n’est pas ça qui viendra entraver quoi que ce soit. Je sais ce que j’ai à faire.

Ah, ça va, il ne l’avait pas envoyé balader. Il était peut-être vraiment plus apaisé que son descendant. Formbi écoutait tout en essayant de mettre suffisamment de côté ses préjugés et garder l’esprit un minimum ouvert. Sa nièce donnait une entière confiance à ce jeune homme et lui avait même dit que lui aussi le fera, dans un futur proche. L’Aristocra n’avait toujours pas compris par quel miracle ça pouvait arriver, encore moins comment il pourrait devenir ami avec un Humain… Surtout celui-là ! Et il n’était même pas sûr que l’Humain en question soit au courant de ce petit détail. Formbi préférait ne pas poser trop de questions à sa nièce, certains autres détails… l’effrayaient.

– Il y a un point qu’il nous est devenu impossible de nier ou repousser. Ce qui s’est passé avec le Sith nous a prouvé à tous que nous pouvons pas éternellement ignorer les agissements du reste de la galaxie, nous pouvons être touchés à n’importe quel moment, comme cela a été le cas avec la pandémie. Il ne s’agit pas de s’ouvrir vraiment ou de se faire de nouveaux alliés ici et là, simplement de laisser une petite porte ouverte, pour ne plus être pris de court. La vie de l’Ascendance n’en sera pas impactée pour autant.

Aristocra Nelvi’isi’argo, 42 ans, à la tête du clan Argo

Ce qui étaient des affaires très rares et minimes se multipliaient au point d’en devenir presque ordinaires, depuis l’apparition de ces failles, et plus encore, depuis qu’ils avaient des membres de leur propre peuple impliqué dans tout cela. Sans oublier les problèmes pouvant les toucher eux aussi, comme cette maladie. Une pandémie que l’Aristocra surnommait la peste Sith, intérieurement, ou la peste impériale, c’est selon. Jamais il n’avait eu le moindre respect pour ce gros voisin encombrant et ces événements n’avaient rien arrangé. Mais le camp les combattant était-il mieux ? Pouvait-on se fier aux Jedis ?

C’était une question qu’il peinait encore à trancher, comptant sur cette entrevue pour en retirer un point de vue plus ferme. Lui-même et Nilat'ase'sabosen étaient les deux indécis, si on peut dire, de leur Assemblée, sur le sujet. Les plus traditionalistes étaient, bien entendu, contre avant même d’avoir rencontré qui s’occupait de tout cela. Les Nuruodo, de leur côté, n’étonnaient personne en voulant se lancer là-dedans… Pas plus que le clan Mitth, inféodé aux précédents. La vraie surprise venait de Chaf’orm’bintrano, qui prenait le parti des modérés. Lui qui avait toujours suivi les traditions à la virgule près…

Ses nouvelles prises de position ne soulevaient pas que des interrogations ou de la surprise mais aussi de la méfiance. Sa position en devenait plus fragilisée. Le réalisait-il ? La plupart des Familles, ici, voulaient savoir ce qui avait réellement causé ce changement, s’il n’y avait pas autre chose qu’une nièce surgie tout droit des failles, puisque ce revirement s’était encore accentué alors même que la nièce en question n’était plus dans les parages depuis un long moment, mise à part une brève apparition au mariage, avant de disparaître de nouveau. Formbi savait pourtant qu’il ne pouvait pas se permettre de faire passer ses intérêts personnels avant ceux de l’Ascendance.

C’était de ce dernier point dont beaucoup le soupçonnaient. Leur collègue était sur une pente dangereuse… Iisia détacha son regard de lui, pensif, puis le reporta sur le jeune humain, par la suite. C’était donc lui qui devait servir d’intermédiaire. De ce que l’Aristocra avait cru comprendre, les Jedis bien de cette époque étaient rares et plus rares encore ceux déjà assez engagés dans la reconstruction de leur Ordre. Il ne pouvait s’empêcher d’éprouver une certaine sympathie, en conséquence, pour ce petit, qui devait porter une telle responsabilité malgré son jeune âge et les problèmes allant avec. Il appréciait les jeunes acceptant de faire face à leur Devoir sans reculer.

"Devoir prendre une telle responsabilité, à votre âge, est sans doute… stressant. J’imagine que vous avez déjà dû participer à un autre projet du même type auparavant ?"

"J’ai déjà eu à composer avec des personnes qui ne souhaitaient pas ma présence et ce sera de nouveau le cas dans très peu de temps. Personne n’oblige à apprécier des alliés, tant qu’il est possible de travailler dans un but commun. Quant à mon âge, je ne l’ai pas choisi non plus, mais sachez que ce n’est pas ça qui viendra entraver quoi que ce soit. Je sais ce que j’ai à faire."

Hum, il aurait été de toute manière douteux qu’il ait déjà eu une occasion de participer à un autre projet comme celui-ci par le passé, car il était effectivement tout jeune. Beclu'doz'csapla manifestait simplement son désaccord en insistant sur l’âge. Certes, les Humains n’avaient pas la même maturité assez tôt au cours de leur existence, mais cela différait d’une personne à l’autre, selon l’expérience vécue. Il était donc inutile de s’y attarder, peu importe l’âge, ce qui comptait restait les actes. Eux-mêmes, par le passé, avaient parfois confié de très lourdes responsabilités à des personnes d’à peine vingt ou trente ans. Pour des résultats plus ou moins heureux, certes.

"Il y a un point qu’il nous est devenu impossible de nier ou repousser. Ce qui s’est passé avec le Sith nous a prouvé à tous que nous pouvons pas éternellement ignorer les agissements du reste de la galaxie, nous pouvons être touchés à n’importe quel moment, comme cela a été le cas avec la pandémie. Il ne s’agit pas de s’ouvrir vraiment ou de se faire de nouveaux alliés ici et là, simplement de laisser une petite porte ouverte, pour ne plus être pris de court. La vie de l’Ascendance n’en sera pas impactée pour autant."

Effectivement… Pour le moment. La crainte la plus grande était bel et bien que cette petite ouverte n’amène, par la suite, vers une entrée plus béante, que la majorité ne souhaitait pas voir survenir. Les conditions présentées en début de réunion n’offraient pas assez de garanties pour totalement rassurer l’assemblée, c’était visible. Ou plutôt, pour rassurer les traditionalistes. Pour sa part, Iisia n’avait, fondamentalement, rien contre ce projet, mais il comprenait pour autant très bien les inquiétudes des autres Clans. Quelques concessions, de la part de chacun, ne feront de mal à personne.

"C’est une porte qui doit demeurer infime, afin de rassurer les nôtres. Restreindre ce lien avec une seule et unique personne, dans cet Ordre Jedi, donc vous, jeune homme. En plus, bien entendu, de n’y mêler aucune autre faction ni aucun groupe, quel qu’il soit. Vous devez donner votre parole, également."

Il attendit qu’on le lui traduise, un instant. Puisque ce petit ne parlait pas le Sy Bisti… C’était un peu dommage, car cela ralentissait le fil de la conversation, mais soit, c’était encore un moindre mal comparé à ce qui pouvait être fait.

"Par ailleurs… Il y a plus d’agitation depuis ces failles et il faut que cela cesse, pour le bien de tous. Peut-on compter sur l’Ordre pour garder, en quelque sorte, les Chiss qui viendront d’une faille à l’avenir ou ceux déjà présents ?"

Il ne parlait pas d'exil volontairement pour ne pas faire bondir Formbi et enliser du même coup cette conversation sur un autre sujet durant des heures. Mais l'idée de fond restait sensiblement la même... Le tout était, une fois encore, de savoir faire des concessions pour calmer la fronde traditionaliste et faire progresser cette affaire.

Luke voudrait bien savoir si certains, ici, n’aimaient pas cette idée pour des convictions purement politiques ou parce qu’ils craignaient vraiment qu’avoir un simple contact dans la galaxie amène vraiment l’Ascendance à se fourrer dans d’innombrables problèmes dont elle ne voulait pas. Ou bien un mélange des deux ? Cette affaire n‘avait pourtant rien à voir avec la politique ! Au moins, certains, comme le chef des Chaf, essayait de faire avancer tout ça et souligner les évidences, c’était bien d’avoir un autre soutien que celui de Veeren. L’homme assis à côté de lui, dont Luke n’avait pas réussi à retenir le nom, lui traduisait à mesure, en chuchotant. Il l’aura compris, l’Ascendance ne voulait pas de nouveaux ennemis, pas d’alliés, rien du tout, même un simple contact leur semblait déjà de trop. Pourtant, Formbi avait raison de rappeler la pandémie, si jamais une autre horreur de ce type arrivait, comment feront-ils, s’ils ne pouvaient pas être au courant assez vite ou avoir, tout bêtement, les moyens de parer ? Si un Sith les trouvait et attaquait, il leur faudra savoir comment se défendre, d’une façon ou d’une autre. Cet accord était donc gagnant pour chaque partie.

Son traducteur lui donna la suite après qu’un autre Aristocra ait pris la parole. Très bien, très bien, s’ils tenaient à ce que ne soit qu’une seule personne à la fois qui se charge de ça, très bien, il l’acceptait sans problème. Il donna aussi sa parole, du même coup, de ne parler des termes de cet arrangement à aucune autre faction, quelle qu’elle soit, et que cela restera entre eux. En revanche, lorsque la suite lui fut traduite, il ne put s’empêcher de tiquer nettement. Il aurait dû se douter qu’ils trouveraient une nouvelle façon, plus détournée, pour en arriver là, ça collait très bien à ce que Thrass et Feesa avaient déjà dits sur le sujet. Luke se mordit un peu les lèvres pour ne pas laisser échapper la réponse assez cinglante qui lui était venu, rester diplomate, on avait dit. Mais la désapprobation devait tout de même se lire très clairement sur son visage, il ne cachait pas aussi bien ses émotions qu’eux tous et ne comptait pas non plus apprendre à le faire. Malgré tout, il s’obligea à afficher tout de même un air à peu près neutre, si c’était possible.

– L’Ordre Jedi n’est pas une prison et ne le deviendra jamais. Nous ne forcerons personne à s’entraîner ou à rester parmi nous. Si certains des vôtres arrivent de nouveau par les failles et ne veulent pas rester auprès de l’Ordre, personne ne les retiendra par la force.

Il attendit d’abord que le traducteur répète ça pour ceux qui ne comprenaient pas le Basic, profitant de ce court temps mort pour bien se concentrer et conserver son calme. Ça, déjà, c’était le premier point. Luke n’en revenait pas, d’une pareille ingratitude envers les leurs, alors qu’aucun d’entre eux n’avait jamais attaqué ou agressé son propre peuple en faisant usage de ses dons et de la Force, bien au contraire. Qu’ils n’aiment pas le désordre, soit, mais ça ne justifiait pas de vouloir à tout prix jeter dehors des personnes loyales et qui n’avaient en plus jamais demandé à avoir ce type de pouvoir.

– Ce sont aussi des personnes qui sont capables d’aider et protéger l’Ascendance, la Force peut être un outil de plus dans cet objectif, et non pas un simple chaos. Nous pouvons former ceux des vôtres qui possèdent ce don, mais jamais les obliger à rester loin des Régions Inconnues. Avoir peur d'elles n'aidera pas.

– J’ai déjà eu à composer avec des personnes qui ne souhaitaient pas ma présence et ce sera de nouveau le cas dans très peu de temps. Personne n’oblige à apprécier des alliés, tant qu’il est possible de travailler dans un but commun. Quant à mon âge, je ne l’ai pas choisi non plus, mais sachez que ce n’est pas ça qui viendra entraver quoi que ce soit. Je sais ce que j’ai à faire.

– Il y a un point qu’il nous est devenu impossible de nier ou repousser. Ce qui s’est passé avec le Sith nous a prouvé à tous que nous pouvons pas éternellement ignorer les agissements du reste de la galaxie, nous pouvons être touchés à n’importe quel moment, comme cela a été le cas avec la pandémie. Il ne s’agit pas de s’ouvrir vraiment ou de se faire de nouveaux alliés ici et là, simplement de laisser une petite porte ouverte, pour ne plus être pris de court. La vie de l’Ascendance n’en sera pas impactée pour autant.

Le dire simplement ne suffira pas à rassurer tous leurs confrères, ils avaient besoin de preuves concrètes avant d’accepter et les laisser faire. Pour ça, ils avaient plusieurs éléments. Le système de communication dont ils avaient parlé en amont, bien entendu, ainsi que ce qui avait été prévu pour que ces échanges puissent avoir lieu, sans que les Chiss n’en soient nécessairement informés. Ou plutôt, qu’ils n’aient pas à s’en préoccuper, car aucun de ces allers-retours n’aura le moindre impact sur leur vie au quotidien. Ils avaient déjà un point en leur faveur, après tout, certains ici avaient craint des soucis si le cinglé était enfermé dans une de leurs prisons. Or, il n’en avait rien été. L’endroit était maintenu secret et rares étaient ceux ayant le droit de s’en approcher, hormis la garde rapprochée et certains officiers.

Veeren voulut, justement, présenter ce dont ils avaient à disposition, afin d’assurer tout le monde que cette « union » restera aussi minime que fiable, mais le chef des Argo l’interrompit, en demandant tout d’abord à Luke sa parole que les Jedis ne mêleront aucune autre faction, peu importe laquelle, à cette affaire. Un point dont ils avaient déjà discuté en amont et dont la certitude était déjà établie, pourtant. Il ne devait être rassuré qu’en l’entendant directement de la part du jeune Humain. En revanche, sa demande suivante avait sûrement de quoi faire crier Formbi, même si ce dernier savait se contenir, elle pouvait déjà ressentir qu’il commençait à bouillonner sur place. Comment essayer d’arranger l’éloignement des leurs alors même que la question de l’exil avait déjà été traitée. Si leur confrère Aristocra souhaitait rallumer les braises, c’était le meilleur moyen.

– L’Ordre Jedi n’est pas une prison et ne le deviendra jamais. Nous ne forcerons personne à s’entraîner ou à rester parmi nous. Si certains des vôtres arrivent de nouveau par les failles et ne veulent pas rester auprès de l’Ordre, personne ne les retiendra par la force.

Et voilà, il commençait à s’agacer, pour si peu. Veeren se surprit à penser, alors que le traducteur accomplissait son devoir, qu’il pourrait bien s’entendre avec Formbi, si ce genre de sujets l’enflammait lui aussi si vite. D’autant plus lorsqu’il en rajouta, une dernière phrase qui avait aussi été dite lors du dernier conseil par Formbi, d’ailleurs… Ils déviaient complètement du sujet d’origine, elle ignorait si leur confrère le faisait exprès pour faire passer en force une contrainte rejetée auparavant ou s’il pensait sincèrement que l’Ordre Jedi pouvait être un réel moyen de calmer le jeu, sur ce terrain, et qu’il n’avait donc rien compris à leur rôle. Un bon mélange des deux, sans doute. Mais peu importe, s’ils se laissaient entraîner dans ce débat-là, ils en auront pour une journée entière.

– Nous avions déjà discuté de ce point et il n’y a plus lieu de le remettre sur la table. D’autant plus que les nôtres venus de ces failles ont toujours choisi, jusqu’ici, un éloignement volontaire. Nos lois actuelles sont telles qu’ils ne peuvent de toute manière pas vivre simplement parmi nous.

Beclu'doz'csapla avait froncé le regard très exactement sur le mot auquel elle l’avait attendu au tournant. Petite satisfaction personnelle. Pour ne pas lui laisser le temps de contre-attaquer, elle enchaîna directement en présentant, cette fois concrètement, en quoi cette affaire n’aura aucune sorte d’impact sur la vie globale de l’Ascendance. Les seuls directement concernés seront, somme toute, les membres de la Flotte de Défense qui serviront de « relais » et la personne, parmi les leurs, chargée de suivre cette échange et faire en sorte que tout se déroule bien. Comme l’Aristocra s’y était attendu, cette présentation provoqua, bien sûr, le lancement d’un nouveau et long débat. DE quoi leur changer les idées et écarter temporairement les sujets qui fâchent. Comme elle appréciait ce côté procédurier, en cet instant précis.