Toute cette affaire s’était soldée sur une véritable catastrophe… D’abord avec le Tailleur, ensuite l’accident de la reine, le temps passé à l’hôpital, celui perdu à cause du médecin en chef de l’unité qui avait tenu à faire des examens supplémentaires avant de vraiment les laisser partir et ensuite le temps nécessaire pour rejoindre le vaisseau. Le tout sans avoir pu trouver une tenue correcte à la reine consort et par-dessus tout, sans avoir pu, donc, la conduire au bal prévu. Bref, tout s’était extraordinairement mal passé et la journée avait été un véritable calvaire. Le vaisseau avait à peine décollé et était encore coincé, pour le moment, dans les longues files des vaisseaux et navettes de Coruscant, en attendant de pouvoir rejoindre l’orbite puis quitter la planète. Les contrôles impériaux supplémentaires étaient désormais si nombreux que tout était encore plus ralenti que d’ordinaire. Comme s’il y avait besoin d’une raison supplémentaire d’être contrariée. Isobel passa un peu plus de temps sous la douche que d’ordinaire, histoire de se détendre un maximum, puis enfila une robe très simple en sortant. Ne restait qu’à se sécher les cheveux.

Ce qui s’était passé tournait en boucle dans son esprit, elle ne cessait de ressasser, encore et encore… Jusqu’à s’en épuiser elle-même. Cette planète, dont elle avait déjà eu une piètre opinion avant aujourd’hui, la rendait encore plus nauséeuse aujourd’hui. Elle détestait les personnes profitant de leur statut social pour nuire à d’autres personnes et détestait encore plus ceux et celles qui se permettaient de rabaisser absolument tout le monde. Enfin… On pourrait aussi, quelque part, se dire que ce n’était pas si grave, mais… Qui sait quelles répercussions ce genre d’événements peut avoir. Après tout, la haute société de Coruscant peut faire preuve d’un cynisme sans pareil, lorsqu’elle s’y met. Isobel termina rapidement de mettre une très légère couche de maquillage, rapide car elle n’avait pas envie de se prendre la tête, puis quitta sa cabine. Pour se rendre dans la partie privative, sur le vaisseau, où logeait la reine consort et la reine Organa-Hilts lorsqu’elle voyageait. Elle commença, dans la cuisine annexe, par préparer un plateau, avec du thé, des fruits et du pain. Bien que son altesse ait déjà mangé, il y a peu de temps, peut-être qu’une collation lui fera du bien.

Isobel s’annonça, quelques minutes plus tard, à la suite qu’occupait la princesse, son plateau en main. Une fois rentrée, elle alla le déposer sur une table élégante en bois, non loin de la princesse, en précisant que le thé préparé avait été amené à bord avant le début du voyage, qu’il venait d’un petit producteur d’Alderaan et qu’il s’agissait d’une nouvelle variété. Il était très important de le préciser, car le goût était différent, il pourrait dérouter la princesse. Il s‘agissait de thé vert, cultivé au creux de la vallée voisine à la capitale. L’Intendant du Palais avait découvert cette variété un peu par hasard, lors d’une journée de congés, où il avait eu l’occasion de le goûter. Au fond, Isobel espérait aussi que cette mise en avant des produits de leur belle planète puisse aider à faire oublier plus vite les désagréments de la capitale et d’une partie indigne de sa population. Les suivantes procédaient toujours de cette manière, après de tels cas, afin d’apaiser quelque peu le moment présent. Quoi de mieux, pour chasser le mauvais esprit, que d’en appeler à de beaux souvenirs.

"Comment vous sentez-vous ? Avez-vous besoin que le médecin de bord vous examine ou ne vous donne un calmant ?"

Peut-être n’avait-elle besoin que de repos, à présent, mais sait-on jamais…

Cette journée lui restait encore bien en travers de la gorge. Dès le départ, tout était aligné pour que ce soit une catastrophe. L’idée même de participer à une réunion mondaine sur Coruscant selon le code strict de la Haute Société de la ville-monde était une aberration. Depuis quand les souverains d’un monde devait-ils se plier aux exigences les plus ubuesques de quelques petits aristocrates ou bourgeois d’un autre ? Leur obstination était pathétique. Takara aurait dû faire ce qu’elle avait voulu depuis le début, et refuser cette idée de chercher l’inclusion là où, par défaut, elle était vouée à l’échec. Cette longue session chez la Maison Channol avait été un enfer. Il y avait d’abord eu tout ces gens qui lui avait tourné autour pour savoir ce qui lui irait le mieux aux pieds, aux poignets… Puis il y avait eu ce Tailleur insupportable, infect, même. Elle aurait dû lui briser la nuque au moment même où il l’avait insulté, sans chercher à calmer le jeu, pour bien faire comprendre qu’elle n’était pas n’importe qui, et qu’il était hors de question que qui que ce soit s’adresse à elle de la sorte. Qui aimerait cela, d’ailleurs ? Qui accepterait de se faire insulter pendant des heures pour finalement repartir avec le sourire, si possible en disant, en plus de cela, ô combien ils avaient raison de lui avoir pourri la vie ?

Non, tout ceci n’était qu’une fabrication d’une aristocratie bien trop perchée dans ses fantasmes pour avoir ne serait-ce qu’une once de pragmatisme et de logique. Et c’était sans parler de cet impudent qui avait osé profiter de la situation pour toucher Isobel, en sa présence, sous son regard ! C’était presque à croire que tout ceci n’avait été, au final, qu’un coup monté contre elle, Leia, et Alderaan. Lui aussi, aurait dû finir la nuque brisée, pour son comportement. Ce n’était pas parce qu’elle était Sith, que leur image était déjà bien trop ternie, qu’elle se laisserait gifler de la sorte sans rien dire. Un jedi pouvait faire exploser toute une station avec des dizaines de milliers de vie à bord sans que ça ne pose de problèmes. En revanche, il suffisait de serrer un peu le cou d’un scélérat pour être cataloguer comme un monstre.

Et finalement, il y avait eu cette chute, stupide, en sortant de cet enfer. Puis l’hôpital, alors qu’elle aurait sans doute reçu les mêmes soins à bord. Surtout que ce n’était pas grand-chose, et qu’il n’avait pas fallut bien longtemps pour soigner sa cheville, qui lui demanderait tout de même encore un petit peu de repos. La facilité de se soigner, à cette époque, restait étonnante, et cela ne l’avait pas empêché de marcher à nouveau, une fois à bord du vaisseau. Sans trop forcer, bien sûr, et surtout sans chaussures.

Takara venait tout juste de se changer, dans une robe légère et simple qui pourrait presque faire office de robe de chambre, lorsqu’Isobel s’annonça à la porte de la suite privative. La jeune reine consort eut tout juste le temps de s’asseoir au bord d’un siège particulièrement confortable avant de lui signifier qu’elle pouvait entrer. La sith l’accueillit avec un sourire aimable, car c’était sans doute bien la seule personne à bord à même de comprendre ce qu’il s’était passé, et ce qu’elle en pensait. C’était aussi la seule personne qui était parvenu à agréablement la surprendre, aujourd’hui, au milieu de ce purgatoire qu’avait été son rendez-vous auprès de la Maison Channol.

Elle appréciait son comportement en plus de sa compagnie. Aussi la laissa-t-elle faire ce qu’elle pensait savoir faire de mieux, se contentant de sourire à son explication concernant le thé, comme si cela suffirait à chasser toutes les mauvaises pensées qu’elle pouvait encore avoir concernant ce qui s’était passé. Était-ce une manière pour elle de chercher un moyen de s’excuser pour quelque chose dont elle n’était pas responsable ? Peut-être bien. On lui avait dicté une attitude similaire, à son arrivée sur Alderaan, quand sa relation avec Leia était encore un secret.

« Merci, Isobel. » fit-elle, avec un nouveau sourire.

Il n’y avait pas de Mademoiselle Mackay, lorsqu’elles étaient seules. C’était beaucoup plus simple ainsi. Takara prit ensuite une des tasses, pour venir renifler l’odeur du thé en question, avant de venir la porter à ses lèvres, pour le goûter. Puis elle reposa l’ensemble sur la table, avec approbation, tout en écoutant les questions d’Isobel. Malgré son léger sourire, le regard qu’elle jeta à Isobel sur l’instant en dit long sur sa frustration, et son agacement par cette affaire.

« Particulièrement frustrée. J’aurais dû leur tordre le cou, ça n’aurait rien changé, et au moins aurais-je pu tirer un plaisir de cette journée maudite… »

Takara déglutit, la chose étant sortit toute seule, et sans le moindre filtre. Son regard s’échappa d’Isobel pour venir se poser sur la petite table devant elle, dans le thé reposant dans sa tasse. Mackay ne faisait sans doute pas allusion à cela, mais plutôt à son état de santé. Sur ce point, au moins, ça allait plutôt bien. Aussi, agitant vaguement la main, elle rejeta le sujet précédent, lâché sans véritable volonté.

« Bref, ça n’a plus d’importance. Pour le reste, ça ira. Ce n’est rien. J’ai connu pire. »

Elle ne voulait pas en parler, car il n’y avait rien à dire. Sa cheville était déjà soignée, il fallait juste qu’elle évite de trop forcer dessus encore un peu. Elle méditerait plus tard, pour accélérer le peu de guérison qu’il resterait. A vrai dire, Takara préférait profiter de l’occasion pour discuter d’autre chose avec Isobel, avant qu’elles n’arrivent toutes les deux sur Alderaan. Ce qui s’était passé chez le Tailleur n’était pas que de son fait. Elle n’avait rien fait à l’assistant qui puisse expliquer ce qui s’était passé, mais elle avait clairement senti la Force s’agiter autour d’elles, lorsque cela s’était produit. Au fond, Takara avait toujours trouvé quelque chose de singulier chez Isobel, et a présent elle pensait comprendre pourquoi elle l’avait choisi elle, et pas une autre, pour la suivre partout.

D’un geste de la main, donc, elle désigna le fauteuil à côté d’elle, avant d’agiter les doigts pour l’inviter à s’asseoir.

« Je préfèrerais que l’on parle de vous, ce qui s’est passé a dû profondément vous marquer. J’ai senti votre colère, et votre dégoût, avant que je n’intervienne. Et même après. » Elle prit sa tasse en main, pour boire une petite gorgée du thé. « Vous pouvez en parler, vous savez ; Me dire ce que vous avez ressenti, avant qu’il ne s’évanouisse. »

"Particulièrement frustrée. J’aurais dû leur tordre le cou, ça n’aurait rien changé, et au moins aurais-je pu tirer un plaisir de cette journée maudite…"

C’est-à-dire qu’Isobel parlait de sa cheville… Celle qu’elle s’était brisée en quittant la maison de haute couture… Mais elle comprenait bien, également, que ce qui l’ait le plus énervée soit avant tout les personnes s’étant trouvées dedans. Et la jeune femme dû le comprendre car elle finit par agiter la main en lançant que « le reste » n’était rien. Pour ça, Isobel voulait bien la croire, quand bien même elle n’imaginait qu’à peine le genre de vie secrète que les Sith pouvaient avoir entre eux. Enfin… Tant mieux si elle se sentait mieux. Quant à la colère, elle passera, elle aussi. Elle s’apprêtait à repartir, après avoir rappelé de ne pas hésiter à l’appeler cette nuit si jamais cela n’allait pas, lorsque la consort lui fit tout à coup signe de s’asseoir. Isobel eut un léger temps d’arrêt puis s’exécuta. Peut-être avait-elle une mission « diplomatique » dont elle désirait discuter, comme souvent après de tels événements. La jeune femme aurait néanmoins préféré qu’elle prenne d’abord le temps de se reposer, cela pouvait attendre le retour sur Alderaan. Les soins pour un os brisé avaient beau être rapides, ils n’en restaient pas moins fatigants.

"Je préfèrerais que l’on parle de vous, ce qui s’est passé a dû profondément vous marquer. J’ai senti votre colère, et votre dégoût, avant que je n’intervienne. Et même après. Vous pouvez en parler, vous savez ; Me dire ce que vous avez ressenti, avant qu’il ne s’évanouisse."

Là, Isobel voyait mal où elle voulait en venir et eut bien du mal à le cacher… Une vague de perplexité envahit son visage, avant qu’elle ne parvienne à se reprendre. Oui, elle avait éprouvé beaucoup de colère, mais en quoi cela avait la moindre importance ? N’importe qui d’autre aurait été en colère, dans la même situation. Ce qui comptait, c’était de savoir se maîtriser dans un tel cas. La colère était une trop mauvaise amie pour la laisser prendre dessus, c’était quelque chose qu’elle avait dû apprendre très jeune et qu’elle avait bien failli oublier pour de bon aujourd’hui. Repousser cet être répugnant avait été un réflexe, en revanche, elle jugeait avoir tardé à se reprendre ensuite. Même maintenant, une part d’elle regrettait un peu qu’il n’ait pas subi pire que cela, enfin… Ce n’était pas à elle d’en juger, après tout. Si tout cela s’était déroulé dans la rue et pas dans une telle situation, cet homme ne s’en serait pas tiré à si bon compte.

"Eh bien… Je sais que j’ai mis trop longtemps à maîtriser ma colère et j’en suis navrée. Mais ce n’était pas tant marquant ou une épreuve, simplement la goutte de trop. Ce tailleur ne cessait de vous insulter, depuis le début, d’où la colère. Le geste de son assistant est arrivé au plus mauvais moment. Néanmoins, il ne fallait pas que ça dérape plus. Je souhaitais juste qu’il disparaisse ou s’évanouisse, durant un temps… Il a dû s’évanouir sous la pression, au bon moment en plus, j’en remercie le ciel."

C’était au moins ça de satisfaisant. Si elle avait été très surprise, presque choquée, sur le moment, tout ça était passé depuis. Elle s’était dit que sous le coup du stress, en étant tenu si soudainement par le cou, il avait tout simplement dû s’évanouir. Tout simplement. Ce qui ne l’empêchait pas, entièrement, d’en bénir tous les dieux et les esprits qu’elle connaissait. Une pensée qui lui arracha un bref sourire.

"C’était comme si quelqu’un répondait soudainement à ma prière, la sensation était étrange mais très brève. Cela dit, ça ne compense en rien le comportement qui vous a été adressé."

Takara se contenta de garder son sourire malgré l’air perplexe d’Isobel. Elle pouvait comprendre son incertitude, vu qu’elle n’avait pas été dans le détail en lui suggérant de parler de ce qu’elle avait ressenti, lorsque l’assistant du tailleur avait porté la main sur son corps, puis lorsqu’il s’était soudainement évanoui, alors que la sith l’avait encore entre les doigts de sa main invisible. Elle-même avait été surprise de le voir tomber dans les vapes, la chose n’ayant pas été de son fait. Elle n’avait pas exercé une pression suffisante sur sa trachée pour provoquer cela, et il ne s’était pas évanoui par peur non plus, de ça elle en était absolument certaine.

Les oscillations qu’elle avait ressenti dans la Force à ce moment là ne mentait pas. Sa dame de compagnie, et suivante, en avait été à l’origine, ce qui ne laissait pas de place au doute. Isobel était sensitive, ce qui expliquait peut-être pourquoi, en plus du reste, la jeune sith l’avait trouvé différente des autres. Peut-être que tout était lié, finalement, bien qu’il fût encore trop tôt pour le dire. Dans tout les cas, l’opportunité était bien trop belle pour être manquée. Takara ne pouvait pas la laisser dans l’ignorance alors qu’elle pouvait désormais leur apporter bien plus, à Leia et elle. En plus d’Alderaan, bien évidemment.

"Eh bien… Je sais que j’ai mis trop longtemps à maîtriser ma colère et j’en suis navrée. Mais ce n’était pas tant marquant ou une épreuve, simplement la goutte de trop. Ce tailleur ne cessait de vous insulter, depuis le début, d’où la colère. Le geste de son assistant est arrivé au plus mauvais moment. Néanmoins, il ne fallait pas que ça dérape plus. Je souhaitais juste qu’il disparaisse ou s’évanouisse, durant un temps… Il a dû s’évanouir sous la pression, au bon moment en plus, j’en remercie le ciel."

Croisant délicatement une jambe par-dessus l’autre, Takara déposa doucement ses mains dessus, liée l’une dans l’autre. Puis posant finalement son regard dans celui d’Isobel, elle écouta cette dernière avec une attention toute particulière. Elle fit fi, bien sûr, de ses excuses, inutiles dans ces circonstances. Ce n’était pas elle qui était fautive. Takara aurait dû mettre un terme à cela bien avant que la situation ne dérape. Puis, une fois encore, toute cette affaire était déjà derrière elle. Leia comprendrait, et trouverait un moyen de régler le problème. Ou de l’ignorer, tout simplement. En revanche, elle ne le dirait pas à Isobel, non. Elle était beaucoup plus intéressée par exploiter l’état d’esprit de sa dame de compagnie; sa colère ; sa frustration ; sa désapprobation; sa culpabilité. Des ressentis forts, puissants, qu’elle aurait probablement de nouveau, à l’avenir, et sur lesquels il était possible de travailler, là, dès maintenant.

"C’était comme si quelqu’un répondait soudainement à ma prière, la sensation était étrange mais très brève. Cela dit, ça ne compense en rien le comportement qui vous a été adressé."

Elle eut un léger rictus satisfait au coin des lèvres. Ce qu’elle décrivait-là était bien l’œuvre de la Force, il n’y avait absolument pas de doute, et donnait désormais assez de contexte pour comprendre parfaitement, et en détail ce qui s’était passé. Takara trouvait même amusant de sentir ce qu’Isobel ressentait, en disant cela, et elle acquiesça à son propos, d’un air parfaitement compréhensif. Et elle l’était, compréhensive. Elle comprenait la satisfaction, le contentement et le soulagement qu’elle avait dû ressentir, en voyant l’assistant tomber mollement au sol, sans jamais se réveiller.

« Je savais bien qu’il y avait quelque chose de spécial, chez vous. Je ne savais pas quoi exactement, mais c’est très clair, à présent. »

Elle avait dit ça calmement, presque comme une confidence, en se penchant un peu en avant. A présent, il serait question de l’exploiter, et Takara n’accepterait pas de refus de sa part. Pas après ce à quoi elle avait assisté. Déliant doucement ses mains, elle attrape de nouveau sa tasse, pour la porter à ses lèvres et boire une nouvelle gorgée, laissant volontairement planer le doute sur le sujet.

Puis, finalement, reposant la tasse sur sa coupelle, elle finit par dire, en reposant son regard sur le visage d’Isobel :

« La vérité, c’est qu’il ne s’est pas évanoui de peur, ou de panique, non. Mais bien parce que vous lui avez commandé de le faire. C’est vous, qui avez fait cela, Isobel. »

Cette fois-ci plus franchement, avec beaucoup moins de forme.

« Rien que vous, par la puissance de votre volonté. »

"Je savais bien qu’il y avait quelque chose de spécial, chez vous. Je ne savais pas quoi exactement, mais c’est très clair, à présent."

Si être spécial, pour elle, était simplement avoir du mal à gérer sa colère face aux personnes infectes, c’est qu’il en lui en fallait bien peu. Enfin, chacun avait sa propre opinion sur le sujet… Isobel était plutôt du genre à vouloir rapidement laisser couler de telles choses, elle n’aimait pas trop s’attarder sur de tels événements. Surtout lorsqu’il fallait songer en priorité aux conséquences et comment les gérer. Il n’y avait aucun doute, ce type cherchera à se venger, d’une façon ou d’une autre… Sans doute en utilisant les biais politiques… La Reine sera sans doute furieuse, en apprenant tout cela, que de mauvaises nouvelles à ramener sur Alderaan. A vrai dire, elle ne comprenait même pas comment la consort pouvait prendre les choses de façon aussi détendue, où pouvait-elle bien trouver du positif dans toute cette histoire ? A moins qu’avoir évité la tentation d’achever pour de bon cet homme infâme et son assistant grossier soit une réjouissance suffisante. Ce serait bien maigre, mais soit, pourquoi pas.

"La vérité, c’est qu’il ne s’est pas évanoui de peur, ou de panique, non. Mais bien parce que vous lui avez commandé de le faire. C’est vous, qui avez fait cela, Isobel. Rien que vous, par la puissance de votre volonté."

Elle ne put empêcher un petit sourire amusé de venir flotter un instant sur ses lèvres. Il est vrai que, dans certaines situations, elle avait secrètement rêvé d’être capable de faire taire ou d’assommer certaines personnes simplement en le voulant, mais hélas, c’était complètement impossible. Enfin, ce devait l’être pour les Sith, sans doute. A vrai dire, elle ne connaissait rien de leurs pouvoirs, mis à part qu’ils pouvaient étrangler les gens, alors pourquoi pas ? Est-ce que ces Jedi pouvaient faire la même chose, d’ailleurs… ? A ses yeux, ça s’apparentait à une forme de sorcellerie ou de magie bizarre, comme on en lit dans des romans, ici et là.

"C’est un rêve inaccessible, madame. Si j’en étais effectivement capable, voilà longtemps que ça aurait pu servir, dans de nombreuses missions diplomatiques. Ou tout simplement sur Alderaan, pour régler au plus vite les caprices enfantins de certains membres de la Haute Société et les empêcher de venir ennuyer la famille royale. Si seulement il suffisait d’un léger geste de main pour qu’une personne fasse son travail au lieu de tergiverser durant des heures, ce serait formidable… Mais ça n’arrive pas dans mon monde. Je comprends mal comment il aurait bien pu suffire que je veuille que cet homme s’évanouisse pour qu’il le fasse réellement. Il n’existe sans doute aucun Dieu ou autre chose qui ait la force nécessaire pour agir comme ça au travers des gens."

L’idée même était très étrange… Sans être spécialement croyante, elle connaissait les fondements de quelques cultes, dans les Mondes du Noyau, hors, aucun ne parlait d’une divinité pouvant accomplir ces miracles. Le seul truc possible, finalement, c’était cette espèce d’énergie dans le corps des gens comme la reine, qui leur permettait d’accomplir ça.

Ah, oui. Takara garda un air plutôt neutre, en se rappelant qu'Isobel était une totale néophyte de la Force, ne connaissant rien aux capacités qu'elle fournissait, et au bienfait que cela faisait d'en sentir sa présence. Elle avait faillit oublier, pendant ce bref temps, que sa dame de compagnie ne connaissait des Jedi et des Siths que ce que la propagande impériale, ou même rebelle, pouvait en dire. Takara ne considéra pas cela comme une mauvaise chose, bien au contraire, préférant y voir là une opportunité nouvelle. Si Isobel ignorait tout de ce qu’était la Force, et notamment les siths tels qu’ils étaient caricaturés depuis des millénaires, peut-être que la former un peu, de sorte qu’elle puisse les assister Leia et elle, pouvait s’envisager sans qu’elle n’ait trop d’à--priori.

« C'est parce que vous ignoriez, et ignorez encore, quel pouvoir sommeille en vous, Isobel. Celui que peut vous octroyer la Force. Soulever et étouffer un individu n'est qu'une infime facette de ce qu'elle peut vous offrir. »

Elle avait dit ça sans le moindre jugement, ni appréhension, se contentant d’énoncer la vérité, rien que la vérité. Isobel se devait de la croire, a défait de pouvoir, pour le moment, le constater par elle-même. Qu'elle ait pu ainsi agir sur l’esprit de l’assistant, aussi faible ce dernier ait pu-t-il être, sans formation aucune, présageait d’un potentiel plus qu’intéressant. Bien sûr, parler de la Force, comme ça, devait lui paraître très abstrait, un mot comme un autre. Pourtant, si ce n’était là qu’une simple dénomination comme bien d’autres, sa présence, et son potentiel, était bien réel.

« La Force, cette entité que beaucoup dans la galaxie associe à de la magie, de la sorcellerie, ou à l'œuvre de dieux disparus, elle est en vous, comme en moi, comme en chacun de nous. Partout. »

C’était pour cela qu’elle avait été capable d’attraper le tailleur et l’assistant à la gorge. C’était aussi pour cela que sa tasse à moitié vide se soulevait légèrement de sa coupelle sans qu’elle ne la touche vraiment, en se contentant de bouger l’index et le majeur. La sith jeta un air distrait à la chose, brièvement, avant de reporter son attention vers Isobel, reposant par la tasse à sa place, par la même occasion. Revenant croiser ses mains sur ses genoux, Takara esquissa un léger sourire, avant de prendre le contrepied des éventuelles questions en tout genre que sa dame de compagnie pourrait avoir. Ils auraient tout le temps pour cela, pendant ce voyage retour vers Alderaan. Et même au-delà.

« Il y aurait beaucoup à en dire, mais pour le moment, disons que c’est ce qui fait la différence entre la Reine, moi, ou vous désormais, c'est que nous avons la faculté d'interagir avec elle, de la maitriser. Dès lors, rien n’est inaccessible. »

Rien, à commencer parce qu’Isobel avait justement évoqué juste avant. Takara avait déjà utilisé ces mêmes dons au Palais, de façon discrète et occasionnelle, par exemple lorsque le gouverneur militaire impérial était venu poser des questions un peu trop indiscrète à ses yeux. Elle n’en abusait pas pour autant, simplement pour ne pas attirer l’attention sur elle, mais aussi parce que Leia s’occupait en gérénal elle-même de ce genre de problèmes. Sur ce point elle l’avait bien formé, et sa femme avait toujours été douée, naturellement, pour convaincre les gens.

« Ce n’est, bien sûr, pas quelque chose que l'on apprend en quelques jours. Mais avec de la discipline, et une forte volonté, vous pourriez vous aussi apprendre à vous en servir. Et réaliser tout ce que vous venez de dire : taire les caprices d’un revers de main ; s’assurer que chaque personne fasse bien son travail d’un claquement de doigt. Imaginez tout ce gain de temps, au Palais, et en dehors. »

Cette fois-ci, Takara s'était de nouveau penché en avant, et un peu de côté, pour lui dire cela avec le sourire. Il était vrai qu’avec du temps et de la pratique, Isobel pourrait bien être tout à fait capable de faire cela, elle aussi. C’était, de tout façon, dans un premier temps, tout ce dont elle aurait besoin d’utiliser la Force pour. Il ne lui servirait à rien d'apprendre a jeter une volée d’éclairs sur quelques aristocrates bougonnant, bien que cela pouvait, elle l’imaginait sans peine, provoquer une satisfaction immense. Puis, bien sûr, c’était une manière d’ouvrir la porte juste assez pour attirer Isobel, avec des choses concrètes et dont elle savait qu’elle en trouverait un certain plaisir, désir, ou bien une simple satisfaction. Dire qu’elle comptait faire d’elle une sith ne ferait que la brusquer, en plus de lui mentir.

La sith se pencha cette fois-ci vers la table, déliant ses jambes pour venir attraper la théière, et venir remplir sa tasse, ainsi qu’une seconde, sans laisser le temps à Isobel de réagir, ou alors juste trop tard. Takara ne voulait pas qu’elle pense à ces petits devoirs pour l’instant. Elle savait encore se servir un thé.

« Je sais que ça fait beaucoup de choses à digérer. Qu’une fois de plus, cela doit être bouleversant pour vous. Je ne souhaite pas vous imposer cela, mais je veux que vous réfléchissiez bien à tout ce que cela vous apporterait, à tout ce que cela vous permettrait de faire pour la Reine, le Palais, et Alderaan. »

Nouveau sourire, accompagné d’un mouvement de la main pour pousser, doucement, la seconde tasse vers Isobel.

«  Tenez, prenez donc un peu de thé, vous aussi. Cela vous fera du bien, vous verrez. D’ailleurs, vous est-il déjà arrivé de vous laisser tenter par la méditation ? »

Mais qu’est-ce que c’était, la Force, au juste ? C’est ça qu’elle avait du mal à comprendre ! Aussi, pourquoi la princesse semblait si persuadée qu’elle en était capable, elle aussi, où était la preuve… ? Isobel, de plus, n’avait aucune envie ou intérêt à étrangler des gens à distance, la violence n’était jamais la meilleure solution. Tout ça était… De quoi parlait-on, d’un Dieu ancien, justement, d’une sorte de grosse boule d’énergie ou encore d’un parasite s’installant au hasard chez les gens ? Et si c’était ça, comment entrait-il dans vous et « partout » comme elle disait ? Elle ne put s’empêcher de se frotter machinalement les poignets et la peau, comme si ça pouvait aider à sentir si un truc bizarre se passait dans son corps. Elle avait l’impression que… Enfin, c’était purement un effet de l’esprit, mais qu’elle était parasitée. Ou quelque chose du genre. Un frisson la parcourut de la tête aux pieds, à cette seule pensée. Avait-elle fait quelque chose de mal, pour attraper ça… ? Et comment pouvait-elle le gérer, surtout ?! Risquait-elle de faire mal à quelqu’un par accident, si elle avait de nouveau du mal à maîtriser sa colère ? C’était très dangereux ! A mesure qu’elle prenait conscience de ce qui se passait, la panique montait en crescendo.

"Ce n’est, bien sûr, pas quelque chose que l'on apprend en quelques jours. Mais avec de la discipline, et une forte volonté, vous pourriez vous aussi apprendre à vous en servir. Et réaliser tout ce que vous venez de dire : taire les caprices d’un revers de main ; s’assurer que chaque personne fasse bien son travail d’un claquement de doigt. Imaginez tout ce gain de temps, au Palais, et en dehors."

S’il est vrai que cette perspective-là était très intéressante, ça ne diminua pas, sur le moment, son impression d’avoir été brusquement contaminée par quelque chose. Même le sourire de la reine consort ne suffit pas vraiment à la rassurer. En fait, à partir du moment où elle ne parvenait à visualiser ou comprendre quelque chose, ça l’effrayait… Surtout si elle était concernée directement. La reine se pencha tout à coup pour se saisir de la théière et Isobel réagit avec un temps de retard, un peu frustrée. Ce manque de concentration n’allait pas du tout… Il fallait se ressaisir ! Pour commencer, elle s’obligea à arrêter de frotter frénétiquement son poignet et prendre une attitude plus calme. Détendue. Tout va bien. Elle voudrait juste comprendre comment et pourquoi elle avait été contaminée ! Est-ce que côtoyer des personnes ayant déjà cette « Force » suffisait-il… ? C’était peut-être contagieux ? Peut-être que ce truc vous grimpait dessus et s’insinuait dans votre organisme s’il sentait que vous étiez assez réceptive ? A ses yeux, c’était la seule manière rationnelle d’expliquer cette situation, une sorte de microbe s’attaquant à un système défaillant…

Si on partait du principe que c’était une énergie au lieu d’une maladie, le résultat était le même, cette énergie se serait développée en elle sans qu’elle n’y fasse attention et maintenant… Elle se sentait bizarre, sans trop savoir si c’était le stress ou une simple bouffée de paranoïa. Surtout, surtout, surtout, c’était un coup de pied dans sa vie parfaitement bien rangée et organisée… Et ça, c’était à la limite du supportable ! Que devait-elle faire ? La princesse affirmait que ça se contrôlait, soit, comment on s’y prenait ? Il y avait un tel gouffre entre rêver de faire ci ou ça puis découvrir avec une certaine brutalité que c’était possible. Alors même que la princesse ne cessait de sourire, comme si cette annonce était la meilleure qui puisse arriver ! Mais enfin… Isobel n’était plus sûre de savoir si c’était vraiment une bonne nouvelle ou si elle allait simplement se jeter tout droit dans un gouffre. Si c’était dangereux ou pas. Si elle allait se maîtriser un jour ou non. Que pourrait-il y avoir de plus stressant encore…

"Je sais que ça fait beaucoup de choses à digérer. Qu’une fois de plus, cela doit être bouleversant pour vous. Je ne souhaite pas vous imposer cela, mais je veux que vous réfléchissiez bien à tout ce que cela vous apporterait, à tout ce que cela vous permettrait de faire pour la Reine, le Palais, et Alderaan. Tenez, prenez donc un peu de thé, vous aussi. Cela vous fera du bien, vous verrez. D’ailleurs, vous est-il déjà arrivé de vous laisser tenter par la méditation ?"

"Au musée, oui… L’art me détend."

Après un instant d’hésitation, elle prit quand même la tasse entre les mains, espérant faire passer une part de nervosité ou de confusion grâce au thé. L’odeur et la chaleur du liquide eurent au moins le mérite de faire diminuer une part de ses tremblements.

"Mais qu’est-ce que c’est, alors ? Un parasite ou alors une énergie comme celle des soleils, qui s’insinue partout ? Ou une divinité ? Comment se serait-elle agrippée à moi, j’ai fait quelque chose qu’il ne fallait pas ? Comment le contrôle peut se faire ? Pourquoi les Jedi et Sith en parlent comme ça, ils sont plus infectés que les autres ?"

Takara regarda Isobel se crisper et angoisser, tout en sirotant doucement son thé. Elle secoua ensuite doucement la tête, car cela n’allait pas du tout. Ce n’était pas la réaction qu’elle attendait d’elle, bien que l’anxiété et la peur pouvait se révéler de puissants moteurs, lorsque l’on parvenait à s’en saisir, à la maitriser, pour l’exploiter. Mais ce n’était pas le cas d’Isobel. Elle manquait d’entrainement, et de maitrise. Elle devait se ressaisir, car ses inquiétudes n’étaient pas fondées. La Force n’était pas un parasite, ou même une maladie, car sans elle, toute la galaxie n’existerait pas. Toute vie disparaîtrait. Il ne resterait rien. La sith restait tout de même compréhensive, et particulièrement patiente, car Isobel était ignorante de tout cela. Sans la moindre connaissance, elle ne pouvait pas comprendre. Lui en tenir rigueur ne serait que de la pure mauvaise foi. Elle n’était pas comme cela, pas avec les personnes pour qui elle avait de l’estime.

Mais d’abord, Isobel devait se détendre un peu. Tendue comme cela, à penser uniquement aux problèmes éventuels, elle ne serait pas assez concentrée. Elle devait respirer, tranquillement. Se focaliser sur quelque chose qui la détendait.

« Bien, je l'apprécie également. Peut-être vous accompagnerais-je, un jour. En attendant, focalisez-vous sur l’art, dans ce cas. Prenez le temps de penser aux œuvres des grands peintres, et inspirez, profondément. Détendez-vous. »

Oui, voilà, comme ça. Tranquillement. Stresser ne servait à rien. Cette révélation n’allait pas la tuer.

Takara profita donc de cette petite pause, et prit donc un peu de temps pour réfléchir à la manière d’aborder le sujet sans que ce ne soit trop abstrait, ou incompréhensible. Parler de la Force, la décrire, était toujours compliqué. Elle était née avec, et avait été formée depuis sa plus tendre enfance. Elle faisait partie de sa vie depuis aussi longtemps qu’elle s’en souvenait. Et pourtant, trouver les mots justes étaient toujours délicat, encore aujourd’hui. Reposant sa tasse sur ses genoux, elle se tourna un peu dans le fauteuil, pour faire un peu mieux face à Isobel, la jambe de sa cheville au repos toujours croisée par-dessus l’autre.

« La Force n’est pas un parasite, ni une maladie Isobel, bien au contraire. C’est une énergie, créée par chaque être vivant dans la galaxie. Vous. Moi, les plantes, les animaux… Elle nous unit tous. Elle nous entoure, et nous pénètre, en chaque instant. Sans elle, la vie telle que nous la connaissons n’existerait pas. Un parasite ronge, détruit. La Force crée, unit, et transforme. »

Elle pouvait tuer, aussi, lorsqu’on le souhaitait, mais il était inutile de le souligner. Il était préférable, pour le moment, de mettre en avant tout ce qu’elle rendait possible, à commencer par leurs propres existences. Sans elle, en effet, pas de galaxie, et pas de vie. Qui plus est, elle ne voulait pas transformer Isobel en une tueuse ou un assassin, du moins, pas dans l’immédiat. En revanche, il y avait tant de choses moins… disons extrêmes qu’elle pouvait accomplir sans avoir à changer de trop ses habitudes, ou même son travail au Palais.

« Ensuite, l’influence que l’on peut avoir sur elle dépend de notre propre force émotionnelle. C’est pourquoi il est difficile pour des non-initiés de le faire ; c’est pourquoi, cette fois-ci, vous êtes exceptionnellement parvenu à vous en servir. Parce que vous étiez profondément en colère, et frustrée, comme jamais vous ne l’avez été. »

C’était souvent de cette manière que la Force se manifestait la première fois. Parce que l’on souhaitait quelque chose si fort, comme jamais on ne l’avait souhaité auparavant. Ou bien, parce que l’on avait une imagination débordante, et l’insouciance de croire, généralement en étant enfant, que tout était réalisable, même si cela pouvait sembler parfaitement irrationnel. Parce que la Force l’était, indubitablement. Il fallait sortir du carcan de la logique et du pragmatisme pur, pour pouvoir l’appréhender pleinement.

Et cela demandait du temps.

« Bien sûr, comme je l’ai évoqué plus tôt, avec de l’entrainement il vous sera plus facile de puiser en elle, sans avoir besoin d’une réaction émotionnelle intense. »

Se détendre… Bien plus aisé à dire qu’à accomplir… Même si elle le devait, bien sûr… Elle but une longue gorgée de thé, en s’efforçant de relâcher la tension de ses muscles et de tout son corps. Inspirer, expirer, se répéter que tout allait bien… Oublier cette petite voix hurlant toute en panique que sa vie bien rangée, mais déjà fragilisée, risquait de voler en éclats… ce n’était pas que le fait d’apprendre ça sur la Force, c’était aussi le fait d’être assise face à la reine consort avec un thé au lieu d’être debout, occupée à lui servir. Des deux, elle ne saurait vraiment lequel elle le plus étrange. Enfin bref… Se détendre pour mieux écouter… Entendre, en premier lieu, que ce n’était pas une maladie avait déjà un ton rassurant. Elle aurait trouvé odieux qu’un petit parasite puisse se promener dans son sang, quand bien même cela lui conférait en contre-partie des dons spéciaux. La simple idée d’avoir quelque chose d’étranger se baladant dans son corps, hors de contrôle, la révulsait complètement, c’était bien trop infâme et aucun pouvoir n’en valait la peine à ses yeux. Ce serait comme si le contrôle de son propre corps lui échapperait, une horreur, somme toute.

L’idée d’une énergie était bien plus abstraite à saisir, plus complexe, bien qu’elle soit plus rassurante que celle d’un parasite. S’imaginer ce genre de chose était délicat en toutes circonstances, alors le faire en devant prendre en compte une telle affaire… Et si c’était vrai, alors pourquoi toutes les religions existantes n’étaient-elles pas centrées vers cette énergie ? Pourquoi n’était-elle pas plus connue, de tous, si elle permettait réellement toute forme de vie ? Que s’était-il passé pour qu’une connaissance aussi importante ne soit pas face à tous, qu’elle reste latente, assez faible pour que d’autres mouvances et croyances aient pu émerger ? Ou même qu’elle ne se retrouve pas dans les différentes formes d’arts ? C’était étrange… A moins que le secret demeure conservé par ceux et celles plus initiés et que, pour une raison ou pour une autre, ils ne souhaitaient pas le partager. A ses yeux, c’était très dangereux. Lesdits initiés pouvant disparaître, lentement ou d’un seul bloc, leur savoir disparaîtrait avec eux. C’était en agissant ainsi que des connaissances ou archives précieuses étaient perdues, voire même des technologies innovantes. Une honte pour les générations futures.

"Ensuite, l’influence que l’on peut avoir sur elle dépend de notre propre force émotionnelle. C’est pourquoi il est difficile pour des non-initiés de le faire ; c’est pourquoi, cette fois-ci, vous êtes exceptionnellement parvenu à vous en servir. Parce que vous étiez profondément en colère, et frustrée, comme jamais vous ne l’avez été."

La force émotionnelle, ça aussi, ça se posait là, comme concept flou… Isobel hocha néanmoins la tête, plongée dans ses pensées, en buvant lentement son thé. La force émotionnelle… Elle pouvait dépendre de tant de paramètres… Depuis l’environnement familial à celui professionnel, les amitiés et les ennemis, les coups reçus dans la vie, les difficultés et les joies, les armes pour y faire face, le caractère, celui de son entourage, la situation financière et sentimentale, le lieu de vie, la stabilité ou l’instabilité de son existence, les projets, les envies, les peurs, l’état de santé… La liste était encore très longue ! Sans oublier tout ce qui touchait aux facteurs sociaux. Parmi tout cela, une personne ne pouvait avoir la main que sur très peu de choses. Donc, si c’était lié à la maîtrise de la Force, cette maîtrise devait logiquement varier énormément entre chaque utilisateur. Il était censé il y avoir des différences de niveau absolument phénoménales entre chacun. Dans ce cas, comment des ordres comme les Sith ou Jedi avaient pu apparaître… ? Comment avaient-ils pu concilier des disparités aussi profondes ?

"Bien sûr, comme je l’ai évoqué plus tôt, avec de l’entraînement il vous sera plus facile de puiser en elle, sans avoir besoin d’une réaction émotionnelle intense."

La question de l’entraînement avait beau être essentielle, elle ne répondait pas à toutes les questions qu’Isobel se posait dorénavant… Un entraînement régulier et intensif ne pouvait pas effacer les traits de caractère obtenus suite à une enfance difficile, par exemple, ou des drames personnels. L’entraînement ne pouvait ni effacer ni modifier les aspirations personnelles d’un individu. L’entraînement n’avait aucune prise non plus sur un contexte familial tendu ou encore des difficultés rencontrées dans le monde du travail. L’entraînement ne pouvait pas modifier l’état d’esprit d’une personne dépressive ou troublée à cause de soucis familiaux. Pour tout cela, des Ordres entiers remplis d’individus sensibles à cette Force lui apparaissaient comme un équilibre très précaire et bancal. Du moins, s’ils cherchaient une homogénéité dans les rangs.

"En partant du principe que je sois bien capable d’apprendre de telles choses, comment cela se passe ? Je veux dire, le travail quotidien est déjà prenant et je suppose que celui-ci doit l’être encore plus. Comment concilier les deux ?"

Il était normal d’être troublé, lorsque vous venez d’apprendre que, toute votre vie, vous avez été ignorante du don qui sommeillait en vous, et que, soudainement, quelqu’un de votre entourage venait vous révéler la vérité. Surtout lorsque vous aviez déjà vu quelles capacités ce don pouvait vous donner, que ce soit au cours des quelques entrainements auxquels vous avez pu assister, ou bien encore, lorsque vous les découvrez brusquement, et que vous ne comprenez pas comment vous avez pu faire, ou comment vous pourrez vous en servir. Sur ces points, Takara était, encore une fois, particulièrement indulgente avec Isobel, car sa dame de compagnie n’était pas n’importe qui. Elle n’était pas une enfant, que l’on pouvait aisément mouler à gré, avec rigueur et discipline. Elle n’était pas un pouilleux, que l’on pouvait fracasser à souhait, jusqu’à obtenir le résultat escompté. Elle avait une fonction très claire, et exigeante au sein du Palais, à son service, et parfois aussi au service de la Reine, forcément, lorsqu’elles étaient ensemble.

Il n’était donc pas question d’en faire une sith accomplie, capable de manier le sabre à la perfection, ou d’utiliser le Côté Obscur à outrance pour parvenir à ses desseins. Non, Isobel avait déjà une voie bien tracée, que Takara peaufinait encore. Il n’était pas question, non plus, de changer ses fonctions au Palais, mais seulement de la rendre encore plus performante, et loyale dans son travail. S’il y avait bien une chose à exacerber, se serait sa volonté d’agir pour le bien du Palais, pour leur bien à Leia et elle, et ce sans le moindre scrupule, mais sans s’affranchir du protocole, et des règles déjà en place. Isobel avait, sans vraiment le savoir, déjà évoqué en quoi consisteraient ses quelques fonctions supplémentaires, en parfaite adéquation avec ce qu’elle faisait déjà : faciliter encore plus leur travail, à Leia et elle, en faisant taire les caprices d’un revers de la main, ou en s’assurant que tout le monde faisait parfaitement son travail, quitte à le leur suggérer avec insistance.

Ça, et d’autres choses, pour éventuellement, plus tard, l’inviter à suivre des exercices avec Leia, pour parfaire ses compétences d’autoprotection. Guère plus, en revanche, pour ne pas la bouleverser encore plus qu’elle ne le serait déjà. Il faudrait bien sûr qu’elle accepte, pour commencer, mais cela ne serait qu’une formalité. D’une certaine manière, à l’écouter, sa dame de compagnie avait déjà quitté la phase du déni, pour rentrer dans celle, plus délicate, de l’acceptance. Elle n’aurait, de toute manière, guère le choix, maintenant qu’elle était au courant du potentiel qui sommeillait en elle. Elle n’aurait cesse de s’inquiéter, à chaque fois, de pouvoir utiliser la Force sans même s’en rendre compte, au risque de provoquer une catastrophe. Bien sûr, ces risques restaient infimes, mais c’était une chose que Takara se gardera bien de lui dire.

Buvant une nouvelle gorgée de ce thé particulier, et plutôt plaisant, la sith se doutait bien qu’Isobel devait avoir une quantité phénoménale de questions à lui poser. C’était normal, dans la phase d’acceptance, de se demander comment allait se passer les choses, désormais. Ou encore de se demander comment elle pourrait ne pas mal tourner, quant les seuls exemples à votre disposition en dehors de Leia et elle, était les actes de Plagueis, ou le comportement de Vader.  Ou encore, de se demander comment allait évoluer leur relation, désormais.

« Il faudra du temps pour que vous puissiez prendre en main le potentiel qui sommeille en vous. Pour cela, il vous faudra apprendre à venir toucher, et comprendre votre lien avec la Force. »

C’est là que sa question précédente, à propos de la méditation, trouvait tout son sens. C’était le meilleur moyen de se plonger dans l’énergie générée, et qui transcendait chaque être dans cette galaxie. Isobel avait une appétence certaine pour l’art, elle-même avait dit que ça l’apaisait, c’est donc par-là, en principe, qu’elles commenceraient.

« La méditation, d’abord, est le meilleur moyen d’accomplir cela. Avec rigueur et régularité, pour vous mettre en bonne condition, et vous familiariser avec la Force. Bien sûr, vous avez votre travail quotidien, qui, vous le savez, est fort apprécié. Sur ce point, plusieurs possibilités s’offrent à vous. La première, est de déléguer une partie de vos tâches, pour pouvoir profiter de votre temps au Palais, en notre présence. Cependant, les journées sont généralement chargées, avec peu de temps pour cela. La seconde, serait de prendre sur votre temps libre, le soir, généralement. Mais ce n'est pas écrit dans le marbre, nous pourrons nous adapter. »

Elle marqua une pause, le temps de profiter d’une nouvelle gorgée de thé, avant d’incliner la tête, avec compréhension.

« Ecoutez. Je sais qu’il peut être difficile de concevoir la nécessité de devoir abandonner certaines de vos activités sociales pour cela. Mais vous vous rendre vite compte que c’est pour le mieux. »

Comprendre le lien avec une entité qu’elle avait toujours extrêmement de mal à visualiser ou comprendre la nature, voilà un programme qui s’annonçait compliqué. Ça lui donnait le sentiment d’avoir tout à coup un petit animal sauvage posé sur ses genoux et qui la fixait, en attendant qu’elle apprenne à l’apprivoiser. La méditation était donc censée vous apprendre à toucher un truc invisible… ? C’était si abstrait ! Elle rebaissa la tête sur sa tasse, en se rappelant des ressentis qu’elle avait en allant se détendre au musée. Du calme, quelques rêves, de la détente et… C’est tout… La méditation lui servait avant tout à évacuer le stress. Parfois, à mieux s’endormir, lorsqu’elle avait passée une mauvaise journée ou lorsqu’elle était malade.

"Avec rigueur et régularité, pour vous mettre en bonne condition, et vous familiariser avec la Force. Bien sûr, vous avez votre travail quotidien, qui, vous le savez, est fort apprécié. Sur ce point, plusieurs possibilités s’offrent à vous. La première, est de déléguer une partie de vos tâches, pour pouvoir profiter de votre temps au Palais, en notre présence. Cependant, les journées sont généralement chargées, avec peu de temps pour cela. La seconde, serait de prendre sur votre temps libre, le soir, généralement. Mais ce n'est pas écrit dans le marbre, nous pourrons nous adapter."

Comment allait-elle pouvoir cacher ça… ? Ni la reine ni son épouse ne clamaient à tous leurs aptitudes et elles s’entraînaient en cachette, c’est donc que cela devait rester secret, n’est-ce pas ? Alors comment elle-même pourra le dissimuler si elle risquait de produire d’autres accidents, comme chez le tailleur ? C’était effrayant ! Risquait-elle de blesser une autre suivante sans faire attention… ? Bon sang… Tout cela était peut-être « pour le mieux » mais restait dur à concevoir. Elle n’avait pas tant d’activités sociales, cependant, entre le travail habituel, les entraînements et les activités plus personnelles… Elle se demandait aussi si son fiancé ne risquait de découvrir ce truc, si elle avait un accident en sa présence ou s’il notait qu’elle avait quelque chose de différent. Tout comme sa famille, d’ailleurs. Sans doute ferait-elle mieux de ne pas leur rendre visite immédiatement, laisser passer quelques temps sous le prétexte du travail, afin de se laisser assez temps pour se calmer et digérer tout cela.

"Je… vois… ça devrait être possible…"

Elle essayait d’être plus enthousiaste ou confiante, réellement. Et puis, après tout, si cet entraînement pouvait effectivement contribuer à améliorer l’efficacité au travail et la tranquillité du palais, au quotidien, s’y lancer était très intéressant ! Elle n’avait rien à perdre, en toute logique. Et elle ne pouvait pas non plus devenir un de ces soldats de l’enfer perturbés comme pouvait l’être le seigneur Vader. Ou pire encore, comme le Sith fou et meurtrier, qui avait traumatisé Alderaan il y a deux ans, puis déclenché la plus grave catastrophe sanitaire galactique de l’Histoire entière. Deux exemples très angoissants… Par bonheur, le couple royal n’avait rien à voir avec ces deux-là.

"Comment cela se passe vis à vis des proches ? Pour qu’ils ne découvrent rien ? Ma famille pourra sans doute se douter de quelque chose, même si je la vois peu souvent. J’ai aussi un fiancé, il travaille au Palais d’ailleurs. Il risque de comprendre qu’il s’est passé quelque chose d’inhabituel. Je doute qu’il ne parle à qui que ce soit, par contre, je ne veux pas le blesser par accident. A-t-on le droit que les conjoints sachent ce genre de choses ?"

Ne connaissant rien des règles accompagnant cette Force bizarre, autant poser directement la question. Aldo pourra, de toute façon, vite sentir qu’elle n’était pas tout à fait dans son état normal, même si elle parvenait à se calmer avant de la retrouver.

Il y avait des questions que Takara ne s’était jamais posé, avant de mettre les pieds sur Alderaan, de part sa nature d’abord, puis par ses origines, ensuite. Celles que se posait Isobel en cet instant en faisait partie, et si elle n’avait pas passé plus d’une année loin de chez elle, et de ses habitudes, peut-être n’aurait-elle pas pu y répondre sans la moindre hésitation. Elle n’avait, après tout, jamais eu à cacher sa nature de sith sur Kesh, puisque tous les humains qui y vivaient étaient sensitifs, les enfants ne l’étant pas étant tout simplement éliminés, pour satisfaire une forme d’eugénisme nécessaire au maintien du mensonge existentiel qui gardait les natifs keshiris dans une forme de servitude. Être sensitif et humain sur Kesh était donc un privilège qu’il ne fallait surtout pas cacher, un présent qui faisait de vous un dieu vivant. Le véritable secret, gardé précieusement, était donc celui de leur véritable nature, de la réelle raison de leur présence sur Kesh, et des secrets que ce secret avait générés, pour parfaire l’apparence, et achever de convaincre les natifs de la suprématie des humains, siths.

Dès lors, en apparence, garder le secret de la véritable nature de mademoiselle Mackay semblait être une promenade de santé, en comparaison. Ce serait négligé la force d’observation du personnel du Palais, chose que Takara avait justement appris à ses dépens. Et cela, déjà, concernait sa suivante. Elle avait donc une certitude, celle que le personnel finirait, tôt ou tard, à découvrir la vérité concernant Isobel, tout comme certains avaient, peut-être, déjà fait la concernant, même si désormais, avec ce qui s’était passé sur Coruscant, Takara n’avait plus à se préoccuper de cela. Elle l’annoncerait sans doute officiellement, en petit comité auprès de l’Intendant, histoire que l’information, si elle n’était pas déjà connue, puisse se distiller de la meilleure des manières. Il n’en serait rien, néanmoins, concernant les facultés d’Isobel. Une fois encore, garder le secret serait difficile, mais peut-être n’avaient-elle tout simplement pas à le faire, sans l’admettre pour autant. La discrétion avait fait ses preuves, et peut-être suffirait-elle encore.

Sa dame de compagnie était confortablement installée dans l’organigramme du Palais, et ce depuis longtemps. Par défaut, donc, la méfiance à son sujet était bien moindre. Ensuite, de la part la nature de l’entrainement que Takara pensait dispenser, et des capacités à leur disposition, il ne devrait pas être compliqué de renvoyer les plus curieux d’une simple suggestion mentale ; elle d’abord, bien sûr, le temps que mademoiselle Mackay soit en mesure de s’en charger elle-même. Concernant la famille, en revanche, cela serait plus délicat, et c’est pourquoi Takara avait pensé à éviter de trop changer les habitudes de sa suivante, ou du moins de façon mesurée, pour éviter d’attirer l’attention. Ensuite, si besoin et en qualité de reine consort, elle pouvait toujours se permettre quelques… disons, changement de programme, ou caprices, pour étirer leur agenda sans que cela ne soulève trop de questions…

A vrai dire, toutes ces choses là se règleraient en temps et en heure, en fonction des appréciations. Takara préférait se concentrer sur l’instant présent, et le fait qu’Isobel semblait s’enfoncer un peu plus profondément dans l’acceptance de sa nouvelle situation, elle qui avait déjà vécu un certain bouleversement peu avant la cérémonie de son union avec Leia, lorsqu’elle avait changé quelque peu son statut. Là encore, Isobel en avait fait beaucoup pour pas grand-chose, puisqu’elle semblait se satisfaire, désormais, de ce qui l’avait pourtant profondément irrité. Comme quoi, le changement n’était pas foncièrement une mauvaise chose. Au contraire, celui-ci ne pourrait une fois encore que la satisfaire…

« En évitant de trop bouleverser vos habitudes, tout simplement. Pour le reste, le risque que vous reproduisiez ce que vous avez fait sur Coruscant sera rapidement négligé par votre introspection, lors des entrainements. Il n’en faudra pas beaucoup, pour que vous soyez à même de l’éviter. » dit-elle calmement, en posant de nouveau sa tasse sur le rebord de la table basse, et sans en penser un traitre mot.

Si le début de son propos était vrai, et qu’elle comptait effectivement y aller en douceur pour éviter d’attirer l’attention, il n’y avait absolument aucun risque qu’elle n’agresse un membre de sa famille mentalement, à moins, bien sûr, de se retrouver une nouvelle fois dans une situation émotionnelle aussi intense ; mais il y avait une part de vérité que Takara garderait n’allait pas dévoiler, ce serait bien trop simple, et totalement contreproductif. Il était préférable qu’Isobel se convainque elle-même que ses séances avec elle était la source de son contrôle…

« Monsieur Nileseal, c’est bien ça ? Comment va-t-il ? » dit-elle, en décroisant finalement les jambes, pour reposer ses deux pieds à même le sol.

De tête, il s’agissait du ou d’un des restaurateurs de l’intérieur, au palais. Qu’elle sache cela ne devrait pas surprendre Isobel. Connaître le cercle de proches des suivantes les plus proches d’elle ou de Leia était assez normal. Cela donnait de la crédibilité, et une forme d’ancrage dans le monde réel, loin des mythes que la majorité du peuple avait peut-être sur la famille royale d’Alderaan.

« Pour être tout à fait franche avec vous, il sera plus simple de ne rien dire à personne, sans pour autant que cela soit nécessairement un secret à garder. Je pense plutôt que la discrétion, à elle seule, sera suffisante. Vous êtes au service de la famille depuis longtemps, il n’y a pas de raison que l’on vous soupçonne. Qui plus est, ma seule présence suffira à focaliser l’attention sur moi, et non sur vous. »

"En évitant de trop bouleverser vos habitudes, tout simplement. Pour le reste, le risque que vous reproduisiez ce que vous avez fait sur Coruscant sera rapidement négligé par votre introspection, lors des entraînements. Il n’en faudra pas beaucoup, pour que vous soyez à même de l’éviter."

Bon… C’était au moins cela… En attendant, la peur de blesser son conjoint par accident lui rongeait le ventre, elle priait tout ce qu’elle pouvait pour ne pas causer le moindre accident. Pour ses parents, elle s’en faisait, pour le moment, un peu moins, d’ici à ce qu’elle les revoit, sans doute aura-t-elle eu le temps d’apprendre à se contrôler. N’est-ce pas ? Normalement… Elle déposa la tasse sur le petit plateau, la boule au ventre et un peu trop stressée pour terminer son contenu. Même si la chaleur apaisait. Comme à chaque fois qu’un élément venait bouleverser son quotidien bien rangé, il fallait du temps pour le digérer, évacuer le stress et se reprendre, en se disant qu’il n’y avait rien de si grave. Enfin… Non, non, elle ne devait pas se dire ça, ce n’était pas une maladie, l’épouse de la reine le lui avait expliqué. Sa famille ne risquait rien, en toute logique. En revanche, pourquoi une telle chose s’était déclenchée chez elle alors que, justement, personne dans sa famille ou son entourage n’était concerné ? Que s’était-il produit de particulier pour que cela arrive ? D’ailleurs, maintenant qu’elle y songeait, elle ne connaissait personne de concerné en-dehors du couple royal. Ça semblait si peu fréquent qu’Isobel ne pouvait s’empêcher de se demander si elle avait fait quelque chose de mal, pour que ça lui tombe dessus ainsi.

"Monsieur Nileseal, c’est bien ça ? Comment va-t-il ?"

"Bien, je vous remercie."

Peut-être avait-elle fait quelque chose… Sans le réaliser et qui avait conduit à… Elle ne savait pas… A « réveiller » cette chose en elle sans le désirer ? Bon, du calme. On respire. Après tout, ça n’allait pas empoisonner toute sa vie si elle prenait garde à s’entraîner et se contrôler. Elle avait, en sus, parfaitement confiance en le couple royal pour lui dire ce qui était autorisé ou non, dangereux ou pas, ce qui devrait écarter les risques de finir dans le même état mental dégradé que certains psychopathes dans cette galaxie. Cela pourra seulement servir à faciliter la vie quotidienne au palais… Restons pragmatiques… Pour évacuer le stress, en particulier.

"Pour être tout à fait franche avec vous, il sera plus simple de ne rien dire à personne, sans pour autant que cela soit nécessairement un secret à garder. Je pense plutôt que la discrétion, à elle seule, sera suffisante. Vous êtes au service de la famille depuis longtemps, il n’y a pas de raison que l’on vous soupçonne. Qui plus est, ma seule présence suffira à focaliser l’attention sur moi, et non sur vous."

D’un côté, elle était soulagée de ne pas avoir à expliquer cela à ses proches car elle peinait encore à bien le comprendre elle-même, d’un autre côté, elle n’était pas à l’aise avec l’idée de ne pas le partager avec lui. Pour se rassurer, elle se dit qu’elle aura peut-être la possibilité d’aborder le sujet plus tard, lorsqu’elle sera plus à l’aise et que le danger de le blesser involontairement sera passé. D’un seul coup, elle se sentait assez épuisée… Entre cette journée interminable, la pression subite par l’accident de la consort, les heures passées à l’hôpital puis ces révélations par-dessus… Le tout avait mis ses nerfs à rude épreuve. Néanmoins, il n’était pas question de partir comme une sauvage. Il lui fallait d’abord s’assurer que l’épouse royale ait dit tout ce qu’elle avait à dire, ranger, rapporter le plateau de thé, faire quelques points de vérification avec l’équipage pour le voyage et seulement après, se reposer. Voire se laisser aller à une petite crise de nerfs et d’angoisse une fois seule, tant se retenir commençait à être ardu.

"Très bien, je veillerai à tout cela. Je vous remercie d’avoir répondu à mes questions. Il y a-t-il un sujet que vous désiriez aborder ou autre chose que je puisse faire pour vous ?"

Jusqu’alors, elle n’avait porté que peu d’attention aux relations que pouvait entretenir sa suivante au Palais, et il n’y avait pas de raisons que cela évolue. Ce a quoi elle avait assisté aujourd’hui ne devrait pas y changer grand-chose. A moins, bien sûr, que cela ne devienne un problème, chose qui était, à ce stade, fort peu probable. Elle-même ne connaissait qu’assez peu le fiancé d’Isobel, n’ayant eu sans doute à le croiser qu’à de très rares occasions, lorsqu’elle tenait encore un rôle qui n’était plus le sien depuis plusieurs mois. Peut-être tout au plus se renseignerait-elle un peu mieux à son sujet. Ce n’était pas à elle de décider de tout ce que sa dame de compagnie pouvait ou ne pouvait pas faire en sa présence, ou son absence. Il n’y aurait pas de relation particulière entre elles, comme il pouvait y en avoir entre un maitre sith et son élève. Une fois encore, ce n’était pas de cette manière qu’elle visionnait sa formation, bien qu’elle prendrait sans doute exemple sur ce que l’on avait pu lui apprendre, comme elle avait pu le faire avec Leia, mais avec des objectifs radicalement différents.

Il y avait tout de même un certain parallèle à faire avec sa femme, sur le fait qu’elle aussi avait été apeurée par le pouvoir qui sommeillait en elle, avec la crainte de devenir folle comme Plagueis, ou mégalomaniaque comme Sidious. Si Takara avait réussi à lui prouver qu’il existait une autre voie, il n’y avait pas de raison qu’Isobel n’arrive pas aux mêmes conclusions. Pour le reste, la situation était différente, et il faudrait lisser son enseignement, tout en l’échelonnant en plusieurs étapes successives qu’il faudrait franchir pas à pas. D’abord, il faudrait chasser l’inquiétude et la peur que sa suivante pouvait avoir, en lui montrant que la Force n’était en rien une maladie, mais un outil qu’elle pourrait utiliser pour façonner les choses à sa manière, et en conformité avec ses principes. Une fois de plus, il n'était pas question de l’abreuver de trop dans le Côté Obscur, mais d’adapter ses réactions, et son comportement comme il le fallait, en chassant les blocages qu’elle pouvait avoir, en retirant les scrupules gênants qu’elle pourrait avoir.

« Je… vois… ça devrait être possible… »

Bien évidemment, que cela devrait être possible. Un peu de confiance, que diable ! Il y avait tant de choses à envisager, et à faire, qu’Isobel ne serait pas de trop. D’ailleurs, peut-être pourrait-elle-même l’aider, plus tard, à trouver où pourraient bien se cacher les derniers fouineurs rebelles d’Alderaan, afin de régler une bonne fois pour toute ce problème qui avait été jusqu’alors parfaitement jugulé, tout en gardant au large la curiosité maladive impériale. Elle était, après tout, bien confortablement installée au Palais, et bénéficiait d’une confiance que la reine consort n’avait jamais pu obtenir en si peu de temps. Peut-être qu’en sa présence certaines langues se délieraient…. A condition, bien sûr, qu’elle accepte tout cela, car bien qu’elle fasse déjà un très grand pas dans sa direction, ce n’était pas encore une certitude. Il fallait laisser du temps, pour laisser cette dernière s’installer dans l’esprit de sa suivante.

« Très bien, je veillerai à tout cela. Je vous remercie d’avoir répondu à mes questions. Il y a-t-il un sujet que vous désiriez aborder ou autre chose que je puisse faire pour vous ? »

« C’est normal. Après ce qu’il s’est passé, vous méritiez une explication. Je sais que c’est assez abstrait, mais vous vous y ferez. »

Takara offrit un énième sourire à son intention, à cette simple pensée. Il faut dire qu’elle n’avait pas été totalement honnête avec elle. Avec le temps, la crainte de voir ce pouvoir émerger à nouveau, de façon imprévisible, allait la ronger à un tel point qu’elle n’aurait pas d’autre choix que de revenir vers elle. Il fallait simplement attendre, et faire preuve de patience. Sur ce point, la reine consort avait grandement évolué. Il fut un temps où elle n’aurait même pas envisagé l’idée de devoir patienter. Sur ce point, Leia avait été d’une grande aide. Aussi n’allait-elle pas pousser sa chance en cette soirée, elle en avait déjà assez fait.

« Du reste, je pense que nous en avons assez fait pour aujourd’hui, je vous remercie. Je ne vous retiens pas plus longtemps. Je vais profitez du court temps de voyage pour méditer un peu. Et réfléchir à une explication à donner à la reine. Merci encore, Isobel. »[/color]