Darth Sidious, Empereur Galactique

La tension dans la salle de réunion et autour de cette table était bien plus modérée que l’Empereur aurait pu le songer, après les récents événements. Beaucoup, ici, ne voyaient cette situation que comme la continuité logique d’une affaire attendue depuis bien des années. Personne, ici, n’avait jamais eu une entière confiance en le grand amiral venu des ces régions si lointaines et tous, ou presque, s’étaient attendu à une désertion, tôt ou tard, dès son entrée dans la Marine Impériale. Personne non plus n’était surpris de la désertion de son petit assistant humain, qu’il avait gardé à ses basques depuis plus de dix ans. Les nouveaux avis de recherche à leurs têtes avaient déjà commencé à se diffuser, au milieu d’autres, dès l’annonce faite de cette double trahison. Voilà qui réglait une question que l’Empereur s’était posée il y a longtemps, de quelle manière leur amiral bleu allait-il finalement trahir l’Empire et pour quelle raison exacte ? Après avoir parié intérieurement sur plusieurs pistes, voici finalement la réponse. Quant au gamin de l’Espace Sauvage, Palpatine ne s’était pas attendu à ce qu’il reste, quoi qu’il arrive, même si Thrawn n’avait pas déserté. Croiser Plagueis en tête à tête durant plusieurs heures aurait fait fuir n’importe quel officier.

Non, la réelle surprise, autour de cette table, était bel et bien la désertion du colonel Yularen. Personne ne s’y attendu, ni préparé, et l’Empereur n’y aurait pas cru non plus. Yularen était un des officiers les plus loyaux – et fanatique – que l’Empire ait compté dans ses rangs. Si loyal et acharné dans son travail qu’il avait su gagner la confiance de tous et avait été très respecté, au sein de cette immense machine impériale. Et le voilà qui disparaissait à son tour, emportant avec lui non seulement de très nombreuses informations capitales mais aussi une part de la confiance ferme que les hommes sous ses ordres avaient envers l’institution. Ils ne pouvaient guère se permettre de laisser le BSI se noyer dans les troubles et le doute. Outre la taille tentaculaire de l’organisation, elle avait trop de responsabilités et de rôles à jouer pour qu’ils puissent se permettre de la laisser se scléroser. Contrairement au BRI, qui restait un bureau relativement petit, et donc aisé à surveiller dans sa globalité, le BSI comptait dans ses rangs un nombre impressionnant de membres, sans oublier ceux et celles qu’ils devaient chapeauter, conditionner, voire reconditionner d’une façon plus brute. Déceler les traîtres dans le tas ne sera pas une mince affaire.

Pour autant, il ne s’agissait pas d’agir de façon brutale ou excessive. Laisser croire que les hautes institutions de l’Empire ne portaient plus leur confiance en le BSI serait tout simplement catastrophique, que ce soit dans un contexte ordinaire ou dans un contexte exceptionnel, comme aujourd’hui. Un nouvel homme fort allait être nommé, en remplacement de Yularen, et d’ici là, un ménage discret allait être mené dans les rangs. Une analyse poussée, pourrait-on dire, puis une action en conséquence. Le colonel Yularen avait tout intérêt à fuir très loin d’ici… Ce sujet les occupa un long moment, durant toute la première partie de leur réunion. Isard semblait plutôt agacée de ne pouvoir appliquer des méthodes plus expéditives mais comprenait également la nécessité d’agir discrètement. Le bureau d’analyse, sous ses ordres, aura bien des heures supplémentaires à effectuer, très bientôt, au cours de cette opération de nettoyage. Une fois le cas du BSI réglé, ou plutôt une fois toutes les actions à mettre à son encontre réglées, ils passèrent au sujet suivant. Une fois de plus, la Force devenait une source directe d’ennuis, plus ou moins importants. La vie était plus simple, lorsqu’ils n’étaient plus que deux Siths et une petite poignée de Jedis survivants vivants, cachés dans les tréfonds de la galaxie.

L’Empereur avait dû revoir certains de ses plans, certains à long terme, d’autres plus proches, bien plus actuels. Il avait également dû reconsidérer le rôle à attribuer à certaines personnes. Qu’une de ses Mains soit gâchée, soit, cela arrivait et il existait bien des facteurs pouvant attaquer le conditionnement d’une personne, que ça vienne d’elle-même ou de son environnement. Ce qui agaçait plus Sidious, en revanche, c’était que ce problème vienne, encore et toujours, des mêmes troubles-fêtes qui ne cessaient de lui pourrir l’existence depuis des mois, des années maintenant. Comme pour se payer sa tête, la Force et les failles avaient décidé de ravaler, littéralement, Cade Skywalker, avant que l’Empereur n’ait eu le temps de s’occuper personnellement de son cas, après celui de Mara. Il avait eu beaucoup de chance… L’autre blondinet ne perdait rien non plus pour attendre, Palpatine le tenait pour personnellement responsable d’avoir détourné sa Main de lui. Oui, il s‘agissait bien toujours des mêmes, qui causaient les ennuis… Quoi qu’il avait été également surpris de voir Jinzler participer à ce grand cycle du « Je vais causer des problèmes autour de moi simplement avec une histoire de famille ». Palpatine soupçonnait même Thrawn d’avoir su depuis des mois que cette femme était de retour et n’en avait rien dit avant que ça ne soit découvert par l’Empire seul, ou pire encore, de l’avoir croisée face à face, sans l’arrêter.

Le fait qu’elle porte un enfant demeurait néanmoins un détail intéressant, qui pourra servir plus tard, le cas échéant. Une petite information rangée dans un coin de son esprit, en attente pour le moment. Il ne pouvait, de toute manière, pas l’atteindre pour le moment, et laissait même ce soin aux Rebelles, qui seront sûrement ravis d’apprendre ce nouvel imbroglio de famille. Là où leur confiance envers les Jedis était déjà malmenée, pour ne pas dire presque tarie. Lorsque leur réunion prit fin, Palpatine quitta la salle d’un pas tranquille, ses pensées se tournant ensuite vers le cas d’une autre femme, une autre de ses Mains. Il n’excluait bien sûr pas l’idée que Mara revienne d’entre les morts par ces failles et qu’elle se mette sur les traces de Shira, dès son retour, au milieu d’un ou deux autres problèmes causés au passage avec son cher blondinet. Voire que les deux se mettent sur les traces de Shira. En chemin, il commença par se rendre dans l’esprit de Shira, en douceur, assez pour qu’elle ne remarque rien… Il pouvait la plonger à distance dans un sommeil tranquille, un sommeil naturel, finalement, lorsqu’il en avait besoin. Avant qu’elle ne quitte Coruscant de nouveau pour partir en mission, il avait une tâche à effectuer.

Seigneur, votre navette est prête.

Un transport secret l’attendait, avec une garde là encore modérée et plus discrète. Un voyage court, jusqu’aux appartements de sa petite « protégée ». Il était bien rare que l’Empereur vienne ici, d’ordinaire, il la convoquait et elle se déplaçait aussitôt. Pour cette fois, faisons une exception… Il pénétra seul dans les appartements, plongés dans la pénombre du soir, jusqu’à aller trouver la jeune femme, endormie comme il l’avait souhaité dans le canapé. Il stoppa au-dessus d’elle, debout, la regardant l’espace d’un instant. Puis, lentement, il posa sa main ridée contre son front, après avoir dégagé les quelques mèches rousses. Ce n’était guère un pouvoir brutal, ou de guerre, mais il n’en restait pas moins puissant. Le conditionnement mental par la Force, la la manipulation de la psyché, tout cela demandait un contrôle fin de la Force… Peu de Siths prenaient la peine de longuement pratiquer ce domaine et de faire ployer un esprit par leur propre pouvoir. Il s’immisça sans heurts ou douleurs dans l’esprit de la rouquine, entrant comme s’il était chez lui, sans toutefois l’étouffer de sa présence, comme il l’avait fait contre Mara.

Cet esprit était, sous sa main, une grande machine composée de multiples pièces, qu’il pouvait déplacer, modifier, renforcer ou affaiblir à sa guise. Remodeler à son bon vouloir, pour faire d’elle ce qu’il souhaitait. Elle n’était qu’une marionnette parmi les autres. Il s’intéressa d’abord au conditionnement général qu’il lui avait imposé, le retravaillant avec un grand soin pour le renforcer. Cela passait par la loyauté qu’elle éprouvait envers lui, bien sûr, mais aussi un attachement filial conséquent… Un attachement qu’elle ne pourrait éprouver pour personne d’autre à une telle intensité… Il renforça également la fierté qu’elle pouvait avoir de servir l’Empire et la place qu’elle y tenait, sa ferveur, son engagement. Il accentua son ambition, puis, après un moment de réflexion, accentua son envie de s’investir dans son apprentissage de la Force, l’attrait du côté obscur. Ce n’était guère compliqué, elle qui n’hésitait déjà guère à user de violence contre leurs prisonniers, lors des interrogatoires. Ce goût de la noirceur allait la guider. Il ne la laissera pas être gâchée par l’amour d’un stupide petit Jedi. Cette faiblesse était intolérable.

Il accentua également le profond racisme qu’elle pouvait éprouver envers les non-Humains, tout comme sa fierté à être, elle, une des pièces maîtresses de la machine impériale, puis se retira de son esprit. L’opération avait duré plusieurs heures et la nuit touchait déjà à sa fin. Satisfait, l’Empereur quitta alors les appartements, revenant vers sa garde, puis vers le Palais. Elle se réveillera seule d’ici quelques heures. Et lui avait encore bien d’autre travail à accomplir.