Sur les traces du passé [Nat]

L'Empire avait été rapide, plus rapide que dans leur propre époque, il fallait leur reconnaître ça, même si c'était mesquin pour Fel. La proximité de Coruscant permettait d'envoyer tant de renforts qu'on pouvait vite se retrouvé noyé dessous sans pouvoir réagir assez vite, ça devenait agaçant. Cet arrêt forcé sur Chandrila, encore une fois, devait être rapide... Nat rangea son comlink, après avoir prévenu son frère, puis sauta à terre hors de la navette pour aller à l'arrière et vérifier les moteurs. Le tir n'avait pas été assez puissant pour les exploser en plein vol mais tout de même assez pour l'empêcher de repartir tout de suite. Par bonheur, Chandrila était toute proche et même s'il n'était pas un as du pilotage, Nat se débrouillait juste assez bien pour perturber assez ses adversaires grâce à des manœuvres peu prudentes et ainsi les perdre derrière lui. Les moteurs auxiliaires crachaient des étincelles et des petites flammes, qu'il commença par éteindre en jetant un produit dessus, puis il enfila une paire de gants. Les TIE de cette époque étaient encore à l'étape "grossière production de masse sans finesse", c'était une chance.

En pleine nature, pas beaucoup de risques d'être dérangé, cette planète avait encore cette chance de ne pas être polluée ou sur-envahie comme Coruscant ou il ne savait où encore. Tirant ses outils de la soute, il se mit au travail en tâchant d'être le plus rapide possible, tout en repensant à sa dernière visite dans le coin avec Wrath-le-général-incompétent. Refuser d'accepter la reddition était une chose, le faire alors qu'il n'existait aucun moyen alternatif sinon le massacre pur et simple en était une autre. Une "retraite stratégique"... Lui appelait ça une fuite désespérée, après avoir pillé un peuple lui prêt à se battre, et qui n'avait pas été préparée avec soin, comme tout le reste d'ailleurs ! Nat ralentit ses gestes en sentant quelqu'un approcher puis cessa complètement lorsqu'il ressentit également son lien avec la Force. Lorsqu'il tourna la tête, il tomba sur un jeune visage familier, elle avançait comme si on allait lui tirer dessus, sabre en mains.

– Tiens donc, bonjour, Rosas. Je ne pensais pas te retrouver ici, le bruit courrait que tu avais été capturée par l'Empire.

Donc par les Siths, pourtant, elle n'était même pas plongée dans le Côté Obscur jusqu'au cou, plutôt mitigée, de ce qu'il en sentait. Sans cesser ses réparations, il lui lança un plus long regard, sourcils légèrement froncés.

– Que cherches-tu ?

On dirait bien que le choc et le bombardement ne lui avaient pas fait que du bien. Tarkin n’y avait pas été de main morte, malheureusement, la planète s’en souvenait encore… Nat n’eut qu’un très maigre sourire lorsqu’elle lui demanda s’ils se connaissaient, en réponse à son salut, apparemment encore plus perdue et perturbée que la dernière fois qu’ils s’étaient croisés. Si elle avait vraiment été capturée par les Siths, ces derniers n’étaient visiblement pas des plus doués pour garantir la stabilité mentale de leurs apprentis et encore moins pour garder un œil dessus, s’attacher leur loyauté. Étonnant, alors qu’on savait pourtant, pour quelques uns, qui était revenu et leurs pouvoirs. Hum, Krayt était peut-être cinglé et dangereux, cela dit, il savait s’y prendre pour obtenir la loyauté des siens, il serait de bon ton qu’il enseigne ça à ses confrères. Enfin, peu importe. Il se moquait mais savait lui-même ô combien il était facile de se détacher d’un Ordre une fois qu’on commençait à ne plus s’y sentir à sa juste place, y rentrer plus tard était difficile. Nat avait beau être revenu dans le giron des Jedis, il ne se sentait pas vraiment comme l’un des leurs. Plus maintenant.

– Je cherchais du calme et de la tranquillité. Et vous ? Qu'est ce qui vous a conduit ici ?

– La « tranquillité » dans les Mondes du Noyau, sachant que Coruscant est en train de les noyer sous les vaisseaux, comme c’est mignon. Ce n’est pas ça que tu cherches vraiment et tu le sais. La dernière fois qu’on s’est croisé, tu avais déjà tous ces doutes. Qui suis-je, que dois-je faire, où est ma place ? Car c’est toujours ce que tu te demandes, n’est-ce pas ?

Nat n’attendait pas vraiment de réponse, quand bien elle veuille démentir ou acquiescer cette affirmation, ça servira à peu de choses. A moins qu’elle ne pense la même chose que Cade, que l’ingénieur était définitivement incapable de prendre des pincettes pour annoncer les vérités et qu’il parlait toujours très platement. Comme si ça servait à quelque chose de tourner autour de pot, la galaxie irait beaucoup mieux si la franchise était de mise. Il leva légèrement les yeux au ciel, en pensant à ça, tout en fixant une pièce neuve au moteur auxiliaire, gardant un œil en coin sur la Sith-Jed-perdue-depuis-longtemps. Il lui faudrait une thérapie, tiens, ou bien lui faire cracher certains souvenirs et rancœurs une bonne fois pour toutes, qu’elle en ait la tête vidée, avant de faire quoi que ce soit d’autre. Une fois la pièce fixée, il tapota doucement les soudures pour en juger de la solidité, décidant assez vite de les renforcer.

– Il va falloir te décider un jour, ma grande. Que veux-tu être ? Je ne te demande pas de choisir entre un Ordre ou un autre, mais choisir ce que tu veux faire. Seras-tu combattante, chercheuse, ou autre ? Chercher le passé, c’est bien joli, mais ce n’est pas ça qui va te faire progresser.

L’ingénieur n’avait pas prévu cet arrêt ni le fait de tomber sur une ex-apprentie d’on ne savait plus de quel bord elle penchait, à force de changements, encore moins maintenant qu’elle était amnésique. Coup du destin, coup de la Force, simple hasard ? Oui, il croyait encore au hasard, malgré l’influence de la Force. Nat glissa la main sur son comlink puis envoya rapidement un message codé à Kol pour lui signaler qu’il avait une petite chose à régler et de ne pas l’attendre. Les gens perdus, il en avait l’habitude, il se demandait même s’il ne les attirait pas, comme une sorte d’aimant qu’il leur enverrait un signal. Ou peut-être était-ce parce qu’il savait ce qu’on ressentait lorsqu’on recherchait où était sa place et sa véritable identité, les personnes mettaient plus ou moins de temps à le trouver, et parfois, un bon bout de temps avant de l’accepter. Cette dernière étape était délicate… Nat sourit faiblement dans sa barbe, sans rien dire pendant que Rosas croisait les bras en le dévisageant, l’air de réfléchir à sa réponse. Il avait remarqué que la plupart des personnes savaient déjà très bien ce qu’elles étaient censées être mais qu’elles ne voulaient simplement pas se l’avouer. Par peur de se tromper, pour la plupart.

– Ce que je veux être ? Clairement pas Sith, ce n'est plus ma place, je le sens très bien. Jedi, peut être pas non plus, mais je veux apprendre la Force, ses subtilités, pourquoi elle est présente ou non dans certaines personnes, qu'est-ce qu'il fait qu'on peut s'en servir ou pas. Je veux savoir me battre et protéger ce qui est cher à mon cœur.

– Donc chercheuse, historienne, bibliothécaire, sans négliger le combat mais sans en faire non plus ta force principale.

Si elle était sûre de en plus vouloir être Sith, il lui faudra tout de même les combattre, tôt ou tard, en avait-elle conscience ? Il lui coula un regard aigu en refermant dans un claquement la petite trappe arrière, des moteurs, de sa navette. Il faudrait plusieurs vies avant de saisir toutes les subtilités de la Force, et même ainsi, il doutait que quiconque y parvienne un jour, elle était bien trop vaste, trop impénétrable, ils l’étudiaient depuis déjà des millénaires et tous ses secrets n’avaient pas encore été percés. Nat s’essuya les mains puis fourra le chiffon dans sa poche, avant de s’agenouiller pour prendre d’autres outils, rapidement. La Force était peut-être impénétrable mais heureusement, ce n’était pas le cas de la mécanique, on pouvait arranger un vaisseau au fin fond d’une forêt ou dans une grotte, avec une boîte d’accessoires de merdes, si on s’y prenait bien et si on possédait des notions solides dans le domaine.

– Si tu cherches un maître qui ne soit ni un Sith ni un Jedi, je ne sais pas où tu peux aller, reprit-il en se redressant. Juste pour l’info, tout ce que je sais sur toi, c’est que tu t’appelles Rosas Sky, que tu avais déjà voulu quitter les Siths une fois avant de te retrouver sur Alderaan, et sous les bombes de Tarkin, que tu as une chance infernale de ne pas être restée, et qu’on s’était croisé une fois, assez brièvement. Pour ma part, je ne nomme Nat Skywalker, enchanté de nouveau.

Il ne se souvenait plus vraiment du pourquoi elle avait voulu quitter les Siths, ça devait être quelque chose en rapport avec son ancien maître. Enfin bref, peu importe. Le passé c’est le passé, ça parasite le présent.

– Tu comptes rester plantée là longtemps ou bien réfléchir à où tu iras ensuite ? marmonna-t-il en continuant ses réparations.

L’ingénieur haussa légèrement les épaules lorsqu’elle demanda s’il était de la famille d’Anakin. Quelle importance ? Il menait son propre chemin, savoir qui étaient vos ancêtres n’avait pas un grand intérêt, ce n’était pas sa lignée qui allait décider pour lui de ses actions et son mode de pensées. De son côté, elle avait tout oublié, quelle importance, une fois encore. Le passé, c’était le passé, ça parasitait le présent. D'une manière générale, Nat n'avait jamais fait un très grand cas des événements qui pouvaient survenir, c'était la volonté de la Force, voilà tout. On était triste pour ceux et celles qui nous quittaient, bien évidemment, en revanche, c'était sur l'avenir qu'ils devaient se concentrer, sur le temps qui leur était donné. Les mains serrées sur deux fils, crachant des étincelles, qu'il dénoua avec soin, il fronça un peu les sourcils lorsqu'elle lui demanda s'il connaissait des Rebelles. Une personne importante à retrouver, hein ? Pas un maître potentiel, en tout cas, il y en avait peu et les Rebelles n'étaient pas bien friands des utilisateurs de la Force, surtout en ce moment.

– Qu'est-ce qui t'es arrivé pour avoir un vaisseau dans cet état ?

– Pas la peine de m'aider, je fais ça à ma manière.

Il lui reprit l'outil des mains et le laissa retomber dans la petite caisse, avant de frémir un peu, les yeux fermés. Kol... Comme un frémissement de la Force, un voile qui s'était de nouveau déchiré, puis dont le pan était retombé, dans un bref souffle, sans un bruit. Parti. Nat le ressentait, on pouvait ne pas le croire, il était convaincu que son frère avait été rappelé par la Force. Rouvrant les yeux, il soupira longuement, lui souhaitant d'être revenu dans leur propre époque. Son temps était terminé, il avait dû accomplir ce que désirait la Force. Très bien, chacun devait se concentrer sur son propre Devoir. Nat referma le dernier clapet, dans un claquement sonore, puis se pencha pour ranger les outils. Il devait y aller, rapidement, s'il était seul pour mener la tâche à bien, pas question de perdre du temps. Cela changeait assez ses plans, néanmoins, faire demi-tour était hors de question.

– Je signalerai aux Rebelles que tu recherches ton ami, ils diffuseront le message et il viendra te trouver ici, sur cette planète, s'il le veut. Pour ma part, j'ai un Devoir à accomplir.