Visite de musée

Le capitaine du Rancor avait un air… Bizarre, alors que Soontir lui donnait le déroulé des événements. Un mélange entre perplexité, inquiétude et air blasé. Il finit par marmonner qu’il avait vraiment l’art de s’attirer des problèmes, peu importe où il se rendait. Oh, ça va, hein, ce n’était pas systématique ! Ici, c’était un… Cas particulier, allons-nous dire. Le vrai problème, depuis qu’il avait été libéré, c’est bien que les Chiss avaient décidé de l’inviter à plusieurs rencontres et réunions diplomatiques, pour discuter des relations avec les FID… Comme s’il était vraiment ambassadeur alors qu’il n’était que soldat et instructeur. Ces réunions l’angoissait beaucoup, il avait peur de lâcher un truc qu’il ne fallait pas et en plus, ça s’éternisait à mort… Sale période, somme toute, il n’avait jamais été autant sur les nerfs, de toute sa vie. Tous ces trucs étaient beaucoup trop différents de ce qu’il devait accomplir d’habitude !

"Donc, là, vous faites surtout de la diplomatie ?" bredouilla le capitaine du Rancor en essayant avec force de garder un air neutre, les joues rouges tant il se retenait de rire.

"Je fais ce que je peux."

"Inutile de le préciser…"

"Bref ! Vous pourrez donner ce paquet au petit ? Ce sont des photos de ses parents et de lui aussi, quand il était tout petit."

"Quel petit ?"

"Nuru, le petit Chiss des failles, là, vous voyez ? Donnez ça à ma femme, sinon, elle lui transmettra. Merci par avance."

Son interlocuteur hocha vivement la tête, puis se détourna après avoir marmonné un « bonne journée » étouffé et de s’éloigner, une main contre la bouche. C’est quelques mètres plus loin qu’il craqua et explosa de rire, faisant sursauter certains de ses hommes. Soontir soupira, très fort, en s’éloignant. Le lieutenant-colonel attendait un peu plus loin, les bras croisés, il avait sans dû entendre toute la scène. Voir un humain avec le même uniforme que les Chiss, ça lui faisait toujours bizarre. Comme ça lui faisait bizarre que certains des soldats Chiss, rencontrés cette semaine, semblaient déjà le connaître avant même qu’il n’ouvre la bouche. Il avait surtout vu ceux ayant envoyé des messages de soutien mais n’avait vraiment compris pourquoi ils l’avaient fait… Bah, peu importe, au moins, il avait pu leur parler normalement. Sans recevoir de remarques racistes.

Ils devaient se rendre dans un musée, maintenant, pour récupérer des holos de plein de trucs… Une mission bizarre… Bon, c’est vrai que l’amiral avait toujours plein d’hologrammes, dans son bureau, avec des statues, des tableaux, des choses et des machins… Allez savoir ce qu’il en fichait ! Là encore, Soontir se demandait pourquoi il n’avait pas demandé à un des Chiss de la base de s’en occuper. Qu’il puisse lire les indications, pour commencer, puis… Ah, mais c’est vrai, son collègue du jour parlait le Cheunh, lui. Il le suivit, à l’entrée du musée, sans trop savoir où aller, quoi regarder, ni lire les cartes et plans, pour savoir où était présentée la période concernée, 3500 balais avant leur ère. Il n’y avait pas beaucoup de monde, à cette heure… L’art, ça ne lui parlait pas trop. Le seul art qu’il aimait, c’était la littérature, dégoter de bons romans. Alors que la peinture, les sculptures ou la musique, ça ne lui parlait pas.

"Vous savez à quoi ça va bien pouvoir servir, des photos d’assiettes datant de trois millénaires ?"

Il en avait entendu, parfois, sur la réputation de cet homme, dans l’Empire… Le peu de fois où il l’avait croisé, ensuite, Eli n’avait pas pu se faire une idée par lui-même. Mais la réaction du capitaine du Rancor, à elle seule, voulait tout dire. Je vous jure… Eli s’appuya contre le poteau, les bras croisés, en écoutant vaguement leur échange. C’était très grave, comme affaire, une fois de plus… Et il n’était pas certain que Fel le réalise pleinement. Qu’il le réalise tout court, d’ailleurs. Lorsqu’il revint, alors que son homologue s’étouffait à moitié de rire en s’éloignant, il gardait toujours un pas assez détendu, comme s’il ne craignait rien. Ça se passait de commentaires… Ils se rendirent ensuite ensemble dans le muse que Thrawn voulait revisiter par procuration. Le jeune homme était certain qu’il avait déjà dû venir ici, par le passé… Qu’il avait déjà dû passer des heures dans tous les musées de l’Ascendance.

Il y avait très peu de monde… A cette heure, il fallait dire… Certains jetèrent des regards plus ou moins discrets vers le capitaine, murmurant à son passage. Là encore, bien évidemment, ça avait fait le tour des informations en boucle et ça continuait ensuite. Les Stybla avaient dû être affreusement vexés, en réalisant qui était le capitaine et pour qui il travaillait, selon Thrass. Il s’arrêta dans un coin le temps de jeter un coup d’œil au plan du musée, récupéré à l’accueil, pour voir où étaient exposés les objets de la période voulue. Il devait il y avoir pas mal de pièces issues de civilisations étrangères, récupérées au cours de missions ou par les voies marchandes. Trois millénaires et quelques siècles avant leur ère… Ça correspondait à il ne savait plus grande guerre, avec l’Ancienne République, normalement. Aucune idée encore de ce qu’avait bien pu faire les Chiss à cette époque-là.

"Vous savez à quoi ça va bien pouvoir servir, des photos d’assiettes datant de trois millénaires ?"

"Oui, Thrawn s’en sert pour trouver des informations sur les cultures, les méthodes de combat et d’autres choses," dit-il en repliant le plan et en indiquant où se rendre en premier. "Étudier tout ça l’aide à mieux connaître sa cible. C’est son grand truc."

Ils commencèrent par une salle rassemblant des objets et pièces ayant appartenu à l’Ascendance. Une partie concernait le militaire, tout le restant était consacré au civil. Dans un coin, un uniforme de l’époque, ressemblant beaucoup à ceux d’aujourd’hui, à quelques détails près. Loin de ceux observés sur la fresque, en revanche. Des armes, dans une vitrine proche, quelques exemples de plaques pour les grades… Fel pouvait aussi prendre ça en photo, bien que ça ne soit pas de l’art, ça pouvait toujours être utile. Mis à part des étuis supplémentaires accrochés aux cuisses ou aux bras, il y avait peu de différences. Seuls les insignes étaient très différents. Plus petits, visiblement plus légers, dans des tons trop éloignés des actuels pour qu’il puisse deviner, sans lire les inscriptions, ce qui correspondait à quoi.

"Ce n’est pas vraiment la peine de photographier aussi les notes," ajouta-t-il en voyant le capitaine penché au-dessus. "Ou les plaques qui vont avec, il n’en aura pas besoin."

Il attendit qu’il termine, avant de le diriger vers les objets civils. Soit du quotidien, servant à l’époque, soit des appareils électroniques d’antan, soit de la décoration… Les anciens holo-communicateurs avaient une forme similaires aux actuels, mais ils étaient bien plus gros et lourds. Pas très pratique, sans compter que la portée indiquée était bien moindre. Quant aux tableaux, gravures et autres… Il avait le sentiment que les œuvres étaient plus riches en couleurs que les actuelles. Plus « vivantes ».

"Vous êtes vraiment détendu ?" finit-il par demander avec un léger soupir. "Il y a quand même quelqu’un qui a voulu vous tuer."

"Oui, Thrawn s’en sert pour trouver des informations sur les cultures, les méthodes de combat et d’autres choses. Étudier tout ça l’aide à mieux connaître sa cible. C’est son grand truc."

"Ah ouais… ?"

Il étudiait des poteries pour… Créer des stratégies de combat ? Une grimace perplexe lui monta au visage, alors qu’il se mettait à imaginer le Chiss penché sur des couverts ayant appartenu à tel ou tel peuple, avant d’en tirer la conclusion qu’ils adoraient faire des fêtes à minuit et que le moment idéal pour les surprendre était donc une heure après le début de la fête en question. Pourquoi le lieutenant-colonel n’était absolument choqué, en racontant ça ?? C’est avec une moue aux lèvres qu’il le suivit dans les escaliers, puis dans une grande salle. Il ne savait pas trop ce qu’il était sensé regarder et prendre en photos… Suivant vaguement son instinct, puis les instructions de son guide du jour. Des armes, des informes, des insignes, des schémas ou des maquettes… Ensuite, des trucs de la vie civile. C’est qu’il y avait vraiment des assiettes, dans le tas, donc il fallait qu’il les prenne aussi ?

"Vous êtes vraiment détendu ? Il y a quand même quelqu’un qui a voulu vous tuer."

"Oui, bon… Tous mes ennemis essayent de me tuer, en mission, comme tous les soldats, c’est pour ça que je ne peux pas en être choqué. C’est la première tentative d’empoissonnement, par contre, c’est vrai. Et oui, ce n’est pas pareil, une tentative de meurtre, qu’un combat en règle, mais c’est un petit détail, ça. C’est plus pénible pour Oneslia, car c’est son propre peuple, qui l’a attaquée. Si j’avais été seul visé, ça aurait pu être un simple crime raciste, totalement gratuit. Elle pense que ça à voir avec cette bande qu’ils ont déjà traqué, mais sans résultats, des anti-sensitifs."

Il parlait à haute voix mais en Basic. Bien pratique, pour le coup, avec un autre Humain, c’était si peu répandu ici qu’ils avaient l’assurance de parler tout tranquillement. Après le procès, ils en avaient beaucoup discuté, avec Thasuin et Oneslia. Elle était convaincu que ça venait d’un association, ou un truc du genre, qui agissait directement contre les sensitifs de l’Ascendance, ou proches d’elle, pour les faire disparaître, car ils considéraient la Force comme une maladie. Une organisation clairement radicalisée et dangereuse. Mais que pour le moment, rien de concret n’avait pu être découvert, mis à part l’identité d’un des médecins militant pour faire disparaître cette maladie, chez ce peuple. Ce serait eux qui auraient voulu tuer la jeune Jedi, en réalité. Enfin, l’ex-Jedi.

"En tout cas, pour la diplomatie, je pense que c’est déjà raté," grimaça-t-il en continuant à prendre des photos de trucs au hasard, un peu de tout.

Ah oui, donc même s’il arrivait – à peu près – à comprendre qu’une tentative de meurtre n’était évidemment pas la même chose qu’un combat en règle, face à d’autres soldats et dans un contexte de guerre, il ne voyait pas pour autant à quel point c’était grave. Un « détail », c’est ça ! Eli secoua un peu la tête, une main contre les yeux et une grimace blasée aux lèvres. Que ça soit pour Oneslia ou pour lui, c’était important dans les deux cas ! Laissant retomber son bras, il crut alors que Soontir l’avait pris en photo, à l’instant, lui au lieu de la vitrine derrière… Il n’avait vraiment aucune idée de ce qu’il faisait, c’est ça ? C’était les objets, qu’il fallait prendre ! Il commença au moins à prendre autre chose, mais ça se voyait qu’il n’avait aucune idée de ce qu’il faisait là. Eli secoua un peu la tête et se rapprocha, avec un léger soupir.

"En tout cas, pour la diplomatie, je pense que c’est déjà raté.

"Je croyais que vous aviez reçu des messages de soutien ? Si c’est ça, de la diplomatie ratée, pour vous… On est au-delà de l’aveuglement."

Il lui pointa du doigt ce qui pourrait potentiellement intéresser Thrawn, dans les vitrines devant eux, puis s’écarta de nouveau. Un peu de concentration, ça ne lui fera aucun mal. Enfin, ce n’était pas que sa faute, la situation devait quand même être très perturbante, en se retrouvant coincé ici et en devant, en plus, réaliser une mission dont il ne voyait pas l’intérêt. Pour lui, les musées, c’était… Malheureusement devenu une habitude. Thrawn avait profité de chaque occasion pour aller voir tous ceux lui tombant sous la main, à droite et à gauche dans la galaxie, sur tous les mondes possibles et à chaque fois, il l’avait traîné avec lui. On finissait par se résigner. Un peu comme avec certains de ses plans ou de ses idées, d’ailleurs, il valait mieux apprendre très vite à ne se formaliser de rien. Le capitaine Fel allait bien finir par s’y faire, à son tour.

"Sans vouloir vous stresser, il y a des chances qu’il ait décidé de vous prendre comme élève, vous aussi. Entre cette mission et ce que vous avez raconté avant, ça me semble évident. Qu’est-ce que vous aviez fait, pour vous faire remarquer ?"

Étant donné le caractère du pilote, Eli doutait que ça soit un simple accident. Ça pouvait même dater de l’époque où ils étaient encore dans l’Empire. Les bras croisés, il attendait sur le côté qu’il prenne ses photos, en attendant sa réponse.

"Je croyais que vous aviez reçu des messages de soutien ? Si c’est ça, de la diplomatie ratée, pour vous… On est au-delà de l’aveuglement."

"Heu…"

Même si ça venait de soldats ? Il avait compris que ça devait bien se passer avec les politiciens, avant tout. Non ? Rah, il ne savait plus, lui ! C’était la première fois qu’il se retrouvait dans une situation pareille et il n’était qu’un simple pilote ! Juste un sergent instructe… Heu, capitaine, mais bref, c’était presque pareil ! Il soupira, en se grattant le nez, puis recommença à prendre les photos. Autant laisser couler, parce que là… Déjà qu’il était sur les nerfs, pas la peine d’en rajouter. Il y avait une bonne nouvelle, en plus, dans le tas, le petit allait pouvoir découvrir les visages de sa famille biologique ! Même si les rencontrer un jour, ça semblait compromis, c’était très important de connaître son miroir génétique. Dans la vitrine, face à lui, plein de… Trucs. En céramique, visiblement. Ça servait autrefois comme ustensiles divers.

"Sans vouloir vous stresser, il y a des chances qu’il ait décidé de vous prendre comme élève, vous aussi. Entre cette mission et ce que vous avez raconté avant, ça me semble évident. Qu’est-ce que vous aviez fait, pour vous faire remarquer ?"

Le capitaine éclata de rire, en entendant ça, incapable de s’en empêcher. L’amiral qui prendrait « personnellement » des élèves, rien que ça ! Il y avait déjà bien assez de cours en tous genres et d’entraînements divers, sur la base, pour que les hauts officiers prennent de la peine et du temps pour ça, encore pire avec une seule personne. Non, non, vraiment. En plus, pour le peu qu’il le croisait, il ne voyait pas quand l’amiral aurait le temps de jouer les professeurs. Il lui avait parlé en face plus de quelques minutes pendant, quoi… Deux ou trois fois, depuis son arrivée ? Au travail, Soontir passait la moitié de son temps avec les élèves pilotes et ses collègues, l’autre moitié dans les différents bureaux de certains officiers, qui voulaient lui reprocher ci ou ça.

"Hum, pardon," dit-il en reprenant son souffle. "Je ne fais pas exprès, en général, pour me faire remarquer, comme vous dites. C’est seulement lorsque je me retrouve face à une situation clairement mauvaise ou injuste, que je réagis directement. Si quelqu’un se fait agresser devant moi ou qu’un officier donne un ordre débile, qui va emmener à la mort ses soldats. C’est arrivé tellement de fois, dans l’Empire. Un peu moins chez les Rebelles, mais quand même. Et sur Nirauan, on me reproche surtout mes méthodes de travail ou les risques pris, même quand je les prends seul. Je n’arrive pas à rentrer dans le moule attendu. C’était sans doute une idée débile, de s’obstiner à rester soldat, j’aurai dû faire comme Solo et finir contrebandier."

Bon, d’accord, se faire inscrire sur la liste noire des pilotes ne lui avait pas laissé beaucoup de choix, par contre, il aurait très pu se lancer dans un tout autre métier, n’impliquant pas de faire du pilotage son gagne pain. Soontir se demandait parfois comment aurait été sa vie, s’il avait juste laissé tombé l’armée. Il n’avait pas le caractère pour s’y conformer ou y mener une carrière tranquille, c’était acté depuis ses débuts. Mais bon, maintenant qu’il en était là, autant poursuivre. Tout en discutant, ils avaient fait le tour de la salle, puis passer à la suivante. C’est là qu’il eut l’extrême surprise de découvrir des objets exposés venant des Mondes du Noyau. Et même de Corellia ! Un brin de nostalgie le prit, en regardant une maquette d’un très ancien modèle de cargo, qu’il avait déjà vu exposé en réel, sur sa planète. L’appareil ne volait plus, évidemment, mais l’avoir face à soit faisait quelque chose. En voir une maquette ici était… Bizarre…

"Comment tout ça a bien pu parvenir jusqu’ici ?"

Complètement aveugle… Même Eli ne l’était pas à un tel point, c’était dire ! Il parvint à effacer une grimace à la fois blasée et désespérée, en le voyant rigoler à en cracher ses poumons. Non mais à ce compte-là, sélection naturelle, tant pis pour lui ! Au moins, il aura essayé de lui montrer la réalité en face. Thrawn n’allait avoir absolument aucun mal à l’emmener là où il en aura envie. En attendant que le capitaine arrive à reprendre son souffle, le jeune homme en profita pour reprendre un air parfaitement neutre et essayer de chasser le désespoir l’ayant envahi. Comment arrivait-on à ne pas voir les évidences, à ce stade-là ? C’était un grand mystère de la science… Il ne se souvenait pas d’avoir déjà rencontré une autre personne capable de ça, maintenant qu’il y pensait. Enfin, quoi que, il y avait Skywalker, aussi… Le jeune Jedi, pas l’ex-Sith perturbé.

"Hum, pardon. Je ne fais pas exprès, en général, pour me faire remarquer, comme vous dites. C’est seulement lorsque je me retrouve face à une situation clairement mauvaise ou injuste, que je réagis directement. Si quelqu’un se fait agresser devant moi ou qu’un officier donne un ordre débile, qui va emmener à la mort ses soldats. C’est arrivé tellement de fois, dans l’Empire. Un peu moins chez les Rebelles, mais quand même. Et sur Nirauan, on me reproche surtout mes méthodes de travail ou les risques pris, même quand je les prends seul. Je n’arrive pas à rentrer dans le moule attendu. C’était sans doute une idée débile, de s’obstiner à rester soldat, j’aurai dû faire comme Solo et finir contrebandier."

Ah oui, les méthodes de travail douteuses, la difficulté à rentrer dans le moule et les libertés prises, parfois, avec les ordres, pour les contourner ou les adapter… Ça lui rappelait furieusement quelqu’un, tout à coup… Il se retint de justesse de lui en faire la remarque, vu que ça ne servait à rien, passant plutôt dans la salle suivante avec lui. Une exposition d’objets, maquettes, pièces et armes venant des régions du Noyau, pour la plupart. D’autres de la Bordure Intérieure, il en reconnaissait certaines avant de lire les étiquettes. Face à la surprise du capitaine, il lui expliqua que la majorité avaient été emmenées dans le Chaos par des marchands de tous bords, des voyageurs de passage, etc., que l’Ascendance achetait ces pièces quand elle en avait l’occasion. Une petite partie avait aussi été trouvée dans des vaisseaux arraisonnés et abandonnés par des pirates ou sur des marchés. Eli nota, à ce moment-là, que toutes les étiquettes n’étaient pas exactes, sur la provenance de ces pièces.

"Il faudra leur faire changer ça, tiens," lança-t-il en notant rapidement quelles étaient les erreurs. "Vous venez de Corellia, c’est ça ? Toute cette vitrine-là devrait vous intéresser."

C’était une planète qu’il aurait bien aimé découvrir… Après toutes les rumeurs et histoires qui avaient couru sur son compte, lorsqu’il était encore dans l’Empire. Aujourd’hui, c’était compromis, impossible d’aller faire du tourisme dans le Noyau tant que l’Empire était en place. La commodore Faro lui avait signalé qu’il avait une prime sur la tête, aussi, d’il ne savait plus combien. Bah, c’était le cas pour des milliers de personnes à travers la galaxie, de toute façon, il n’allait pas en faire une maladie. Ce devait surtout être le colonel Yularen, qui devait avoir une prime importante sur la tête. Avec l’influence qu’il possédait, sa désertion avait dû en crisper plus d’un.

"Tant que nous y sommes, après avoir terminé ici, le lieutenant Amars souhaitait vous rencontrer, en personne. Puisque vous êtes coincé ici pour encore un moment, vous allez avoir le temps de le rencontrer, lui aussi. Il travaille sur Naporar, ça sera pratique."

C’était quand même bizarre, de prendre la peine de récupérer autant de trucs venant de cultures tellement éloignées ! Il se pencha sur la vitrine désignée, souriant en reconnaissant certains des objets. La nostalgie gagnait du terrain, c’est qu’il n’avait pas pu retourner sur son monde natal depuis des années… La dernière fois, c’était lorsqu’il y avait fait un bref passage, avec le petit Nuru, la première fois qu’il était tombé chez eux. Mais sans avoir rien pu revoir de son monde ni en profiter, pas le temps. Sinon, ça remontait au temps où il vivait encore chez son père, avant d’être expédié à l’académie. C’était loin, tout ça ! Comme on dit souvent, il n’y a pas de place meilleure que sa maison. Il se redressa, avec un léger soupir. Ah là là, Corellia était loin… Et il craignait, au fond, que ses enfants ne découvrent jamais cette planète.

"Tant que nous y sommes, après avoir terminé ici, le lieutenant Amars souhaitait vous rencontrer, en personne. Puisque vous êtes coincé ici pour encore un moment, vous allez avoir le temps de le rencontrer, lui aussi. Il travaille sur Naporar, ça sera pratique."

"Ah, heu, pas de soucis."

Il était un peu perdu, encore, entre ceux qu’il rencontrait dans le cadre de la relation avec les FID et ceux par « curiosité », comme ils disaient. Enfin, bon, il était coincé, c’est vrai… Nouveau soupir, tout en reprenant quelques photos. Comme allait-il expliquer ça, dans son rapport, une fois de retour… ? Il ne savait même pas pourquoi ces types avaient voulu les tuer et il était en plus persuadé que certains officiers – comme le capitaine Benden, à tout hasard – allaient trouver le moyen de rétorquer que ça devait être de sa faute. Déjà que les relations étaient, hum, légèrement tendues, ce n’était pas ça qui allait arranger la sauce. Tss, pourquoi ça ne pouvait jamais être simple… Il repensa à ce moment-là ce que lui avait dit ce Sith fou, que son fils aîné allait devenir Empereur, dans la ligne du temps d’où il venait. Brrr… Pourvu que ça n’arrive pas ici, il ne souhaitait pas un tel malheur à ses enfants !

Pensant aux enfants, tiens, il chassa ces mauvaises pensées de sa tête puis demanda au lieutenant-colonel si lui aussi était papa. Le genre de conversations ayant le don de le remettre aussitôt de bonne humeur et oublier tous les soucis autour de lui. A ses yeux, rien de mieux que de discuter de leur douce progéniture, tout en poursuivant le travail. C’était devenu son sujet de conversation préféré, depuis la naissance de sa fille, il adorait raconter ses petites mimiques, décrire son sourire, la manière dont elle réclamait son biberon, raconter avec quoi il l’habillait et les petites évolutions qu’elle connaissait chaque jour, comme elle s’éveillait ! Depuis peu, il avait commencé à parler de Nuru exactement de la même manière et ne se priva pas de le faire, en long et en large, comme il venait juste de parler de sa petite Anya.

Les trois salles suivantes furent entièrement consacrées à raconter à son interlocuteur les moindres faits et gestes, progressions, petites victoires et sourires de ses enfants, alors qu’il continuait à photographier ce qui pouvait être intéressant. Si le lieutenant-colonel venait sur Nirauan, un de ces jours, il faudra qu’il lui présente ses enfants ! Soontir avait déjà dû montrer des photos de sa fille à la base toute entière, d’ailleurs, y compris à ceux qui ne pouvaient pas le voir en peinture.

"Et le petit aura dix ans, dans quelques mois ! Je me demande ce qu’il pourrait aimer, pour son anniversaire. Vous avez la moindre idée de comment ils faisaient, pour ça, au temple Jedi ?"

C’est marrant comme avec certains, les relations diplomatiques à tenir étaient bien plus une torture que lorsqu’ils se retrouvaient projetés au milieu de batailles complètement folles. Le capitaine ne s’en cachait même pas. A moins qu’il soit juste déprimé par avance de l’accueil qu’il allait recevoir au retour. Il changea bien vite de sujet, de toute façon, pour parler des enfants. Puis, très vite, de commencer à lui décrire en long, en large et en travers les moindres faits et gestes et les petites histoires sur sa fille puis son fils fraîchement adopté. Pas encore officiellement, en plus, de ce qu’Eli compris. Tout en passant dans les différentes salles, il lui raconta absolument tout dans les moindres détails, jusqu’à lui décrire la façon dont les deux enfants souriaient lorsqu’on s’occupait bien d’eux.

Si Eli aimait beaucoup aussi parler de ses fils, il n’en avait jamais fait autant auprès d’autres personnes. Mais visiblement, le capitaine fondait au point de devoir tout raconter. Avec un tel père poule, les deux enfants ne pourront jamais cacher la moindre peine, ça avait du bon. Il ne dit pas grand-chose, tout le temps que ça dura, l’écoutant simplement, à la fois ému par un tel enthousiasme et un peu assommé. Bien qu’il soit facilement persuadé que ces deux petits étaient adorables, il ne voyait pas très bien en quoi la couleur de leurs futurs vêtements le concernait. Ni pourquoi il était important de détailler, dans le flot, comment leur chambre devait être décorée. Il faudra qu’il demande à Tayla, un peu plus tard, si eux aussi avaient été aussi à fonds sur ce genre de petits détail ? En tout cas, pour habiller leurs fils, ils ne s’étaient pas posés autant de questions.

"Et le petit aura dix ans, dans quelques mois ! Je me demande ce qu’il pourrait aimer, pour son anniversaire. Vous avez la moindre idée de comment ils faisaient, pour ça, au temple Jedi ?"

"Alors là," grimaça-t-il en haussant un peu les épaules. "Je ne suis même pas sûr qu’ils le fêtent. Mais la seule Jedi que je connaisse n’avait pas non plus un maître se préoccupant de ça, donc… Vous pourrez lui demander en personne, si vous voulez, avant de rentrer chez vous. En idée de cadeau, sinon…"

Il énuméra quelques idées, sans grande conviction car il ignorait tout autant ce que le petit pourrait bien aimer. Il n’avait pas eu une enfance « normale », en plus, ça pouvait beaucoup influencer ses préférences. Sinon, à dix ans… Des livres, des maquettes à construire, un jeu, quelque chose comme ça ? Étant encore au stade où il pensait offrir une peluche ou un petit jeu d’éveil à ses fils, pour leur première année de vie, il était encore loin d’imaginer ce qu’on offrait à un petit garçon pour ses dix ans. Au même âge, ses propres parents lui offraient des jeux d’adresse en bois, pour l’occuper, durant les longs trajets commerciaux faits avec eux.

"De toute façon, si ce n’est que dans quelques mois, vous avez encore largement le temps de trouver une idée, de préparer quelque chose en avance. Vous pouvez aussi offrir un jeu éducatif, dans un domaine où il peut avoir plus de mal qu’ailleurs. C’est très utile. Même pour les adultes, il y a des jeux de cartes éducatifs pour apprendre la diplomatie, par exemple."

Il en avait déjà vu, sur son monde natal et était certain que ça devait encore se vendre. Un bon cadeau qu’il pourrait se faire à lui-même, s’il passait faire un tour dans l’Espace Sauvage, un de ces jours.

Ah bon, ils ne fêtaient rien, au Temple ? Eh bah, tu parles d’une vie ! Ils savaient s’amuser, au moins ou bien ils passaient leurs vies à accomplir leur travail, s’entraîner et rien d’autres ? Si même les enfants n’avaient eu le droit de se détendre, où allait-on ! Mais bon, s’il connaissait quelqu’un à qui en discuter, oui, ça sera super ! Plus en il en saura et mieux il sera capable de comprendre le petit, c’était super important. Il posa l’appareil, le temps de sortir un petit carnet et griffonner dessus les quelques idées. Il avait le temps, oui, bien sûr, enfin… Pas tant que cela, car ce n’était pas sur Nirauan qu’il allait trouver un cadeau intéressant, il devait voir ça lors d’un passage dans la Coalition ou demander à quelqu’un devant s’y rendre bientôt de s’en charger. Ah, cela dit, même ici, il pourrait… Il « avait le temps », oui. Quelle frustration.

"Vous pouvez aussi offrir un jeu éducatif, dans un domaine où il peut avoir plus de mal qu’ailleurs. C’est très utile. Même pour les adultes, il y a des jeux de cartes éducatifs pour apprendre la diplomatie, par exemple."

Hum, il disait ça pour lui, là… ? Soontir rangea le carnet, avec un sourire contrit, en répondant qu’il allait y réfléchir. Il pouvait faire plus d’efforts là-dessus, c’est vrai… Comme beaucoup de personnes le lui répétait en boucle… Énième soupir, en reprenant son appareil.

"Tout le monde me dit ça, mais vous savez, je suis juste pilote, après tout. Je ne dirige jamais des équipes de plus de six ou sept personnes, lorsqu’on doit attaquer en chasseur. Et il y a toujours une personne plus haut gradée à superviser. Oui, il y a des situations où la diplomatie reste importante, cela dit, ça reste exceptionnel. Ici, c’est juste car j’avais demandé à venir pour récupérer des informations, pour Nuru, sinon jamais personne n’aurait eu l’idée de me coller l’étiquette de diplomate et de m’envoyer ici en toute connaissance de cause. Ils ne sont pas fous à ce point, sur Nirauan. Même si l’amiral a des idées bizarres, parfois, on n’en est pas rendus là."

Il refit rapidement une première sélection, pour éliminer les clichés où on ne voyait rien, tout en répondant au lieutenant-colonel. Il comptait bien s’y mettre, ou, à la diplomatie, au moins pour qu’on cesse de lui rabâcher les oreilles avec ça, avoir les connaissances minimum requises, somme toute ! Ce qui devrait suffire, après tout, comme il n’était pas un haut officier, il n’avait pas besoin d’être doué dans ce domaine.

"Il y avait eu une situation assez similaire, quand j’étais chez les rebelles," poursuivit-il alors qu’ils avançaient vers les salles suivantes. "Une petite troupe locale avait été capturée et on était parti les chercher, contre les ordres, car le Conseil estimait ça trop dangereux, vu que le monde où ils étaient enfermés était en plein cœur du Noyau. On est revenu avec deux survivants, mais leurs amis avaient déjà été exécutés. Le conseil nous a allumé comme il faut, au retour. On a fini deux semaines en cellule, comme mesure disciplinaire. Et là, avec les FID, c’était le colonel Yularen que j’avais beaucoup énervé. Pour changer. Ils sont quelques uns à me reprocher d’entraîner les autres dans ce genre d’histoire alors que je n’ai jamais forcé la main à qui que ce soit. Ce serait grave, de le faire…"

Il tapota doucement sur l’appareil, plutôt agacé par ce reproche-là. Jamais il ne s’était amusé à manipuler qui que ce soit pour lui attirer des ennuis ! Il n’avait jamais non plus exigé qu’on le suive, dans ce type de mission ! Alors qu’on le considère comme un manipulateur ou il ne savait quoi, c’était insupportable.

"Vous pensez qu’on me voit vraiment comme quelqu’un qui veut du mal aux autres exprès et leur attirer des ennuis ?"

C’était un des rares sujets où il pouvait sincèrement s’inquiéter. Pas pour sa réputation, ça, il ne s’en était jamais préoccupé de sa vie. Mais il supporterait très mal que ses élèves, amis ou proches puissent se sentir en danger ou même trahis, alors qu’il ne leur avait jamais voulu le moindre mal.

Bon, au moins, il allait tenter de faire un peu plus d’efforts, question diplomatie, c’était déjà ça… Même s’il ne comprenait pas pourquoi c’était aussi important, ce n’était pas si grave. Pour le moment, en tout cas. L’entendre raconter qu’il avait déjà vécu quasiment la même situation chez les rebelles, tandis qu’ils marchaient vers les autres salles, n’étonna pas du tout Eli. De un, c’était fréquent de voir ça, pour un groupe rebelle, de deux, avec le caractère du capitaine, personne ne pouvait être surpris de sa réaction. D’autres, dans l’Alliance, avaient sûrement ce même genre de réactions, aujourd’hui, aucune chance possible d’être le seul. Après tout, nombreux étaient les membres de l’Alliance à être portés par un fort idéalisme. La base même de leur révolte se situait là. Avoir pu sauver deux personnes était déjà beaucoup, dans un pareil contexte.

"On a fini deux semaines en cellule, comme mesure disciplinaire. Et là, avec les FID, c’était le colonel Yularen que j’avais beaucoup énervé. Pour changer. Ils sont quelques uns à me reprocher d’entraîner les autres dans ce genre d’histoire alors que je n’ai jamais forcé la main à qui que ce soit. Ce serait grave, de le faire… Vous pensez qu’on me voit vraiment comme quelqu’un qui veut du mal aux autres exprès et leur attirer des ennuis ?"

Quoi ?! Mais enfin ! Il se sentait vraiment en insécurité par rapport à ça ?? Eli faillit se prendre un bout de la prochaine vitrine, parce qu’il fixait le capitaine avec un air choqué, s’arrêtant juste à temps. D’accord, d’accord, alors, reprenons calmement. Il connaissait un peu le colonel Yularen, il avait dû le côtoyer à pas mal de reprises, même si à chaque fois, il avait pu laisser Thrawn se charger de toute la discussion ou quasiment. Bien qu’il ne se soit que très rarement retrouvé en tête à tête avec le colonel, il avait bien cerné son caractère et ses attentes.

"Non, alors, non, pour commencer. Le colonel Yularen est une personne très carrée et procédurière, à mon avis, ce qu’il vous reproche plus, c’est que votre attitude puisse déteindre sur d’autres personnes, que vous vous en rendiez compte ou non. Une armée tient grâce à sa discipline et un électron libre est toujours plus compliqué à gérer. Il doit sûrement craindre que vous en influenciez d’autres, même si ce n’est pas votre intention ou que vous ne le réalisez pas. C’est justement parce qu’ils savent tous que ne vous ne leur voulez pas de mal et que vous êtes prêt à foncer pour eux qu’ils vous confiance et vous respecte. D’où l’influence exercée. Et aussi d’où l’importance que vous gagnez quelques compétences supplémentaires, pour apaiser tout le monde et éviter trop d’ennuis. C’est pour le bien de ceux qui sont prêts à vous suivre, que vous devez le faire."

Il avait pris le problème dans le sens opposé, tellement il avait du mal à voir et accepter son influence sur les autres membres des FID… Il fallait le faire, quand même ! Ce pas-là allait être difficile à franchir, pour lui, ne serait-ce que le temps qu’il accepte les évidences et n’ait plus peur de se dire qu’il était plus qu’un « simple pilote », comme il disait.

"Si c’était vraiment ça, qu’on pensait de vous, vous pensez vraiment que vous seriez toujours en poste ?"

Non, vraiment, il en était sûr ? Soontir ne pouvait pas s’empêcher de s’angoisser, sur ce sujet-là, c’était normal ! Il rouvrit la bouche pour le préciser puis la referma, lorsque son interlocuteur lui présenta un toute autre point de vue, concernant le colonel. Ce serait possible que… Ah… ? Il voulut dire qu’il n’avait jamais eu l’intention d’influencer qui que ce soit mais là encore, il n’en eut pas le temps. Car le lieutenant-colonel le précisa dans la foulée, en ajoutant que ça n’avait aucune importance, que c’était ainsi même s’il ne réalisait pas. Mais il… Mais… Pour la toute première fois de son existence, une grosse bouffée de stress germa dans son ventre, avant de remonter enflammer le corps et l’esprit. Il ne l’avait pas fait exprès, il, il… Ça ne changeait rien ?! Comment ça pouvait arriver si on n’agissait pas en toute conscience pour ?? Hein… Hein ?

"Et aussi d’où l’importance que vous gagnez quelques compétences supplémentaires, pour apaiser tout le monde et éviter trop d’ennuis. C’est pour le bien de ceux qui sont prêts à vous suivre, que vous devez le faire."

Ah… Ah, il… Heu… Le stress maintenant bien installé et les mains légèrement tremblantes, il hocha faiblement la tête, toute trace de son sourire habituel disparu. Il n’avait jamais envisagé les choses de cette façon-là… Et ça… Ça remontait pas mal de trucs en question… Il tenta de se reprendre, avec difficulté, en voulant chasser le stress et se détendre. Essayer, en tout cas. Espérer que ça ne concernait qu’une petite poignée de personnes, qu’il « influençait ». Et pas trop de monde non plus car ça voudrait dire qu’il n’avait absolument rien contrôlé ou vu depuis trop longtemps. Le colonel pensait-il qu’il le faisait exprès, alors ? Et que ça allait vraiment déstabiliser l’armée… ? Oh, bon sang… Il grimaça, se repassant l’intégralité de l’engueulade avec ce point de vue, puis se dit qu’il avait sous-estimé à quel point il avait dû agacer le vieux colonel. Ou même d’autres officiers.

"Si c’était vraiment ça, qu’on pensait de vous, vous pensez vraiment que vous seriez toujours en poste ?"

Peut-être pas… Il haussa un peu les épaules, marmonnant qu’il n’était plus sûr de rien. C’était arrivé très souvent, qu’il s’était demandé pourquoi on l’avait jamais viré de l’armée. Il s’était viré tout seul, d’abord de l’Empire puis de chez l’Alliance Rebelle. Donc, il risquait vraiment de faire du mal involontairement aux autres s’il n’essayait pas de changer, au moins un peu, c’était ça ? Il devait bien comprendre ça ? Alors… Bon, il… Il s’y mettra plus sérieusement, alors, une fois rentré. Vanto avait eu l’art de tirer sec sur l’une de ses cordes sensibles, juste car il lui avait posé une simple question. Touché, coulé…

"Eh bien… Compris, je prendrai plus de précautions, à l’avenir."

Plutôt perturbé, avec tout ça, il reprit plus lentement la suite du travail. Et ne dit, de toute manière, plus grand-chose, durant le temps que prit la suite de la visite. Mis à part ce qui concernait ce travail, lui-même. Il fallut encore une bonne heure avant d’en finir ici, avec toutes les salles concernées sur la période demandée. Un temps qui l’avait aidé à la fois à se calmer et commencer à digérer la situation. Tout cela lui tournait en boucle en tête, il ressassait depuis tout à l’heure. Lui avait-on déjà dit cela, en plus, avant ? Lors des engueulades ? Impossible de s’en rappeler… Mais il fallait bien avouer qu’il n’écoutait rien ou presque, lorsqu’on lui hurlait dessus. Sortir du musée, reprendre l’air, lui fit un bien considérable. Restait à se mettre en route vers le quartier général de la Flotte, où travaillait cet homme dont il lui avait parlé au début de la visite. A pieds, puis avec une des petites navettes faisant les allers-retours, ça devrait être rapide.

"Dites-moi, comme vous avez l’air d’assez bien connaître Yularen, comment ça se fait ? Vous aviez eu des ennuis avec le BSI ?"

Bizarre, il avait l’air anxieux, lorsqu’il affirmait qu’il fera plus attention. Eli fronça légèrement les sourcils en le voyant trembler, inquiet… Il allait bien ? Ou c’était l’idée d’apprendre la diplomatie, qui l’angoissait ? Tout de même pas ! Il n’allait tout de même pas s’inquiéter juste à cause de ce qu’il avait dit, non plus… Ou si ? Enfin bref… Il n’ajouta rien de plus sur le sujet, poursuivant plutôt la visite avec lui. Il avait été sans doute abrupt, mais tant pis, au bout d’un moment… Le capitaine ne dit plus que quelques mots, tout le reste du temps, comme perdu dans ses pensées. Un peu plus d’une heure s’écoula, avant d’en terminer ici et sortir. Enfin… Les musées, c’était sympa, sauf lorsque cela durait des journées toutes entières ! Bien, à présent, se rendre au quartier général, ils n’étaient pas sortis trop tard du musée, ils seront arrivés à l’heure convenue.

"Dites-moi, comme vous avez l’air d’assez bien connaître Yularen, comment cela se fait ? Vous aviez eu des ennuis avec le BSI ?"

"Non, jamais. Je le côtoyais car il travaillait avec Thrawn, tout simplement. Ils se rencontraient régulièrement pour les affaires de l’Empire, souvent à cause de Nightswan d’ailleurs ou avant des procédures disciplinaires. De là à bien se connaître, on ne peut pas dire ça. Enfin, lui, de son côté, doit connaître mon dossier. Mettre son nez partout est un réflexe bien ancré, au BSI."

Ne serait-ce que pour savoir avec qui on travaillait, pour commencer. Eli n’avait pas posé la question, à l’époque. Dès qu’il avait vu l’uniforme blanc de cette organisation pointer le bout de son nez, il avait su que tous ceux présents dans la pièce avaient déjà été « étudiés » par le colonel ou ses adjoints. Même s’il n’y avait rien à voir dans son dossier militaire. Ils se glissèrent dans une des navettes régulières, remplie en grande partie de soldats et de deux ou trois civils. Une volée de regards curieux ou suspects partirent en direction du capitaine, évidemment, mais personne ne fit la moindre réflexion. Le trajet fut rapide, la navette ne faisant qu’un arrêt avant de s’arrêter près du QG. Le jeune homme venait assez rarement ici… La dernière fois, c’était pour les quelques jours qu’il avait dû passer en surveillance à l’hôpital militaire, après l’affrontement avec cette sorte de zombie, dans les tunnels.

Le lieutenant Hea’mar’sol les attendait déjà, il avait visiblement réussi à se dégager plus de temps qu’initialement prévu et les accueillit avec chaleur. Il y a longtemps qu’il avait eu envie de rencontrer le capitaine, depuis qu’il y avait une histoire de racisme ou il ne savait plus quoi, contre son beau-frère, sur Nirauan. Eli n’avait pas très bien compris cette histoire-là et profita donc de l’occasion pour demander ce qui s’était passé, exactement. Cela dit, ce qui arriva très vite sur la table, ce fut la tentative d’empoisonnement contre la jeune femme et lui… Entre les coups de blaster contre Lorana et cette tentative aujourd’hui, deux attentats racistes ayant finalement peu d’écart entre eux, une bonne partie de la population était en émoi. Ne pas aimer la venue d’étrangers ne signifiait pas pour autant cautionner les tentatives de meurtres.

Une branche plus radicale et conservatrice s’installait peu à peu, en politique, ces derniers temps, ce n’était un secret pour personne. Et elle poussait de plus en plus à refuser des liens avec des non-Chiss. Ce genre d’attaque ne faisait que leur offrir du grain à moudre, ils s’en servaient pour pointer du doigt les bouleversements contre la société. Un renversement des valeurs et responsabilités qui agaçait beaucoup Eli. Ils discutèrent de ça, autour d’un café, dans l’une des salles de pause. Il jouait les traducteurs entre Soontir et Amars, presque automatiquement.

"Vous qui avez l’habitude d’apaiser les tensions, que pensez-vous de tout ça ? Que feriez-vous, dans une situation pareille ?"

"Non, jamais. Je le côtoyais car il travaillait avec Thrawn, tout simplement. Ils se rencontraient régulièrement pour les affaires de l’Empire, souvent à cause de Nightswan d’ailleurs ou avant des procédures disciplinaires. De là à bien se connaître, on ne peut pas dire ça. Enfin, lui, de son côté, doit connaître mon dossier. Mettre son nez partout est un réflexe bien ancré, au BSI."

Roh, ça, c’était une balle perdue, pauvre colonel ! Il eut un bref sourire, puis le perdit en sourcillant un peu. Une minute, ça voulait dire qu’il était avec eux, à ce moment-là, dans toutes ces rencontres ? Mais pourquoi faire ? Il faillit poser la question puis se ravisa, en se disant que ça allait être vexant. A la place, il le suivit dans la navette s’occupant de la liaison, en s’efforçant de ne prêter aucune attention à la fournée de regards en coin qui s’ensuivirent. C’est bon, présence bizarre, il avait bien compris, on pouvait passer à autre chose ! Et encore, heureusement que la petite affaire d’empoisonnement ne devait pas être trop connue. Normalement. Ce n’était pas trop connu, n’est-ce pas ? Ils géraient comment les faits divers, ici ? Pourvu que ça ne le soit pas, franchement, il avait déjà assez d’ennuis comme ça !

Le quartier général en lui-même était… Très grand. Vraiment très grand, bien plus que ce qu’il s’était imaginé. Tout un pan semblait réservé à un complexe médical, sur le côté Est, d’après ce qu’il pouvait en voir de loin. Le reste était un ensemble de bâtiments divers et d’entrepôts, parsemée de quelques pistes ou les navettes de transport venaient se poser. Il suivit le lieutenant-colonel dans l’un d’eux, puis furent assez vite accueillit par le lieutenant Hea’mar’sol. Il fut assez surpris d’apprendre qu’il était le beau-frère de Mozia. Voilà pourquoi il avait voulut le rencontrer, enfin une raison logique ! Ils se rendirent dans une sorte de salon ou salle de repos, pour partager un café et s’installer. Cependant, assez tôt, ce fut l’affaire d’empoisonnement qui revint, comme sujet. Rah là là, ce n’était pourtant plus la peine d’en faire toute une histoire.

Pire encore, cet attentat-ci amena sur le précédent, puis sur une discussion tournant autour de la politique… Pfiouuu… Il tenta bien de suivre, sincèrement, mais ça lui prenait très vite la tête, comme à chaque fois. Il avait déjà bien vu avec les deux petits que les histoires entre clans n’étaient pas simples et que ça suffisait même à porter deux collègues l’un contre l’autre, alors qu’ils étaient pourtant tous les deux hors de l’Ascendance et devaient coopérer. Si on ajoutait à cette sauce une montée conservatrice bien réactionnaire… Pfft, ça promettait, tout ça.

"Vous qui avez l’habitude d’apaiser les tensions, que pensez-vous de tout ça ? Que feriez-vous, dans une situation pareille ?"

"Hein, moi ? Heu…"

S’il était politicien, carrément ? Mais il n’en savait rien ! Lorsqu’une société entière tournait depuis des millénaires autour de ce modèle et que toutes les générations avaient été biberonnées dans cet esprit de compétition non-stop, au point que même deux gamins de dix-neuf ans ne se toléraient pas par pur principe juste car leurs familles respectives ne le pouvaient pas, ça ne sera pas rien, pour changer le système en profondeur. Sans compter qu’il fallait d’abord que plusieurs générations successives veuillent changer le tout, avant d’espérer que ça progresse ! Il gérait parfois des conflits, oui, mais avec deux ou trois personnes impliquées, au maximum.

"Ils ont l’air de se rassembler contre les sensitifs et leurs alliés en les présentant un ennemi commun, soit-disant dangereux pour l’équilibre de la société, ça va être dur. C’est vieux comme la galaxie, comme technique. Si en plus, les sensitifs ont autant de mal à s’intégrer dans la société, c’est… Bon… Les employer dans une affaire importante où ils pourront faire un coup d’éclat et présenter ça en masse au reste de la population, pour commencer à améliorer leur image ? Dans un truc où les plus conservateurs ne pourront pas dire que ça apporte du négatif, même avec la plus mauvaise volonté qui soit. Et une fois l’attention gagnée, continuer comme ça avec plein d’autres petites actions, importantes ou non, peu importe, c’est l’image renvoyée qui compte."

Tout le monde avait déjà fait ça, la République, l’Empire, l’Alliance, les Mafias… La guerre d’image était rude et il n’y avait pas cinquante solutions à employer. Le problème, ici, c’est que cette branche conservatrice avait déjà pris une belle longueur d’avance…

"En même temps, en prendre un ou deux pouvant renvoyer une image d’innocence, de non-danger absolu… Présenter aussi de cette manière, pour prouver qu’il n’y a vraiment rien à craindre, que ce type de pouvoirs peut aussi servir au quotidien, tout simplement, sans nuire à personne Donc à la fois un soldat pouvant montrer que ces dons sont très utiles pour la sécurité de l’Ascendance et une autre personne, très mignonne, la douceur et l’innocence incarnées, qui prouvera qu’on peut vivre en société avec ces pouvoirs sans faire de mal."

Lui, oui ! Ça ne lui fera pas de mal de réfléchir avant de parler, pour une fois, vu que ça n’avait quand même pas l’air d’arriver si souvent. Pour le moment, en tout cas, ça pouvait pas mal changer par la suite. Si Thrawn s’en chargeait bel et bien. Ou Yularen. Ou les deux. Le capitaine commença d’ailleurs par prouver qu’il était bel et bien capable d’analyser correctement la situation et de voir facilement les techniques de manipulation en place. C’était bien la preuve qu’il pouvait faire bien mieux au quotidien, s’il s’y mettait avec un peu plus de sérieux. Parfait, maintenant qu’il avait pris conscience de tout ça et qu’il prouvait pouvoir faire mieux, ça ne devrait pas être trop difficile, pour la suite des événements. Il faudrait juste qu’il… Comment dire… Qu’il arrête pour de bon de se dévaloriser, en disant qu’il ne pouvait rien faire de plus que piloter.

"Les employer dans une affaire importante où ils pourront faire un coup d’éclat et présenter ça en masse au reste de la population, pour commencer à améliorer leur image ? Dans un truc où les plus conservateurs ne pourront pas dire que ça apporte du négatif, même avec la plus mauvaise volonté qui soit. Et une fois l’attention gagnée, continuer comme ça avec plein d’autres petites actions, importantes ou non, peu importe, c’est l’image renvoyée qui compte."

Il répéta ça, mot pour mot, au lieutenant. Puis fit de même pour la suite. Ce dernier fit une légère moue, l’espace d’in instant, avant de retrouver son air impassible. C’était une tactique qui pouvait parfaitement marcher… Il y avait déjà des exemples touts désignés mais la Flotte n’était certainement pas prête à laisser se répandre le secret de ces fillettes navigatrices, elle jugeait que déjà bien assez de personnes étaient au courant. Il ne pouvait en discuter avec Soontir, cela dit. Dommage, ces fillettes représentaient très exactement tout ce dont ils auraient besoin, pour adoucir l’image des sensitifs et prouver que la Force était utile à la société toute entière. A la fois mignonnes et efficaces, dans leur quotidien. Car sinon… Lorana étant Humaine, ça passerait aussitôt moins bien. Vah’nya était elle aussi cachée par la Flotte et il ne sera pas question de la mettre en avant. Rhon… Hum, si on lui proposait un pareil plan, il serait capable de fuir à l’autre bout de la galaxie. Sans compter qu’il avait bien trop de mal avec les codes sociaux en vigueur. Thrass… Ce serait délicat aussi, il venait d’une faille, ce « détail » passait mal auprès de trop de personnes.

"Ce serait une excellente tactique, mais impossible à employer en l’état, car il n’y a aucune personne pouvant jouer ce type de rôle."

Le secret entourant les petites navigatrices avait trop de valeur pour le sacrifier, même si cela pouvait contribuer à adoucir la société. Sa protection passait bien au-dessus. Ce n’était même pas la peine de suggérer l’idée à la Flotte.

"C’est un sujet sensible et malheureusement, peu de moyens sont à disposition. Pour le moment, en tout cas. Ce qu’on peut faire, en revanche, c’est continuer le travail pour garder et améliorer les relations actuelles avec les FID. Ça aussi, c’est souvent menacé ou remis en cause, bien qu’aucun camp politique n’ait encore les moyens de défaire cet accord. Vous pouvez y contribuer, vous aussi."

Qu’il n’y ait personne pour faire ce genre de plans, ça, c’était une autre affaire. Et il ne voyait pas quoi y faire ou dire de plus ! Ce n’était qu’une idée et de toute façon, lui et les manœuvres politiques, hein… Surtout ici, ce n’était pas une petite nation, il y avait… Il ne savait déjà plus combien de planètes en tout… Mais c’était gros et il imaginait bien le bordel logistique, social et militaire qui devait se trouver derrière.

"C’est un sujet sensible et malheureusement, peu de moyens sont à disposition. Pour le moment, en tout cas. Ce qu’on peut faire, en revanche, c’est continuer le travail pour garder et améliorer les relations actuelles avec les FID. Ça aussi, c’est souvent menacé ou remis en cause, bien qu’aucun camp politique n’ait encore les moyens de défaire cet accord. Vous pouvez y contribuer, vous aussi."

"Bien sûr," sourit-il avec ironie. "Je vais créer une sorte de d’endroit où ce peuple et le nôtre pourront continuer à coopérer en paix et à échanger, sans avoir besoin de passer obligatoirement par la base militaire de Nirauan. On appellerait l’Empire coopératif ou je ne sais quoi. Bon, sinon, sans rire, oui, je vais faire de mon mieux, mais n’attendez quand même pas de miracles, hein."

C’était le boulot de Thrawn et des hauts officiers de la base, d’améliorer les relations entre FID et Chiss, d’assurer la diplomatie et de s’occuper des échanges et besoins à long terme. Le tout en relation directe avec les dignitaires de l’Ascendance et les hauts officiers de la Flotte d’ici. Tout ça le dépassait, il ne s’était jamais vraiment demandé quelles tâches, exactement, occupaient les hauts officiers, dans une armée. Il s’occupait de ce qu’il pouvait, à son échelle, donc avec ses élèves, ses collègues pilotes, ses superviseurs directs et ceux qu’il pouvait parfois commander en mission. Courir après les promotions et les montées en grade, ça ne l’avait jamais préoccupé. C’était même l’inverse, il avait descendu en grade et n’était remonté que récemment, avec son escadrille, en arrivant sur Nirauan. Il adressa un sourire rayonnant à Amars, après que le lieutenant-colonel lui ait traduit ce bref échange. Allez, haut les cœurs, tout allait bien finir par s’arranger ! Il faut être optimiste, dans la vie !

"Oooh, d’ailleurs, attendez, je ne vous ai pas montré, à vous !"

Il ne pouvait juste pas s’en empêcher et leur mit sous le nez, à tous les deux, des photos de ses adorables enfants. Il en avait déjà des dizaines de sa petite fille et forcément, moins pour l’instant de Nuru. Le petit garçon avait toujours un air un peu étonné, d’ailleurs, sur les photos, comme s’il ne comprenait pas pourquoi c’était important d’immortaliser l’instant. Il y en avait une, comme ça, où il était blotti dans le canapé, empêtré dans un plaid, bien au chaud, avec un livre entre les mains. Il levait son petit nez vers lui, surpris. Ce cliché-là faisait fondre Soontir à chaque fois, tellement il trouvait ça mignon. Il adorait tout autant la photo de sa fille où elle battait des mains vers lui, juste après qu’il ait fini de la changer et l’habiller.

"Ils sont tellement adorables, vous ne trouvez pas ?? J’espère qu’ils auront d’autres frères et sœurs ! On veut avoir une grande famille, avec Syal, qu’on puisse élever en sécurité. Dès que la petite aura un an, je commencerai à lui apprendre à piloter ! Je n’ai pas encore pu commencer, avec le petit, car il n’est pas encore bien remis mais ça viendra vite. Je me demande si je pourrai adapter le siège du simulateur, pour sa taille, je… Boarf, on verra bien en rentrant."

"Bien sûr. Je vais créer une sorte de d’endroit où ce peuple et le nôtre pourront continuer à coopérer en paix et à échanger, sans avoir besoin de passer obligatoirement par la base militaire de Nirauan. On appellerait l’Empire coopératif ou je ne sais quoi. Bon, sinon, sans rire, oui, je vais faire de mon mieux, mais n’attendez quand même pas de miracles, hein."

Eli se jura mentalement de la lui ressortir mot pour mot, celle-là, si jamais le capitaine en arrivait réellement à créer un endroit pareil. C’est qu’il en serait capable, vu comment il était parti ! Il traduisit ça au lieutenant, puis la seconde suivante, lui lança un regard compatissant, alors que Soontir ne put s’empêcher – une fois de plus – de les envahir de photos de ses enfants. Pitié… Il retint d’extrême justesse un soupir blasé, une main contre le front, mais ne fit rien pour l’arrêter, sachant que ça ne servirait strictement à rien. Et dire qu’on lui reprochait parfois d’être trop père poule, lorsqu’il parlait de la manière dont il élevait ses fils et jouait avec eux, ça se voyait que ceux balançant ça n’avaient jamais croisé la route du capitaine Humain. Il avait remarqué que les Chiss ne s’étalaient pas souvent sur le sujet, de toute façon, ça restait privé.

"Ils sont tellement adorables, vous ne trouvez pas ?? J’espère qu’ils auront d’autres frères et sœurs ! On veut avoir une grande famille, avec Syal, qu’on puisse élever en sécurité. Dès que la petite aura un an, je commencerai à lui apprendre à piloter ! Je n’ai pas encore pu commencer, avec le petit, car il n’est pas encore bien remis mais ça viendra vite. Je me demande si je pourrai adapter le siège du simulateur, pour sa taille, je… Boarf, on verra bien en rentrant."

Il tenta bien de s’imaginer ce que ça pouvait bien donner, une fillette qui commençait à peine à marcher, tentant de bouger des manettes quasiment aussi lourdes qu’elle, pour certaines, dans un simulateur, sur les genoux de son père, sans avoir la moindre idée de ce qui se tramait… Il n’était pas très convaincu par l’idée… Non pas qu’il doutait que les Corelliens étaient parfaitement capables de fourrer leurs gosses dans des navettes pour leur apprendre aussi jeunes, leur réputation sur le sujet n’étant plus à faire, Eli n’était pas sur que l’idée en emballe beaucoup, sur Nirauan. Il s’apprêtait à lui demander comment il comptait convaincre ses supérieurs pour qu’un projet pareil soit accepté, avant qu’un nouveau venu arrive, soudainement, près de leur table, dans la salle de pause. Eli se leva pour le saluer, avec un sourire. Content mais aussi surpris de le voir ici, il le croyait encore en mission. Amars fit de même, plus formellement.

"Je te présente le capitaine Fel," lança-t-il ensuite, "enfin, tu as déjà dû entendre parler de l’affaire. Qu’est-ce qui t’amène dans le coin ?"

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Déjà croisés : réussite. Est-ce qu’on se connaît bien : 1. Tutoiement (1-10) : 8.

La porte se referma dans un chuintement discret, derrière Thalias, lorsqu’elle ressortit de la salle d’examen. Leurs petites navigatrices étaient toujours très suivies et surveillées, ces derniers temps, depuis le début de ce… Il ne saurait comment l’appeler… Une sorte d’empoisonnement généralisé. Plus aucune d’entre elles, pour le moment, n’était envoyée en mission extérieure, pas tant que la situation sera aussi instable. Cela ralentissait considérablement les opérations restantes. Déjà que beaucoup avaient dû être annulées, leurs supérieurs préférant concentrer la majeure partie des efforts à une surveillance renforcée des frontières et aux opérations internes, conséquences de la crise sur Csilla. Samakro se releva pour aller à sa rencontre, en lui demandant ce que ça donnait. Pas de meilleures nouvelles mais au moins, ça n’empirait pas non plus. Il hocha la tête avec un soupir, en se massant la nuque.

"Qu’est-ce qui va bien pouvoir encore nous tomber dessus ensuite, c’est infernal ! Entre ça, ces sortes de monstres qu’on retrouve de temps en temps, les nations du Chaos qui font n’importe quoi et…"

"Du calme," souffla sa femme en lui pressant l’épaule d’une main. "Il y a quand même du mieux, les visions ont cessé, pour toutes les petites, désormais."

"Il n’en reste pas moins que le problème vient encore et toujours de la même source," maugréa-t-il en partant avec elle dans le couloir. "Le Troisième Œil, toujours… On ne peut jamais avoir l’esprit en paix, avec ça. C’est peut-être utile mais c’est aussi dangereux. On ne peut jamais se préparer au problème suivant."

"Oh, généralement," rit-elle avec légèreté, "il est plutôt rare de prédire les problèmes tout court. Nos ennemis ont beaucoup d’imagination. On va s’en sortir malgré tout, j’ai toute confiance. Toi non ?"

"Si, si… Je n’aime juste pas ce genre de choses. Lorsque je vois ce que a provoqué sur Csilla, c’est… Tellement aberrant. Sans oublier les autres soucis étranges qui ne cessent d’arriver. On va bientôt repartir, pour ça, justement. L’amiral Ar’Alani suit l’affaire de très près. Ce sera peut-être de nouveau en coopération avec les Humains."

"En attendant, essaye de ne pas rentrer trop tard… N’oublie pas que tu as promis à Samynr d’aller voir le spectacle scolaire, pour une fois."

"Non mais," grinça-t-il avec une petite moue. "Comme si je pouvais oublier ma propre fille."

Il profita d’un recoin de couloir et qu’ils soient seuls pour la serrer dans ses bras, avant qu’elle ne reparte de son côté. Il vérifia rapidement l’heure, avant de filer à son tour. On lui avait demandé d’aller à la rencontre de cet Humain, celui qui avait failli se faire assassiner, avec sa collègue Chiss de Nirauan, car il était probable qu’il doive travailler avec lui aussi, un de ces jours, sur une de ces « affaires »… Des missions coopératives avec une autre mission, ça aussi, c’était étrange, bien que pour le moment, cela s’était limité à embarquer parfois deux ou trois des leurs, pour des buts très spécifiques. Il n’aimait guère cela, car ça dérangeait l’ordre bien établi d’un vaisseau. Enfin, tant que ça n’allait pas plus loin, il n’en disait rien à personne. Les militaires étrangers n’étaient pas forcément capable de s’intégrer correctement, même pour une courte mission, ça dérangeait beaucoup l’organisation globale.

Il savait qu’Eli était avec le capitaine, aujourd’hui et il avait l’avantage de ne pas être bien dur à repérer, étant le seul Humain de la Flotte, impossible pour lui de se fondre dans la masse. En arrivant, il découvrit le lieutenant Hea’mar’sol également occupé à discuter avec les deux hommes, tiens. Navré d’interrompre si brusquement. Il les salua formellement, serrant en plus la main d’Eli. Qui lui souriait. Il souriait souvent, c’était dingue… Les premières semaines, Samakro était demeuré plutôt sceptique, vis à vis de son arrivée, puis… Au fond, même s’il était tout à fait hors de question de l’avouer, y compris sous la torture, il le trouvait adorable. Un homme compétent, bien plus sociable que beaucoup, diplomate. Il comprenait parfaitement pourquoi Thrawn lui était tombé dessus.

"Je te présente le capitaine Fel, enfin, tu as déjà dû entendre parler de l’affaire. Qu’est-ce qui t’amène dans le coin ?"

"Vous rencontrer, justement, ma supérieure m’en a fait la demande," indiqua-t-il en observant l’Humain de plus près.

Une seconde tentative d’assassinat, si peu de temps après la précédente… Un crime raciste, à ne pas en douter. Mais s’en prendre au Clan Mitth, réputé chatouilleux sur de telles questions, puis à un diplomate officiel d’une nation étrangère, ainsi que son escorte, à quel point fallait-il être profondément abruti pour penser qu’il s’agissait d’une bonne idée ?! La première agression le choquait encore plus, cela dit, car s’en prendre à une jeune mère, devant une maternité, c’était…

"Vous semblez remis de votre agression, c’est une bonne chose. Pensez-vous que ce soit la réputation vous ayant précédé qui ait provoqué cet incident ?"

Une bonne frange de la classe politique et de la population ne voulaient pas d’une coopération avec leurs voisins Humains, aussi ne trouverait-il pas surprenant que celui l’incarnant le mieux, actuellement, soit pris pour cible. Comme symbole ou message.

C’est sur ces entrefaites qu’un nouveau soldat vint se présenter, un type que le lieutenant connaissait visiblement très bien, à la manière dont il se leva pour lui sourire et le saluer. C’est là que Soontir se demanda comment Vanto semblait connaître et apprécier autant de personnes… Depuis leur entrée ici, il en déjà salué une bonne dizaine comme s’ils étaient tous amis. Il y avait comme un certain pouvoir, là-dessous. Saluant à son tour, il les regarda tour à tour, car c’était le lieutenant qui se chargeait toujours de la traduction. Donc ce Ufsalama… Samakro avait eu pour ordre de le rencontrer ? C’était… Bizarre, ça aussi, mais passons ! Il n’était plus à ça près, de toute façon, hein. Ça fait déjà plus d’une semaine qu’il ne trouvait rien de logique, dans tout ce qui lui tombait dessus, alors un peu plus ou un peu moins. Par contre, cette question, hum… Quelle était vraiment la « réputation » qui l’avait précédé ?? C’est que ça commençait sérieusement à l’inquiéter !

"Alors, je n’en ai aucune idée… Je ne pensais déjà pas avoir la moindre réputation dans les parages, pour commencer. Si c’est bien à cause de ça, alors je comprends encore moins ce qui a poussé à cette attaque, à quoi ça aurait bien pu servir, si ça avait fonctionné. Pire encore, pourquoi s’en être pris à ma collègue alors qu’elle est pourtant des vôtres."

Il pouvait comprendre qu’on veuille s’en prendre à un responsable, un chef, un leader d’on ne sait quoi, bref, une personne qui avait une très forte influence et qui pouvait faire bouger de grands pans d’un projet, d’une société ou d’il ne savait quoi. Mais lui, franchement ! Le temps que Vanto traduise ça aux deux autres, Soontir tenta – encore – de comprendre en quoi ça aurait bien pu les aider ou leur faire plaisir, s’il en était mort, ces types-là. Et si c’était un crime raciste, pourquoi Neslia aurait-elle été visée ? Elle n’était pas là pour y réfléchir avec eux. Comme il se trouvait avec le lieutenant, aujourd’hui, elle en avait profité pour partir sur une autre mission avec Thasuin. Apparemment, lorsqu’ils venaient dans l’Ascendance, ils en profitaient toujours pour aller « se renseigner » sur divers sujets. Fallait croire qu’ils étaient les yeux et les oreilles de l’amiral, dans l’Ascendance.

"Qui vous a demandé de me rencontrer, exactement, puis, pourquoi faire ? Et j’ai quel genre de réputation, ici, au juste ? Ça devient angoissant, votre affaire."

Bon, à part Mozia qui avait parlé de lui à son beau-frère, ici présent, Soontir ne voyait pas qui d’autre aurait pu le faire et pourquoi ! Ah, peut-être Nosig aussi, admettons, s’il avait été marqué par son expérience récente. Mais sinon ?

Ah, c’était l’amirale, qui l’envoyait ? Elle devait se dire que le pilote avait pas mal de chances de faire parti, prochainement, d’une mission commune, à tous les coups. Il traduisit ça pour le capitaine, après avoir tiré un autre siège pour que Samakro puisse s’asseoir avec eux. C’était une bonne question, ça, on pouvait imaginer que s’en prendre à Fel puisse servir d’exemple, montrer la détermination de leurs adversaires. Bon, leur confrère des FID n’avait quand même pas l’air de penser la même chose, cela dit, venant de sa part, c’était normal. Pour le moment. Il répété ça en Cheunh, alors que Amars marmonnait que c’était aussi bizarre que l’enquête n’ait rien donnée et que ça n’avait pas été poussé très loin. Oh, de leur point de vue, il devait bien se passer autre chose, dont ils n’étaient pas au courant. Et puis, le clan Stybla détestait être pointé du doigt pour une affaire de ce genre, ils n’allaient pas rester sans réagir.

"Qui vous a demandé de me rencontrer, exactement, puis, pourquoi faire ? Et j’ai quel genre de réputation, ici, au juste ? Ça devient angoissant, votre affaire."

"L’amirale Ar’Alani," répondit-il dans la foulée, avant de tourner la tête vers Samakro et lui demander si elle avait des raisons particulières de vouloir cette rencontre, autres que celles auxquelles il avait songé.

Il pouvait aussi il y avoir d’autres raisons encore, dont elle ne comptait pas parler, ça… Il préférait encore ne pas se poser la question. De toute façon, que ça soit elle ou Thrawn, ils avaient l’habitude d’attirer des histoires assez… Improbables. Bon, soit, pour elle, beaucoup moins. C’est surtout depuis qu’il avait rencontré Samakro, l’année dernière, qu’Eli avait réalisé le nombre effarant d’histoires compliquées, d’ennuis effarants et tout le bazar que Thrawn était parvenu à créer en quelques années à peine… A côté, il avait su rester tranquille, dans l’Empire, en réalité, ça avait remis pas mal de choses en question. Le jeune père ne comprenait même pas comment il avait bien pu éviter d’être viré de la Flotte de Défense, purement et simplement, bien avant son exil. Une question qu’il commençait aussi à se poser pour le cas de Fel, au passage.

"Sinon, votre réputation, eh bien, on vous voit comme la nounou des Chiss engagés sur Nirauan et leur protecteur, finalement. Une sorte de lien entre les deux mondes, quelqu’un qui aide à s’intégrer et faire en sorte que les choses se déroulent correctement. Ils vous voient comme un chef engagé pour le bien des autres."

Pas de quoi angoisser, somme toute ! Il avait une très bonne réputation, parmi celles et ceux ayant entendu parler de son cas. Une réponse qu’il répéta à la suite dans la langue des Chiss, par réflexe et habitude. Dommage que le capitaine ne parle que peu les langues commerciales, la conversation aurait été facilitée. Mais son Sy Bisti n’était pas encore assez bon pour suivre une conversation complète. Ou bien, il faudrait de multiples pauses, ce serait plus fastidieux que simplement laisser traduire.

"Pour toi," ajouta-t-il, toujours en Cheunh, pour Samakro, "comme c’est un point qui te gêne toujours, tu pourras t’appuyer sur lui, en cas de besoin, pour être sûr que des coopérations futures se déroulent bien."

Il ne voyait pas très bien la manière dont sa réputation aurait pu pousser à cette attaque ? C’était pourtant suffisamment évident. Dans un tel contexte, il représentait un symbole assez important pour attiser le désir de s’en prendre à lui. Sans compter que cela contribuait à alourdir l’atmosphère déjà pesante. Maron'esli'asu était un dommage collatéral… Bien qu’elle aurait sans nul doute pu être ciblée également, pour la seule raison de son appartenance aux FID… Il retint un soupir, en croisant les bras, appuyé contre le dossier de son siège. Eli lui traduisit alors l’angoisse du capitaine, puis demanda s’il y avait d’autres raisons, pour l’amirale, de vouloir leur rencontre. Elle prenait simplement ses précautions, dans l’espoir que tout se déroule au mieux, une fois tous entrés dans le vif du sujet. C’était une simple affaire de prévoyance, comme elle en avait l’habitude.

Il tiqua légèrement sur la manière dont Ivant avait tourné sa réponse, pour la question de la réputation, sans plus, toutefois. Une nounou, le terme était quelque peu exagéré ! De plus, il était compréhensible qu’il existe des frictions et autres difficultés à s’accorder, entre leurs deux peuples. Cela dit, si Fel ou d’autres avaient des facilités pour s’en arranger… Soit, tant mieux. Sans compter qu’en plus de ces difficultés essentielles, rappelons qu’ils devaient tous, en sus, apprendre à gérer les « idées » de Thrawn. Il compatissait sincèrement… Que ces idées soient bonnes ou non non n’était pas le souci, il s’agissait surtout d’éviter que ça ne cause trop d’ennuis ! Et que ça ne cause pas de désordre. Et que ça ne porte pas sur les nerfs de trop de monde. Et que… Enfin… Bref… Il trouvait déjà que c’était bien de la folie, de vouloir diriger un tel rassemblement et espérer, en plus, que ça fonctionne sur le long terme.

"Pour toi, comme c’est un point qui te gêne toujours, tu pourras t’appuyer sur lui, en cas de besoin, pour être sûr que des coopérations futures se déroulent bien."

"Peut-être…"

Il n’était pas encore bien rassuré… Puisque qu’il ne connaissait pas encore bien cet homme, tout simplement. L’idéal serait de l’observer en conditions réelles, cependant, ces derniers temps, ce n’était pas forcément possible. Amars ajouta, à ce moment-là, comme s’il avait deviné à quoi il pensait, ce dont ils avaient discuté juste avant son arrivée. Ses propositions, pour adoucir les tensions, vis à vis des sensitifs. Qu’il faudrait utiliser une personne à la fois formée sur ces sujets et assez mignonne pour attendrir le débat. A ce moment-là, Samakro ne put s’empêcher de fixer Eli. Il pourrait très bien faire l’affaire, là-dessus, n’est-ce pas ? Il connaissait très bien le sujet, il s’entendait bien avec les navigatrices, connaissait un peu le Troisième Œil et il avait en plus cette capacité effarante d’attendrir tous ceux qu’il croisait, y compris les politiciens les plus secs.

"Eh bien, tu pourrais faire l’affaire, pour ça. Beaucoup seraient d’accord… Même le capitaine, tiens, tu peux lui demander."

L’amirale, hum… Il n’avait jamais entendu ce nom-là, à la base, il ne voyait pas qui ça pouvait bien être. Et donc encore moins pourquoi elle aurait voulu cette rencontre. Il attendit que le lieutenant demande, puis lui fasse la traduction, lèvres légèrement pincées. Comme s’il avait l’habitude de se retrouver dans ce genre d’affaires ! La dernière, c’était pour… Bon, ça ne comptait pas vraiment, circonstances exceptionnelles, tout ça, tout ça. Par contre, pour sa réputation ici… Il, heu… Ah… ? C’était… Bien ? C’était vraiment ça où ils se payaient sa tête ?? Il n’avait rien fait ! Enfin, mis à part cette affaire de racisme, mais en-dehors de ça, il ne s’était rien passé de particulier. Le travail classique, d’un soldat, quoi, si on voulait aller par là. Le temps que les deux autres discutent, dans leur langue, il se gratta un peu la tête, légèrement perturbé. Un lien entre les deux mondes, alors là… Il ne s’était pas attendu à un truc pareil. Surtout vu ce qui se passait en ce moment.

En tout cas, alors qu’ils discutaient, le capitaine nouveau venu se mit soudainement à fixer le lieutenant, avec un air bizarre. Comme s’il s’apprêtait à lui faire passer un entretien. Qu’est-ce qui se passait ? Il attendit qu’on lui traduise, puis se mit, à son tour, à observer le lieutenant. Ce n’est pas faux, ça, il avait une bonne tête et s’il s’entendait aussi bien avec autant de personnes, pourquoi pas ! Mais comme il était Humain, ça ne risquait pas de causer des soucis, avec les conservateurs ? Ou dans leurs problèmes politiques et… Pourquoi pas, après tout. Il fallait une personne mignonne, en plus de bien connaître le sujet ! Et ce type, soyons honnête, il l’était. Ça ne se faisait pas trop, de qualifier un militaire ainsi, mais c’était vrai !

"Si vous connaissez très bien le sujet, ça vaut le coup de tenter. Par contre, il faut voir si ça ne va pas vous causer de soucis, comme vous êtes humain et que ce petit détail en gêne certains, visiblement, dans les parages. Sauf si le fait que vous soyez dans l’armée suffit à les calmer ?"

Qu’ils s’en prennent à lui car étranger, soit, à sa collègue car membre des FID, d’accord, mais ce gars, il était membre de la Flotte de l’Ascendance, alors ça devrait suffire à le couvrir, si leurs ennemis avaient un minimum de sens moral. Quoi que, ouais, parler de sens moral avec des assassins… Oublions cette question, ça ne les arrêtera pas. Par contre, il y avait tout de même une chance qu’ils n’attaquent pas aussi directement. Il existait tout de même une sacré différence entre s’en prendre à deux personnes isolées et non surveillées qu’à un militaire sur un vaisseau. Il secoua un peu la tête, en se frottant doucement la tempe. Il y avait de ces affaires compliquées, dans le coin… D’accord, plus une société était complexe, plus les coups fourrés augmentaient, mais il trouvait ça fatigant.

"Sinon, pour aider en plus, des missions communes, les occasions ne vont sûrement pas manquer. Avec tout ce qui arrive, en ce moment, après tout. Ou alors, ça serait possible d’organiser aussi des manœuvres communes, pour détendre les plus réfractaires et s’organiser en amont, prouver que c’est possible ? Il y a tout de même un sacré espace, entre votre Empire et Nirauan, largement de quoi faire sans embêter qui que ce soit."

Il avait l’air très convaincu, décidément ! Mais bon, il verra bien de lui-même, de toute façon. Amars se pencha légèrement, pour lui expliquer ce dont ils avaient discuté, tout à l’heure, appuyant le fait que le capitaine Fel était quelqu’un de sérieux grâce à cela, pour le travail. C’était toujours marrant, la manière dont il le défendait, depuis cette histoire sur Nirauan. Mais bon, comme il le soulignait, c’était un sujet compliqué et ils n’avaient pas de personne immédiatement disponible, sous la main, pour tout régler… Eli allait ajouter qu’ils pourraient peut-être voir avec d’autres personnes, moins impliquées, tant pis, mais s’interrompit presque immédiatement, voyant que Samakro le dévisageait fixement. Qu’est-ce qu’il y a, il avait un truc sur la figure ? Il… Une minute, lui, qui pourrait tenir ce rôle ? Il était Humain ! Ce seul détail suffira à rebuter une partie de la population. Il traduisit ça au capitaine, souriant à moitié, puis déchanta vite lorsque ce dernier se mit à le dévisager à son tour. Eh, oooh, quand même !

"Si vous connaissez très bien le sujet, ça vaut le coup de tenter. Par contre, il faut voir si ça ne va pas vous causer de soucis, comme vous êtes humain et que ce petit détail en gêne certains, visiblement, dans les parages. Sauf si le fait que vous soyez dans l’armée suffit à les calmer ?"

"On a dit quelqu’un de mignon."

Samakro marmonna quelque chose, lorsqu’Eli traduisit tout ça vite fait, mais trop vite et trop bas pour qu’il comprenne. De quoi ? Ah, quoi que, finalement, il n’était pas certain de vouloir le lui faire répéter. Amars n’avait rien répondu, juste légèrement détourné la tête, une main contre la bouche, en regardant les alentours avec un air soudainement très intéressé. Voilà, maintenant, c’était au tour d’Eli de se demander comment certains le voyaient vraiment, ici. Quoi qu’il n’était pas sûr de vouloir connaître la réponse.

"Sinon, pour aider en plus, des missions communes, les occasions ne vont sûrement pas manquer. Avec tout ce qui arrive, en ce moment, après tout. Ou alors, ça serait possible d’organiser aussi des manœuvres communes, pour détendre les plus réfractaires et s’organiser en amont, prouver que c’est possible ? Il y a tout de même un sacré espace, entre votre Empire et Nirauan, largement de quoi faire sans embêter qui que ce soit."

C’est vrai, mais… Normalement, ce genre de chose venait dans un message officiel, de la part des hauts gradés, d’un camp ou de l’autre. Ce n’était pas censé venir comme ça, sur le tapis, au détour d’une conversation de ce genre. Enfin bon, Fel et le protocole militaire, de toute manière, ça faisait deux. Rapportant ça aux deux autres, il se demanda dans la foulée comment un truc pareil pourrait être bien accueilli, par certains politiciens… Et certains « civils » légèrement agacés en ce moment. Pour l’armée, il y avait moins de soucis à se faire, tout ce qui pouvait améliorer les états de service et l’efficacité dans le secteur restait bon à prendre.

"Pour toi qui a besoin de preuves que ça peut fonctionner et être sûr que ça ne causera pas de dégâts majeurs, c’est une bonne idée, tu ne trouves pas ?"

Samakro marmonna très bas que c’était incroyable d’être dans le déni à ce point, sur un ton étouffé, puis échangea un bref regard avec Amars. Ce dernier hocha très rapidement la tête puis détourna le regard, observant les murs puis le plafond, tout en cachant – mal – son sourire avec une main. On avait dit quelqu’un de mignon, oui, oui, en effet… Le capitaine retint de justesse un soupir, secouant la tête en regardant le jeune humain. Comment faisait-il pour ne pas le réaliser ? Ça le dépassait complètement ! Même les plus raides et les moins sensibles à ça, sur le vaisseau, avaient craqué ! La moitié de l’équipage le voyait comme un petit chaton et l’autre moitié comme une mascotte. Ça n’empêchait pas de reconnaître ses compétences en tant que soldat, bien évidemment ! Mais ça incitait à légèrement plus le protéger que de coutume.

Il reprit son sérieux, pour écouter la proposition du capitaine Fel, traduite par leur chaton national. Il avait l’autorité pour faire une telle suggestion… ? Il… Bon, non, ne rien dire là-dessus. Il travaillait pour Thrawn, après tout, donc le respect des règles et des protocoles n’était guère plus qu’une option, dans certaines circonstances. Cela dit, ce n’était pas une mauvaise idée. Il hocha la tête à la question d’Eli, répondant simplement que la Flotte ne devrait pas voir d’obstacles à organiser ce genre de choses avec les FID. Leurs politiciens, ce sera une autre affaire, mais pour ça, leurs avis n’intéressaient pas l’armée. Du moins, pas sur ce genre de sujets. Le capitaine ignorait si cela allait se faire, cela dit, attendons de voir, comme on le dit. Il demanda surtout où il imaginait que ça puisse se dérouler, puisque leur invité-diplomate-victime-de-tentative-de-meurtre-chef-qui-ne-voulait-pas-l’être était si bien parti.

"Je comprends mieux pourquoi Thrawn lui est tombé dessus," soupira-t-il en Cheunh, suite à tout cela, en se massant un peu la tempe, une légère grimace aux lèvres. "Il est foutu."

"De… Comment ça ?" demanda Amars, complètement perdu.

"Je vous expliquerai après. Eli, tu peux lui demander s’il veut nous accompagner à un entraînement plus simple, en attendant ?"

Il voudrait voir ce qu’il valait, une fois mis en situation. Des manœuvres communes, oui, c’était bien, mais rien na valait mieux que de juger soi-même et en direct les compétences d’une personne, dans divers domaines, lorsqu’on voulait se faire une idée.

Il ne s’était pas attendu à ce qu’ils proposent ça, ensuite, mais bon, pourquoi pas ! Tant que ça ne concernait pas un entraînement avec… Argh… Si… Il cacha de justesse une énorme grimace blasée lorsque les doubles portes s’ouvrirent sur un dojo, imaginant déjà parfaitement la suite et les hématomes qui iront avec. Même si ça sera « rapide », selon leurs guides. Ah là, s’ils voulaient vraiment évaluer ça vite fait, ils n’allaient pas être déçus du voyage, ça allait être un carnage ! Il perdait même contre les novices et les plus jeunes soldats, sur Nirauan, dans les combats à mains nues, alors ne parlons pas du résultat contre des personnes bien mieux exercées. Il retira sa veste d’uniforme avec très peu d’enthousiasme, juste avant qu’on ne lui lance des bâtons entre les mains. Avec ça, normalement, il ne s’en sortait pas trop mal, l’honneur devrait être sauf !

Amars n’était pas venu avec eux, retourné à son travail et le capitaine avait lancé avoir « encore un peu de temps ». Parfait, tant que ça ne durait pas des heures interminables. C’est fou ce qu’il pouvait détester ça ! Mais heureusement, cette première passe, que ça soit contre l’un ou contre l’autre, se passait bien. Il parvenait à se débrouiller, tant qu’il avait une arme entre les mains, même une de ce genre. Mais bon sang, ça restait dur ! Autant il n’avait aucun problème à bien se repérer dans le ciel ou dans l’espace, peu importe à quelle vitesse ou à quelle position, autant il avait bien plus de mal à se placer correctement lui-même, une fois les deux pieds sur terre. Il parvint quand même à faire figure honorable, simplement car il trouvait ça plus simple, comme toujours, avec un bâton ou que que ce soit d’autre, pour faire face à un adversaire.

Ce fut autre chose lorsqu’il s’agit de passer à mains nues…

Il était et avait toujours été un combattant à distance. Se battre au corps à corps, en contact direct, ce n’était si son truc ni ce qu’il avait déjà exercé, ces dernières années. Comme prévu, il se retrouva immédiatement dans une galère noire, alors que l’exercice avait débuté il y a moins de quarante secondes. Il essaya quand même de bien se placer, de se faire une garde correcte, mais deux minutes plus tard, alors qu’il tentait justement de bouger pour mieux parer, un coup le surprit en pleine lancée et il ressentit une douleur très vive au visage. Un juron plus tard, des étoiles plein les yeux, il porta la main à son nez. Pour l’écarter pleine de sang. Ah, bah ça, c’était prévisible et pas non plus la première fois que ça arrivait. Quoi que la dernière fois, ce n’était pas le nez qui avait pris mais l’arcade sourcilière.

"Désolé, ce n’est pas du tout mon domaine," rit-il vers Samakro en remettant la main dessus pour arrêter le sang. "Vous avez une serviette ?"

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Combat à mains nues, 18. Avec bâtons, 1.

Si c’était accepté, d’un côté comme de l’autre, il espérait ne pas louper la mise en œuvre, très curieux de voir ça ! Surtout en ce moment, les responsables de la Flotte commençaient à sérieusement s’agacer qu’une bonne majorité des opérations extérieures n’aient pas encore repris, des manœuvres étaient un bon moyen de se défouler. Samakro marmonna ensuite d’un ton aussi désespéré que blasé que le capitaine était foutu, à présent, il n’aura plus la paix. Ça, ouais, c’était bien vrai… Il prit quand même trois brèves minutes pour expliquer pourquoi à Amars, avant qu’il ne doive partir et qu’eux ne se dirigent vers un des dojos, sur proposition de Samakro, pour un « rapide exercice ». Il voulait toujours se rassurer, finalement, c’est fou qu’il ce qu’il pouvait être anxieux, sur ce genre de sujets.

Le premier round se passa avec les bâtons d’entraînement, comme souvent en guise d’échauffement, ici, ou pour se remettre à niveau après une période de rééducation. C’était aussi le plus rapide, pour qui n’avait que peu de temps. Pour sa part, en combat au corps à corps ou avec des bâtons, il avait un niveau moyen, disons. Ni très bon, ni très mauvais, il se situait dans la moyenne attendue pour quelqu’un comme lui, accomplissant le même genre de travail. De quoi se défendre en se trouvant sur un champ de bataille mais pas de quoi intégrer un véritable commando ou les forces spéciales, somme toute. La plus grosse différence avec la Flotte Impériale était qu’ici, les plages d’entraînement diverses étaient obligatoires, y compris pour des exercices ne vous servant que très peu au quotidien. Seul le pilotage ne l’était pas, excepté bien sûr pour ceux dont c’était le métier, pour des raisons pratiques.

Le combat à mains nues était un autre de ces exercices obligatoires et répétés très souvent. Mais c’est là qu’Eli réalisa le niveau réel du capitaine, dans ce domaine, en voyant quelle garde il adopta durant leur combat puis pour se défendre ensuite. Ouh là… Il devrait songer à plus s’entraîner, parce que là, il se ferait avoir en moins de deux, s’il se retrouvait piégé à terre, entouré d’ennemis ! Reculant un peu, il observa celui avec Samakro, pensant qu’il vaudrait mieux abréger ça et plutôt lui montrer quelques bas… Puis sursauta brusquement lorsque le pilote se fit casser le nez brusquement, après un mouvement bizarre qui avait sans doute surpris Samakro aussi. Il courut chercher une serviette sur le banc d’à côté, alors que Fel riait un peu.

"Comme si c’était le moment de rire ! Faites voir ça ?"

Il le poussa à redresser la tête en lui tenant la joue d’une main, observant les dégâts. Bel et bien cassé, selon lui, il venait de gagner un tour à l’infirmerie. En attendant, il pouvait utiliser ça pour tenter de stopper le sang. C’était le genre d’accident qui arrivait de temps en temps mais cette fois, c’était encore plus prévisible, ils auraient mieux fait de se lancer sur autre chose de plus simple, en voyant à quel point il avait du mal.

"Venez, il faut aller à l’infirmerie. Tu viens aussi, Samakro ? Tu ne t’es pas fait mal non plus, au passage ?"