Bienvenue dans le Côté Obscur

L’Empereur Palpatine était un être intéressant, nul doute là-dessus. Il avait saisi à la perfection toutes les subtilités du jeu et su composer avec la Règle des Deux, imposée il y a bien longtemps par Bane. Quand bien même cette règle n’avait plus lieu d’être, de leurs jours, ses répercussions sur le fonctionnement de l’Empire ne pouvaient, bien sûr, pas être écartés si simplement. Et il serait idiot de le faire. C’était d’ailleurs une des raisons ayant poussé Vitiate à ne pas s’impliquer dans le semblant de nouvel Ordre Sith de cette époque. Certains avaient dû croire que c’était possible, lors de leurs rencontres ou réunions, les naïfs… Cette époque ne pouvait être taillée pour un Ordre Sith tel qu’il avait autrefois existé, pas après tant de siècle sous la Règle des Deux, pas après ce qui avait été déjà été mis en place autant par la République que par l’Empire, pas après que les mentalités de tous les peuples aient évolué dans un sens si particulier. Vitiate n’avait pas voulu perdre de temps à jouer cette mascarade d’un nouvel Ordre, ce n’était qu’une vague apparence ne servant qu’à conforter certains des leurs dans leur petite zone de confort, rien de plus. Une inutilité sans nom. Sidious avait été bien patient, d’accepter ce petit jeu ridicule, par ailleurs.

Les pathétiques demandes de certains, lors des rares réunions où il avait pris la peine de se rendre, soit une ou deux, l’avait profondément agacé. De tels refus de voir la réalité en face ou comprendre que cette époque était différente… Comprendre, par-dessus tout, en quoi elle était différente et ce qui avait fondé tous ces changements. Beaucoup étaient tout simplement incapables d’utiliser le peu de matière leur servant de cerveau, voilà où était le problème. Une autre de ces réunions avait eu lieu, d’ailleurs, il y a quelques temps, une où il ne s’était pas déplacé, ayant bien mieux à faire. Rencontrer Palpatine seul à seul était bien plus supportable et productif que rencontrer du même coup la brochette de crétins ou de faiblards remplissant actuellement les rangs Siths. Tout juste bon à être envoyés au casse-pipe, à peine bons à être utilisés pour les combats à venir. Il serait bon de savoir si les Jedis avaient le même type de qualité, dans leurs rangs. Si tel était le cas, les futures batailles tourneront vite courts. Il y avait également un moment qu’il n’avait plus pris de nouvelles de ses « alliés », trop occupé ces dernières semaines pour songer à eux.

Des préoccupations plus privées lui revinrent à l’esprit, alors qu’il pénétrait dans la navette devant le déposer sur Alderaan, à la capitale. Avoir récupéré Vaylin n’était pas un mal, plus particulièrement à cet âge et dans cet état. Le récit de son arrivée avait bien fait rire son père, intérieurement, et ne l’avait guère étonné. Cette enfant possédait le même pouvoir que lui, la même puissance brute, cependant, et c’était là une différence notable, elle n’avait pas eu aussitôt le désir brûlant de maîtriser, développer et se servir de ce gouffre de puissance. Contrairement à lui, elle n’avait pas pris très tôt conscience de ce qu’elle était et cherché à asseoir sa domination sur les autres. Sa puissance s’était ensuite repliée en elle, pour ne ressortir que sur des explosions de peur et de colère, se développant dans ce petit corps comme un cancer, rageant pour sortir et dévaster tout ce qui lui était possible. Elle était sa digne fille. Aucun de ses deux frères ne possédait cette puissance brute. Oh, ils n’étaient pas si mauvais, cela dit… Thexan avait toujours été doué, même enfant, dans la maîtrise de la Force. Et Arcann s’était révélé un pion très utile.

Ses fils étaient sur sa liste d’objectif… Arcann se faisait discret, très discret, sa trace n’était plus qu’à peine perceptible au sein de la Force. Quant à Thexan, il était arrivé plus tard, son père avait ressenti son arrivée lointaine dans ce temps, comme une déchirure nette et soudaine du voile de la Force. Vitiate n’avait pas encore pris le temps de vraiment se focaliser sur lui et déterminer dans quelle région galactique il se trouvait. Senya avait beau s’inquiéter, lui doutait que l’enfant soit en danger. De ses trois rejetons, Thexan était sensiblement celui qui avait le plus de maîtrise, à la fois de lui-même et de la Force. Il était, en sus, parmi les trois, celui dont le conditionnement était le plus finement marqué dans son jeune esprit. Dommage qu’il soit également le seul des trois à avoir une bonne âme… Le seul à ne jamais succomber à la colère, à l’impatience, le seul à savoir se reprendre en un rien de temps lorsqu’il commençait à perdre l’équilibre au sein de la Force. Quel gâchis, quel gâchis, quel gâchis… Thexan savait pourtant mieux rester à l’équilibre, à l’âge de huit ans, que Revan n’avait jamais réussi à le faire en une vie entière.

Vaylin récupérée, Arcann se terrant dans un coin et ne levant plus une oreille, Thexan était maintenant passé dans ses priorités, au milieu de ses autres projets. Pour le peu que Vitiate avait pris la peine de faire, pour le moment, il avait ressenti que son fils était arrivé plutôt jeune. L’âge exact, il l’ignorait, mais c’était un détail sans importance. Il le retrouvera… Dès leur naissance, Vitiate s’était isolé avec ses jumeaux, afin de lier leurs esprits aux siens, appliquer sur eux un conditionnement mental très fin, selon une technique perfectionnée avec les années et ses multiples expériences précédentes. Il pouvait affirmer que la chaîne mentale accrochée au cou de ses enfants représentait la quintessence de son art, dans le contrôle mental. Une chaîne qu’il pouvait tirer, relâcher et resserrer à loisir, l’alourdir ou l’alléger à l’envie et selon ses besoins. Il sourit doucement, puis se leva finalement lorsque la navette se posa à terre. Ils avaient averti de leur arrivée en arrivant en orbite de la planète, bien sûr, il faut savoir être poli. L’escorte à leur arrivée n’était d’ailleurs pas très importante, il était agréable d’arriver dans un lieu ou personne, ou presque, ne savait qui vous étiez et vous traitait comme un invité des plus ordinaires.

La planète était plutôt belle, le palais agréable à l’œil. Voilà donc la ville où sa fille avait été jetée. Senya et lui avaient eu une discussion sur le sujet, au cours des quelques heures séparant cette planète de la ville-poubelle servant de capitale. Réaction typique, pour sa progéniture, et réaction très ridicule, pour la réaction des Siths impliqués dans cette affaire. Un tel fiasco, c’était presque impensable. Sa petite escorte stoppa finalement à l’intérieur du Palais, dans une sorte de salon devant servir habituellement à recevoir les visiteurs, tels que lui. Là encore, un bel endroit. Il salua la jeune reine d’une façon très protocolaire, conformément à son rang, parfaitement à l’aise dans ce type d’endroit et indifférent aux diverses réactions, plus ou moins négatives, qu’il percevait au travers de la Force. Sa réputation avait déjà dû attendre les douces oreilles de cette reine et apprentie, étant donné ce qu’il percevait. Serait-ce la petite Sith qui aurait vendu la mèche ? Petite Sith rousse à laquelle il adressa un sourire moqueur, doublé d’un regard lourd de mépris, avant de se tourner de nouveau vers la reine Organa.

« C’est un réel plaisir de vous rencontrer, reine Organa, et je regrette de n’avoir connu cet instant plus tôt. Je suis le seigneur Darth Vitiate, ravi de faire votre connaissance. »

Les rapports n’étaient pas très bons, mais c’était prévisible. La présence impériale, surtout renforcée, agaçait fortement la population et pas seulement dans la capitale. Les garnisons extérieures et les patrouilles avaient remonté un regain de mécontentement dans les campagnes et petites villes. Leia lisait tout cela depuis trente bonnes minutes, installée dans le bureau qui était autrefois celui de son père adoptif. Tout en lisant, elle prenait à la main quelques notes, sur un petit carnet posé près de l’ordinateur, et réfléchissait aux mesures à prendre. Les Alderaaniens sont profondément pacifiques, c’est déjà une chance, même s’ils se lançaient dans de grandes manifestations, ça ne pouvait pas déraper comme sur Corellia ou d’autres planètes plus agitées. Mis à part si les Rebelles locaux décidaient de briser cette règle officieuse et prendre les armes… Mais à faire cela, ils pourraient se mettre une partie de leurs propres concitoyens sur le dos. Même les gardes de l’Empire présents ici avaient pour ordre de ne pas faire usage de leurs armes, autrement qu’en paralysant dans certains cas.

Dans un premier temps, elle pourrait réunir les responsables des villes et régions pour discuter avec eux et proposer des mesures. Il y avait des lieux, sur Alderaan, où une présence impériale renforcée n’était pas nécessaire, d’autres où cette présence pouvait se faire très discrète facilement, sans pour autant disparaître. Elle pouvait aussi proposer des solutions pour que les différents responsables reprennent la main et se sentent reconnus dans leur travail. Dans un premier temps, elle souhaitait ramener la planète à sa situation post-occupation impériale renforcée, même si, bien sûr, l’Empire ne partira pas pour autant. Le but était de rassurer les habitants et écraser une partie de la pression mise sur eux tous. Ramener le calme et le conserver, somme toute. Une fois que ce sera fait, Leia aura déjà les mains plus libres pour passer à la suite de ses projets. D’autant plus qu’aucun rebelle ou jedi n’était venu l’agacer, pour le moment, ou tenter quoi que ce soit de stupide. Le calme avant la tempête ? Elle était bien heureuse qu’ils lui fichent la paix, en tout cas, même si ça cachait sans doute un coup foireux.

Plongée dans son travail, elle ne réagit pas immédiatement lorsqu’on frappa une première fois à la porte, ne relevant la tête que lorsque les coups se firent plus insistants. Une fois ouvert, l’Intendant du palais lui annonça qu’on venait de leur annoncer une visite, pour elle, un envoyé de l’Empire, nommé Seigneur Vitiate. La jeune femme réussit d’extrême justesse à se contenir, hochant la tête et répondant à l’Intendant que oui, il pouvait conduire cet homme dans le salon prévu pour cela, et parvint à attendre qu’il ait refermé la porte pour lâcher une exclamation étouffée, paniquée, étranglée. Il n’était pas censé avoir été ravalé par les failles, celui-là ?! Pourquoi venait-il ici ?! Elle se leva d’un bon, vérifiant sa tenue d’un coup d’œil, puis prit son intercom pour appeler Takara, occupée elle ne savait où et à faire elle ne savait quoi dans le palais. Dans le même temps, elle s’obligeait à repousser peur et panique, ainsi que la confusion, qui s’étaient brutalement invitées dans son esprit.

– Takara, rendez-vous dans le salon de réception dans moins de dix minutes, on va recevoir la visite de Vitiate.

Elle raccrocha presque aussitôt, puis quitta son bureau, regardant encore une fois comment elle était mise. Tenue formelle, coiffure formelle, talons formels, maquillage formel, même une légère tiare dans la coiffure pour compléter le tout. En rejoignant le salon, où Takara ne tarda pas à se montrer, elle ne cessait de se demander pourquoi ce type venait ici… Si c’était en rapport avec l’incident avec sa fille… Le stress était à son plus haut niveau et elle n’eut qu’à peine assez de temps pour se composer une expression parfaitement neutre et polie. L’Intendant amena leur invité indésirable, avec quelques gardes, puis s’inclina avant de les laisser. Un homme entre deux âges, une barbe poivre et sel, plus grand qu’elle et avec une manière de marcher dévoilant facilement son aisance dans ce genre de lieux. La manière dont il la salua était elle aussi très formelle. Elle lui rendit son salut dans les tons, sans manquer le regard mémorisant et le sourire moqueur qu’il adressa en biais à Takara. Il avait peut-être récupéré sa fille… Ou su l’histoire d’une autre façon.

– C’est un réel plaisir de vous rencontrer, reine Organa, et je regrette de n’avoir connu cet instant plus tôt. Je suis le seigneur Darth Vitiate, ravi de faire votre connaissance.

– C’est un grand plaisir également, bien que nous ne nous attendions pas à cette visite. Installez-vous, je vous en prie.

Il ne fallut qu’un bref moment, le temps qu’ils s’installent dans la pièce, pour qu’un serviteur du palais arrive avec de quoi boire. Ils offraient toujours à leurs invités la même boisson locale pour une entrevue telle que celle-ci, dans cette pièce, et les serviteurs du palais étaient habitués à la manœuvre. Il sortit avec rapidité, une fois fait. Très bien… Après la fille, le père, formidable, tout à fait formidable ! De tous les Siths ayant existé dans cet univers, il fallait que ce soit celui-ci qui débarque…

– Que nous vaut l’honneur de cette visite ? Beaucoup commençaient à songer que vous ne souhaitiez plus revenir dans ces régions de la galaxie.

Takara se figea un instant pour digérer l’information, hésitante à demander à Leia de bien vouloir la répéter. Avait-elle bien parlé de Vitiate ? Ici ? Dans ce temps ? Sur Alderaan ? Ou bien avait-elle simplement mal compris ? Il lui suffit de sonder l’inquiétude qui régnait dans l’esprit de sa compagne, discernable dans la Force à travers le palais, pour la conforter dans son malaise. Leur… lien privilégié rendait plus facile encore de ressentir les émotions de l’autre lorsque celles-ci étaient fortes et que le partenaire ne fermait pas purement et simplement son esprit à l’autre. La réalité était ce qu’elle était : Vitiate serait ici dans peu de temps, pour elle ne savait qu’elle raison, et Takara savait que ni Leia ni elle n’était réellement préparée à ce genre de rencontre. Une soudaine envie de tourner son attention vers les cieux à la recherche de la présence de celui dont Scourge avait vanté les horreurs traversa son esprit, la rouquine la rejetant aussitôt dans les méandres de sa psyché. Ce serait offrir son mental sur un plateau à une personne réputé pour avoir une certaine habitude de se faufiler dans la tête d’autrui. La sith resta interdite un instant, dans une profonde introspection, comme suspendue à la contemplation du reflet de son visage maquillé dans le miroir. Pourquoi la Force n’avait-elle pas pu le ramener dans son époque ? Pourquoi de tout les siths fallait-il que ce soit lui qui vienne aujourd’hui ? Si Takara n’avait pas la réponse à la première question, la seconde pouvait peut-être s’expliquer dans l’apparition de Vaylin sur Alderaan il y a de ça quelque temps. Souhait-il dans ce cas se venger ? Non, ce serait bien futile et ennuyeux pour un individu de son calibre, quoi que parfois l’obstination d’un sith ne pouvait s’expliquer.

Sa gamine avait été renvoyé sur Coruscant sans le moindre mal. Ce ne pouvait pas être ça. Du moins, ce ne pouvait pas être la seule raison.

Leia.

Si ce n’était pas pour elle, ce ne pouvait être que pour Leia. Cette pensée lui glaça le sang un instant, suffisant pour la sortir de la torpeur dans laquelle elle s’était enfoncée, à un tel point qu’un des serviteurs venait tout juste de l’approcher pour s’enquérir de sa santé. Takara le chassa poliment, lui expliquant que tout allait bien et reporta son regard sur son reflet un instant de plus. Le maquillage était élégant mais discret, formel. Sa tenue, sa coiffure, ses talons l’étaient également, dans le pur style Alderaani, élégant et raffiné. La rouquine remua doucement la tête devant ce spectacle. Dire qu’elle allait devoir bien présenter devant cette chose, telle une potiche inutile, pour ne pas alerter les autres résidents du palais de sa véritable nature, au lieu de se montrer en sith, surement pas d’égal à égal, mais avec un aplomb qu’elle ne saurait reproduire ainsi vêtue… Elle maugréa avant de quitter la pièce d’un pas plus rapide, laissant derrière elle la tâche que Winter lui avait demandé d’accomplir et prit la direction de l’étage des appartements de la Reine, où se trouvaient également ses propres appartements, à côté de ceux des autres suivantes. Refermant la porte derrière elle, elle se dirigea vers une des armoires et retira une boite cachée sous une pile de vêtements soyeux. Takara la déverrouilla avec son empreinte et un code et retira un long morceau de tissu qu’elle déroula pour libérer son sabre-laser et, éventuellement, celui que l’Empereur avait gracieusement confié à Leia, si cette dernière n’était pas déjà passé le récupérer. Les sortir ainsi était risqué, mais la situation n’avait rien d’ordinaire.

Takara referma la boite et souffla. Peut-être se faisait-elle des idées. Ce ne serait pas la première fois qu’elle voyait les choses sous leurs aspects les plus sombres. Vitiate n’avait peut-être aucune animosité à leur égard, aucune roublardise à leur soumettre. Aucune chance, pensa la rouquine. S’il venait ici, c’était forcément avec un plan. Comme Dreypa en son temps. Comme son propre père, avec la Tribu.

Comme tous sith qui se respecte vraiment.

Elle rejoignit le salon de réception après avoir minutieusement dissimulé le ou les armes sous sa longue robe, seul véritable avantage qu’elle trouvait réellement à son accoutrement en cet instant, sachant qu’il lui suffirait de les libérer pour avoir aussitôt son sabre en main en cas de nécessité. Hors de question de les dissimuler ailleurs dans la pièce sans prendre de risques supplémentaires. De plus, Takara n’en avait tout simplement pas le temps. Leia était déjà là à faire les cent pas, facilement reconnaissable aux claquements réguliers de ses talons sur le sol. La rouquine la contempla un bref instant, seul rayon de lumière dans cette affaire, puis s’avança dans sa direction après une salutation des plus protocolaires en présence des serviteurs qui s’affairaient pour finir de préparer la pièce. Sa compagne et élève était stressée, tout comme elle, à l’idée de gérer cette rencontre seules, sans l’appui potentiels d’individus ayant déjà eu à affaire à Vitiate. Elles devraient improviser, comme Takara avait bien trop souvent l’habitude de faire. La sith était néanmoins calme en apparence, à la différence de son élève, dont les marmonnements inutiles commençaient doucement à l’agacer. Il était là, point final. La raison, pour le moment, était hors de leur portée.

La rouquine attendit impatiemment que les serviteurs quittent la pièce pour profiter du temps mort et s’exprimer librement, se permettant même d’apposer une main ferme sur l’épaule de Leia.

« Du calme. dit-elle avec une froideur qu’elle ne parvînt pas à retenir mais qui serait peut-être suffisante pour sortir Leia de sa spirale solitaire. Takara marqua une pause, le temps de déglutir et de cligner des yeux pour adoucir son ton. « Concentre-toi sur ce que nous avons travaillé. Tout va bien se passer. »

Plus facile à dire qu’à faire, dira-t-elle sans doute. Leia devrait pourtant faire au mieux aussi bien qu’elle n’avait fait lors de leurs exercices communs sur Coruscant, ou encore récemment, si elle voulait parvenir à pleinement cacher ce qu’elle ressentait à leur invité et, peut-être, parvenir à lui bloquer toute porte d’entrée dans sa psyché.

Takara prit finalement place en retrait derrière Leia et croisa les mains devant elle lorsqu’un des serviteurs annonça l’arrivée de leur invité nuisible. Celui-ci fit son entrée avec un aplomb et une manière de marché qui mettait en évidence un train de vie coutumier de celui dans lequel il venait mettre les pieds. La manière dont il salua fut tout aussi formelle et protocolaire, si ce n’est plus et la rousse attendit que Leia rende les salutations pour en faire de même, machinalement, mais sans le moindre enthousiasme. L’air dédaigneux, méprisant et parfaitement détaché qu’elle lui lançait depuis la disparition des gardes et des serviteurs n’avait que pour but de signaler qu’elle savait qui il était et ce qu’il était réellement derrière sa barbe bien taillée et son élégance potentiellement feinte. A moins que ce soit naturel chez lui de se pavaner de la sorte…

Un frisson lui parcouru cependant l’échine lorsqu’il croisa son regard et il lui fallut toute sa concentration pour ne pas déglutir et perdre son aplomb. Tout juste si elle souffla pour chasser cette sensation, de crainte de trop en dévoiler sur son appréhension. Son sourire moqueur s’imprégna dans son esprit, qui en tira aussitôt la seule conclusion logique, à savoir qu’il savait pour sa fille, l’accident, et la présence de Scourge lors des célébrations. Cela ne fit que conforter le mépris qu’elle avait pour cet homme, et son regard ne fit que s’assombrir un peu plus tandis qu’elle s’installait à la place qui était la sienne dans ce genre de réunion formelle, et ce, dans un mutisme des plus total.

Ah Leia, que tu avais raison. Si seulement il avait pu ne jamais revenir…

« C’est un grand plaisir également, bien que nous ne nous attendions pas à cette visite. Installez-vous, je vous en prie. »

« Je vous remercie. »

Quels airs fermés, méfiants et tout ce qui peut s’ensuivre, c’était plutôt amusant. Cela dit, même son cher ami Palpatine avait su lui faire ressentir, sans lui dévoiler ouvertement, à quel point sa présence était indésirable, dans son palais et dans cette époque tout court. Ce même sentiment se trouvait ici, bien que les deux femmes face à lui cachent moins bien leurs émotions que ne le faisait Sidious. Il retint un petit sourire, tout en s’installant, alors qu’un serviteur leur apportait de quoi boire, avant de se retirer en silence et rapidement. Belle efficacité de service, il devait le reconnaître. La boisson dégageait un parfum légèrement sucré, d’une couleur claire. L’endroit était tout de même plus beau que le palais impérial… Plus richement décoré, dans des tons blancs, dorés et majestueux, lui rappelant sa chère Zakel, même si c’était dans une moindre mesure. Des courbes élancées et élégantes, à la fois fines et gracieuses, une architecture dévoilant un amour de l’art et du beau, ce qui n’était pas pour lui déplaire. Ce serait dommage qu’il arrive un quelconque malheur à cette petite planète. Las, les choses pouvaient survenir si vite, parfois.

« Que nous vaut l’honneur de cette visite ? Beaucoup commençaient à songer que vous ne souhaitiez plus revenir dans ces régions de la galaxie. »

« En effet. Je ne vous en blâme guère, ceci dit, d’autant plus avec cette douce réputation que certaines petites natures se plaisent à m’accoler. Je ne comptais pas revenir avant longtemps… La petite affaire familiale récente m’a donné un prétexte pour revenir visiter de vieux amis. Navré, d’ailleurs, que ma fille vous ait causé ces quelques tracas. »

Il n’était, bien sûr, pas du tout navré, même si rien dans le ton de sa voix ne le laissait transparaître. Cette femme devait déjà être bien assez à l’aise dans le grand jeu de la politique pour le saisir. Enfin… Son enfant possédait un pouvoir très intéressant, depuis toujours, et malgré tout ce qui avait pu se produire et ce qui pouvait encore arriver, il avait toujours certaines idées bien arrêtées à son sujet. Quant au reste… Un nouveau sourire éclaira son visage, cette fois mélange entre amusement sincère et moquerie, songeant à ce que sa chère petite nature favorite avait dû s’amuser à colporter dans son dos. Tout ce qu’elle avait pu baver, encore et encore, à tous ceux et celles prêts à l’écouter. Même des millénaires plus tard, il avait définitivement la rancune bien tenace, alors qu’il n’avait pourtant pas tant souffert. Oh, peut-être un peu en gagnant l’immortalité, certes, mais ensuite ? Une telle ingratitude le dépassait. Enfin, ce n’était, après tout, qu’une simple Furie. Une brute épaisse tout juste bonne à exécuter ceux qu’on lui désignait sans réfléchir, il était bien inutile d’attendre plus de réflexion de la part de ça.

« Quant à cette visite, plus particulièrement… Ce que j’ai pu entendre sur vous a attiré mon intérêt. Il est bien rare de découvrir une personne prête à s’engager dans le Côté Obscur de cette manière, en trahissant si facilement amis, famille et alliés. J’apprécie les personnes qui savent ce qu’elles veulent et sont prêtes à tout pour l’obtenir. Il a été amusant de constater que les divers membres de votre famille ont eux aussi une certaine réputation d’agitateurs. J’aurai, par ailleurs, aimé rencontrer également votre frère. Il existe des arguments, et méthodes, qui rendent les jeunes Jedis plus réceptifs à l’appel de l’obscurité, sans même besoin de leur faire le moindre mal. »

Il ponctua cette phrase d’un petit geste de sa main libre, l’air très détaché, et en apparence, parfaitement détendu. C’était sincère, il y avait bon nombre de moyens, plus ou moins longs, permettant de faire glisser posément dans la noirceur même les Jedis les plus avides de lumière. Toute personne possède ses forces et ses faiblesses, toute personne possède des points très sensibles, c’était là un vaste jeu, d’apprendre où appuyer.

« Vous-même dans la noirceur, votre jumeau dans la lumière, c’est un équilibre intéressant. »

– En effet. Je ne vous en blâme guère, ceci dit, d’autant plus avec cette douce réputation que certaines petites natures se plaisent à m’accoler. Je ne comptais pas revenir avant longtemps… La petite affaire familiale récente m’a donné un prétexte pour revenir visiter de vieux amis. Navré, d’ailleurs, que ma fille vous ait causé ces quelques tracas.

– Cette affaire-ci a été réglée.

Elle ne le pensait pas sincère le moins du monde, bien évidemment, mais il serait idiot de le relever. Ce n‘était pas le débat ni même le sujet… La petite Vaylin était désormais une affaire passée, et malgré tous les problèmes et conséquences l’accompagnant, Leia ne pouvait plus rien y faire. La petite était passée entre les mains de Palpatine, et certainement revenue désormais dans celles de son père, c’était comme ça, on ne pouvait malheureusement plus rien y changer. Son verre en main, assise face à leur invité parfaitement indésirable, elle peinait un peu à décrypter le sourire qu’il affichait présentement. De l’amusement, sûrement, mais quoi d’autre… ? Du sarcasme, selon elle, mais… Il ne semblait pas le leur adresser, à elles personnellement, c’était compréhensible d’après le regard, d’autant plus qu’il avait su dès son entrée le faire comprendre, lorsqu’il s’adressait bien à une personne face à lui. Takara en avait fais les frais une minute plus tôt. Non, il semblait ne pas être du genre à se cacher lorsqu’il voulait mépriser une personne ou s’en moquer, ce sourire-là moqueur-là n’était pas pour elles.

Il était sans doute destiné à la « petite nature » à qui il pensait. De qui il s’agissait, ça, la jeune reine n’en avait aucune idée et s’en moquait bien. Tout ce qui l’intéressait, pour le moment, c’était d’apprendre pourquoi un Sith multi-centenaire et nihiliste venait poser ses bottes dans son salon. Elle tentait également d’enfouir au plus profond d’elle la peur et la nervosité ressentie, ainsi qu’un profond sentiment d’insécurité. Un Sith capable d’anéantir toute vie sur une planète à lui seul sans aucune arme, seulement son pouvoir de monstre, pourrait sans trop de peine mettre l’ensemble des gardes de cette planète au tapis. Leia tentait de se détendre – assez vainement – en se répétant que s’il avait voulu attaquer Alderaan, il n’aurait pas pris la peine de descendre ici leur parler ou se montrer. Toutes les leçons qu’elle avait déjà eu, de Palpatine ou de sa compagne, lui semblaient d’un seul coup bien faibles, pour se protéger, face à ce type… La paranoïa montait d’autant plus qu’elle ne serait pas capable de dire s’il avait déjà commencé ou non à fouiller son esprit. Même s’il n’y avait pas de réelle raison ou d’intérêt de s’en prendre à elle.

– Quant à cette visite, plus particulièrement… Ce que j’ai pu entendre sur vous a attiré mon intérêt. Il est bien rare de découvrir une personne prête à s’engager dans le Côté Obscur de cette manière, en trahissant si facilement amis, famille et alliés. J’apprécie les personnes qui savent ce qu’elles veulent et sont prêtes à tout pour l’obtenir. Il a été amusant de constater que les divers membres de votre famille ont eux aussi une certaine réputation d’agitateurs. J’aurai, par ailleurs, aimé rencontrer également votre frère. Il existe des arguments, et méthodes, qui rendent les jeunes Jedis plus réceptifs à l’appel de l’obscurité, sans même besoin de leur faire le moindre mal.

La jeune femme n’était pas très sûre de savoir si elle devait se sentir soulagée, ou au contraire, s’angoisser encore plus. Son instinct de survie finit par la pousser vers la seconde option. Car entendre qu’on avait attiré l’intérêt d’un type comme celui-ci, ce n’était pas bon, pas bon du tout, peu importe les circonstances. Qu’avait-il entendu sur elle, au juste, et de la part de qui ? Qui, dans cette galaxie, aurait pu lui parler d’elle ou de… De… Lui… Palpatine… La colère vint s’ajouter à la méfiance et la stupeur, elle ne tentait même pas de s’en cacher. Palpatine, évidemment, qui d’autre ?! Néanmoins, lui aussi venait d’éveiller son intérêt, même si elle restait très méfiante. Bien droite, presque raide, dans son canapé, elle tapotait légèrement son verre du bout des doigts, sans y avoir touché une seule fois jusqu’ici. Une main tendue, c’était toujours agréable, mais cette main pouvait aussi vous attraper férocement pour ensuite vous faire mordre. Quoi qu’elle avait déjà saisi la main de Palpatine, à un moment donné, elle ne voyait pas comment ça pourrait encore être pire. Il ne lui restait plus grand-chose à perdre. Toujours silencieuse, elle conservait le regard rivé sur le serpent face à elle, le visage de marbre.

– Vous-même dans la noirceur, votre jumeau dans la lumière, c’est un équilibre intéressant.

Il s’y connaissait, en jumeaux ? L’un des siens était mort jeune, si Leia avait bien suivi l’histoire. Il n’était pas non plus le père de l’année, pas plus que Vader, ni n’importe quel autre Sith dans la galaxie toute entière, qu’importe l’époque.

– Je ne possède aucun doute sur vos capacités de manipulation, dit-elle enfin, après un petit instant de silence. Et je n’imagine pas non plus que vous « travaillez » sans contrepartie ni sans rien attendre en retour. Quel intérêt avez-vous à vous soucier de ce genre de problème ?

Takara ne croyait pas une seule seconde à la sincérité de l’homme qui venait de prononcer ces quelques mots d’excuses, tant ce n’était pas dans les habitudes des siths d’un tel gabarit d’agir de cette manière pour si peu, à moins que ses intérêts ne soient menacés par la tournure actuelle des choses, ce qui n’était probablement pas le cas. Bien au contraire. Redressée de toute sa hauteur sur le sofa, le menton légèrement relevé, elle n’offrit qu’un regard parfaitement blasé, presque dédaigneux pour unique réponse. Elle n’était pas près d’oublier ce qui s’était produit avec sa fille. Néanmoins, et bien que l’amour propre de la sith restait meurtri et sa rancune tenace, cette affaire était, pour plusieurs raisons, belle et bien réglée : les failles, d’abord, puis maintenant l’éloignement de la gamine, représentaient à eux deux des justifications suffisantes. Puissent-elles ne plus l’être à l’avenir, la situation pourrait cependant de nouveau évoluer. Takara doutait en effet que le père porte vraiment une réelle attention à la potentielle perte de Vaylin.

Ce n’était pour lui qu’un outil de plus dans sa main, un outil dont il pouvait se séparer si nécessaire. Il en était de même pour ses autres enfants. Thexan d’abord, Arcann ensuite. Il avait déjà montré par le passé qu’il ne portait pas de réel intérêt à l’attachement familial. Bref, la sith était plus inquiète du fait que Vitiate soit informé de ce qui s’était produit sur Alderaan car cela venait confirmer ses pires craintes sur le sujet, à savoir que cette arme était certainement de nouveau dans son arsenal. Son pouvoir était bien trop grand et dangereux pour être laisser entre de telles mains. Hélas, Takara n’était pas en mesure d’y faire quoi que ce soit, bien qu’un début d’idée commençât petit à petit à faire son chemin dans son esprit au fur et à mesure qu’elle scrutait les traits de leur invité nuisible. Une idée qui pourrait bien permettre de résoudre certains de ses problèmes mais qui dans le même temps venait en poser de nouveau. Une idée qui, en l’état, n’était pas exploitable et qui ne changerait en rien la situation actuelle : une menace était présente dans son salon et elle ne pouvait rien y changer.

La rousse n’avait pas touché à sa boisson, laissant le verre reposer sur la table basse. Elle espérait que Leia en ferait de même vu les conséquences, non pas déplaisante par ailleurs, que cela avait eu par le passé. Ce n’était simplement pas le bon moment pour tenter le sort, surtout lorsque votre invité indésirable venait vous révéler que vous étiez la raison première de sa visite d’aujourd’hui, et qu’il avait clairement l’intention de s’intéresser plus à vous à l’avenir. A vous et à votre frère. Première alerte et pas des moindres. Le regard de Takara dévia une première fois dans la direction de Leia pour jauger sa réaction. La sith ne tenait pas à prendre le risque de le faire mentalement en la présence du dit invité. Elle n’avait de toute façon pas besoin de cela pour sentir le léger et bref agacement chez sa compagne. Evidemment, si quelqu’un sur Coruscant avait pu parler d’elle et de son parcours, il ne pouvait s’agir que de l’Empereur.

Takara ne voyait pourtant pas ce que Palpatine pouvait bien tirer de positif en envoyant quelqu’un comme Vitiate vers son apprentie, à moins que ce mouvement ne soit la première preuve d’un désintérêt soudain et d’une volonté de s’en délaisser pour passer à autre chose, ce qui signifierait que Leia ne lui était plus utile. C’était une routine asse classique chez les siths d’exploiter le potentiel de quelqu’un pour ensuite s’en débarrasser une fois le dit potentiel épuisé, ce qui n’était pas sans provoquer des réactions souvent violentes et hostiles chez les individus écartés, à condition bien sûr que ceux-ci aient été épargné par leur maitre, ce qui constituerait là une deuxième erreur. Il était préférable de garder l’ivraie auprès de soit pour la voir évoluer et la faucher si celle-ci se montrait un peu trop gênante. En l’état, il était vrai que la famille de Leia possédait désormais une bien piètre réputation. Son père était l’exécuteur de l’Empereur, bourreau de l’Ordre Jedi et de la République Galactique. Leia avait pour sa part trahi et vendu une partie de l’Alliance Rebelle poursuivre son propre chemin dans la réalisation de leur objectif commun, la chute de Palpatine.

Heureusement, ce ressenti-là était bien moins visible sur Alderaan, bien que la population pacifique de la planète eût semblé faire preuve d’une agitation nouvelle ces derniers temps. Takara avait distraitement suivi l’évolution de la situation jusqu’à présent. Il était parfois préférable de laisser faire la populace jusqu’à ce qu’elle se lasse que de simplement la réprimer. Cela lui donnait une fausse impression de liberté. Ce n’était que lorsque la protestation venait à s’installer dans le temps qu’il fallait agir avec fermeté…

Takara cilla finalement légèrement lorsque leur invité nuisible orienta plus précisément son propos sur le lien entre Leia et son frère, en venant rappeler à sa compagne qu’elle n’était pas parvenue à lui faire entendre raison, avant de laisser sous-entendre qu’avec son expérience il pourrait très certainement parvenir à ces fins si elle acceptait sa main tendue, le tout avec la subtilité délicate d’un léviathan au galop. La sith cligna des yeux puis porta pour la deuxième fois son regard sur Leia, cette fois-ci pour s’y fixer et ne plus en bouger.  Sa compagne savait très vient de quoi était capable Vitiate. Takara avait veillé à tout lui dire, même la partie de l’histoire évoquant ô combien cet homme était un parfait paternel. Après tout, ses enfants étaient adorables, et ne lui avaient pas tout exploser à la figure. Une personne des plus fiables, à n’en pas douter. Scourge donnait peut-être l’impression de s’égosiller, sur ce point la rouquine saurait être d’accord avec cet être exécrablement exceptionnel, mais il avait su se montrer sincère et convainquant dans les récits qu’il lui avait rapporté, et ce sans donner l’impression de les avoir exagérés. Tenebrae n’était pas digne de sa confiance ; de leur confiance. Pourtant, le rejeter purement et simplement n’était pas la solution.

C’était trop tard de toute façon. Il fallait désormais éclairer sa proposition, chercher ce qu’il espérait en retour et trouver un moyen de ne rien lui donner, ne rien lui promettre. Elle craignait simplement que Vitiate vienne exiger l’inenvisageable ; qu’il vienne mettre en péril ce qu’elles avaient prévus de bâtir ensemble. Pour l’instant la sith n’avait rien à dire, et de toute façon sa compagne savait où était la ligne rouge. Takara avait été très clair qu’elle n’accepterait pas de travailler librement pour un être qui n’avait la destruction et l’anéantissement pour ambitions.

Aussi se contenta-t-elle de tourner la tête vers leur invité pour écouter sa réponse. C’était tout ce qu’il y avait à faire pour le moment.

Spoiler:

« Je ne possède aucun doute sur vos capacités de manipulation. Et je n’imagine pas non plus que vous « travaillez » sans contrepartie ni sans rien attendre en retour. Quel intérêt avez-vous à vous soucier de ce genre de problème ? »

« Je possède de nombreux intérêts… »

De très nombreux, incalculables, il lui serait impossible de tous les citer, si tant est qu’il voudrait le faire, bien entendu. Il prit un instant pour boire une gorgée de son verre, tranquillement, notant que les deux autres n’y avaient pas touché encore une seule fois. Preuve supplémentaire de leur nervosité, il n’avait pas même besoin de la Force pour sentir leur peur. Ah, la peur, un sentiment si familier, parmi les personnes croisant sa route, en plus de la haine, la simple colère ou la méfiance. C’était amusant. Il reporta ensuite son attention sur la toute jeune femme, la comparant maintenant à la photo de son frère, vu sur un de ses avis de recherche. Les deux ne se ressemblaient pas du tout, ni physiquement, ni mentalement. Frère et sœur, deux faces d’une même pièce, opposés l’un à l’autre en tous points. Il aurait trouvé intéressant de les rencontrer tous les deux ensembles, las, le petit Jedi n’aurait sans doute guère été très coopératif sur le sujet. A moins de l’amener ici de force, pieds et poings liés, il serait douteux qu’il accepte gentiment de suivre un Sith comme lui, dans son vaisseau, pour un petit voyage amical.

« L’Empire actuel n’est plus aussi solide qu’à ses débuts il y a vingt ans, c’est un fait. Les Siths venus de tous temps le renforcent mais tous ne sont pas aptes à ajouter leur pierre à l’édifice. Notre ami scientifique, par exemple, avait un peu de mal sur ce sujet. C’est dommage, il est pourtant très doué… Pour ma part, je ne souhaite bien sûr pas le retour d’une simple République, ce type de gouvernement est faible et sans intérêt. Dans la situation actuelle, avec la confiance quelque peu ébranlée, il faut replacer les pions et assurer l’avenir. Sur deux axes, officiel et officieux. Vous n’intéressez pas que moi. »

Il lui adressa un léger geste d’hommage avec son verre, accompagné d’un bref sourire. Sourire qui aurait pu être amical mais qui reflétait plutôt le danger émanant d’un serpent prêt à mordre. Elle devait déjà avoir pleinement conscience d’être un pion sur ce vaste échiquier. Pour devenir plus que ça, il lui faudra travailler mais aussi avancer ses propres pions, nouer des alliances utiles et se tailler sa place, par la ruse ou par la force. Ce n’était qu’un immense jeu infini, où chaque pas compte.

« Il y a ceux des nôtres incapables de s’adapter à cette douce époque et qui ne vaudront rien à l’avenir. Il y a ceux le pouvant et capables d’apporter du nouveau. Nous avons déjà notre lot de simples brutes et de petites natures, pas assez de personnes capables de réfléchir et ayant un rôle à jouer sur la scène galactique. Vous pouvez rejoindre ceux et celles travaillant actuellement à restaurer l’Ordre Sith et surtout, à préparer l’Empire à résister aux faiblards inconscients. Si cela vous rassure, sachez que je ne suis encore qu’un si petit rôle… Mais il y a une autre personne qui en sait bien long sur ce genre de manœuvres politiques. »

Une personne enfin prête, par ailleurs ? Il lui avait donné certaines consignes, plus tôt… Il s’apprêtait à prendre son comlink pour le vérifier lorsqu’un serviteur revint, à ce moment-là, pour annoncer la venue « du reste de la délégation impériale ». Charmante façon de le dire. Vitiate posa son verre sur la table et se leva souplement, pour accueillir la femme qui fut introduite. Dès la porte refermée, il alla vers elle et se plaça à ses côtés, glissant un bras autour de sa taille, sa grossesse délicatement soulignée par la tenue qu’elle portait.

« Je vous présente ma charmante épouse et mère de mes enfants, Senya. Qui avait hâte de vus rencontrer, Takara… »

La vie avait repris un cours ordinaire, elle pouvait soutenir ou aider son mari lorsqu’il en faisait la demande. Même lorsqu’il s’agissait de ce type d’occasions un peu… Enfin, disons que ce n’était pas sa partie favorite. Elle préférait les arènes et les entraînements, les longues heures à se dépenser, courir, combattre et se défouler, entraîner ses enfants à faire de même. La vie, finalement, la vie telle qu’on pouvait la suivre au maximum. Elle était un soldat avant tout, c’était ainsi qu’elle avait été éduquée, formée et entraînée, ainsi qu’elle avait passé toute sa vie. Et bien qu’elle maîtrisât l’aspect plus diplomatique et politique, ce n’était pas ce qui l’attirait le plus. Enfin, puisqu’il fallait en passer par là… Une fois prête, elle suivit un garde qui l’attendait à l’extérieur, jusque dans la navette préparée pour eux. Après la ville-monde, c’était une toute autre planète s’offrant face à eux.

Senya était plutôt curieuse, car elle désirait voir en face la personne qui avait « récupéré » sa fille à son arrivée ici, puis qui l’avait lourdement sédatée et droguée, malgré son si jeune âge… Elle aurait très bien pu faire un malaise grave, voire un arrêt cardiaque, quelqu’un aurait pu profiter de son état pour la frapper. Alors qu’elle n’avait que douze ans ! C’était ce qui avait outré sa mère, qu’on inflige ça à une si petite enfant, une fillette haute comme trois pommes, encore un peu frêle. C’était de l’inconscience pure et simple, même pire, de la maltraitance ! Alors que la petite n’y était strictement pour rien si elle ne maîtrisait pas encore son pouvoir. Sur le court trajet, elle médita un peu pour recouvrer son sang-froid, bien que la colère reste bien ancrée dans le fond. Valkorion n’avait qu’à peine réussi à la calmer, sur le chemin les menant vers cette planète.

Une curieuse sensation la frappe, en posant pied à terre, comme si… Il y avait quelque chose, ou quelqu’un, l’appelant, sur cette planète. L’impression était diffuse, bien trop diffuse, puis disparu dès qu’elle chercha à ressentir plus. On la guida à l’intérieur du palais, jusqu’à une sorte de salon de réception. Deux femmes, l’une devait être la reine, étaient installées là, une brune et une rousse. Si elle en croyait Vaylin, la rousse devait être celle qui l’avait droguée et attachée dans un lit… Senya s’avança d’un pas léger, puis stoppa lorsque Valkorion s’arrêta près d’elle et passa son bras autour de sa hanche. Surprise, elle ne put s’empêcher de lui lancer un petit regard en biais, n’ayant pas pensé une minute qu’il voudrait montrer leur lien en public.

"Je vous présente ma charmante épouse et mère de mes enfants, Senya. Qui avait hâte de vous rencontrer, Takara…"

Il la présentait comme ça… ? Ce ne fut que grâce à l’entraînement qu’elle put ne pas montrer son ébahissement mais n’en pensait pas moins. Il la tenait serrée contre lui par la taille et elle n’aurait pu se dégager sans le repousser fermement, et cela, c’était parfaitement impensable. Elle salua néanmoins la reine avec politesse, ainsi que cette Takara, d’un ton égal, parfaitement neutre, mais la posture un peu raide. Non pas qu’elle détestait être dans ces bras, mais… ce n’était pas souvent. Jamais en public. Et aujourd’hui, elle pouvait ressentir cet amas de pouvoir brûlant, en lui, qu’il ne s’efforçait même pas d’atténuer, et avoir ça collé contre elle ne la rendait pas à l’aise. Elle préféra encore attendre un peu et ne rien dire, une fois ces salutations faites. Déjà pour voir ce que son mari attendait précisément d’elle, en ce lieu, et ensuite qu’il la relâche un peu.

La jeune femme gardait l’esprit ouvert, face à toutes sortes de propositions, de marchés, de contrat ou d’autre, cependant, il fallait discuter du prix. Surtout face à ce genre de… Comment en parler poliment… Face à des individus ayant déjà plus que prouvé, par le passé, être des requins prêts à vous dévorer au moindre faux pas. Ou simplement une fois qu’ils s’étaient lassés de vous. Contrôler sa peur, et ne pas la dévoiler – enfin le moins possible – était un exercice très délicat, même lorsqu’on avait été entraîné à ne pas montrer ses émotions. D’ordinaire, Leia ne se souciait pas une seconde des personnes la dévisageant, lors des assemblées et des réunions, ou lors de rencontre officielles, sauf ici, c’était très différent. Elle se sentait comme un petit lapin surpris par un gros loup, au milieu d’un champ, sans possibilité de fuite. Même face à Palpatine, pourtant un ennemi de poids, elle ne s’était pas sentie autant en danger immédiat. Même face à Plagueis, elle n’avait pas eu non plus cette sensation. Quoi que dans ce dernier cas, son jugement avait été complètement obscurci et dévié par la haine. En d’autres circonstances, peut-être aurait-elle une réaction très différente. Sans doute, même.

– L’Empire actuel n’est plus aussi solide qu’à ses débuts il y a vingt ans, c’est un fait. Les Siths venus de tous temps le renforcent mais tous ne sont pas aptes à ajouter leur pierre à l’édifice. Notre ami scientifique, par exemple, avait un peu de mal sur ce sujet. C’est dommage, il est pourtant très doué… Pour ma part, je ne souhaite bien sûr pas le retour d’une simple République, ce type de gouvernement est faible et sans intérêt. Dans la situation actuelle, avec la confiance quelque peu ébranlée, il faut replacer les pions et assurer l’avenir. Sur deux axes, officiel et officieux. Vous n’intéressez pas que moi.

Ne réponds pas. Attend la suite. Garde ton sang-froid. Reste droite. N’angoisse pas. Aucune envie non plus de réfléchir à qui d’autre elle pourrait bien intéresser, dans cette foutue galaxie, et encore moins de creuser le sujet. C’était le prix, qu’elle attendait, après cette entrée en matière. Le geste d’hommage que lui adressa le seigneur Sith ne l’émut pas plus, par contre, le sourire qu’il leur adressa ne contribua pas à la rassurer. S’il comptait émettre un prix du type « se mettre à son service », ce sera évidemment non. Se mettre à celui de Palpatine avait déjà été dangereux, pas question de faire l’expérience deux fois avec un type dont elle savait qu’il pouvait jouer comme d’un rien avec des multitudes d’esprits. Elle se força également à ne pas tourner le regard vers Takara, ce serait un signe de faiblesse, montrer, comme si ce n’était pas assez évident, qu’elle n’était pas à l’aise. Vitiate poursuivait son petit laïus, d’un ton toujours très égal, voire détendu, alors qu’elle commençait à voir où il voulait en venir. Mmh… Il ne jouait qu’un petit rôle là-dedans, bien sûr, bien sûr. La dernière phrase la fit presque sourire. Se serait-il trouvé un assistant, ce vieux loup ?

Un assistant qui daigna d’ailleurs se présenter à son tour, comme un signal. Leia en profita pour déposer rapidement son verre sur la table basse, échanger un long regard avec Takara, puis se lever elle aussi pour accueillir ce nouvel invité indésirable. Une invitée, plutôt. Une femme plus grande qu’elle et sans doute plus que Takara, à peine plus petite que Tenebrae. Habillée élégamment, assez sobre, et bien belle, il fallait le reconnaître, elle avait une certaine stature. Leia lui rendit son salut avec politesse, puis sentit sa bouche s’assécher légèrement lorsque le Sith glissa d’un coup son bras autour de la taille de la nouvelle venue et la serra contre lui. C’est juste à ce moment que la reine remarqua que le ventre de la nouvelle venue était un peu arrondi. Elle serait… De lui…. ? Non… Non, non, non, ça suffit ! Il comptait créer d’autres monstres gorgés de pouvoir comme la gamine blonde, incapables de se contrôler ?! Comme si la galaxie n’avait pas déjà suffisamment souffert ! Pourquoi, mais bon sang, pourquoi, au nom de la Force, ce…

– Je vous présente ma charmante épouse et mère de mes enfants, Senya. Qui avait hâte de vous rencontrer, Takara…

Une impression des plus mauvaises secouait déjà Leia face à cette femme, car si elle s’était évidemment demandée qui avait bien accepter de se marier avec ça, il y avait un gouffre entre s’imaginer la scène et le voir en face. Elle ne laissa cependant pas cette impression influencer son comportement, ni l’air qu’elle afficha, inspirant un peu. Puis elle proposa aux deux de s’installer confortablement, pour la suite de cette discussion. Une fois rassise, elle eut un peu de temps pour reprendre contenance. Un gamin de plus en route, dans cette famille de fous, c’était vraiment une très mauvaise nouvelle.

– C’est une proposition intéressante et nous devrons bien sûr y réfléchir. Quant à avoir besoin d’un avis supplémentaire, nous verrons cela sur le moment, bien que je ne doute pas de vos compétences. Ou de votre patience, madame.

La patience de supporter cet être, pire encore, de l’aimer, de lui donner une descendance… Oui, cette femme devait être un véritable modèle de patience et d’abnégation. Elle tourna ensuite la tête vers Takara, déjà au bout de sa propre patience, avec cette entrevue.

– J’imagine qu’il y a peu d’alliances fructueuses, par le passé ?

Il possédait de nombreux intérêts. Bien évidemment. Ce n’était pas surprenant chez quelqu’un qui avait vécu aussi longtemps. Il avait très certainement plus de temps que nécessaire pour se forger un réservoir d’expérience aussi monstrueuse que sa longévité, et développer une infinité d’intérêts. Takara se demandait même s’il n’avait dû finir par se lasser et s’ennuyer par moment, après tout ce temps. La sith avait encore du mal à pleinement croire à cette histoire. Une telle durée de vie lui paraissait inconcevable. Et pourtant, l’aura face à elle ne mentait pas. Sa noirceur semblait infiniment profonde qu’elle pourrait aisément s’y perdre si elle baissait sa garde, et la froideur qui en suintait suffisait à lui glacer le sang. Il n’y avait pas de doute quant à la puissance que Vitiate avait pu accumuler après tout ce temps. A vrai dire, il devenait de plus en plus difficile de le regarder en face et Takara céda à la nécessité pressante de détourner légèrement le regard pendant un instant, et tenta de cacher son malaise en se saisissant délicatement du verre qu’elle s’était pourtant interdite d’y toucher, pour en goûter le spiritueux. Elle reposa délicatement le verre sur la table et reporta son regard sur l’invité nuisible une fois sa contenance retrouvée et haussa un sourcil lourd de sens lorsqu’il commença à évoquer l’état de l’Ordre Sith et de l’Empire. La rousse commençait à avoir assez de recul pour pouvoir acquiescer mentalement à ses propos sur l’Empire. En revanche, il devait délirer en affirmant que les autres siths venus du passé œuvrait au renforcement de l’Ordre. Aucun de ceux qu’elle avait rencontré n’avait réellement fait le moindre pas dans ce sens et continuait d’œuvrer, comme elles finalement, dans leur propre coin, à la différence que Takara essayait de donner le change un minimum... Evidemment, comme Vitiate l’avait annoncé, certains avaient même poussé leur nuisance à l’extrême, au point de détruire leur maigre image aux yeux de tous. Ce Plagueis en était l’exemple ultime et Takara manqua de s’étrangler lorsque l’être supposé immortel évoqua les compétences de cette aberration. Il n’y avait bien qu’un individu pareil pour parler en bien d’un acte aussi horrible et malfaisant que la pandémie qui avait ravagé la galaxie.

Takara était néanmoins d’accord sur le fait que l’Empire avait besoin de changement mais se garda bien de le montrer. Après tout, elle n’avait pas approché Leia pour rien à la base, ayant vu en elle une personne capable et avec la carrure suffisante pour gagner en importance et, peut-être à l’avenir, supplanter Palpatine. Il n’était néanmoins pas rassurant de constater que d’autres ait pu partager son point de vue… Surtout lui. Son sourire n’était à ce sujet en rien rassurant, la rousse l’ayant vu bien trop souvent sur le visage d’autres siths prêt à vous poignarder dans le dos à la première occasion, une fois votre utilité épuisée. Takara avait déjà la conviction que Palpatine avait rangé Leia sur une voie de garage après avoir dépensé les opportunités qu’il avait vu en elle. L’Empereur ne voyait en Leia et elle que pions pouvant servir ou non leurs desseins. Il en était très probablement de même pour leur invité, et bien que celui-ci semblait vouloir le nier, la rousse n’était pas dupe. Elle n’avait que trop baigné dans le milieu politique sur Kesh pour en discerner les ficelles. Du moins, le pensait-elle. En proposant ainsi à travailler à un changement de statut, il ne cherchait qu’à titiller l’intérêt en jouant sur une frustration éventuelle. Au final, tout cela était bien trop classique à son goût, bien trop prévisible, et Takara ne voulait rien à voir avec cet individu. Pas sans garantie qu’il se devrait de respecter, quel que soit la situation. Des garanties qui lui était difficilement concevable, et qu’il n’avait nullement proposé. Leia était bel et bien affutée à ce genre de négociations, il n’y avait pas de doutes. Malgré la présence imposante de leur invité, malgré le stress et éventuellement la peur, elle restait debout face à l’adversité et résistait à la tentation de se détourner et de prendre la fuite. Elle la rendait fière, même si elle avait peur.

La sith se réhaussa légèrement d’abord et partagea le lourd regard de sa compagne, avant de se lever ensuite, lorsque le vieil homme se leva pour s’approcher de l’une des grandes double-portes du salon derrière laquelle une nouvelle présence pouvait se faire sentir à travers la Force, accompagnée par quelques serviteurs du palais. Takara avait un soudain mauvais pressentiment. Elle resta d’abord interdite devant son aura particulière, puis face au mouvement de leur premier invité à son égard. Venait-il vraiment de… Elle devait rêver… La rousse cligna brièvement des yeux pour tenter de chasser cette image de son esprit mais celle-ci restait imprimée devant-elle, particulièrement déroutante. Quoi, comment une personne pouvait-elle s’attacher à ce… à ça ? Bien sûr, il n’avait pas eu ses trois enfants tout seul mais Takara ne s’était jamais posé la question de savoir qui aurait pu accepter de former une famille avec un être aussi sombre que le néant, à moins de n’être soit même qu’un gouffre de noirceur. Et pourtant ! Voilà que toute la famille semblait vouloir se réunir dans ce temps, au lieu de rester bien gentiment dans un passé dont plus personne ne souhaitait entendre parler ! Pourquoi, la Force ? Pourquoi ?

Ce n’était pas tout, cependant. Le regard de la sith était doucement descendu pour scruter la nouvelle arrivante sous toutes les coutures mais s’était brusquement interrompu en arrivant au niveau de son ventre et exprimer sa surprise. Enceinte… Elle était enceinte… La rousse resta lèvres entrouvertes pendant un très bref instant. Ce n’était pas possible… Non. Evidemment. La Force n’avait pas pu en rester là. Cela aurait été bien trop simple ! Il fallait qu’elle soit enceinte ! Encore ! Ce très court moment d’ébahissement passé, Takara jeta un bref regard des plus blasé à l’égard de Vitiate. Un regard qui en disait long sur ce qu’elle en pensait ; un regard interrogateur qui demandait comment il avait pu penser qu’il s’agissait là d’une bonne idée ; un regard accusateur qui lui demandait comment il n’avait pas pu apprendre de ses trois précédents échecs ? La sith baissa la tête peu après car ce n’était pas le moment de faire une scène. Il était inutile de déverser son venin à l’égard d’une personne qui devait déjà avoir compris tout le dégoût qu’elle lui inspirait. Takara finit donc par relever le visage vers Senya pour lui offrir un sourire des plus chaleureux.

« C’est effectivement un plaisir partagé, d’enfin pouvoir faire votre connaissance. »

Une pure facette, bien sûr. Elle n’en pensait pas un traître mot. Takara aurait préféré ne jamais la rencontre. Ni elle, ni lui, ni ses enfants. Ah que Kesh et son ignorance lui auraient soudainement manqué s’il n’y avait pas eu Leia dans ce temps ! Bref… C’était là, il fallait faire avec désormais, même si la rousse espérait pouvoir passer ne serait-ce qu’un peu de temps sans que la Force ne vienne lui jeter quoique ce soit à la figure…

Suivant l’invitation de sa compagne, elle suivit le mouvement et retourna s’installer à la place qu’elle avait quitté et manqua pas de se saisir de son verre au passage, pour y goûter à nouveau en écoutant Leia, le tout en regardant Senya. C’était étrange. Elle n’était pas du tout comme son mari, du moins était-ce l’impression qu’elle donnait à travers la Force. La réponse de son amante à la proposition de l’être immortel était dans le ton que la rouquine avait espéré : ne pas donner de réponse claire, tout en s’offrant un délai de réflexion pour trouver une solution pour se sortir de cette situation inconfortable. Elle se garda bien de faire son propre commentaire, pour éviter de cliver la discussion mais se retrouva bien malgré elle sous le feu des projecteurs lorsque Leia tourna finalement une dernière fois la tête vers elle, avec une question qui la prit quelque peu de court, et qui venait rajouter un poids assez conséquent sur ses épaules, vu sa tournure. Elle y réfléchit quelques secondes avec un sourire sincère, le temps d’organiser sa réponse, avant de finalement tourner son visage en direction de leurs invités.

« Cela dépend. Bien souvent ces alliances se détruisent de l’intérieur, par des luttes intestines, puisqu’aucun des participants ne souhaite y tenir qu’un rôle de simple exécutant, surtout lorsqu’il s’estime plus puissant et méritant que les autres. De plus, si les siths avaient réellement su s’entendre sur la durée, l’Empereur n’aurait pas eu à renverser la République. Celle-ci aurait cessé d’exister il y a fort longtemps. Sans buts communs à long-terme, ils ne pensent qu’à s'entre-détruire. Concernant notre invité et sa proposition je ne dirais qu’une chose : par le passé, il me semble avoir entendu que peu sont ses alliés qui ont eut l’occasion de voir le fruit de leur succès. Mais ces accusations sont peut-être fallacieuses. »

Evidemment que non, elles ne l’étaient pas. Elle l’avait senti chez Scourge, avant et après Alderaan, avant et après qu’il ne… change. Il lui avait dit la vérité, rien que la vérité. Peu être édulcorée, mais la vérité tout de même. Mais il fallait éviter d’être trop incisif pour le moment, en laissant ouverte l’idée que ce qu’elle ait pu entendre au sujet de l’être éternel ne soit rien d’autre qu’un tissu de mensonges attendant d’être balayé par une vérité éclairée.

Sa douce épouse était plutôt… raide. Crispée. Sans doute un peu perturbée par le fait qu’il la tienne. Lui-même s’en amusait, après tout, que ce serait une vie éternelle sans des petits plaisirs ? Que serait cette si longue vie si elle n’était faite que de complots et de guerre, sans pouvoir en profiter d’une autre manière ? Jouer des réactions de son épouse était aussi satisfaisant que jouer de celles de ses adversaires, s’amuser de certaines réactions. Ces failles et cette époque permettait plus de liberté, il n’y avait aucune importance à ce que l’on sache qu’il était marié, bien des personnes savaient déjà qu’il avait eu des enfants. Or, il n’avait pu les faire seul, ces chères petites blondes, il se devait d’y avoir une douce femme auprès de lui. Quoi que, « douce » n’était pas le terme le plus exact. Le temps des saluts, il la garda contre lui, s’amusant aussi de ce qu’elle ressentait en étant si proche de ce qu’il était réellement, ce qu’il ne tentait guère de cacher. Un pur réservoir de puissance brute et profondément liée au côté obscur, construite à force de temps, de patience, de recherches et d’efforts soutenus. Par goût et envie de pouvoir.

Une fois rassis auprès de Senya, face aux deux femmes, il adressa un très bref sourire moqueur à la petite rousse. Il savait ce qu’elle pensait et cela l’amusait d’autant plus. Ce nouvel enfant attendu ne représentait encore rien, à ses yeux. Trois possibilités s’offrait, pour l’avenir. S’il n’était pas sensible à la Force, il ne sera alors rien, à peine un vulgaire petit pion dont il faudra se débarrasser ou reléguer dans un coin sans plus s’en soucier. S’il était sensitif, soit il sera un pion de plus sous son contrôle, soit il deviendra un adversaire qu’il écrasera comme on écrase un insecte. En attendant, quelle importance avait ce gamin en cours de gestation ? Il comptait sans doute pour Senya, lui, si cela pouvait l’occuper un peu, après tout, c’était très bien, elle aura un jouet pour se distraire, lorsqu’elle sera seule. Il pouvait lui laisser cela, pour le moment, après tout, Senya était l’unique lueur de lumière dans son existence entière, une lumière que personne ne pouvait apercevoir, tant elle était encerclée par les ténèbres. Une lumière certes vacillante et qui ne saura jamais faire reculer la noirceur, mais une lumière tout de même, bien existante. Tel était le véritable pouvoir de cette femme. De sa femme.

Qui croirait qu’elle soit également la seule personne dans cette galaxie sur laquelle il n’avait pas imposé son pouvoir et qu’il avait laissée libre ? Même alors qu’elle était entièrement à sa merci et à sa portée. La seule, oui… Ce privilège lui était unique, n’en déplaise à d’autres. Le regard sur la toute jeune reine, il écouta sa réponse sans manifester la moindre émotion. C’était, bien sûr, une réponse logique et attendue, pour cette première phase de l’entretien. Il n’était guère venu ici pour la convaincre d’emblée, mais pour déposer une première base et plus encore, pour mettre en place un ou deux atouts. Les simples visites de courtoisie n’étaient pas de son style… Quoi qu’il menait, d’ailleurs, rarement de visites. D’ordinaire, c’était bien ses adversaires qui avaient la gentillesse de se déplacer jusque chez lui, la plupart du temps pour mourir inutilement. Y compris certains Siths. Curieuse manie… Les Siths aimaient le pouvoir et pourtant, telles la petite nature, s’effrayaient soudainement lorsqu’ils rencontraient une personne ayant amassé bien du pouvoir. Ce brave Scourge pourrait en dire quelque chose.

« J’imagine qu’il y a peu d’alliances fructueuses, par le passé ? »

« Cela dépend. Bien souvent ces alliances se détruisent de l’intérieur, par des luttes intestines, puisqu’aucun des participants ne souhaite y tenir qu’un rôle de simple exécutant, surtout lorsqu’il s’estime plus puissant et méritant que les autres. De plus, si les siths avaient réellement su s’entendre sur la durée, l’Empereur n’aurait pas eu à renverser la République. Celle-ci aurait cessé d’exister il y a fort longtemps. Sans buts communs à long-terme, ils ne pensent qu’à s'entre-détruire. Concernant notre invité et sa proposition je ne dirais qu’une chose : par le passé, il me semble avoir entendu que peu sont ses alliés qui ont eut l’occasion de voir le fruit de leur succès. Mais ces accusations sont peut-être fallacieuses. »

La petite rousse confondait différentes sortes d’alliance, mais il lui pardonnait, cela devait être dû à son jeune âge. Sans oublier qu’elle avait sûrement être bien influencée par de nombreuses histoires, à son égard, et par les racontars des Siths faibles et effrayés par le véritable pouvoir. Bien peu étaient ceux se permettant d’y goûter au plus haut point, de s’y plonger comme jamais. Nihilus, par exemple, l’avait fait. Ce cher Sion également. Et bien sûr, sur un temps plus récent, leur bon ami Plagueis. Il ne prit cependant pas la peine de relever cette erreur de jugement chez la petite. Aaah, maintenant qu’il y songeait, Nihilus et Plagueis portaient si parfaitement leurs noms, ensemble, ils auraient pu faire subir bien pire encore à cette chère galaxie. Un véritable travail d’orfèvre, un talent qu’on ne pouvait qu’apprécier. Ses propres méthodes étaient plus lentes, il devait bien l’admettre. Alors que détruire tant de vie avec une arme si microscopique, en si peu de temps, c’était là le chef-d’œuvre d’un artiste, si amoureux de son art. Il ne pouvait que respecter cela. Quel dommage qu’ils se soient côtoyé si peu par le passé… Mais peut-être qu’à l’avenir… S’il trouvait où était emprisonné leur bon ami scientifique…

« Il ne faut guère confondre les types d’alliances possibles. Ou avec qui elles se nouent. Il est naturel que beaucoup se plaignent du gouvernement au pouvoir, une part des êtres vivants ne sera jamais satisfaite. Ou, bien des alliances ont longuement tenu, par le passé. Des Siths ont pu se réunir. Ou répondre à un appel, par curiosité, par peur, par faiblesse… Par profonde naïveté, dans le cas de certains. »

Les profonds imbéciles ayant répondu à son appel dans les Régions Inconnues étaient responsables de leur sort, par leur inconscience. Tout en parlant, l’air toujours neutre, Vitiate avait débuté une part de ses projets. Les jeux de l’esprit, son plus grand et son plus beau terrain de prédilection, ce qu’il maîtrisait le mieux. Il existait deux manières de procéder. La façon brutale, mettant à genoux un grand nombre de Siths à la fois lorsque besoin était, ou la façon plus douce, indiscernable, plus lente mais indétectable pour des adversaires de ce niveau. Un toucher incroyablement léger, qui ne laissait aucune trace, et qui n’appuyait guère contre le psyché. Ce n’était pas un contrôle, qu’il désirait, mais simplement déposer une « petite graine » dans les esprits visités… Un simple petit cadeau… Tel un long serpent sinueux et léger, se glissant sur les fils de la Force, pour parvenir à se nicher dans un recoin de l’esprit et y mordre avec légèreté. Y déposant un venin allant aussitôt se diffuser et se fondre dans les ténèbres, en attendant le bon moment. Le serpent se retirait ensuite, sa mission accomplie, comme un léger rêve dont on oublie tout une fois éveillé.

« Ainsi, les Républiques et les Empires chutent tour à tour. Tel est l’Ordre naturel des choses. Un gouvernement ne vaut rien, ce qui compte, ce sont ceux qui y survivent et qui peuvent poursuivre leur lancée. Vous êtes actuellement au cœur même de ce procédé, majesté Organa. Vous pouvez apprendre seule à vous débattre avec les règles enfouies et les codes, vous pouvez chercher des alliés de circonstance, vous pouvez également décider d’abandonner tant qu’il est encore temps. Gardez simplement en tête que revenir en arrière est devenu impossible. La galaxie va encore évoluer. Profondément. »

– Cela dépend. Bien souvent ces alliances se détruisent de l’intérieur, par des luttes intestines, puisqu’aucun des participants ne souhaite y tenir qu’un rôle de simple exécutant, surtout lorsqu’il s’estime plus puissant et méritant que les autres. De plus, si les siths avaient réellement su s’entendre sur la durée, l’Empereur n’aurait pas eu à renverser la République. Celle-ci aurait cessé d’exister il y a fort longtemps. Sans buts communs à long-terme, ils ne pensent qu’à s'entre-détruire. Concernant notre invité et sa proposition je ne dirais qu’une chose : par le passé, il me semble avoir entendu que peu sont ses alliés qui ont eut l’occasion de voir le fruit de leur succès. Mais ces accusations sont peut-être fallacieuses.

Elle lui confirmait ce que Leia songeait déjà sur les Siths, dans l’Histoire, et les guerres passées. Bien sûr, certains Siths n’étaient pas de ce bois-là, ou pas autant que d’autres, plutôt… Si un sourire faillit lui venir à cette réponse, l’envie lui fut complètement coupée en reposant le regard sur leur invité indésirable. Il lui donnait l’impression… le sentiment affreux… D’être au bord d’un gouffre impressionnant de ténèbres, où le moindre petit geste malencontreux pourrait la faire basculer. C’était… Elle ne comprenait même pas comment ce genre d’être pouvait seulement réussir à exister, il était comme un trou noir, autant physiquement dans leur monde qu’au sein de la Force, en tout cas, c’était ainsi qu’elle le ressentait et le voyait. Un gouffre de vide, un gouffre sombre, comment la Force tolérait-elle cela, comment son existence n’était-elle pas annihilée ? Si encore, il cachait cela, il pourrait passer pour un homme parfaitement ordinaire ! Un homme d’un certain statut social, ça se voyait à sa démarche, mais un simple homme tout de même. Comment lui-même parvenait à ne pas se noyer dans son propre gouffre de noirceur, c’était là un mystère de plus qui la dépassait complètement. Il lui faisait horreur, tout ce qu’elle ressentait chez lui la rendait malade.

– Il ne faut guère confondre les types d’alliances possibles. Ou avec qui elles se nouent. Il est naturel que beaucoup se plaignent du gouvernement au pouvoir, une part des êtres vivants ne sera jamais satisfaite. Ou, bien des alliances ont longuement tenu, par le passé. Des Siths ont pu se réunir. Ou répondre à un appel, par curiosité, par peur, par faiblesse… Par profonde naïveté, dans le cas de certains. Ainsi, les Républiques et les Empires chutent tour à tour. Tel est l’Ordre naturel des choses. Un gouvernement ne vaut rien, ce qui compte, ce sont ceux qui y survivent et qui peuvent poursuivre leur lancée. Vous êtes actuellement au cœur même de ce procédé, majesté Organa. Vous pouvez apprendre seule à vous débattre avec les règles enfouies et les codes, vous pouvez chercher des alliés de circonstance, vous pouvez également décider d’abandonner tant qu’il est encore temps. Gardez simplement en tête que revenir en arrière est devenu impossible. La galaxie va encore évoluer. Profondément.

Il lui était très douloureux de le reconnaître, mais sur ces trois points, il n’avait pas tord, ce vieux fourbe… S’avouer ça ne signifiait pas, pour autant, qu’elle ne voulait pas le voir dégager au plus vite de son salon, puis de cette planète, et si possible, de cette galaxie toute entière ! Qu’il aille voir ce qui se passait en-dehors de ses limites, qu’il aille faire du tourisme au-delà des Régions Inconnues, voilà qui plairait à un très grand nombre de personnes, y compris de nombreux Siths. La seule chose qui la gênait était Senya… Laisser une future arme potentiellement semblable à la petite Vaylin, entre les mains de ce dingue, c’était très angoissant… Cela dit, elle ne pouvait quand même pas faire enlever la future maman pour éviter ce scénario cauchemardesque ! Quoi que… Dans le cas miracle où ce vieillard aimait réellement cette femme, il prendrait mal qu’on la kidnappe. Et Leia ne comptait pas se faire de ce type un ennemi. Autant elle ne craignait ni les Rebelles, ni les Jedis, autant elle n’était pas assez cinglée pour déclarer un combat contre ce genre de monstres. Elle doutait d’ailleurs que ceux ayant essayé, par le passé, aient terminé dans un bon état physique et mental.

– Je ne manquerai pas de vous en faire part, pour une éventuelle alliance. D’ici ce temps, nous avons beaucoup à faire, et comme vous l’avez dit, vos propres projets doivent également vous tenir fort occupé. J’ai apprécié cet entretien, nous aurons peut-être l’occasion de nous revoir.

Lui adresser un sourire poli faillit bien lui brûler les lèvres au passage, mais c’était un mal nécessaire. Ne pas se le mettre à dos ni s’attirer sa colère… Car elle ne serait pas capable de l’affronter. Et malgré la confiance qu’elle portait en Takara, elle ne pensait pas que cette dernière soit plus capable de résister en un contre un face à ce type.

Lorsque Leia s’était tourné vers elle pour lui demander son avis, Takara l’avait interprété comme une invitation à l’appuyer dans la nécessité de faire déguerpir leur invité et sa compagne aussi vite que possible, et si possible en refusant toute collaboration avec lui. La réponse de la sith n’avait fait que se conformer à cette nécessité, en mettant en exergue les échecs à défaut des réussites pour ne pas donner raison au nuisible. Il y avait bien évidemment des situations où les siths étaient en mesure de s’entendre et où ce genre d’alliance pouvait fonctionner, lorsque l’ensemble faisait front commun dans un but partagé. Dans ce cas, leur détermination les rendait tout simplement inarrêtables. Le plus compliqué était de maintenir ce sentiment d’unité, ce but qui faisait que les luttes intestines étaient reléguées au second plan. Varner l’avait très vite compris à l’époque où les troubles avaient mené son peuple au bord de l’extinction et avait évidement transmis cet enseignement à sa fille, qui n’avait pu aller que dans son sens en voyant comment leur peuple avait prospéré sous la gouvernance de son père. Un procédé qu’il n’était hélas pas possible de reproduire dans cette époque, pour la simple et bonne raison que les siths n’étaient pas confronté à une situation similaire. L’Empire, bien qu’assailli, continuait à prospérer et la population n’était pas habituée à les voir dominer la scène politique, culturelle, sociale et religieuse, comme cela avait pu être le cas sur Kesh. De plus, ces siths là ne pensaient qu’à leur propre intérêt, aveugles du sort qui leur était irrémédiablement réservé dans la poursuite de cette voie. Bien sûr, en choisissant de faire bande à part avec eux elle aussi, Takara était à priori tout autant coupable, mais lorsque vous êtes l’une des rares à connaître l’origine du problème et sa solution, l’était-elle réellement ?

La seule solution valable était de trouver un but inatteignable ou presque et souder les siths autour de cet objectif, tout en s’assurant qu’il ne pourrait jamais gravir les sommets permettant d’y parvenir. Bien sûr, s’il avait été possible de simplement tous les éliminer sans craindre de les voir aussitôt revomi par la Force, une autre opportunité se serait-elle offerte mais cette opportunité-là, elle, n’existait plus. Takara devait donc admettre que Vitiate avait raison en affirmant que des alliances avaient pu tenir par le passé, des alliances qui étaient pour leur majorité basé sur ce principe pas là d’unicité. Elle ne voyait simplement pas l’intérêt de le souligner pour la simple et bonne raison que cela ne desservait pas son intérêt. Leur intérêt. Du moins était-ce là ce qu’elle pensait. Que Leia et elle étaient toujours sur la même longueur d’onde à ce sujet. Le nuisible devait repartir, et le plus vite possible. Ce qui l’agaçait certainement le plus était de voir, ou plutôt de constater que Vitiate et elle étaient principalement sur la même longueur d’onde et partageait une vision partiellement similaire. Cette simple idée, d’ailleurs, la faisait frissonner. Comment pouvait-elle être d’accord avec cet individu ? Tout simplement parce qu’il était, sur ces points précis, particulièrement objectif. Lui aussi avait compris que Leia était la mieux placée pour incarner ce qui succèderait à cet Empire. Sur ce point, Takara évinçait évidemment siths et jedis, mais aussi rebelles, qui n’étaient que le soubresaut d’une république déjà morte depuis bien des années et qui n’apporterait aucune stabilité.

D’un léger mouvement de tête sur le côté, le port toujours altier, Takara jeta un bref regard vers Leia pour tenter de discerner son avis sur la question avant de reprendre son observation de la dualité offerte par leurs invités, l’un incarnant la mort et la destruction, l’autre paraissant plus saine d’esprit, mais restait encore bien trop peu lisible. Tapotant tout doucement sur son verre à moitié vide, la rousse ne saisissait pas encore comment cette femme avait-elle pu s’attacher à cet homme, à moins, bien sûr, qu’il se soit contenté d’asservir son esprit pour ensuite la modeler de la manière dont elle se présentait aujourd’hui, le tout en masquant son méfait. Scourge avait bien appuyé sur les capacités exceptionnelles du vieil homme dans ce domaine. Qu’il n’ait rien tenté de la sorte à leur égard l’angoissait encore quelque peu, car ce n’était pas l’attitude normale des siths d’un tel calibre, qui trouvait un malin plaisir à mettre leurs interlocuteurs sous pression. Du moins, elle n’avait senti cet habituel appui sur sa psyché, celui qui vous murmurait qu’un blaster pouvait à tout moment se retrouver planter sur votre tempe, et qu’il serait bon de se préparer à frapper la première.

Entendre Leia remettre à plus tard sa décision n’était pas une surprise mais restait un soulagement en soi. Entendre son souhait de mettre un terme à cette entrevue l’était tout autant. Oui, cela n’avait que trop duré. En vérité, Takara aurait tout simplement préféré qu’elle n’arrive jamais et que ce fou reste à jamais enfermé dans le passé. Le voir repartir libre, sans contraintes, n’était en rien rassurant. Le savoir capable de se déplacer librement signifiait qu’il pouvait à nouveau comploter en secret et préparer son prochain coup. Il avait même des alliés pour l’appuyer dans ses projets. Même si cela lui était douloureux de le reconnaitre, il lui faudrait en parler à Scourge. Rapidement. L’informer que le vieux était de retour et qu’il avait récupéré sa fille.

« Nous avons effectivement fort à faire. Si nous en avons finis ici, nous vous remercions pour votre visite. »

Takara n’en pensait pas un traitre mot, et son visage figé, sans sourire et au regard appuyé, ne laissait pas de place au doute. Les deux n’avaient fait que se jauger de la sorte, lui par des sourires moqueurs, elle par un faux désintérêt à son égard. Nul doute qu’il ne lui en tiendrait pas rigueur… En réalité, la Sith n’inclina légèrement la tête que pour saluer sa femme, Senya, dont elle ne savait rien et n’avait rien dit ou fait pour mériter plus qu’un simple préjugement probablement impartial.

Le fait qu’elle soit alliée, et ainsi liée à ce monstre, ne pouvait de toute façon que la desservir…

« Je ne manquerai pas de vous en faire part, pour une éventuelle alliance. D’ici ce temps, nous avons beaucoup à faire, et comme vous l’avez dit, vos propres projets doivent également vous tenir fort occupé. J’ai apprécié cet entretien, nous aurons peut-être l’occasion de nous revoir. »

« Nous avons effectivement fort à faire. Si nous en avons finis ici, nous vous remercions pour votre visite. »

Nul doute qu’il avait bien plus, de son côté, apprécié et profité de cette petite visite qu’elles deux réunies. Bien, bien, bien, il était toujours très agréable de placer quelques pions tout en profitant d’un bon verre, dans un décor, somme tout, charmant. Une fois les saluts terminés, Vitiate offrit son bras à sa femme et repartit avec elle, se permettant juste de sourire plus sournoisement une fois tous deux rentrés dans leur navette et en route vers le vaisseau. C’était une rencontre instructive, et lors de sa petite visite dans les esprits de ces jeunes dames, il avait pu apprendre quelques « détails » intéressants. Voilà bien pourquoi il était important de prendre le temps de parler à ses ennemis comme à ses alliés potentiels. Au retour sur le vaisseau, il laissa Senya aller se reposer, et de son côté, alla plutôt voir ce qu’il en était de leur fille. Leur charmante petite tête blonde qui avait causé tant de remous en si peu de temps et qui avait, au passage, provoqué une sévère inquiétude quant à son pouvoir chez certaines personnes. Bon sang ne saurait mentir, n’est-ce pas ?

Conformément à ses ordres, lorsque ni lui ni Senya n’étaient présents, ses gardes s’occupaient de l’enfant, pour l’entraîner physiquement, d’une part, mais aussi, ben entendu, pour la surveiller de près. A son entrée, il chassa d’un signe de main les deux hommes présents dans la salle d’entraînement avec elle, avant de s’approcher. Cette petite ne réalisait sans doute pas à quel point elle lui ressemblait… A quel point le pouvoir qu’elle possédait était comparable au sien. De ses trois enfants, elle était vraiment celle qui lui était la plus semblable, celle qui avait tout hérité de lui et celle qui possédait le potentiel le plus évident. Thexan et Arcann avaient tous les deux trop pris du tempérament de leur mère, surtout Thexan, et ni l’un ni l’autre ne pouvaient dépasser le stade de simple instrument. Trop faibles, trop manipulables. Bien trop influençable, dans le cas d’Arcann, car il se laissait trop manipuler par ses propres émotions, son frère ne glissait pas si aisément dans ce piège.

Il posa une main sur l’épaule de sa fille et l’emmena avec lui sans dire un seul mot. Désormais, ce sera lui qui veillera sur son entraînement… Il avait réfléchi à ce qu’il devait en faire et tisser de nouveaux projets, où elle se trouvait inclue. Ils allaient quitter ce monde et ces régions galactiques, à présent, il n’avait actuellement plus rien à y faire. Par ailleurs, il laissait quelques jours à ses nouveaux pions pour que les petites graines, laissées dans leurs esprits, aient le temps de germer en paix. D’ici quelques jours, le temps sera parfait pour utiliser, une première fois, le cadeau qu’il leur avait laissé. En attendant, ma fille, suis papa bien gentiment…