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Le petit détour pour aller voir comment allait Sion lui avait surtout permis de voir qu’il avait encore du mal à faire la différence entre ce qui était sensé se manger ou non. Il n’allait pas toujours très bien, avec ça, la lieutenant lui avait signalé qu’il fallait être patient car leur nouveau venu déchiqueté des failles entendait des voix. Enfin, sa voix, à lui, de quand il était plus jeune. C’était, heu… Bizarre. Et le plus bizarre, c’est que leur zombie favori pouvait aussi arrêter de respirer quelques heures quand il filait s’entraîner dehors. Incroyable. La bonne nouvelle, c’est que le lieutenant parvenait à l’apaiser, on dirait bien. Ça changeait ! Sion avait encore pas mal à faire, de toute façon, entre s’éduquer à la vie, à la société, aux technologies de cette époque et ainsi de suite, il n’était pas sorti des ronces. Depuis qu’il s’habillait, ça lui donnait enfin un air normal.

Il passa dans la section nord, pour aller vers les bureaux des officiers supérieurs, où il avait rendez-vous avec l’amiral. Mmh, chaque fois qu’il venait ici, c’était pour se faire engueuler, comme la dernière fois avec le colonel. Bon, celle-là était méritée. L’avant-dernière fois, bien moins, enfin, tous les instructeurs ajoutaient ou modifiaient des programmes, dans les simulateurs, pourquoi c’était sur lui qu’on râlait ? Et la fois d’avant, mince, c’était pourquoi, déjà… Il ne se souvenait déjà plus… Oh, bon, ce n’était pas très important. En plus, il n’avait rien fait de mal ou de bizarre depuis au moins deux semaines, quand même ! Jusqu’à aujourd’hui, quoi. Il s’arrêta devant la porte avant d’annoncer sa présence et être invité à rentrer. Dommage que le petit n’ose pas, ou qu’il pense que ça dérange trop. Il ne fallait pas être si gêné, tout de même.

"Bonjour, amiral Thrawn."

Les saluts et politesses de base, presque mécaniques, tant il les avaient répété dans sa vie. Ce bureau était toujours aussi bizarre, n’empêche ! Il ne connaissait aucun autre gars ayant autant de trucs de décoration ou d’art affiché un peu partout, sur son espace de travail. Et des machins de tous les styles possibles, ça donnait une impression étrange. Il y avait des holos de statues de tous poils, dans tous les sens, on avait l’impression de se retrouver chez un professeur. L’art, lui, ça ne lui disait rien. Sauf l’art de foncer en chasseur sous les boucliers car c’est plus rigolo comme ça, évidemment. Rah là là, Syal entendrait ça, elle lui crierait qu’elle voudrait l’achever elle-même.

"Je viens vous voir pour le petit," lança-t-il d’emblée après les saluts formels. "Parce qu’il n’ose pas encore venir demander seul. On le prend chez nous, le soir, pour qu’il ne reste pas sans cesse seul à l’hôpital et on a un peu parlé de sa famille. On cherche à savoir s’il pourrait y avoir encore certains de ses membres en vie, ses parents avaient peut-être des frères ou des sœurs. Ou ses grands-parents, je n’en sais rien. Comme vous portez le même nom de famille, je me suis dit que vous sauriez peut-être des choses sur ce sujet. Ou sinon, dire qui, sur place, pourrait aider à ces recherches-là. Il doit bien il y avoir des traces quelque part, c’est impossible qu’un vaisseau civil se soit fait pulvériser sans que personne n’en parle ou ne s’en rende compte, à l’époque."

Il allait sans doute lui répondre qu’il se mêlait encore de tout, mais boarf, tant pis, ça valait la peine d’essayer. Ce n’est pas comme si c’était l’unique piste à suivre.

"Il faudrait que quelqu’un de confiance puisse l’accompagner, sur place, mais… Enfin, vraiment de confiance, il est fragilisé, il ne faut pas qu’il lui arrive de mal ! Il n'a que neuf ans et il est tout petit. Enfin, je sais que vous n'allez pas lui faire de mal, mais c'est juste qu'il n'est pas encore très à l'aise."

"Bonjour, amiral Thrawn."

"Bonjour, capitaine. Asseyez-vous."

Thrawn n'était pas dérangé par Soontir Fel, étant occupé à étudier une sculpture, ou plutôt son hologramme car l'original se trouvait dans un musée. D'autres tournoyaient doucement à d'autres emplacement de la pièce, près des murs. Thrawn préparait sa prochaine action contre l'Empire et avait besoin de certaines informations que des services de renseignement ne pouvaient lui fournir.

Pour le moment, la situation était stable au sein des cinq mondes conquit par les FID. Ansion et Kalaan avaient même décidé de les soutenir, ce qui n'était pas surprenant pour le second où le peuple non-humain avait repris le contrôle de son monde. L'usine d'extraction de Kril'dor n'avait pas subi d'attaque de l'Empire. Il y avait moins à attendre de Namadii, Gilater VII où des manifestations -parfois avec de la violence sur Gilater VII- avaient lieu contre les FID par une partie de la population. Mais l'Empire ne pouvait tenter de les reprendre tant qu'Ansion était sous la protection de Thrawn. Et l'Empereur ne semblait pas d'humeur offensive, alors qu'il était malade et affaibli. C'était surprenant et le grand amiral soupçonnait plusieurs choses, bien qu'incapable de savoir ce que mijotait le vieil homme.

"Je viens vous voir pour le petit. Parce qu’il n’ose pas encore venir demander seul. On le prend chez nous, le soir, pour qu’il ne reste pas sans cesse seul à l’hôpital et on a un peu parlé de sa famille. On cherche à savoir s’il pourrait y avoir encore certains de ses membres en vie, ses parents avaient peut-être des frères ou des sœurs. Ou ses grands-parents, je n’en sais rien. Comme vous portez le même nom de famille, je me suis dit que vous sauriez peut-être des choses sur ce sujet. Ou sinon, dire qui, sur place, pourrait aider à ces recherches-là. Il doit bien il y avoir des traces quelque part, c’est impossible qu’un vaisseau civil se soit fait pulvériser sans que personne n’en parle ou ne s’en rende compte, à l’époque."

"Cela n'a pas été le cas. L'un des rôles de la Flotte d'Expansion est d'enquêter sur toute disparition hors des frontières de l'Ascendance chiss. D'après une discussion que j'ai eu avec l'amiral Ar'alani, celle du jeune Nuru et de sa famille n'a pas été résolue, et même si aucun vaisseau n'est à la recherche d'information, tous les appareil de la Flotte d'Expansion gardent un oeil ouvert au cas où une piste surgirait."

Lui-même n'a jamais été chargé d'enquêter sur ce cas  mais il savait les consignes qui étaient données aux capitaines de la Flotte d'Expansion. Les disparitions restaient rares, heureusement, mais il restait difficile d'en expliquer chacune, et le cas du jeune Kung'urama'nuruodo était encore plus particulier : il était bien rare de découvrir qu'un survivant avait été adopté par la République ou les jedi.

"Il faudrait que quelqu’un de confiance puisse l’accompagner, sur place, mais… Enfin, vraiment de confiance, il est fragilisé, il ne faut pas qu’il lui arrive de mal ! Il n'a que neuf ans et il est tout petit. Enfin, je sais que vous n'allez pas lui faire de mal, mais c'est juste qu'il n'est pas encore très à l'aise."

"Et vous êtes la meilleure personne pour l'accompagner, capitaine, ou y aller en son nom s'il n'ose encore se rendre sur l'Ascendance. Je le comprend," répondit Thrawn aussitôt, avec un sourire poli.

Il fit disparaître les statues et une holo-carte de cette partie de la galaxie apparue, avec la position de Nirauan et des frontières de l'Ascendance bien visible, ainsi qu'un petit point rouge, proche de Nirauan, et qui représentait le destroyer de classe Imperial-I Rancor, qui fait la liaison entre Nirauan et Csila.

"Le Rancor sera de retour d'ici deux à trois jours et devrait repartir dans dix jours, cela vous laissera le temps de vous préparer." Le grand amiral parlait comme si son interlocuteur avait déjà accepté, mais il ne doutait pas que l'humain le fasse, pour le bien du jeune chiss. "Bien sur, vous n'irez pas seul. Le docteur Thasuin et Neslia viendrons avec vous pour vous servir de guide et traducteur."

Les deux chiss sont engagés dans les FID, même si Thrawn leur affecte plutôt des missions dans les frontières de l'Ascendance. Généralement, il s'agit juste d'avoir des nouvelles ou une estimation du moral et de l'opinion de la population. Parfois, c'était un peu plus, comme l'assistance portée auprès de Lorana ou une enquête sur le groupe ayant attenté à la vie de cette dernière, enquête qui n'a apporté aucune preuve jusqu'à présent mais dévoilé, pour le grand amiral, l'existence d'un groupe farouchement anti-sensitif au sein de l'Ascendance, et soutenu certainement par de puissants politiciens.

"Je vous conseille de chercher en premier lieu auprès du clan Kung, dont Nuru est l'un des membres. Son vrai nom est, d'ailleurs, Kung'urama'nuruodo, Guraman en simplifié. Je le lui ai déjà dis. Bien, cela étant réglé, le colonel Yularen m'a parlé de votre dernière *mission*. Pourriez-vous me faire votre rapport, capitaine ?"

Heu… Lui, par contre, directement ? Il ne parlait même pas la langue ! Et ne connaissait pas du tout ces planètes, s’y repérer allait être une galère sans nom ! Il n’y avait pas, plutôt, quelqu’un de ce peuple qui pourrait aider, au moins pour… Il secoua légèrement la tête, une moue aux lèvres, en marmonnant qu’il ne parlait absolument pas leur langue, mis à part deux ou trois mots à la volée, ça allait être difficile. Puis l’amiral ajouta que deux Chiss viendront avec lui. Ah ! Dans ce cas, c’était mieux, oui ! Dix jours, alors… Il n’espérait pas vraiment que le petit accepte de venir avec lui, malheureusement. De toute façon, il avait encore besoin de se reposer, physiquement et émotionnellement. Il mémorisa le nom complet, en hochant la tête. Pourvu, par contre, que ce clan ne soit pas, hum… Disons, très anti-sensitifs. Ça allait déjà être assez dur de leur faire avaler qu’un des leurs était revenu d’entre les morts.

"Bien, cela étant réglé, le colonel Yularen m'a parlé de votre dernière *mission*. Pourriez-vous me faire votre rapport, capitaine ?"

Mission, le terme était assez exagéré, il avait plutôt fait du forcing. Soontir savait bien qu’il allait sûrement se faire engueuler une nouvelle fois, mais malgré ça, il ne regrettait toujours pas une seule seconde d’avoir tenté le tout pour le tout.

"Eh bien, j’ai surpris en passant une conversation qui ne me regardait pas, où j’ai entendu qu’un de mes élèves, Nosig, se retrouvait prisonnier, avec la lieutenant-colonel Cyone," commença-t-il, sans essayer de cacher ses tords là-dedans. "Étant donné les risques, pour eux, et la difficulté d’organiser une mission de sauvetage, au vu des circonstances, j’ai fait du forcing pour pouvoir y aller quand même. Avec quelques hommes qui ont accepté de me suivre. On s’est assez vite repérer mais sur place. Heureusement, Nosig était encore en vie et ils se sont servit de lui comme intermédiaire, pour traduire. Comme ils l’avaient bien traité, je me suis dit qu’ils devaient sans doute craindre l’Ascendance et, hum… Bon, je les ai un peu impliqué oralement pour faire peur à ce peupl. Ça a fonctionné, pour récupérer Nosig, mais il était déjà trop tard pour la lieutenant-colonel."

Au moins, il n’avait pas impliqué directement les FID, les ordres étaient respectés, là-dessus, ce peuple n’avait officiellement rien à leur reprocher. Bon, par contre, désolé pour l’Ascendance. Même si ces affreux n’allaient sans doute pas les attaquer comme ça. Ils avaient rendu le petit très facilement, ça montrait bien la peur que leur inspirait les Chiss. Pratique, quand même, sans ça, il aurait eu bien plus de difficulté.

"La méthode employée n’était pas la bonne. J’ai agi comme j’estimais le devoir, quitte à devoir partir seul, si personne n’avait accepté de se lancer avec moi."

Autrement dit, s’il assumait les conséquences de ses actes, il ne comptait pas non plus mentir en affirmant qu’il était navré et ne le refera plus jamais. Il avait comme une impression de déjà-vu, en tout cas… C’était arrivé de multiples fois, ici ou ailleurs, de se retrouver face à un de ses supérieurs hiérarchiques, pour justifier d’une mission, d’un comportement ou autre chose, suivant les circonstances. Cela dit, il comprenait bien que le colonel l’ait très mal pris, pour ça et tout le reste. Il n’était pas le seul à en avoir assez.

"Eh bien, j’ai surpris en passant une conversation qui ne me regardait pas, où j’ai entendu qu’un de mes élèves, Nosig, se retrouvait prisonnier, avec la lieutenant-colonel Cyone. Étant donné les risques, pour eux, et la difficulté d’organiser une mission de sauvetage, au vu des circonstances, j’ai fait du forcing pour pouvoir y aller quand même. Avec quelques hommes qui ont accepté de me suivre. On s’est assez vite repérer mais sur place. Heureusement, Nosig était encore en vie et ils se sont servis de lui comme intermédiaire, pour traduire. Comme ils l’avaient bien traité, je me suis dit qu’ils devaient sans doute craindre l’Ascendance et, hum… Bon, je les ai un peu impliqué oralement pour faire peur à ce peuple. Ça a fonctionné, pour récupérer Nosig, mais il était déjà trop tard pour la lieutenant-colonel. La méthode employée n’était pas la bonne. J’ai agi comme j’estimais le devoir, quitte à devoir partir seul, si personne n’avait accepté de se lancer avec moi."

"Même si je salue votre sens de la camaraderie, capitaine Fel, je suis bien d'accord avec vous : votre méthode n'était pas la bonne. Même si vous avez sauvé l'enseigne Nosig, qui n'était pas en si danger immédiat car sinon il serait déjà mort à votre arrivée, vous nous avez mis dans une position délicate. L'Ascendance prendra ombrage si jamais cela leur arrive aux oreilles. Et ce peuple aussi quand il découvrira que vous l'avez dupé. En bref, votre initiative a été un fiasco diplomatique, qui peut nous priver d'alliés, dont un très puissant."

Le chiss regardait son interlocuteur calmement, comme un officier instructeur qui regarde son élève et lui explique ses erreurs.

"Si nous avions encore été au sein de l'Empire de Palpatine, je vous aurais certainement fait passer par la cour martiale, mais j'ai besoin de vos talents de chef, capitaine, aussi vais-je laisser passer, pour cette fois." Le ton se fit un peu glacial sur ces trois derniers mots, afin que le corellien comprenne bien que, la prochaine fois, il ne s'en tirera pas aussi bien. "De fait, vous pourrez profiter de votre voyage au sein de l'Ascendance pour tâcher d'améliorer nos relations avec mon peuple. Je vous conseille donc de vous renseigner un peu sur les coutumes chiss avant de vous y rendre, et de vous trouver des vêtements civils. Mon peuple risque de ne pas apprécier de voir un militaire étranger se promener ainsi chez eux."

Le chiss se renfonça dans son fauteuil, allumant l'holo-émetteur de son bureau, pour afficher une carte du système Phoobos.

"Bien. La mission du lieutenant-colonel Cyone n'a pas été approuvée. Mais je ne peux pas accepter que les Phoobaemons la tuent pour autant. Elle est allée les voir au nom des FID, faisant de facto de sa personne notre représentante. Nous devons donc effectuer des représailles, d'une part car nous passerons pour une force faible aux yeux des autres peuples, d'autre part pour leur faire oublier vos mensonges. Quel plan d'attaque proposez-vous, capitaine ? Et selon vous, jusqu'à quel point devons nous les frapper pour qu'ils comprennent ?"

Le chiss croisa les doigts, regardant son interlocuteur. Thrawn ne comptait pas le faire diriger ces représailles car il tenait à le faire lui-même, et en profiter pour faire un exemple de ce qui arrive quand on s'en prend à un membre des FID. Mais il tenait à ce que Soontir Fel comprenne un peu l'importance de ses actes, pour une fois.

Pas en danger immédiat, ça, ils n’auraient pu le savoir avant de se rendre sur place, malheureusement. Pour le reste, c’était certain et il n’avait pas de défense là-dessus, comme il n’avait, de toute façon, pas eu de plan, sur le coup. C’était complètement improvisé, selon ce qu’il avait sous la main. Soontir s’attendait un peu à tout, comme sanction, pour cette affaire. Déjà surpris que le colonel n’en ait pas donné immédiatement et encore plus surpris que l’amiral laisse passer « cette fois ». Il faillit rétorquer que ce n’était pas normal, par contre, puis ravala cette réponse un millième de seconde avant qu’elle ne franchisse ses lèvres. Il y avait des moments, comme celui-ci, où il était largement préférable de la boucler. Il se demandait quand même s’il arrivera à être plus… A se retenir, si un coup pareil se représentait un jour. Il n’était vraiment pas fait pour être diplomate.

"De fait, vous pourrez profiter de votre voyage au sein de l'Ascendance pour tâcher d'améliorer nos relations avec mon peuple. Je vous conseille donc de vous renseigner un peu sur les coutumes chiss avant de vous y rendre, et de vous trouver des vêtements civils. Mon peuple risque de ne pas apprécier de voir un militaire étranger se promener ainsi chez eux."

Entendu. Enfin, il ne voyait pas bien comment il pourrait améliorer des relations entre les deux factions alors qu’il partait juste à la recherche d’une famille en particulier. Surtout, ça ne serait pas mieux que ça soit quelqu’un qui les connaisse déjà, a minima, ou qui soit connu chez eux ? Parce que lui, mis à part ceux de la base, il n’y connaissait personne. Il en discutera avec le sergent, avant de partir, c’était le plus ouvert, là-dessus. Dix jours, ça laissait déjà un peu de temps pour parler de tout ça, même si ça ne suffira pas à bien connaître le sujet. Mais bon, en toute logique, Soontir ne devrait pas rester très longtemps sur place. L’amiral afficha ensuite une carte de Phoobos, le faisant légèrement se crisper.

"Bien. La mission du lieutenant-colonel Cyone n'a pas été approuvée. Mais je ne peux pas accepter que les Phoobaemons la tuent pour autant. Elle est allée les voir au nom des FID, faisant de facto de sa personne notre représentante. Nous devons donc effectuer des représailles, d'une part car nous passerons pour une force faible aux yeux des autres peuples, d'autre part pour leur faire oublier vos mensonges. Quel plan d'attaque proposez-vous, capitaine ? Et selon vous, jusqu'à quel point devons-nous les frapper pour qu'ils comprennent ?"

Un plan, eeer… Du genre, un plan stratégique, un vrai, pas juste foncer dans le tas en tirant sur tout ce qui bouge ? Ce n’est qu’à ce moment qu’il eut une véritable sueur froide, mal à l’aise, d’un seul coup. Il n’en avait jamais fait ! Au contraire, lorsqu’il avait attaqué des bases, avec son unité, dans l’Empire, le plan était justement de ne pas en avoir, pour mieux surprendre l’ennemi. Personne ne lui avait jamais demandé ça, en plus. D’une part car il était un simple pilote, pas un chef de guerre, ensuite car son tempérament y incitait encore moins. Il resta une bonne minute à fixer la carte, muet, en cherchant quoi répondre. Les seuls plans qu’il avait pu faire, dans sa vie, c’était donner l’angle d’attaque en arrivant sur une cible quelconque et quelle formation appliquer, rien de plus. Les grosses batailles, ce n’était pas son boulot, de les gérer, il n’avait jamais été formé pour ça.

"Anéantir complètement, ça ne servirait à rien," finit-il enfin par dire, d’un ton hésitant. "S’ils ont assez peur d’une nation pour ne plus oser l’attaquer ensuite, il suffit de leur inculquer cette peur dès le début. Et les laisser la transmettre aux autres, ensuite."

Il aurait très franchement préféré se retrouver en cour martiale, se faire hurler dessus durant des heures ou même finir dans une cellule, plutôt que devoir donner son avis sur un sujet pareil. Il n’était pas un haut officier, ne commandait aucune bataille d’envergure et sans aucune intention de le faire un jour, n’avait pas l’âme d’un grand chef et ne voyait pas non plus pourquoi des personnes accepteraient de le suivre dans une telle affaire. Une simple mission avec quelques hommes, d’accord, mais ça ! C’était bien trop demandé. Autant de raisons qu’il mourrait d’envie de lancer et se retenait avec grande peine. Si on lui reprochait déjà les fiascos diplomatiques, lui demander un plan pour ce genre de bataille allait se conclure par un fiasco militaire.

"Sinon, interroger d’abord d’autres peuples pour connaître la puissance exacte de celui-ci et leurs alliés. Ils semblaient plus attentifs sur la surveillance de ces deux points d’arrivée," ajouta-t-il en pointant du doigt deux endroits précis, sur la carte. "Ils ont un Vizir, qui les dirige, mais ils doivent avoir un monde quelque part. Cette station est simplement très importante pour eux, pour une raison ou une autre. Elle est bien défendue, ça suffit amplement contre toute attaque de pirates ou même un vaisseau plus gros leur tombant dessus. Je commencerai par attaquer et paralyser leur tour centrale, il y a une antenne, c’est de là qu’ils peuvent sans doute appeler des renforts. En lançant une attaque de front, pendant que d’autres s’occupent des chasseurs et de leurs défenses."

C’était avec ça qu’ils avaient attaqué et pris une des bases rebelles, un mois ou deux à peine avant qu’il ne prenne la décision de déserter. A la seule différence que le destroyer était loin, occupé avec des renforts inattendus de la part de la rébellion. Ça avait fonctionné. Mais là, la situation était très différente, il n’était pas pas très convaincu.

Enseigne Nosig, 19 ans

Stressé, c’était le bon mot… Se faire convoquer par un haut officier n’augurait jamais rien de bon, surtout lorsqu’on se trouvait à ce stade de sa carrière. Ou convoquer tout court, d’ailleurs, il n’y avait normalement pas de raisons à ce qu’on veuille lui parler ainsi. Il souffla un grand coup avant de pénétrer dans le bureau et saluer son supérieur comme il se doit, adoptant une attitude se voulant la plus neutre possible. Ce qui fut visiblement inefficace, car l’amiral lui demanda d’emblée de se détendre, puis de lui expliquer ce qui s’était passé, chez les Phoobaemons. Ah… ce n’est pas qu’il avait oublié, bien loin de là, mais il avait pensé que cette affaire ne serait plus abordée. Enfin, plutôt, pas avec lui. Il se demandait si le capitaine avait donné « tous » les détails, juste avant lui… Il était franc, donc c’était bien possible.

J’ai accompagné la lieutenant-colonel car elle avait besoin d’une personne pouvant parler le Taarja, amiral, commença-t-il en adoptant naturellement sa langue maternelle. Un petit côté rassurant, plutôt qu’à devoir en plus se débattre avec le Basic. Elle désirait partir à la rencontre de ce peuple pour débuter une relation diplomatique. Ils nous ont laissé approcher puis ont ensuite attaqué. Dès notre capture, nous avons été séparés. Ils m’ont interrogé sur qui j’étais et d’où je venais. J’ignore ce qu’ils lui ont demandé, avant de l’assassiner. Ils ont laissé croire jusqu’au bout qu’elle aussi était bien traitée et simplement enfermée, mais elle… Enfin, ils n’ont posé aucune autre question, entre-temps, avant l’arrivée du capitaine Fel et ses hommes. J’ignore ce qu’ils voulaient ou attendaient.

S’il contrôlait sa voix, il ne pouvait s’empêcher de rester sur le qui-vive, par crainte de se faire engueuler. Pour n’avoir pas fait mieux, empêcher cette capture ou… Bref, de passer un sale quart d’heure. S’il gagnait peu à peu confiance en lui à force d’entraînements, de cours et de certaines missions, tout cela restait encore fragile, finalement. Il craignait toujours l’erreur qui poussera ses supérieurs à le renvoyer dans la Flotte de Défense, où il devra repartir de zéro, une nouvelle fois. Le désir de faire ses preuves allait de pair avec la crainte de décevoir. Surtout, comme il ne savait pas grand-chose, il avait l’impression d’ennuyer profondément son interlocuteur.

J’ai ensuite servi de traducteur entre eux et le capitaine, puis ils m’ont libéré, parce qu’il leur a fait peur. Je n’ai pas ou entendu grand-chose, je suis désolé.

J’ai accompagné la lieutenant-colonel car elle avait besoin d’une personne pouvant parler le Taarja, amiral. Un petit côté rassurant, plutôt qu’à devoir en plus se débattre avec le Basic. Elle désirait partir à la rencontre de ce peuple pour débuter une relation diplomatique. Ils nous ont laissé approcher puis ont ensuite attaqué. Dès notre capture, nous avons été séparés. Ils m’ont interrogé sur qui j’étais et d’où je venais. J’ignore ce qu’ils lui ont demandé, avant de l’assassiner. Ils ont laissé croire jusqu’au bout qu’elle aussi était bien traitée et simplement enfermée, mais elle… Enfin, ils n’ont posé aucune autre question, entre-temps, avant l’arrivée du capitaine Fel et ses hommes. J’ignore ce qu’ils voulaient ou attendaient. J’ai ensuite servi de traducteur entre eux et le capitaine, puis ils m’ont libéré, parce qu’il leur a fait peur. Je n’ai pas pu entendre grand-chose, je suis désolé.

"Inutile d'être désolé pour avoir fait ce que vous pouviez, enseigne," répondit Thrawn. "C'était une mission non autorisée, surtout que j'avais bien précisé que je participerais à toute première rencontre pour éviter des événements de ce genre. La lieutenant colonel est seule responsable de ce désastre."

Et il fallait espérer que cela servira de leçon aux officiers supérieurs sur la nécessité de se montrer prudent pour toute négociation avec les peuples du Chaos. Il ne faut pas les comparer aux peuples non-humains de l'Empire, qui avaient conscience de la puissance impériale et de sa rapidité à mener des expéditions punitives. Non, ces peuples là n'avaient aucune idée de cela et n'avaient jamais ou trop peu entendu parler des FID. Donc beaucoup se montreront arrogants, trop surs d'eux, violents même. Il va donc falloir insister à nouveau sur la nécessité à le laisser diriger toute négociation, jusqu'à nouvel ordre, et surtout à ne pas se promener dans les Régions Inconnus avec une simple navette.

"Et surtout, vous avez peut-être peu entendu mais vous avez vu des choses. L'agencement intérieur, l'architecture, peut-être des oeuvres, statue, tableau. Prenez votre temps pour y réfléchir et décrivez moi cela, enseigne. Si vous le pouvez, après cet entretien, voyez si vous pouvez les dessiner, même."

Enseigne Nosig, 19 ans

Inutile d'être désolé pour avoir fait ce que vous pouviez, enseigne. C'était une mission non autorisée, surtout que j'avais bien précisé que je participerais à toute première rencontre pour éviter des événements de ce genre. La lieutenant colonel est seule responsable de ce désastre.

Pincer très soigneusement les lèvres fut sa seule issue, pour retenir un long soupir de soulagement. Il n’allait pas se faire éjecter manu militari, alors… Sa supérieure hiérarchique avait connu une fin tragique et même si elle était en tord, il trouvait horrible de terminer comme ça. Pourtant, à l’école, même tout petit, on leur avait seriné les règles de sécurité, pour le Chaos, à suivre en permanence ! Mais là, elle… Les officiers qui arrivaient ici devaient les apprendre aussi, non ? Tout le monde les apprenait, en venant vivre dans ces régions… Il se retint de justesse de poser la question, ravalant toutes ces réflexions pour lui. Il trouvait les Humains très peu… Prudents… De toute façon. Enfin, tous ceux qu’il avait appris à connaître l’étaient beaucoup. Le capitaine Fel, le lieutenant Kravhenn, le général… Ils fonçaient tous dans les ennuis sans hésiter.

Et surtout, vous avez peut-être peu entendu mais vous avez vu des choses. L'agencement intérieur, l'architecture, peut-être des œuvres, statue, tableau. Prenez votre temps pour y réfléchir et décrivez moi cela, enseigne. Si vous le pouvez, après cet entretien, voyez si vous pouvez les dessiner, même.

Il ne savait pas dessiner… Peut-être faire des schémas ou autre chose, mais pas plus. En se mordillant un peu les lèvres, silencieux, il rassembla d’abord ses souvenirs. Cette base avait tout de même semblé très isolée, c’était curieux, ils n’avaient pas repéré la moindre planète à proximité immédiate. A moins que les senseurs n’aient tout pas simplement pas bien fonctionné, ça restait probable. Il lui vint à l’idée, par contre, que quelqu’un d’autre pourrait l’aider, en dessinant, s’il lui décrivait suffisamment bien ce qu’il avait vu. Bon, il y aurait forcément une marge d’erreur mais ça serait mieux que rien, non ? Maelle adorait le dessin, elle, par exemple.

La base en elle-même avait l’allure d’une fleur, commença-t-il en ayant bien conscience que présenté ainsi, surtout pour une base militaire, ça devait donner une impression sacrément étrange. Je veux dire, le principal de la structure est entouré de dizaines de plateformes, grandes et petites, comme des pétales, de tous les côtés. Tout est en métal, à l’extérieur, ça ressemble à n’importe quelle autre base spatiale du Chaos. Les bâtiments forment un grand cercle et au milieu, il y en a un plus petit et avec un bouclier. Ils ont dit qu’ils y menaient leurs réceptions.

La nausée montait, maintenant qu’il savait quel genre de « réceptions » se menaient… Quelle horreur… Des peuples de ce genre, il y en avait plein. Mais voilà, c’était le premier qu’il croisait, dans sa jeune carrière. Un début très « prometteur » pour la suite.

Je n’ai pas pu voir grand-chose de l’intérieur, ajouta-t-il en dissimulant plus ou moins bien un air contrit. La chambre où j’ai été enfermé était très simple, des murs gris, une couchette, rien de plus. Il n’y avait rien qui ressemble à de l’art, de mon point de vue. Je n’ai pas entendu grand-chose d’autres.

Si encore, il comprenait la question sur l’architecture, il ne voyait pas ce que celle sur des tableaux potentiels venait bien faire ici. Mais bon, passons.