Alway a problem

Anakin s’appuya contre la paroi, en lisant le message du sous-lieutenant sur son datapad. Les portes du turbo-lift se refermèrent dans un chuintement, juste après que la femme de Thrawn se soit glissée à l’intérieur, avec son fils. Il lui adressa un bref signe de tête, en guise de salut. Ce ventre, bon sang, il se demandait commente elle arrivait encore à marcher, encore moins porter en plus son fils aîné. Enfin bref. Plongé dans sa lecture, il ne prit pas garde tout de suite à un sifflement suspect, ne revenant à la réalité que lorsque la cabine stoppa d’un bloc, brutalement. Il poussa la jeune mère par réflexe contre la paroi, pour qu’elle ne s’écrase pas par terre sur le ventre, laissant tomber le petit appareil à la place. Un juron sonore lui échappa, alors qu’il allait regarder le panneau de contrôle.

"Toujours un problème, avec ces trucs," grommela-t-il. "Alors…"

Le gamin d’à peine un an pleurait et criait, dans les bras de sa mère, effrayé par les secousses soudaines et brutales, lors de l’arrêt. Il tenta de ne pas y prêter attention, concentré sur le panneau. Le bouton d’alerte semblait ne pas marcher. Il leva les yeux au ciel, avec un soupir, puis observa le plafond de la cabine. Faire un trou dedans avec son sabre pour sortir, puis grimper jusqu’à un prochain palier, ne lui prendrait pas très longtemps. Il suffirait d’emmener la… Hum… Il se retourna vers la mère de famille, puis sur le petit, puis sur son ventre gonflé. Imaginant déjà les dégâts si le gamin ou même tombaient, dans l’affaire. Ou pire, que les secousses du trajet provoquent un accouchement prématuré. Il envisagea un moment de partir seul devant, pour aller prévenir les techniciens et qu’ils viennent débloquer. Avant de se dire qu’elle pourrait faire un malaise entre-temps, vu son état.

"Eh bien, il va falloir attendre un peu," soupira-t-il en ravalant avec une très grande difficulté son impatience et son agacement, parlant plus fort pour se faire entendre malgré les cris du bébé. "L’équipe de maintenance ne va pas tarder à se mettre au travail, lorsqu’ils vont réaliser que c’est coincé. Vous devriez rester assise, en attendant."

Juste au cas où l’appareil redescendait d’un seul coup sans prévenir… Il pourra juste user de la Force pour la protéger, avec le gamin, d’une chute mortelle. Ou bien se résigner à découper la cabine, sauter avec elle et le petit, puis essayer de ne blesser personne dans l’affaire. Par contre, elle ne pourrait pas faire taire ce gosse… ? Dans une si petite cabine, les pleurs résonnaient et lui arrachaient les tympans ! Il s’assit à son tour, exaspéré, bien qu’il tente de ne pas le montrer. Il essaya, du moins. Déjà bien peu fan de ce type de moustiques, il l’était encore moins quand il les entendait pleurer.

"Pourquoi il hurle comme ça, il y a de la lumière, ce n’est pas assez ??" soupira-t-il en s’asseyant à son tour.

La jeune mère se glissa dans la cabine, saluant brièvement le général qui s’y trouvait déjà, puis se mit dans un coin, retenant un léger soupir. Elle sortait tout juste de son rendez-vous mensuel, pour la surveillance de la grossesse. La tête remplie de questions. Plus ça avançait, plus l’épuisement était fort, elle commençait déjà à avoir du mal à s’occuper de son fils aîné. Mais déjà demander plus d’aide, mmh… Au-delà du besoin de se reposer, la culpabilité restait plus forte. Elle remonta un peu son fils, un peu agité, contre elle. Il avait fait sa sieste pendant son rendez-vous et commençait à plus se réveiller. Elle allait le reposer par terre lorsqu’un sifflement soudain envahit la cabine, juste avant un arrêt très brutal. Elle se sentit partir en avant, serrant son fils contre elle par réflexe, avant de se faire repousser vivement contre la paroi et maintenue là, par le général, avant de chuter. Tout se passa si vite qu’elle mit un moment avant de réaliser et retrouver son équilibre.

Vueoda s’était mis à pleurer, accroché à elle avec ses petits poings serrés, de toutes ses forces. Il avait eu peur, le pauvre… Elle le berça doucement, en le serrant contre elle, l’embrassant dans les cheveux, pour essayer de le calmer. Durant ce temps, le général examinait le panneau, puis regarda autour d’eux comme s’il envisageait de pousser la cabine avec la Force ou elle ne savait quoi. Avant de lancer d’un ton agacé qu’il fallait patienter. Oui, du calme… Elle hocha la tête et s’assit, une position finalement meilleure dans sa situation. Le général limita, alors qu’elle pensait qu’il allait rester debout pour se calmer un peu. Son petit avait du mal à se calmer, forcément… Ewime s’installa un peu mieux puis replia légèrement les jambes, pour venir asseoir son fils dessus et tenter de lui redonner le sourire en jouant avec lui. Et ne pas lui montrer son propre stress. La remarque du général lui fit lever les yeux au ciel à son tour. Il n’avait décidément pas le moindre talent naturel avec les enfants, ni une bonne compréhension de leurs besoins.

« A son âge, il ne peut pas analyser de manière rationnelle la situation et donc évacuer la peur aussi vite. Il apprend juste à marcher et parler, on ne peut pas lui demander de ne pas être effrayé après un tel choc. C’est encore un bébé. »

Il ne se souvenait plus du tout de ce qu’il avait fait les siens ou qu… Ah, non, c’est vrai qu’il ne les avait pas élevés, elle l’oubliait toujours. Mais quand même, il ne fallait pas réfléchir longtemps pour comprendre qu’un enfant était bien plus facilement impressionnable qu’un adulte. Enfin bref… Son petit garçon peinait à se calmer et elle peinait de plus en plus à conserver son sourire, pour le rassurer. Car elle avait mal, tout simplement. Marcher n’était déjà plus évident, rendue à ce stade, alors avec ce qu’il venait de se passer…

« Vous pouvez faire voleter sa peluche ou un truc comme ça, devant lui, pour détourner son attention et l’aider à se calmer ? »

Il en était capable, non… ? Ou autre chose, même genre, tant que ça arrivait à surprendre ou amuser le garçonnet, il cessera de pleurer. Un stress de moins, ainsi, dans la cabine.

"A son âge, il ne peut pas analyser de manière rationnelle la situation et donc évacuer la peur aussi vite. Il apprend juste à marcher et parler, on ne peut pas lui demander de ne pas être effrayé après un tel choc. C’est encore un bébé."

Justement, faire des bébés, quelle idée ! Les adopter quand ils étaient déjà en âge d’arrêter de crier pour un oui ou pour un non, ça passait encore, mais en faire soi-même, avec tous les ennuis possible, avec l’accouchement, avec ce genre de soucis… Il retourna lentement la tête vers elle, à moitié effaré devant sa proposition. Parce que ça pouvait aider à calmer le gamin, ça ?? Et pourquoi lui, elle ne pouvait pas jouer avec lui elle-même ? Il allait le lui rétorquer, avant de stopper à la dernière seconde, en ressentant son état. C’est vrai qu’elle était plus fragile que lui… Et qu’il ne pourra pas l’aider, de toute façon, si elle faisait un malaise, mis à part la mettre allongée dans un coin, en attendant l’ouverture forcée de la cabine. Pire encore, il devrait en plus tenir le môme lui-même.

Grommelant un peu, il se résigna donc à se saisir de la peluche avec la Force puis doucement la faire voler sous le nez du bébé. Un fait visiblement assez surprenant pour qu’il arrête peu à peu de pleurer et tende ses bras minuscules vers le doudou, en tentant de l’attraper. C’est ça, allez, enfin un peu de calme ! Qu’est-ce qu’il ne fallait pas faire, des fois… Et de toute façon, comme un garçonnet aussi minuscule parvenait à expulser autant d’air de ses poumons et hurler aussi fort ? Il ne devait lui arriver qu’à peine au genou, une fois debout ! Appuyé contre la paroi, il agitait vaguement la peluche, agitant à peine la main, posée contre son sa jambe repliée devant lui. Pris par la sensation de faire le truc le plus idiot qui soit, avec la Force, depuis qu’il avait appris à s’en servir.

Il était en plus persuadé, maintenant, que la mère de famille allait faire un malaise… Elle avait un teint bizarre et il ressentait qu’elle était affaiblie. Secouant un peu la tête, il lui dit de s’allonger, directement, ça pourra aider. Puis fit ensuite flotter le garçonnet lui-même, proche du sol malgré tout, avec son doudou. L’enfant émit un petit cri de surprise puis commença à tenter de « nager » par réflexe, dans l’air, toujours en voulant attraper son jouet. Comme ça, sa mère pourra se reposer ! Et éviter de s’évanouir ici. Quant à lui, ça lui évitait de toucher le gamin. Un gamin qui avait l’air de bien s’amuser, maintenant, ça changeait des cris.

"Comment avez-vous bien pu avoir l’idée d’en refaire alors que celui-là vous prend déjà autant de temps," soupira-t-il en continuant de faire voleter le petit à une dizaine de centimètres du sol. "Et de toute façon, c’est vraiment le bon endroit… ? Comment allez-vous faire, lorsqu’il devra aller à l’école ? Il sera loin des siens. Comment va-t-il s’intégrer ensuite, dans votre peuple, s’il a grandi loin d’eux ?"

Si elle pouvait arriver à faire des trucs pareils, la vie au quotidien serait tellement plus facile et pas seulement pour jouer avec son fils. Appuyée contre la paroi, déjà à semi-allongée, elle fit un léger signe de tête, à sa remarque, répondant un murmure que c’était bon, dans cette position. Elle n’allait pas s’évanouir, ce n’était qu’un simple contre-coup après le choc… Et elle était déjà très fatiguée, avant tout cela, il était donc tout à fait normal qu’elle éprouver des difficultés à récupérer, même pour si peu. Quiconque avait déjà porté un enfant, et à fortiori plusieurs, pourrait parfaitement comprendre la situation… Un petit pincement au cœur d’inquiétude la prit lorsqu’il se mit à faire voleter son fils, grimaçant un peu, avant de se rassurer en voyant qu’il était si près du sol qu’il ne pourrait pas se faire mal en tombant. Ce serait équivalent aux fois où il roulait pas terre en tentant de se mettre debout. Une inquiétude visiblement non partagée par le petit garçon, très heureux de cette nouvelle expérience.

« Comment avez-vous bien pu avoir l’idée d’en refaire alors que celui-là vous prend déjà autant de temps. Et de toute façon, c’est vraiment le bon endroit… ? Comment allez-vous faire, lorsqu’il devra aller à l’école ? Il sera loin des siens. Comment va-t-il s’intégrer ensuite, dans votre peuple, s’il a grandi loin d’eux ? »

« Il s’y rendra régulièrement, rendre visite à sa nouvelle famille, son Clan, je ne compte pas le priver de son peuple et de sa culture, son père non plus, » glissa-t-elle, à la fois ébahie et amusée qu’il s’en inquiète. « Pour ce qui est des cours, il y a une partie qu’il faudra faire nous-même, bien entendu, sur la langue, l’écriture, l’Histoire… Nous aurons un peu d’aide, grâce à notre famille. »

Peut-être qu’ils pourront aussi scolariser leur fils une partie de l’année scolaire dans l’Ascendance et une autre partie ici… Ça restait à déterminer. Elle devait en discuter autant avec Thrawn qu’avec le Clan, car cela impliquait toute une organisation. Sans compter leurs autres enfants à naître… Son fils aîné aura intégré l’école avant que ses frères et sœurs ne soient en âge d’y aller aussi, donc comment s’y prendre, dans ce cas ? Tous les emmener avec elle dans l’Ascendance ? Y laisser y aller seulement son fils, avec leur clan ? C’était à voir. Quoi qu’il en soit, école « partage » ou non, il y aura des voyages, c’était la seule chose de sûre. Pas seulement pour assurer un lien avec leur culture, pour les enfants, mais aussi pour que Formbi puisse les voir en secret.

« Son père et moi lui parlons dans notre langue, en plus du Basic, lui apprendre dès tout petit plusieurs langues ne fait pas de mal, c’est bien plus facile ensuite pour eux de les mémoriser. Bien sûr que ça prend beaucoup de temps, mais vous savez… Pour les femmes voulant être mères, et je parle bien uniquement d’elles… Dès qu’elles sont enceintes, leurs vies se recentrent entièrement autour de leur enfant. Il y a un lien incassable. Le temps exigé pour eux n’est plus qu’un détail. Le seul fait de les porter et leur donner la vie les attache à jamais à vous. »

Difficile de savoir si on lui avait déjà parlé du sujet de cette façon, mais étant donné ses réactions précédentes, il n’en avait pas l’air… Sans doute avait-il été simplement trop obnubilé autant par la guerre que par ses problèmes de l’époque, pour réaliser qu’il allait être père et ce que ça impliquait.

« Aviez-vous réalisé ce que cela signifiait d’être père, à l’époque ? »

Ils avaient tout prévu, alors. Quelle organisation. Avoir une famille, ça devait aider, ouais… Il redéposa doucement le gamin à terre, avec sa peluche, puis laissa retomber le bras contre lui. Le môme se mit d’abord à quatre pattes, en serrant toujours son doudou dans son poing minuscule, puis tenta de se mettre debout, en vacillant. Malgré lui, Anakin ne put s’empêcher de chercher des ressemblances avec les deux parents, physiquement parlant. Il ne trouva que la forme des yeux, semblable à celle de son père, puis le nez plus arrondi, ressemblant cette fois à sa mère. Rien d’autre encore. Enfin, il était encore très petit, peut-être que ça viendra plus tard. Ses propres enfants ressemblaient surtout à leur mère, physiquement… Et un peu à lui, aussi, quand il était plus jeune. Le garçonnet battit des bras un moment, avant de retomber par terre. Il avait quoi… Un an ? C’était normal de ne pas savoir marcher, à cet âge, c’était là qu’ils apprenaient ?

"Son père et moi lui parlons dans notre langue, en plus du Basic, lui apprendre dès tout petit plusieurs langues ne fait pas de mal, c’est bien plus facile ensuite pour eux de les mémoriser. Bien sûr que ça prend beaucoup de temps, mais vous savez… Pour les femmes voulant être mères, et je parle bien uniquement d’elles… Dès qu’elles sont enceintes, leurs vies se recentrent entièrement autour de leur enfant. Il y a un lien incassable. Le temps exigé pour eux n’est plus qu’un détail. Le seul fait de les porter et leur donner la vie les attache à jamais à vous."

Ah… ? Il reposa la tête contre la paroi, pensif. Ce lien-là, il l’avait connu, ressenti et chéri plus que tout, avec sa mère. Pour autant, il n’avait pas compris que ce pouvait être exactement le même pour d’autres femmes, avec leurs enfants. Il revoyait Padmé, lui annoncer sa grossesse, la peur dans ses yeux, avec le secret les entourant. Il réalisait qu’ensuite, mis à part la seule fois où elle avait discuté de l’endroit où élever secrètement ces enfants, ils n’avaient jamais franchement discuté de tout ça. Ils n’avaient même pas su qu’elle attendait deux enfants… Il s’était donc souvent demandé ce qu’elle avait pensé de cette grossesse. Ce qu’elle en attendait. Si elle était plus prête que lui. C’était comme si… Elle n’était pas enceinte. Ils n’en parlaient jamais, concentrés sur la guerre en cours et tous les problèmes. Comme si ce n’était pas réel.

"Aviez-vous réalisé ce que cela signifiait d’être père, à l’époque ?"

Il avala sa salive avec difficulté, plongé dans ses souvenirs. Les larmes aux coin des yeux, sans même le réaliser. Plus il pensait et plus il se disait que, quelque part, ils avaient nié la situation, ces enfants, au point de ne pas savoir qu’ils étaient deux. Ils ne les avaient pas attendu comme ils auraient dû. Ils s’étaient d’abord soucié de l’Ordre Jedi, du Sénat et de la guerre. Ils auraient dû, tous les deux, briser le secret les entourant, assumer cette vie, leur famille, quitte à perdre ce qu’ils faisaient sur le moment et tout recommencer ailleurs.

"On ne parlait quasiment pas d’eux," murmura-t-il sur un ton étouffé. "Seulement de la guerre, de nos propres problèmes… Ils étaient là, sans être là. J’avais peur pour elle mais pas pour eux. Elle avait peur pour la République et notre secret. On ne savait pas qu’ils étaient deux. Si elle le savait, pourquoi ne me l’aurait-elle pas dit ?"

Il rebaissa la tête vers le gamin, enfin debout, ou à peu près, sur ses petites jambes, qui venait de venir prendre appui contre son genou pour se tenir. Pour sa part, il ne comprenait pas… Padmé le lui aurait dit, si elle avait su qu’elle en attendait deux ! Et lui, dans sa vision, n’avait vu la naissance que d’un seul, que de son fils. Il tendit la main pour glisser un doigt dans les cheveux bleus foncés du gamin et ramener ainsi une mèche rebelle sur le devant.

"C’était garder le secret, qui nous importait. C’était même… Plus important qu’eux."