Stay with me

Padmé Amidala
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Un tel univers de paix n’avait jamais été troublé avant aujourd’hui, jamais il n’aurait dû l’être. Le silence leur avait été arraché. La solitude apaisante offerte pour qui la souhaitait avait été bafouée. Un sacrilège. L’orage éclatait vivement et ne cessait jamais, parfois proche, parfois longtemps. Le ricanement infâme troublait leur repos. Sa main s’était glissée dans celle de son époux, pour le retenir. Pour ne pas aggraver encore plus ce combat, pour un temps. Pour la première fois, de simple spectatrice en retrait, elle avait entrepris cette action. Osant briser la distance tacite et essentielle, entre leurs mondes. Un nouveau sacrilège. Malgré la crainte d’être emportée avec lui s’il venait d’un coup à revenir auprès des vivants et tomber. Certains malheureux étaient ainsi arrachés à leur univers, ils sombraient, tombaient, chutaient, dans un ultime cri avant de disparaître. Peu d’entre eux avaient eu la grâce de revenir.

Reste avec moi, murmura-t-elle en le sentant bouger.

L’orage n’était pas à portée. La créature vicieuse non plus. Retenir son époux lui était étrange, elle pouvait à la fois le toucher et ne pas le faire. Il était là sans être là. Ils restaient séparés. Ce n’était qu’une illusion, pour elle, une image vague, qu’elle ne parvenait pas à cerner avec exactitude. Comme un de ces rêves flous, qui ne cessait de vous échapper. Un feu étrange, dans un monde où plus rien ne transcendait. Elle essayait de saisir cette image, sans certitudes. Ce monde… lui était si loin… Le leur était apaisant, le temps ne s’y écoulait plus, ils dérivaient souvent presque sans conscience, dans une plénitude totale… Jusqu’au jour où ce monstre s’était introduit chez eux et que leur univers s’était fendu d’un si violent orage. Tout avait été bouleversé. Tous étaient éveillés. Tous redoutaient les retombées.

Elle resserra la main, comme elle le put, sur celle d’Any. Un désir, encore formulé, qu’il reste… Plus longtemps encore… Qu’il demeure là, avec elle, qu’il ne devienne un des leurs et ne disparaisse pas… Elle s’appuya contre lui, en le tenant par le bras et en posant la tête sur son épaule. Oui, ils pourraient demeurer là, tous les deux… Ne souffrait-il pas, dans l’ancien monde ? Ne voulait-il pas que cela cesse ? Il pourrait rester… Rien que tous les deux… Sans plus se préoccuper de rien… Une fois cette force destructrice disparu, ils retrouveront la paix… Rien que la paix… Plongés dans un semi état de conscience éternel, où nul soucis ne venait percer la voûte de leurs âmes. Il ne souffrirait plus… Il n’aurait plus besoin de se battre… N’était-il pas venu jusqu’ici, dans cette ultime transgression, pour cesser enfin le combat ?

Pourquoi veux-tu reprendre le combat ? reprit-elle, toujours de cette voix lointaine, d’outre-tombe. Reste… Reste avec moi… Tu ne souffrirais plus jamais, ici…

Le murmure lui arracha un très long frisson. Il tourna doucement la tête vers elle, lorsqu’elle s’agrippa à son bras et posa la tête contre son épaule. Elle qui était restée en retrait, depuis le début de cette aventure improbable, elle s’était soudainement approchée, l’avait retenu par la main alors qu’il cherchait à atteindre la créature. Il ne savait plus…. Comment… Ils se tenaient au bord du précipice, face à eux, telle une gigantesque éruption d’un volcan, la Force se déchaînait. Le parasite avait perdu en taille et en vitesse, Anakin sentait que la fin était proche. Il devrait y aller… Mais Padmé… Pétrifié sur place, il n’osait même pas la toucher lui-même. Elle était… Si… Glacée… Il sentait la différence entre eux deux, lui était ravagé d’un feu permanent, elle était devenue aussi froide que la glace, quasi immatérielle. Si froide… Sa voix résonnait comme un écho, comme si elle se trouvait si loin de lui…

"Pourquoi veux-tu reprendre le combat ? Reste… Reste avec moi… Tu ne souffrirais plus jamais, ici…"

Il frissonna à nouveau, retournant le regard vers l’éruption titanesque. Rester… Rejoindre ce monde… C’était un souhait qu’il avait si souvent formulé, sans jamais le concrétiser. Retenu par la colère, la haine, tout d’abord, puis retenu par l’espoir de retrouver son enfant ensuite. Aujourd’hui, tout était très différent… Il ne savait plus ce qu’il voulait. Plus rien ne le retenait d’en finir, en vérité… Son fils était devenu un Jedi, sa fille avait rejoint un autre camp et peut-être changera-t-elle par la suite. De nombreuses personnes combattaient farouchement l’Empire de Palpatine. L’Ordre avait chuté mais se reconstruisait. Il avait brisé l’influence de Sidious sur lui. Plus rien ne le retenait… Mis à part ce combat-ci… Cette ultime haine, ce… D’autres pourraient le combattre et en finir… Mais…

Il ne restait que cela, affronter son passé en face, le détruire s’il le fallait, pour être enfin en paix, sans plus de regrets. Son basculement, la guerre, le massacre, les traques… Il ne cherchait pas à se faire pardonner de tout cela et ne recherchait pas non plus d’excuses, n’éprouvant ni regrets, ni remords sur ces sujets. Avec sa famille, une sorte d’équilibre avait été trouvé. Ce n’était pas la plus belle situation qui soit, une famille parfaite comme on pouvait en rêver, mais c’était la sienne et il était inutile de regretter. Les troubles liés à sa naissance même, eux, n’étaient pas résolus. Le parasite demeurait. Et pourtant, il était si tentant de laisser tomber… Une bonne fois pour toute… Oublier tout ça, laisser cette victoire au scientifique fou et se laisser avaler par la Force. Rester là. Il reposa une nouvelle fois le regard sur son épouse, puis osa poser une main contre une des siennes.

"C’est à cause de lui que je suis né, Padmé."

Il ignorait si elle était déjà au courant… Peut-être pouvait-elle apprendre ce qui arrivait chez les vivants. Ou peut-être n’en savait-elle rien et qu’en temps normal, ce monde demeurait totalement hermétique au leur. Ils aimaient tous se rassurer en se disant que ceux déjà pris par la Force continuaient de veiller sur eux… Mais depuis qu’il était ici, Anakin songeait que c’était une simple illusion de réconfort. Aucun des morts qu’il avait rencontré ne semblait savoir quoi que ce soit du monde des vivants, comment pourraient-ils veiller sur leurs proches ? La très grande majorité d’entre eux n’avaient qu’à peine conscience de cet univers, alors l’autre… La Force veillait sur eux, d’une certaine manière, mais pas ceux et celles déjà partis.

"J’aurai dû quitter l’Ordre dès notre mariage," souffla-t-il avec peine. "Vivre avec toi, travailler dans autre chose, oublier les Jedi. Tu n’aurais pas eu à souffrir."

Padmé Amidala
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C’est à cause de lui que je suis né, Padmé.

Comment cela, à cause de lui ? Elle ne comprenait pas… Les yeux mis-clos, tournés vers la tempête et ce parasite, elle ne voyait guère de lien entre lui et son époux… Celui là-bas n’était qu’un simple monstre. Elle referma les yeux, sentant la chaleur par la main qu’il avait enfin posé sur la sienne. La transgression était à la fois belle et malsaine, ils ne devraient pas se toucher, non… Elle avait la faiblesse de céder car il était déjà si proche de la rejoindre. Mais il n’en serait pas de même pour leurs enfants, qu’elle ne voudrait voir arriver ici si jeunes. S’ils s’amusaient à faire comme leur père, elle leur dirait de rentrer immédiatement… Anakin avait, lui, déjà posé un pied dans leur monde depuis des années, elle l’attendait depuis lors… Elle l’avait vu passer, si brièvement, avant qu’il ne disparaisse une fois de plus, échappant à son regard…

J’aurai dû quitter l’Ordre dès notre mariage. Vivre avec toi, travailler dans autre chose, oublier les Jedi. Tu n’aurais pas eu à souffrir.

L’Ordre nous aurait oublié. Mais pas lui.

Elle releva une main pour la poser contre la joue de son mari et le faire regarder dans ses yeux. Elle ajouta, d’un ton bas et doux, que Palpatine ne l’aurait jamais oublié et aurait poursuivi ses desseins, qu’il quitte ou non l’Ordre, peu importe où il comptait vivre, comment et avec qui. Qu’il n’aurait pas laissé leur famille en paix. Voire qu’il aurait pu mettre la main sur leurs enfants dès leur naissance. Ce n’était pas une solution. Elle rebaissa ensuite la main, pour la poser contre lui, au torse. Il était toujours si brûlant… Cette vie pulsante était étrange, presque désagréable… Brutale… Trop éloignée de la douceur de son monde… Cette chaleur la révulsait, malgré son désir de demeurer proche d’Anakin.

Je ne souffre plus. Oublie le passé. Ces peines. Tu pourrais être en paix, toi aussi. N’est-ce pas ce que tu désires réellement ? Cesser de souffrir ? Reste…

Elle lui prit les deux mains pour les serrer contre elle, aussi harassée par la chaleur qu’il dégageait que lui devait l’être par la froideur qu’elle donnait. Il n’avait qu’un pas à franchir, une seule décision à prendre, et ainsi, il ne souffrira plus jamais. Il lui suffisait d’avancer, d’abandonner tout le reste. Laisser ce corps martyrisé là, un souffle l’agiter une dernière fois, puis s’éteindre…

"L’Ordre nous aurait oublié. Mais pas lui."

Il eut un très long frisson. Plus encore lorsqu’elle posa sa main glacée contre sa joue, en le regardant au fond des yeux, tandis qu’elle donnait les autres arguments en défaveur de cette idée. Sidious… Encore et toujours… Lui et Plagueis… La colère revenait remplacer la torpeur, rattrapé par ce sentiment puissant d’injustice, mêlé de haine. Une vie volée, dès la naissance, une erreur de la nature… Il détourna tout de même le regard vers la tempête, pris par l’odeur abominable, secoué par la colère et l’envie de vengeance. Elle ne souffrait plus, oui. Mais lui… Il frissonna encore, quand elle lui serra les mains, rebaissant la tête sur elle. Il pourrait cesser d’en souffrir, il voulait cesser de souffrir, plus que tout ! Il voulait mais il ne pouvait… Mourir et leur céder cette victoire-ci… Il n’avait pas fait suffisamment la paix avec lui-même pour plier pour de bon.

"Je ne peux pas," souffla-t-il.

Le désir d’en finir était incroyablement puissant, assez pour le tirer abominablement vers ce monde. Mais la colère restait la plus forte. Trop ancrée, trop phénoménale, trop puissante pour qu’il puisse accepter de mourir. Il pencha la tête pour embrasser sa femme, longuement, ignorant l’impact de la froideur contre son âme brûlante. L’embrasser comme la première fois, avec intensité et amour, pour lui dire au revoir. Il reviendra… Dès que le contact fut rompu, en douceur, il se sentit vaciller… Sa femme disparu, sur un ultime sourire, tout se troubla. Comme une longue chute, brutale, avant qu’il ne sente brusquement son corps. Anakin rouvrit les yeux, le souffle court, mais le cœur apaisé. La vision claire, pour la première fois depuis si longtemps. Il s’assit lentement dans le lit d’hôpital et se frotta les yeux. Tout était si… calme…

Dans cette chambre d’hôpital, rien ne bougeait. Les quelques machines auxquelles il était relié bipaient faiblement, à intervalles réguliers. Dans un coin, une horloge numérique indiquait qu’ils étaient en début de soirée et sur l’écran à côté, en veille, une lumière brillait discrètement. Il entendit des gens passer dans le couloir en bavardant, avant de s’éloigner. Plus de brumes, plus d’esprit… Plus cette odeur, pour le moment. Plus de parasite en vue. Il commença par retire machinalement les quelques perfusions qu’il avait dans le bras, puis les électrodes surveillant sans doute les fonctions vitales. Débrancher la machine commençant aussitôt à s’affoler se fit dans la foulée. Il en était à remettre son masque respiratoire habituel, quand un médecin entra vivement dans la pièce, affolé.

"Qu’est-ce qui se pa… Oh, vous êtes réveillé ! Mais, eh, attendez, il ne faut pas se lever comme ça !"

"Pourquoi ?" marmonna Anakin en commençant à s’habiller.

"Vous venez de passer plus de trois mois dans le coma, c’est…"

"Je sais," le coupa-t-il avec agacement. "On m’a proposé de décéder, c’était tentant, mais j’avais encore trop de colère pour ça. "

"Pardon… ?"

"Foutez le camp."

Même si ce n’était pas lancé sur le ton de la menace, le médecin eut un petit sursaut et ressortit immédiatement. Bon débarras. Il termina de se préparer puis se leva. S’il sentait encore une certaine faiblesse, ça n’avait rien de comparable avec une personne sortant d’un véritable coma. Preuve qu’il n’avait en rien subit une maladie ordinaire. Trois mois… Il n’avait en rien réalisé le temps qui s’était écoulé. En sortant de la chambre, il en fit sursauter un autre, qui ne s’attendait visiblement pas à ça. Tout le monde était déjà au courant qu’il se trouvait dans un autre monde, durant tout ce temps, ou bien… ? Il avança d’un pas mesuré dans les couloirs, l’esprit encore ailleurs. Retrouver ses marques dans le monde réel était… Extrêmement étrange… Il sentait à peine ses propres jambes. En revenant dans la partie où se trouvaient les différents bureaux des officiers, il passa devant le sien, hésita un bref instant, puis poursuivit sur sa lancée.

C’est aux abords de la cantine des officiers qu’il trouva une tête familière, le colonel Yularen. Il alla à sa rencontre, le plus naturellement du monde, comme s’il était prévu qu’il se réveille subitement aujourd’hui et parte ensuite de l’hôpital, dans la foulée.

"Vous avez l’air fatigué," lança Anakin en l’observant. "Ce n’est pas terminé, le monde réel va bientôt… Retrouver le parasite… Que s’est-il passé, ici ? Où en est la guerre contre Sidious ?"

Songeur, Wullf attendait patiemment que la machine finisse de lui préparer sa tasse de caf’, le regard rivé sur son bloc de données personnel. Parmi les entrées traditionnelles, attendues, se trouvaient aussi parfois des remarques, ou des incidents, auxquels il fallait parfois être attentif, parfois répondre au plus vite. Déléguer les tâches aux bonnes personnes, compétentes, était l’activité qui occupait le plus clair de son temps. Il avait une bonne équipe, fiable, sur laquelle il pouvait compter. Hélas, il y avait parfois des… spécimens qui nécessitaient une attention plus particulière, peut-être personnelle. Le capitaine Fel, malgré ses états de services excellents et ses actes bienveillants… spontanés commençait à doucement entrer dans cette catégorie. Si les Chiss travaillant sur Nirauan commençaient à sincèrement apprécier travailler avec lui, il y avait tout un tas de petites choses, notamment dans son comportement, qui commençaient à doucement irriter certains de ses supérieurs et collègues. Yularen releva la tête en entendant le bip caractéristique de la machine et finit par se saisir de sa tasse avant de doucement se diriger vers le couloir. Il serait plus à l’aise assis, pour traiter tout cela.

Il y avait, notamment, un rapport circonstancier sur l’état des simulateurs de la base. Ou bien ces fois où il avait simplement ignoré les plans établis à l’avance, pour agir par lui-même. Son forcing, répété, pour lancer des missions dangereuses, aux risques élevés. Une chance, finalement, que sa dernière escapade ne se soit pas plus mal terminée… Il allait falloir en discuter avec l’intéressée, et cette simple pensée lui extirpa un profond soupir, las. C’est en relevant une nouvelle fois la tête de l’écran, pour boire une gorgée de son café fumant, qu’il aperçut approchant la silhouette d’un revenant. Ses lèvres se plissèrent, ses yeux s’arrondirent, les poils sa moustache commencèrent à le gratter… Mais qu’est-ce qu’il foutait là, lui ? Il ne devrait pas être alité ? Son regard fusa derrière Skywalker, espérant y voir un médecin débouler pour le ramener dans sa chambre. Rien de rien.

« Vous avez l’air fatigué… » finit par lui dire Skywalker…

Comme si tout était parfaitement normal, qu’il ne sortait pas d’une sorte de coma éveillé long de trois mois ; Comme si son corps ne s’était pas désacclimaté à se mouvoir, à marcher. Ces sensitifs… C’était l’hôpital qui se foutait de la charité…

« … et vous bien vivant, pour quelqu’un de perdu chez les morts. » parvînt-il à rétorquer, en venant lever le menton, ravalant sa salive.

« Ce n’est pas terminé, le monde réel va bientôt… Retrouver le parasite… Que s’est-il passé, ici ? Où en est la guerre contre Sidious ? »

Que… De quoi ? Wullf fronça les sourcils, plissa du nez, oubliant presque pendant un instant qu’il avait une conversation avec un type qui venait littéralement de passer trois mois à parler avec les morts, et à chasser ce qui devait rester de Plagueis... Oui, quelque chose de tout à fait normal, du genre que l’on fait tous les jours. Le parasite ; Pas terminé… Plagueis… Plagueis allait encore revenir ? La Force n’en avait-elle pas assez, pour laisser ce type revenir d’entre les morts, pour venir les emmerder une fois de plus ? Qu’est-ce qu’ils lui avaient fait, pour qu’elle s’acharne de la sorte sur leur pauvre galaxie ?! Ne pouvait-on pas juste le faire disparaître à jamais, pour le bien de tous ?

« Vraiment ? » lança-t-il plus bas, autant inquiet que décontenancé par la nouvelle. « Savez-vous où, et quand ? »

Il fit signe à Skywalker de le suivre, que ce n’était pas très sain d’avoir cette discussion dans un couloir où ils pourraient être écoutés. Wullf préférait garder cette information confidentielle, pour le moment, en attendant que Thrawn décide d’une marche à suivre. C’était préférable, surtout s’ils ne pouvaient rien y faire, pour le moment. Il le guida un peu plus loin, dans un bureau vide, qui n’était pas le sien. Là, il proposa à Skywalker de s’asseoir, par crainte de voir ses jambes cesser de le supporter. Il tira lui-même une chaise, pour s’installer, les deux coudes posés contre le rebord du bureau.

« Thrawn a essayé de vous l’expliquer, à plusieurs reprises. D’autres, aussi, ont essayé. » reprit-il, pour lui faire un résumé complet, cette fois-ci. Le pauvre devait avoir d’autres choses à faire que de simplement écouter ce qui se passait dans le monde des vivants. « Il y a eu peu d’évolutions, concernant l’Empire. Ce qui s’est passé, avec la mort de Plagueis, a essentiellement gelé les lignes de front. La majeure partie de la galaxie sombre doucement dans le chaos. Les fidèles de Sidious, eux, ont commencé à se retirer vers les lignes commerciales, pour protéger la Bordure Médiane, épargnée par les troubles. »

Il reprit l’explication depuis le début. D’abord l’effet sur les sensitifs, comme Kravhenn et les jedis, qui avait dû également impacter Sidious, d’une façon ou d’une autre. Puis sur les changements climatiques violents, et brutaux, à travers toute la galaxie ; Ses conséquences, sur le système économique, commercial ; Les populations, forcées de quitter leur monde, dans la plupart des cas, pour trouver refuge dans les zones plus saines, ou sur les planètes fortes économiquement, et en mesure de trouver des parades, sur le court terme. Les actions des forces de l’Empereur, pillant et abandonnant ces mondes jugés sans importance, pour établir des bastions, et fermer les verrous de la Bordure Médiane. Le fait que seuls des mondes comme Coruscant, Alsakan ou Metellos, possédant des systèmes de gestion du climat à l’échelle planétaire, parvenaient à lutter efficacement contre ce fléau. Que d’autres, comme Alderaan, où se trouvait Organa, avaient pris des mesures rapides et efficaces pour enrayer la catastrophe, sans pour autant parvenir à totalement se démarquer. Il parla aussi de ce qu'ils savaient des jedis et de la Rébellion, maintenant que Kravhenn était revenue parmi eux et avait pu lui remettre un rapport sur ce qui s'était passé pendant son séjour parmi eux.

« C’est essentiellement ici, dans l’Espace Sauvage et au-delà, que les choses évoluent. Le Grand Amiral Thrawn est parti étudier une nouvelle menace en votre absence, dans les Régions Inconnues. Il est revenu il y a peu, si vous souhaitez discuter de cela, tous les deux. » reprit-il, en buvant une gorgée du café, toujours trop serré. «  A la condition que le médecin certifie que vous êtes en état pour quitter l’hôpital. X»

Vivant, oui, il était vivant… Toujours très confus, soyons honnête… Il ne ressentait pas très bien son propre corps, avec toujours cette impression de marcher sur un sol instable, voire du vide, plutôt que sur du béton. Tout était étrange, déstabilisant, trop, trop… Trop « dur » et déroutant. Il ne savait plus où il en était, ni vraiment où il se trouvait, décontenancé par tout ça. Tout ce dont il était sûr, c’était de reconnaître la tête de ceux qu’il avait toujours connu, dont Yularen, un bloc certain, dans cet océan de confusion. Le monde des vivants était… Trop riche… Trop confus… Trop coloré… Trop vivace… ne agression permanente… Il secoua la tête, incapable de dire où le parasite reviendra. Quand, bientôt, oui, bientôt… Mais il ignorait la date précise… Mais il s’affaiblissait, c’était certain, il s’affaiblissait, Plagueis ne pouvait lutter seul et éternellement contre la Force ! Il s’affaiblissait mais là, mais dans quel état reviendra-t-il ici…

Il suivit le colonel sans rien dire, avant qu’ils n’aillent s‘asseoir dans un bureau, appartenant à il ne savait qui. Là, le vieil homme se mit à tout lui expliquer. Anakin n’avait absolument aucun souvenir de qui que ce soit venu lui parler de ce qui arrivait… Peu importe… Le chaos, il l’avait vu, même si ce n’était certainement pas le même que celui auquel il avait assisté. Cette… Tempête… Le chaos du monde réel n’était rien en comparaison de ce qui agitait la Force elle-même… Il s’efforça de se concentrer, de comprendre ce qui se passait, de se reconnecter au monde réel. A ces bouleversements, ces ondes qui s’organisaient ou sombraient dans la folie, sur les zones épargnées, celles qui ne l’étaient pas, sur les actions entreprises et sur la difficulté de retrouver la stabilité. Un chaos ambiant rappelant si fortement la pandémie… Et les Jedi… Parfois, il avait cru en voir des vivants, passer comme des ombres…

"C’est essentiellement ici, dans l’Espace Sauvage et au-delà, que les choses évoluent. Le Grand Amiral Thrawn est parti étudier une nouvelle menace en votre absence, dans les Régions Inconnues. Il est revenu il y a peu, si vous souhaitez discuter de cela, tous les deux. A la condition que le médecin certifie que vous êtes en état pour quitter l’hôpital."

Il allait bien… Parfaitement bien… Confus, mais tout allait bien… Il ne fallait qu’un… Bref temps d’adaptation… Il se frotta doucement le visage, puis reposa le regard sur les mains, serrant très doucement les poings. Il était en vie… Et le monde réel était bien là, puissant et pesant… C’était effrayant. A force de naviguer dans cette océan aussi brut, bercé par la Force durant un temps qui lui avait semblé infini, retrouver le monde réel était bouleversant.

"Le chaos du monde réel n’est rien face à… Vous savez, j’ai vu la… J’ai tout vu… J’ai vu la Force et Plagueis se déchaîner dans un combat titanesque, j’ai participé à… J’ai combattu… Puis il y a eu cette poussée, cette transgression ultime et… Je suis arrivé là où reposent les disparus… Là où le parasite s’était infiltré, troubler leur repos… C’est un pur sacrilège, vous savez ?? J’ai… Vu Tarkin, aussi… Il ne m’a rien dit, la présence du fou le dérangeait bien plus."

Un rire nerveux, incontrôlable, lui échappa. Oh, le vieux militaire n’avait pas été ravi de sa présence mais celle du parasite avait très largement attisé sa colère, bien plus que tout autre. Il stoppa d’un coup son rire, en respirant avec difficulté. Le monde réel, rester connecté au monde réel… Il se prit la tête entre les mains, l’espace d’un instant. Le monde réel… Encore piégé dans un état seconde, entre les deux, il lui était difficile de se rattacher à la vie.

"Il a transgressé un monde de paix, où les défunts peuvent somnoler paisiblement et éternellement, sans plus avoir à se soucier de rien… Notre monde n’est que brûlure, pour eux tous… Vous le savez ? C’est une transgression ! Je ne… Je ne pouvais pas accepter d’y demeurer. Mais je sais que le fou va revenir, il n’a pas la puissance nécessaire pour remporter le combat. Il ne peut pas mourir, il ne peut plus mourir, il en a trop fait, il faut… Le sceller. Le… Il a été trop loin, la mort ne ne veut plus de lui. Vous n’avez aucune idée de son odeur."

Il s’interrompit brièvement, pour reprendre son souffle et fixer son regard sur Yularen. Pour s’aider à conserver un pied dans le monde des vivants. S’y ancrer, définitivement.

"Ma femme m’a proposé de mourir et rester avec elle et je ne… Je n’ai pas pu… J’ai encore des enfants. Vous savez que j’ai des enfants ? Ils sont grands, maintenant… Vous êtes sûr que vous allez bien ? C’est que vous avez une tête bizarre. Qu’est-ce que qui vous ennuie à ce point ? Vous avez eu des problèmes ?"

Yularen essaya de paraître parfaitement serein, et impassible face au récit quelque peu personnel que lui énonçait Skywalker, tout en se demandant fortement, intérieurement, s’il n’était pas préférable de discrètement faire appeler le service médical, pour l’aider à se calmer. Il semblait délirer, devant lui, comme toujours en conflit avec ce qu’il venait de vivre. Il n’était pas psychothérapeute, et ne voyait pas trop quoi lui répondre. La Force était… quelque chose d’indiscernable, vraiment. Pour lui, ça restait cette entité bizarre que les sensitifs appelaient pour les aider. Une arme, ou quelque chose du genre. Si Skywalker n’avait pas évoqué l’existence d’un véritable monde parallèle, en quelque sorte, il aurait jugé cela parfaitement inconcevable. Parce que ça n’avait pas de sens, et qu’il pouvait très simplement délirer, dans un état second. Wullf cherchait toujours du regard, par ailleurs, si un infirmier n’allait pas débouler dans le couloir en hurlant que Skywalker s’était échappé.

« Il a transgressé un monde de paix, où les défunts peuvent somnoler paisiblement et éternellement, sans plus avoir à se soucier de rien… Notre monde n’est que brûlure, pour eux tous… Vous le savez ? C’est une transgression ! Je ne… Je ne pouvais pas accepter d’y demeurer. Mais je sais que le fou va revenir, il n’a pas la puissance nécessaire pour remporter le combat. Il ne peut pas mourir, il ne peut plus mourir, il en a trop fait, il faut… Le sceller. Le… Il a été trop loin, la mort ne ne veut plus de lui. Vous n’avez aucune idée de son odeur. »

Plagueis avait une odeur ? Sérieusement ? Qu’est-ce que c’était encore que cette histoire… Yularen but une plus grande gorgée de caf’, pour faire passer cette idée saugrenue… A moins que… Peut-être qu’elle était là, la solution pour retrouver ce fou ? S’il avait une… odeur, peut-être Skywalker pouvait la suivre ? Il cligna des yeux, pour ne pas souffrir devant une telle image, et se contenta d’hocher doucement de la tête. Il n’avait absolument pas la moindre idée de ce qui était une transgression ou non, dans le monde des morts. Il était parmi les vivants, et comptait bien le rester encore quelque temps. Ce qui l’étonnait le plus finalement, dans tout ça, c’est que la Force ne semblait pas se soucier de ce que quelqu’un avait accompli dans sa vie. Que Tarkin, ce fou, puisse s’y trouver au milieu des autres… Mmmh. Il laissa ses doigts glisser, songeur, a l'extrémité de sa moustache.

« Je pense comprendre ce que vous voulez dire, hélas, personne n’a semblé pouvoir l’en empêcher réellement, » reprit-il, en essayant de se concentrer pour de bon. « Je ne vois, à ma connaissance, aucun moyen de le sceller indéfiniment sans le tuer, ou sans prendre le risque qu’il se libère, ou que quelqu’un vienne le chercher. Vous dîtes qu’il a une… odeur. Peut-on la traquer, d'une quelconque manière ? »

Et par conséquent, déterminer son point de chute ? S’assurer que personne ne soit là pour le réceptionner à nouveau ? Surtout pas un autre fou ?

« Ma femme m’a proposé de mourir et rester avec elle et je ne… Je n’ai pas pu… J’ai encore des enfants. Vous savez que j’ai des enfants ? Ils sont grands, maintenant… Vous êtes sûr que vous allez bien ? C’est que vous avez une tête bizarre. Qu’est-ce que qui vous ennuie à ce point ? Vous avez eu des problèmes ? »

« Leia, sur Alderaan, et Luke, auprès des Jedi. Oui, je suis au courant. Votre fils ne s’est pas échappé du BSI tout seul, » rétorqua-t-il, en retenant un long soupir. Pauvre homme, il semblait totalement perdu, déphasé du monde réel… « Je vais mieux que vous il semblerait, en tout cas. Vous n’auriez peut-être pas dû quitter l’infirmerie si brusquement, si vous voulez mon avis… »

Il pensait de plus en plus sérieusement à faire venir un médecin. Si Skywalker ne se souvenait plus très clairement de ce genre de choses, alors que c’était clairement l’une des raisons, si ce n’est LA raison pour laquelle il était venu chercher de l’aide auprès de Thrawn… qui sait ce qui pourrait bien se passer, ensuite. Mais bon, il ne l’écouterait sans doute pas, à quoi bon…

« Mon affaire vous semblera bien dérisoire, en comparaison. » reprit-il, donc, presque à contrecœur. « Un problème de discipline, de la part d’un personnel émérite et brillant. Si son attitude pouvait être tolérée lorsqu’il agissait seul et n’impliquait pas ses collègues, l’irresponsabilité du capitaine Fel devient un problème lorsque, en tant qu’instructeur, il se doit de montrer l’exemple à ses élèves comme à ses confrères. Sa liste d’infractions s’allonge, et son comportement a déjà commencé à déteindre dans son entourage. Pour le bien de tous, il ne faudrait pas que sa tendance régulière à l’insubordination ne se répande au reste de la troupe. »

Profond soupir. Las.

« C’est une emprise militaire, peuplée essentiellement de militaire. Non de vulgaires pirates. Que cela lui plaise ou non, la discipline se doit de rester la norme. »

Non, non, il allait très bien… Vraiment ! Il était juste encore un peu… Décalé… Mais ça passera… Il secoua un peu la tête, n’éprouvant aucun besoin de retourner s’allonger ou juste prendre du repos. Ses jambes le soutenait, quand bien même il avait l’impression de marcher sur du coton. Il se mouvait comme il voulait, même si là aussi, il avait le sentiment d’avancer dans un brouillard épais, appuyant contre ses membres. Le colonel était fatigué, lui aussi. Et finit par lui expliquer pourquoi. Un problème de discipline, ah… Avec Sion, Apsara, Thrawn ? Oh, non, Fel. Il était vrai que lui aussi faisait partie de la liste. Anakin s’efforça de se concentrer. Une affaire actuelle pouvait aider à revenir pleinement chez les vivants, après tout.

"Sa liste d’infractions s’allonge, et son comportement a déjà commencé à déteindre dans son entourage. Pour le bien de tous, il ne faudrait pas que sa tendance régulière à l’insubordination ne se répande au reste de la troupe. C’est une emprise militaire, peuplée essentiellement de militaire. Non de vulgaires pirates. Que cela lui plaise ou non, la discipline se doit de rester la norme."

Il n’avait du tout changé, alors… Lorsque Anakin avait entendu parler de lui, dans l’Empire, c’était autant pour ses capacités comme soldat que pour sa nette tendance à l’insubordination… Il n’avait jamais été renvoyé simplement car l’Empire avait besoin d’hommes de ce talent et surtout car ses actes lui avaient conféré une certaine aura, dans la Flotte. Se débarrasser de lui n’aurait fait que briser la confiance de pas mal d’hommes en l’Empire. On ne comptait plus les fois où le sergent avait été renvoyé devant la cour martiale, les séjours en quartiers disciplinaires ou prison militaire…

"C’est un Corellien," dit-il d’un ton légèrement pincé. "Plus l’Empire a tenté de briser cet état d’esprit, plus il l’a renforcé. J’ai pu entendre, il y a des années, Tarkin annoncer que Fel avait pulvérisé le record du nombre de passages en cour martiale. Je ne pense même pas qu’il doit faire exprès d’en entraîner d’autres… Je ne pense même pas qu’il réalise, seulement, l’influence qu’il peut avoir sur les autres."

Se concentrer… Il se frotta un peu les yeux, de nouveau, sentant la fatigue s’abattre un peu plus. Pourtant, il restait loin du malaise. Fel, Fel… Un cas « particulier », comme on disait. Anakin pensait vraiment que ce gars ne se rendait compte de rien. Il était bien trop du genre à foncer en avant, sans penser à toutes les conséquences, sans réfléchir à sa propre situation.

"Il va certainement vous répondre qu’il n’influence personne. Vous avez déjà essayé de l’enfermer dans un bureau, le temps qu’il prenne des cours sur la discipline et la diplomatie ?"

Et ce n’était pas une blague, il pensait sincèrement qu’avec ce genre de personnes, c’était littéralement le seul moyen de leur faire apprendre ça. Fel n’apprenait jamais rien, quand il terminait dans une cellule, c’était acté depuis très longtemps…

« C’est un Corellien… Plus l’Empire a tenté de briser cet état d’esprit, plus il l’a renforcé. J’ai pu entendre, il y a des années, Tarkin annoncer que Fel avait pulvérisé le record du nombre de passages en cour martiale. »

Le visage de Yularen se ferma tout à coup, lèvres pincées. Ce n’était pas une raison ! Les origines de telle ou telle personne ne devaient pas conditionner la largesse que l’on donnait aux conséquences de ses actes ! D’autres avaient finis au fond d’un caniveau dans les sous-sols de Coruscant pour bien moins que ça, sous l’Empire. Bien qu’il soit heureux pour eux qu’il n’ait pas subi ce genre de sort pour ses débordements, que Fel ait pu s’en sortir aussi facilement représentait un scandale en soi. S’il suffisait juste de crier haut et fort que l’on était Corellien, Tarisien ou il ne savait quoi pour se croire au-dessus des règles, cette base se transformerait bien vite en anarchie… Bon, en l’état, ce n’était pas un drame non plus, la situation restait sous contrôle, et Fel avait trouvé une nouvelle occupation avec le jeune Chiss, arrivé il y a peu avec Thrawn. Yularen osait y croire, même s’il se doutait que ça ne durerait pas, là encore. Il n’avait vraiment aucune volonté d’en faire un exemple non plus. Ce genre de méthodes avaient peut-être encore cours dans l’Empire, ce n’était plus vraiment le cas ici. Il rumina, sans vraiment commenter quoi que ce soit. Son attitude suffisait à faire passer le message.

« Il va certainement vous répondre qu’il n’influence personne. Vous avez déjà essayé de l’enfermer dans un bureau, le temps qu’il prenne des cours sur la discipline et la diplomatie ? »

L’officier y songeait, oui, d’une certaine façon. Il se redressa un peu, surpris qu’une proposition de la sorte vienne de Skywalker. Ce n’était plus vraiment son genre depuis des décennies. Il doutait même que ça l’ait été, avant l’Empire. Lui, toujours prêt à se jeter dans les ennuis, à régler les problèmes par les actes plutôt que par les mots, proposait de faire donner des cours au capitaine Fel ? C’était… bizarre, à croire que ce qu’il avait vécu pendant son « coma » avait fini de le changer, sur certains points. Ou du moins, le bouleverser un peu. Bon, si cela durait, ce serait probablement pour le mieux. Skywalker faisait déjà de nombreux efforts, depuis qu’ils l’avaient récupéré. Finissant son caf’, Yularen regarda le fond de sa tasse.

« J’y ai songé, d’une certaine manière. L’interdire de vol pendant un temps fait aussi partie des possibilités. Je doute, néanmoins, que les volontaires se pressent au portillon, pour lui donner ce genre de cours. Je vais encore y réfléchir, à moins que vous ne souhaitiez en parler avec lui au préalable. »

Yularen doutait fortement que Skywalker se porte volontaire pour ce genre de choses. Son passif, dans ces domaines, était au mieux douteux. Enfermer Fel ne mènerait à rien. Cela avait déjà été tenté à de nombreuses reprises, sans succès. Oui, peut-être que le lui faire comprendre suffirait… Mais vu son caractère… Mh. La situation était compliquée. Mais parfaitement anodine, en comparaison de ce qu’avait vécu son interlocuteur. Il ne voulait pas le perturber plus qu’il ne l’était déjà.

« Bref, ce n’est pas le plus important, là, maintenant, » reprit-il, en tapotant doucement du doigt sur la table. « Thrawn doit être informé de votre réveil, à présent. Je vous conseille de retourner vous allonger, ou bien d’aller lui parler directement de ce que vous avez vécu, comme vous l’avez fait avec moi. »

Oui, nul doute que Thrawn souhaiterait connaître comment il allait, et entendre de vive-voix ce qu’il lui était arrivé là-bas maintenant que Skywalker avait les idées plus claires.

« Il a ses méthodes, vous le savez bien. Il pourrait discerner quelque chose que vous n’auriez pas vu, ou mal compris. »

"J’y ai songé, d’une certaine manière. L’interdire de vol pendant un temps fait aussi partie des possibilités. Je doute, néanmoins, que les volontaires se pressent au portillon, pour lui donner ce genre de cours. Je vais encore y réfléchir, à moins que vous ne souhaitiez en parler avec lui au préalable."

Il haussa les épaules, ne se sentant absolument pas concerné par ce genre de discussions. Il ne supervisait pas Fel et était déjà, de toute façon, trop habitué à entendre ce genre d’histoires qu’il n’y prêtait plus la moindre attention ! Au moins, ça en faisait un capable de prendre des initiatives, alors à quoi bon s’en préoccuper ? Pas très important, en effet, il suffira de peu de choses pour arranger le cas ! Quant à retourner s’allonger… Il lança un long regard blasé au colonel, à cette suggestion. Et puis quoi encore ! Pourquoi tous ceux qu’ils croisait s’étonnaient autant de le voir debout ?! Il n’était pas tombé dans un coma normal, exigeant tant de soins ! Il n’avait fait que se fondre dans la Force et fréquenter des morts, rien de plus ! En quoi une affaire aussi banale pouvait bien les choquer, sincèrement…

En parler avec l’amiral, capable de « discerner quelque chose » de plus, pourquoi pas, sinon. Il haussa à nouveau les épaules, en disant que ça pouvait être une idée. Même s’il ne voyait pas ce qu’il pourra bien en tirer de plus. Tout ça était un combat, une bataille violente et enragée, sans plans ni quoi que ce soit. Il salua le colonel, plus tranquillement, avant de repartir dans les couloirs. Tout se poursuivait, il le pressentait, le ressentait, même s’il n’en voyait plus rien. Comme une… Pression. Un sentiment qu’il ne contrôlait pas. Plongé dans ses pensées à nouveau, il se perdit deux fois, revint sur ses pas, puis se souvint finalement où étaient les bureaux des officiers. Dont le sien, d’ailleurs, il se souvint de son existence au moment de passer devant. Un bureau qui ne servait pas souvent, c’est le moins qu’on puisse dire.

Il trouva bientôt celui recherché et s’annonça, avant d’attendre l’amiral. Là encore, tout était affreusement calme, c’était dérangeant. En même temps, il faisait chaud, sans cet air glacé permanent, circulant tout autour d’eux. Il ne prêta aucune attention aux décorations habituelles et changeantes non plus, pas du tout intéressé par l’art. C’est peu de temps après que Thrawn arriva, en enfilant sa veste d’uniforme. Alors qu’Anakin était en train de vérifier, sur un petit appareil accroché à son bras, s’il respirait bel et bien. Ça semblait être le cas. Il se retourna vers lui avec un léger temps de retard. Comme pour le colonel, revoir cet homme en vrai était étrange. Tous les vivants, comme les fantômes il y a si peu de temps, lui donnaient l’impression d’appartenir à un autre monde.

"Grand Amiral," le salua-t-il sobrement.

Détail dérisoire pour eux tous, mais important pour lui, son interlocuteur avait une ombre. Ça aidait à comprendre qu’il était bel et bien revenu dans la réalité. Les morts n’en avaient aucune. Il n’y avait rien, pas d’ombre frappante, pas de lumière éclatante, toujours une simple brume grisâtre et éternelle. Entourant des vallons, montagnes, canyons et vallées… Un salut que l’amiral lui rendit, avant de demander ce qui l’amenait. Anakin cligna rapidement des yeux, pour revenir à la réalité.

"Je l’ai déjà dit au colonel, Plagueis va revenir," maugréa-t-il. "Il est maudit… Il est bien trop une infection pour que la mort elle-même en veuille. Il, il… Son odeur… Il a cette odeur, absolument terrible. Je ne sais où, ni quand, mais il sera bientôt recraché, il faiblit. Je l’ai frappé, poursuivi, il a parlé… Il m’a dit « Pourquoi cet air si sérieux ? Souris, parce ça embrouille les gens. Souris, parce que c'est plus facile que d'expliquer ce qui te ronge de l'intérieur. » C’est un fou !"

Cette réponse-là lui était restée marqué au fer rouge, dans sa mémoire, même avec tout ce qui s’était passé depuis lors. Il l’avait effrayé, angoissé, rendu malade de haine et de désespoir…

"Certains défunts ont essayé d’aider… D’autres poursuivaient leur sommeil… Vous savez que tout le monde va au même endroit ? Sensitif ou non, peu importe qui a commis quoi durant sa vie, tous les âges, toutes les races sans aucune exception, c’est… Ils ignorent tout des vivants. Ma femme voulait que je reste. Le combat se poursuit. Ça dérange les morts. Vous sauriez décrypter ce combat ?"

Thrawn était en train de s'entraîner, dans un petit dojo conçu pour son usage personnel, avec deux droïds de combat programmé dans ce but, quand il entendit sonner à la porte de son bureau. Après avoir prononcé la commande d'arrêt de ses deux adversaires, il alla voir qui demandait à le rencontrer, alors qu'il n'avait aucun rendez-vous de programmé. Haussant un sourcil en voyant de qui il s'agissait, il ouvrit la porte, prenant ensuite une serviette pour s'éponger rapidement la sueur du visage. Il attrapa ensuite sa veste de grand amiral, l'enfilant en gagnant son bureau pour rejoindre le général Skywalker, pendant que des oeuvres de Naboo, statues et peintures, flottaient dans les coins de la pièces.

"Grand Amiral," prononça l'ancien jedi.

"Général, que puis-je pour vous ?" Lui répondit le chiss, comme si l'humain n'avait pas passé les derniers mois cloués sur un lit d'hôpital, l'invitant à s'asseoir sur une des chaises, pendant qu'il faisait de même derrière son bureau.

"Je l’ai déjà dit au colonel, Plagueis va revenir. Il est maudit… Il est bien trop une infection pour que la mort elle-même en veuille. Il, il… Son odeur… Il a cette odeur, absolument terrible. Je ne sais où, ni quand, mais il sera bientôt recraché, il faiblit. Je l’ai frappé, poursuivi, il a parlé… Il m’a dit « Pourquoi cet air si sérieux ? Souris, parce ça embrouille les gens. Souris, parce que c'est plus facile que d'expliquer ce qui te ronge de l'intérieur. » C’est un fou !"

"Cela, je l'ai constaté lors de ma première rencontre avec "lui". J'ai toujours, après cela, averti l'Empereur de la menace que le seigneur Plagueis pouvait peser contre l'Empire, en vain."

Et la pandémie qui suivit avait prouvé qu'il avait eu raison de se méfier du sith. Un tel aveuglement de la part de l'empereur n'était pas normal, surtout qu'il avait aidé les recherches du muun fou. Et il avait semblé surpris par l'action de ce dernier, une fois que l'existence de son virus fut révélée. Thrawn s'interrogeait parfois sur les raisons de cet aveuglement et se demandait quels étaient maintenant les plans de l'Empereur vis à vis de ses confrères sith.

"Certains défunts ont essayé d’aider… D’autres poursuivaient leur sommeil… Vous savez que tout le monde va au même endroit ? Sensitif ou non, peu importe qui a commis quoi durant sa vie, tous les âges, toutes les races sans aucune exception, c’est… Ils ignorent tout des vivants. Ma femme voulait que je reste. Le combat se poursuit. Ça dérange les morts. Vous sauriez décrypter ce combat ?"

"Je ne peux interpréter correctement quelque chose que je n'ai pas vu. Mais il y a une forme de logique en tout, même dans la folie de Plagueis. Il me faudrait davantage d'information sur lui pour arriver à mieux le comprendre, même s'il est possible qu'il n'agisse que pour se soulager d'une souffrance, selon ce qu'il vous a dit ?"

Hélas, les seuls à même de lui fournir ces informations sont l'Empereur Palpatine et son maître dont on en sait encore moins. Et il y a peu de chance que le vieil homme accepte de transmettre une information au chiss ou a son ancien bras droit. Thrawn, comme Anakin Skywalker, savent tous les deux combien il est rancunier.

"En attendant, je suis content de vous revoir sur pieds, général, et pas uniquement parce que j'ai besoin de vos services, contre l'Empire et cette présence obscure qui s'étend doucement dans les Régions Inconnues. Et je suis sur que cette nouvelle va ravir certains jedi. Désirez-vous leur faire parvenir un message ?"

Thrawn avait un respect sincère pour les compétences d'Anakin, malgré son impulsivité et son manque de vision à long terme. C'était un guerrier très efficace, un pilote aguerri et qui savait se faire respecter par ses hommes. La preuve étant, selon les informations du général Yularen, que certaines troupes impériales étaient dans le désarroi de savoir que le seigneur Vader n'était plus aux côtés de l'Empereur mais dans le camp des "traîtres". Non que cela les incite davantage à déserter mais cela fait peser un doute et c'est un élément important sur le champs de bataille.

"Je ne peux interpréter correctement quelque chose que je n'ai pas vu. Mais il y a une forme de logique en tout, même dans la folie de Plagueis. Il me faudrait davantage d'information sur lui pour arriver à mieux le comprendre, même s'il est possible qu'il n'agisse que pour se soulager d'une souffrance, selon ce qu'il vous a dit ?"

Il haussa les épaules et agita vaguement les mains, sans avoir aucune idée de quoi répondre à ça. Personne, à part l’Empereur, sans doute – et encore ! – ne savait rien du passé du Muun fou, hormis sa planète de naissance. Ni comment il était tombé dans le côté obscur, ni pourquoi, ni ce qui l’avait poussé à entreprendre tout ça, ni comment il avait repéré son apprenti, ni… Bref, rien… La seule chose dont il était sûr, c’était que ce dingue se complaisait volontairement dans sa folie… Ce qui avait encore moins de sens… Quelque part, alors, il contrôlait quand même cette folie, pour mieux y plonger ? Ce serait possible ?! Parce que bon, se soulager d’une souffrance… Ce sale type lui donnait plutôt le sentiment d’en profiter largement pour ses desseins, au lieu de vouloir y échapper.

"En attendant, je suis content de vous revoir sur pieds, général, et pas uniquement parce que j'ai besoin de vos services, contre l'Empire et cette présence obscure qui s'étend doucement dans les Régions Inconnues. Et je suis sûr que cette nouvelle va ravir certains jedi. Désirez-vous leur faire parvenir un message ?"

"Pourquoi faire ?" grommela-t-il avec étonnement. "Ravir certains, vous en avez de bonnes, vous ! Non, il n’y a pas de temps à perdre. Votre présence obscure qui s’étend, ça ne peut être que Vitiate, je n’ai aucune preuve mais j’en suis sûr. Plagueis possède la technique pour ce genre de poison mais pas la puissance devant aller avec, il a forcément été aidé et cette aide, un seul Sith est capable de la lui fournir aujourd’hui. Ce type connaît parfaitement les Régions Inconnues, sans doute mieux que vous, il a eu des siècles à disposition pour ça. On sait qu’il vient d’ici. Pour ce que j’avais pu en parler avec Obi-Wan, la dernière fois, deux Jedi et un gamin sont allés sur un monde qu’il dirigeait autrefois et formait la base de son Empire. Lorsque Plagueis sera éjecté dans la réalité des vivants, Vitiate tentera certainement de le retrouver le premier. Le Muun sera sûrement plus facile à repérer, mais Vitiate… Il a déjà eu trop de temps pour agir dans l’ombre et personne n’est parvenu à savoir ce qu’il fichait."

Il reprit son souffle, après cette tirade. Encore très secoué par les événements récents mais refusant tout net d’admettre qu’il ferait mieux de se reposer. Ça pouvait très bien attendre. Les Rebelles, les FID en partie et d’autres s’occupaient déjà très bien de l’Empire de Palpatine, il ne se faisait pas encore de soucis là-dessus. Quand bien même il s’inquiétait énormément que son ancien maître laisse passer tranquillement autant de choses…

"Le Chaos est un endroit parfait," soupira-t-il en reportant le regard sur l’amiral. "Pour un type comme lui. Des sociétés soit très militarisées, soit simplement agressives, c’est un terreau de rêve pour un Sith. Ce sont des nations aisées à se mettre dans la poche, s’en faire des alliés, ou juste pour travailler avec elles, conclure des traités de non-agression, ce genre de choses. Ça me m’étonnerait pas que votre peuple et d’autres se lient avec un Empire qu’il dirigerait, sans que ça ne cause de soucis à personne. Ce qu’il faut, c’est réussir à trouver et capturer tous ceux possédés, pour les exorciser. Si Vitiate est tué, alors qu’un de ses pantins est toujours sous contrôle, ça ne servira à rien. Mais ça peut aussi bien des chefs de faction qu’un petit politicien du coin, que personne ne connaît ou ne soupçonne, d’où l’énorme problème… Palpatine use de la même méthode. Le Muun fait ça aussi mais lui, au moins, ne se sert que d’un seul corps à la fois, visiblement. Si on parvient à retrouver le fou les premiers, puis le suivre, ça pourra peut-être mener jusqu’à Vitiate."

Pari risqué. Personne ne savait où ni quand le fou sera éjecté. Mais ça restait une des rares pistes valables.

Anakin se foutait bien, au fond, de savoir qui en voulait à Plagueis, exactement, pour en faire quoi, encore, après tous ces problèmes. La seule chose qui l’intéressait, c’était de le traquer, le capturer et le sceller dans un holocron ou n’importe quel système pouvant faire l’affaire, avant de jeter le tout dans un trou noir ! Peu importe quelle version du Muun allait revenir, si la Force le leur recrachait à l’âge de trois mois, ça sera le même tarif ! Il grommela donc que ça n’avait pas d’importance, tant que ce foutu sorcier était stoppé, une bonne fois pour toutes. Mais ce n’était pas le seul problème à régler… Il fallait aussi se soucier de la source de l’empoisonnement, de ce qui avait permis d’en arriver à une situation aussi grave… Si Anakin mettait la main sur le crétin abyssal qui avait abattu Plagueis au lieu de le sceller…

"Mais pour cette présence obscure, j'hésite aussi que Vitiate est l'ennemi le plus probable, même si cela n'est pas forcément son aura que vous pourriez ressentir. Las événements survenus ici et là sont probablement aussi son œuvre, ce "dragon" repéré par l'Agent Ruby, le petit Inari du lieutenant Kravhenn. Le sort subit par la planète Espolia. J'estime que ce que tout le monde ressent n'est pas le sith mais sa dernière expérience en court et qu'il a prit le contrôle de différents peuples dans le but de protéger celle-ci."

Là encore, Anakin haussa les épaules, jugeant ce détail absolument sans importance. Que ça soit la trace d’une ou plusieurs expériences, du sorcier lui-même ou on ne savait quoi, la menace était exactement la même ! Il laissait tout le plaisir à Thrawn de réfléchir à ce genre de trucs, pour sa part, sa seule motivation était de partir et combattre ! Il avait déjà perdu bien assez de temps comme ça et était pressé de reprendre la traque, dans le monde réel, cette fois. Ne rien pouvoir faire lui portait gravement sur les nerfs et il n’avait aucune intention de rester dans un bureau à attendre que d’autres fassent le travail à sa place. L’amiral parla tout à coup de Sion et il fallut une bonne minute à Anakin pour se souvenir de qui il parlait. Ce type était arrivé en plein milieu de son voyage psychédélique et il avait bien du mal à y raccrocher ses souvenirs.

"Le mort-vivant ? Très bien, ce type est techniquement immortel, ça aidera beaucoup, il pourra se reconstituer tout seul s’il reçoit une bombe."

Difficile d’avoir un soldat aussi pratique que celui-là, pour ce type de missions ! Inutile, ainsi, d’avoir non loin une équipe médicale prête à intervenir en renforts ! Une semaine, ça laissait assez de temps pour revenir complètement dans le monde réel et aussi faire quelques préparatifs, en plus de pouvoir parler à ce Sion et apprendre à mieux le connaître. Au moins, c’était un Sith et un soldat, ça n’aura rien de compliqué de travailler avec lui. Toujours pressé d’enfin reprendre les affaires, il confirma simplement à l’amiral qu’il lui fera un rapport écrit de ce qui s’était passé durant son voyage, au cas où il arriverait à repérer des trucs intéressants grâce à ça, qui pourraient aider, sait-on jamais. S’il n’avait rien d’autres à ajouter, Anakin comptait bien repartir de là aussi sec et filer se préparer.