La première des missions, une fois la journée terminée et les devoirs quotidiens accomplis, était de retirer vivement sa paire de talons haut avec un soupir de soulagement. Puis réceptionner Sucre Roux dans les bras au moment où il lui bondit dessus. Aldo était déjà rentré, comme d’habitude, elle le retrouva occupé à peindre un tableau personnel, dans un coin du salon près de la baie vitrée. Elle l’embrassa avant d’aller s’asseoir dans le canapé et se détendre un peu. Blotti dans ses bras, Sucre Roux miaula une ou deux minutes, avant de se lover un peu plus contre elle, lorsqu’elle commença à le caresser machinalement. Elle somnolait déjà lorsque son fiancé lui demanda comment s’était passé sa journée, après avoir lancé un coup d’œil plutôt appuyé vers l’horloge. Pitié, pas de dispute ce soir à ce sujet… Elle en avait déjà eu assez. Oui, elle avait des journées plus chargées en ce moment et oui, elle rentrait parfois très tard, mais c’était comme ça… Elle lui raconta quand même, dans les grandes lignes, même si ça n’avait rien d’exceptionnel. Tout en passant sous silence ce qui concernait les entraînements à l’usage de la Force, bien évidemment.

"Tu rentres de plus en plus tard, ce nouveau travail te hante," soupira Aldo une nouvelle fois, l’air contrarié, sans cesser de peindre. "Cette femme, elle… Elle te suce ton énergie. Je n’aime pas ça. On ignore d’où elle vient, exactement, elle s’est taillée si vite une place auprès de la jeune reine et les rumeurs qui circulent sur elle sont… très dérangeantes."

"La reine lui accorde sa confiance donc moi aussi. Elle ne traite pas ses serviteurs comme des mouchoirs jetables non plus, donc je ne vois pas en quoi ces rumeurs pourraient montrer une image dérangeante."

Il ne semblait pas très convaincu… Concentré sur son tableau, sourcils froncés, l’air sombre. Elle dû retenir un long soupir à son tour, la gorge assez serrée. C’était comme ça depuis quelques temps… Le ton s’était refroidi, entre deux. Ça avait débuté parce qu’elle avait moins de temps à consacrer à leur couple puis car il avait beaucoup écouté ces fameuses rumeurs, sur la reine consort. Qu’elle passe désormais autant de temps près de l’épouse de la reine déplaisait fortement à Aldo et il ne s’était pas privé de lui faire savoir. Il avait peur qu’il ne lui arrive quelque chose de mauvais et peur aussi qu’elle ne « change » trop. Oui, elle avait déjà un peu changé, mais elle aurait espéré qu’il lui fasse plus confiance que ça… Assez remuée, elle prit un peu mieux leur chat contre elle, pour le câliner, à défaut de pouvoir le faire avec son fiancé. Il ne lui adressait même plus un regard ! Sucre Roux, lui, la fixait en ronronnant, absolument ravi de se faire dorloter.

"Je pense que tu devrais démissionner."

"Je ne peux pas abandonner des années de service, comme suivante, aussi facilement. On en a déjà parlé. Ce n’est pas un simple métier ! C’est une partie de moi, désormais, j’ai travaillé dur pour obtenir la confiance de la famille royale."

"Tu retrouverais du travail très aisément, en ville. Je peux largement subvenir à nos besoins, à tous les deux, durant ce temps. Tu retrouverais une vie normale, plus paisible… Une vie où tu n’aurais plus à côtoyer des individus un peu suspects. Réfléchis au moins à cette possibilité !"

"C’est ce que j’ai déjà fait, une bonne dizaine de fois depuis le jour où tu l’as demandé la première fois, et ma réponse n’a pas changé."

Elle déposa leur chat dans le canapé puis partit vivement vers la cuisine, pieds nus, pour se préparer rapidement quelque chose à manger, pour ce soir. Enfin, ce début de nuit. Ou peu importe. Même si elle avait l’esprit complètement coupé, elle se força à manger un peu. Puis, sur un pur coup de tête, décida après ça de repartir hors de l’appartement. Toujours pieds nus, en retroussant un peu ses jupes blanches des mains, pour ne pas se prendre les chevilles dedans. Ce n’est qu’une fois arrivé dans l’un des jardins privatifs, intérieurs, du Palais qu’elle relâcha un peu la pression. Pour se laisser tomber sur un banc en pierre puis tremper un peu les pieds dans une jolie mare à côté. Stop, cette fois, assez… Elle s’allongea dos contre le banc, pour regarder les étoiles et tenter de faire disparaître la pression…

Takara passa ses mains humides sur son visage, avant de contempler son reflet dans le miroir qui surplombait le lavabo de la salle d’eau des appartements royaux. Frottant un peu plus fort à la commissure de ses lèvres pour en chasser les derniers restes du fin maquillage, elle laissait derrière cette longue journée. Comme à son habitude, ses jours étaient rythmés avec le même protocole, et remplis de rendez-vous aussi divers que variés. Tous les matins, l’ont venait la voir avec plusieurs suggestions de robes pour la journée, avant de l’habiller, la préparer et l’accompagner pour le petit déjeuner. La journée suivait alors son cours, avec Isobel l’accompagnant partout, et s’assurant à chaque instant que tout se déroulait correctement. Takara était très satisfaite de son travail, que ce soit pour elle, ou pour sa femme, et ne regrettait absolument le choix qu’elle avait fait. Même après la journée terminée, sa suivante se montrait disciplinée lorsqu’il s’agissait de recevoir ses enseignements. Bien sûr, cela prenait du temps, mais Isobel était sur la bonne voie, ce qui faisait qu’elle ne voyait pas de raison de ne pas continuer sur cette lancée.

Se séchant les mains, elle jeta un coup d’œil par el cadre de la porte en direction de la chambre. Les dernières servantes étaient reparties, et Leia n’était pas encore rentrée. Ce n’était pas différent des autres soirs. Leia travaillait souvent tard, c’était pourquoi la sith ne trouvait pas de mal à étaler un peu plus ses soirées. En arrivant dans la chambre, Takara jeta un vague regard en biais sa robe du jour, soigneusement déposée sur un fauteuil dans un coin du salon au cas où. La légère robe de chambre qu’elle portait ce soir était nettement plus agréable. Elle éteignit la lumière sur son passage, et alla cherche une des infusions que le personnel du palais avait laissées en partant, en connaissance de cause. Elle n’en était pas très fan, mais avec le temps, c’était presque devenu une habitude. Saisissant la coupelle d’une main, elle se dirigea vers une des commodes pour se saisir d’un petit pad avant de s’avancer vers la baie vitrée qui donnait sur le balcon. Elle fit glisser la fenêtre d’un vague geste, à l’aide de la Force, et profita sur l’instant de la lège brise fraiche des nuits d’Aldéra.

L’altitude, et la proximité du grand lac faisait qu’il ne faisait jamais de grandes chaleurs, même en été. Là, elle s’installa dans un des fauteuils à l’abri des intempéries -bien que le ciel sombre restât particulièrement dégagé -, avant de profiter d’une longue gorgée du breuvage chaud, mais quelque peu amer à ses yeux. Puis déposant finalement la tasse sur la petite table d’extérieure, elle alluma le pad où les données qu’elle avait demandées il y a quelques temps de cela aux universitaires d’Aldéra étaient stockées. Elle regarda avec une légère mélancolie les séries de coordonnées et la zone de la carte stellaire où devait probablement se trouver son monde, basé sur les informations qu’elle avait transmises aux chercheurs. Ainsi, là-haut, quelque part dans cette vaste étendue se trouvait son monde, et peut-être même son peuple. Une part d’elle était curieuse de savoir ce qu’il était advenu de sa famille après des millénaires, mais une autre, plus méfiante, doutait que cela soit réellement une bonne idée. Qui sait ce qui pourrait se passer si quelqu’un d’autre apprenait cette nouvelle ? Il était peut-être mieux de garder cet atout potentiel pour soi, le temps de stabiliser tout ça.

C’est en levant le regard pour contempler les étoiles qu’elle aperçut du coin de l’œil une silhouette blanche s’avançant dans les jardins du palais, à cette heure déjà bien avancée. Takara se pencha instinctivement en avant par simple curiosité, et reconnut presque aussitôt malgré la distance, la démarche et l’apparence de sa suivante, installée au bord d’une des marres fleuries. Elle aurait dû s’en désintéresser si cela avait été dans les habitudes d’Isobel, mais c’était la première fois qu’elle la voyait s’aventurer dans les jardins à cette heure. Du moins, dans ce coin des jardins, visible depuis le balcon des appartements royaux. Voilà qui était donc curieux…

Elle resta là à le regarder un instant, à se demander s’il valait mieux descendre pour voir si quelque chose troublait son élève, ou si elle devait faire comme si elle n’avait rien vu, et attendre qu’Isobel ne lui en parle, éventuellement. Takara jeta un vague regard vers les appartements, Leia n’étant pas encore rentrée, avant de sonder sa présence dans le palais et en conclure que sa femme en avait encore pour quelques temps avant de la rejoindre pour la nuit. Puis son attention retomba avec curiosité et intrigue sur la silhouette d’Isobel au loin, avant que la sith ne lâche un profond soupir et de laisser derrière elle sa tasse encore chaude. Pourquoi fallait-il qu’elle s’enquiert de toutes ces choses…

La consort déposa son pad verrouillé là où elle l’avait prit à l’aller, et alla chercher une sorte de cape blanche longue mais légère pour couvrir ses bras, avant de regarder d’un air mauvais la paire de talons hauts qu’elle avait été si soulagée de laisser derrière elle à la fin de la journée. Il était hélas hors de question de sortir pieds nue ou en chausson pour ne pas provoquer d’esclandre si elle était vue, aussi se résigna-t-elle à les chausser, avant de se diriger vers la sortie sans craindre cette fois-ci de voir débouler une armée de gardes ou de serviteurs pour s’enquérir de sa présence.

A cette heure de toute manière, les couloirs du palais étaient relativement déserts, tout comme les jardins, si bien que le bruit de ses pas dans le palier, puis dans les escaliers du palais n’attirèrent l’attention de personne, si ce n’est d’une servante qui passait par là.

« Votre Altesse ? Que faites-vous à… » dit-elle, après s’être précipitée à faire une révérence à son égard.

« Ne vous inquiétez pas, je vais seulement prendre l’air dans les jardins. Faites comme si vous ne m’aviez pas vu, d’accord ? »

Peut-être avait-elle appuyé ses propos d’une légère suggestion, ou peut-être sa présence inattendue avait-elle perturbée la jeune femme, car cette dernière se contenta de balbutier quelque chose avant de s’écarter de son passage. Takara la remercia d’un sourire, avant de continuer son chemin, s’arrêtant finalement devant une sortie, où un garde, tout aussi étonné de la voir ici, s’enquerra de savoir s’il y avait un problème. Là encore, Takara lui fit comprendre que non, et l’invita même à la suivre de loin, s’il le désirait. Elle n’avait, de toute façon, pas grand-chose à cacher.

Takara remonta ensuite l’un des sentiers pavés, tout en maintenant son regard en direction d’Isobel, qui n’avait pas bougé, mais dont elle pouvait ressentir un peu plus clairement ses émotions perturbées. Nul doute que sa suivante avait dû l’entendre arriver, les talons n’étant pas la chausse la plus discrète qui soit, mais Takara s’arrêta tout de même un peu en retrait, pour ne pas la surprendre, ou l’inquiéter. Les bras ramenés devant elle, les mains croisées l’une dans l’autre sous les pans de la cape, elle lui fit éventuellement signe qu’il était inutile de se lever, et jeta un regard distrait vers la marre, bien que son attention fût focalisée sur sa suivante, pour finalement dire gentiment, bien qu’intriguée :

« Bien que je suis certaine que vous soyez comme moi fascinée par ce ciel étoilé, c’est la première fois que je vous vois ici en cette heure tardive, Mademoiselle Mackay… Des problèmes avec Monsieur Nileseal ? »

Il ne pouvait pas y avoir bien d’autres raisons pour qu’elle se soit retrouvée ici, pieds nus. Du moins, c’était la plus probable, mais elle pouvait se tromper.

A l’air libre et loin du restant d’une conversation dont elle savait qu’elle serait trop pénible à supporter, Isobel se sentait un petit mieux. Du moins, elle respirait plus librement. Complètement allongée sur le banc de pierre, à regarder les étoiles, à effleurer du bout du pied l’eau fraîche de la mare. Elle se demandait si Aldo allait prendre la peine de la chercher, au moins se renseigner là-dessus, ou s’il allait s’en moquer une fois de plus… Elle ne savait pas trop ce qu’elle attendait… Il lui vint même à l’idée de se laisser tomber endormie ci même… Complètement perdue dans des pensées plus moins moroses, elle n’entendit pas tout de suite le bruit de pas, en approche. Lorsqu’il la ramena enfin à la réalité, elle eut un léger sursaut et se redressa, pour se mettre assise sur le banc. S’attendant à voir un des gardes ou un autre serviteur, elle fut pas mal surprise en apercevant la reine consort. Qui lui fit un bref signe de ne pas se lever. Elle avait eu un problème ou bien fallait-il se rendre quelque part, dès cette nuit ? Si c’était ça, elle avait bien fait de ne pas juste avaler un somnifère et se coucher, ça aurait été très compliqué pour l’accompagner. Mais où voulait-elle aller à cette heure ?

"Bien que je suis certaine que vous soyez comme moi fascinée par ce ciel étoilé, c’est la première fois que je vous vois ici en cette heure tardive, Mademoiselle Mackay… Des problèmes avec Monsieur Nileseal ?"

La surprise l’envahit encore plus, elle s’était attendue à absolument tout sauf qu’on lui demande si elle avait des problèmes… Un peu perturbée, elle hocha machinalement la tête. Ce devait être la fatigue, qui lui piquait les yeux, elle devait se reprendre. En plus, ce n’était pas une attitude convenable… Assise alors que la reine était debout, pieds nus, les cheveux détachés et décoiffés, non maquillée… Il n’était censé y avoir personne à une pareille heure et elle n’avait pas croisé grand-monde non plus, dans les couloirs. Les gardes n’avaient pas prêté attention à sa présence, elle faisait déjà trop partie des meubles du palais pour cela.

"Il n’est pas très joyeux, en ce moment," marmonna-t-elle en haussant un peu les épaules. "Il aimerait mieux que je démissionne."

Inutile de lui préciser exactement pourquoi, ça ne servirait à rien et ce n’était pas non plus le genre de nouvelle agréable qu’il fallait déverser sur les autres. De toute façon, elle ne risquait pas de le croiser un jour, alors ça n’avait aucune importance. Isobel avait beaucoup de mal à cacher son amertume et la fatigue allant avec, alors qu’elle le tentait de toutes ses forces. Cette fatigue qui avait le don de lui embrouiller l’esprit et la faire réagir plus nerveusement qu’elle en avait l’habitude. Il ne l’écoutait pas et ça la mettait en colère, elle avait l’impression qu’il ne lui faisait pas assez confiance ou alors qu’il la considérait comme une petite femme toute fragile… Qu’il devait décider à sa place et tout assumer seul pour eux deux car elle devait être incapable de s’en sortir seule. Se laisser aller, ou pire encore, se mettre à pleurer ne pourrait que lui donner raison… Puis pourquoi elle en parlait à la reine, de toute façon ? C’était un problème personnel, elle n’allait quand même pas aller le baver à d’autres personnes, surtout que ces personnes ne devaient certainement en avoir rien à carrer.

"Ce n’est rien, de toute façon, ça passera, il faut juste le temps qu’il se détende vis à vis de tous les changements de cette année au palais et qu’il écoute mieux ce que je… Enfin bref. Tout se passe bien. Je compte dormir dehors cette nuit."

Là, tout de suite, la compagnie des poissons de cette mare, pour cette nuit, lui semblait bien plus merveilleuse que la compagnie de son fiancé. Il ne lui avait même pas demandé où elle sortait, ni cherché à savoir où elle s’était rendue, rien. La frustration était à son comble.

Allons, allons, il ne fallait pas s’en faire pour si peu. Bien sûr que ce n’était pas une attitude convenable, mais qui allait vraiment s’en offusquer, à une heure si avancée, à l’ombre des jardins du Palais ? Ce n’était pas la consort, en tout cas, qui bien qu’ennuyée de devoir s’enquérir de la présence de sa demoiselle de compagnie au bord d’une des marres à une heure si tardive, n’avait au final pas grand-chose à faire du protocole, à cet instant. Isobel avait finit sa journée, et puis c’était elle, qui était venu l’approcher ainsi, non l’inverse. De tout façon, cette contrariété n’était pas celle qui l’intéressait, ni celle qu’elle avait eu la sensation de ressentir en la regardant depuis le balcon.

Aussi, la chasser d’un revers de la main était ce qu’il y avait de plus approprié à faire. L’état d’esprit de sa suivante et élève, ainsi que son train de vie, était tout ce qui comptait en ce moment, et en réalité, depuis quelques temps maintenant. Elle ne se mêlait pas de sa vie privée, bien sûr, mais elle gardait un œil attentif à ce genre de choses. D’où sa présence en cet instant, entre autres. La surprise d’Isobel n’était pas ce qui l’intéressait non plus, mais montrait qu’elle avait vu juste en supposant que le problème venait de sa relation avec son fiancé. Son visage se referma, et s’assombri quelque peu, en entendant la suite. Elle haussa même un sourcil lorsqu’elle évoqua qu’il préfèrerait la voir démissionner, plutôt que de continuer le travail qu’elle faisait si bien depuis tant d’années…

« Vous n’y pensez pas, j’espère ? » lâcha-t-elle, sans cacher l’amertume que cette idée lui laissait au fond de la bouche.

Non, cela ne ferait absolument pas l’affaire. Il était hors de question qu’elle démissionne. Il était inconcevable de la voir partir. Pas après tous ces efforts ; pas avec ce qu’elle avait prévu avec Leia, pour elle. Takara se mordit la langue, tout en fronçant le nez à cette idée. D’un seul coup, l’indifférence qu’elle avait jusqu’à lors porté pour cet homme venait de se transformer en une inimitié profonde. Comment cet insolent pouvait-il ainsi perturber leurs plans ? Pour sûr qu’elle en parlerait à Leia, pour définir un moyen de régler ce problème, à leurs manières. Pour l’heure, cependant, il fallait tempérer, et manœuvrer avec plus de minutie. Il fallait en savoir plus sur le pourquoi du comment, avant d’envisager un plan d’action efficace.

Était-ce parce qu’elle rentrait plus tard, et qu’elle avait plus de responsabilités ? Était-il de ces hommes là qui préférait tout gérer, et préférait voir leur femme au foyer plutôt qu’au travail ? Ou bien était-ce tout autre chose ? Elle, peut-être ? Tous, au palais, n’avaient pas encore digéré sa présence. Cela, elle le savait, mais était-il de ceux-là ? Takara ne s’était guère plus renseignée sur cet homme jusqu’à présent, mais cela changerait, pour sûr. La sith leva les yeux vers les étoiles en entendant la suite, et serra légèrement ses mains pour ne pas lâcher qu’elle ferait mieux de se ressaisir rapidement, parce que ce n’était clairement pas là le comportement qu’elle attendait d’elle. Non, la consort ne devait pas agir comme ça… Mais dormir dehors, sérieusement ? Était-ce donc cela, qu’elle était ? A se laisser marcher dessus de la sorte ? Non, là encore, ça ne faisait absolument pas l’affaire…

« Le pensez-vous vraiment, que ce soit la vraie raison ? Ces changements, ce rythme de vie est le vôtre, désormais. Vous faites de l’excellent travail, et vous continuerez à œuvrer de la meilleure des manières, je n'en doute pas. Pensez-vous donc que ça lui passera ? Qu’il finira par vous écouter ? Regardez où vous en êtes, Isobel. Vous parlez de dormir dehors. C’est hors de question. »

Elle lui trouverait une chambre, si elle refusait de retourner dans son foyer, il était hors de question qu'elle puisse dormir dehors.

Takara marqua une brève pause, avant de s’approcher un peu, et de la regarder à nouveau. Il fallait qu’elle se ressaisisse. Qu’elle se laisse emporter par certaines de ses émotions. Oui, qu’elle reprenne conscience que c’était à elle de mener leur couple, et non l’inverse.

« Vous êtes celle qui a le plus de responsabilité au Palais, au sein de votre couple. Il est normal de penser que ce soit lui, qui devrait vous écouter, et non l’inverse. Ne le pensez-vous pas, au fond de vous ? »

"Le pensez-vous vraiment, que ce soit la vraie raison ? Ces changements, ce rythme de vie est le vôtre, désormais. Vous faites de l’excellent travail, et vous continuerez à œuvrer de la meilleure des manières, je n'en doute pas. Pensez-vous donc que ça lui passera ? Qu’il finira par vous écouter ? Regardez où vous en êtes, Isobel. Vous parlez de dormir dehors. C’est hors de question."

"Je préfère la compagnie des poissons à la sienne, cette nuit."

Car il l’avait énervée, à nouveau, en à peine une minute de conversation. Car cette conversation, justement, ils l’avaient déjà plus d’une dizaine de fois. Car à chaque fois, à chaque **** de fois qu’elle essayait, il refusait de l’écouter, il se contentait de répéter les mêmes arguments. Car à chaque fois, elle sentait qu’il n’avait pas envie de comprendre. Et ça lui faisait encore plus mal encore car ils étaient sur le point de s’engager et qu’elle avait toujours cru qu’il la comprendrait et la suivrait dans ses choix de vie ! Il avait toujours été compréhensif et ils avaient toujours été en accord sur bien des points et là, il, il, il… Elle ne savait pas pourquoi il réagissait comme ça mais… Enfin… Si, elle le savait… Et c’était bien ce qui l’agaçait encore plus car jusqu’à ce soir, elle s’était toujours dit et répété qu’il saura passer au-dessus de ces désirs-là, pour que leur couple reste sain. Combien de temps allait-elle encore devoir patienter ?

"Vous êtes celle qui a le plus de responsabilité au Palais, au sein de votre couple. Il est normal de penser que ce soit lui, qui devrait vous écouter, et non l’inverse. Ne le pensez-vous pas, au fond de vous ?"

Bien sûr que si, elle n’avait pas dit le contraire ! Elle se remit debout d’un bond, les pieds à moitié dans la mare, en faisant fuir de surprise un petit oiseau posé non loin dans un piaillement. Là, la reine consort avait touché de plein fouet un point extrêmement sensible, chez elle. Mêlé, en plus, à sa fierté et à une fatigue très pesante, autant dire qu’elle ne prit absolument pas le temps de réfléchir ni même tenter de conserver son sang-froid.

"Mais ce n’est même pas la question ! Ça ne devrait pas être une question !" fulmina-t-elle. "Je suis entrée dans ce Palais en apprentissage à quinze ans, je ne l’ai jamais quitté depuis, il sait très bien que ce n’est pas un travail comme un autre et pourtant, il persiste à voir ça comme un simple boulot dont on peut partir juste comme ça, même après des années à travailler pour parvenir à un meilleur niveau ! Pourquoi ce serait moi qui devrait laisser tomber alors que c’est moi et pas lui qui ait dû autant travailler avant de pouvoir intégrer ce corps de métier ?! Combien de temps encore va-t-il falloir pour que ça lui rentre dans le crâne ! Il préfère écouter toutes les rumeurs les plus idiotes que moi alors que nous sommes engagés ensemble ! C’est, je, je…"

Elle n’arrivait même plus à trouver les mots, battant des mains et des bras, le visage plus rouge à cause de son coup de colère, tout en cherchant comment exprimer ça. Peut-être qu’elle exagérait un peu, qu’il n’était pas aussi obtus que ça ou… Quoi que !

"Et le pire, le pire, là-dedans, c’est qu’il insiste sur le fait qu’il sera capable d’assurer pour nous deux même si je ne travaille plus et que je reste dans une maison à juste s’occuper de nos futurs enfants, sans travailler. Comme si je n’était pas capable de m’assumer toute seule alors que je me débrouillais très bien avant ! Même sa famille, sur Coruscant, m’a déjà sorti ça, qu’une femme qui passe son temps au travail ne peut pas être capable de gérer aussi une famille. Ma mère avait aussi été suivante et elle s’était occupée de moi, il n’y a pas de raisons, c’est complètement irrationnel ! Et de quoi je me mêle, en plus ?! Est-ce que moi, je vais regarder sous la jupe de leurs femmes pour voir ce qui se cache ?! En plus, sur Coruscant, ils côtoient tous les politiciens les plus ripoux, hypocrites et voleurs qui soient et pourtant, c’est d’ici, de la famille royale, qu’ils osent se méfier ?"

Mine de rien, laisser enfin échapper tout ça, alors que ça la travaillait depuis longtemps, apporta un soulagement certain. La colère était… parfois… Très libératrice… Elle s’efforçait sans cesse de la canaliser, la retenir, la repousser, pourtant, ça… Soulageait tellement. Puis elle revint brutalement à la réalité, en se souvenant brusquement de qui était face à elle.

"Pardon… Je ne dois pas vous ennuyer avec ça."

« Je préfère la compagnie des poissons à la sienne, cette nuit. »

Takara ferma la bouche et baisse le regard, pour retenir sa surprise, d’abord, puis la pointe d’amusement, ou peut-être même de contentement malsain, tandis que son esprit s’imaginait déjà les conséquences d’une telle animosité, dans leur couple. De voir ainsi sa frustration érupter tout d’un coup était si admirable. Voilà qu’elle s’énervait enfin, qu’elle comprenait qu’elle n’était pas n’importe qui, qu’elle n’était plus n’importe qui. Regardant brièvement l’oiseau s’envolé, apeuré par le mouvement brusque d’Isobel, la sith cacha au mieux sa satisfaction devant pareille réaction. Ah, la fatigue, l’amertume, la colère… C’était alors si facile de se laisser emporter, et pour elle, de la mener exactement là où elle le voulait. Bien évidemment, que tout ceci ne devrait pas être une question. Bien évidemment, que ce n’était pas à elle de changer d’un iota ses habitudes. Il était évident que le fiancé de sa dame de compagnie devenait une gêne, au lieu d’un soutien supplémentaire. C’était quelque chose qui allait devoir se régler rapidement, soit par Isobel directement, soit par quelqu’un d’autre. Il ne faudrait pas que ce soit trop brusque, cependant, vu son état émotionnel, ou bien elle pourrait dérailler complètement, et devenir elle aussi un poids au sein du Palais. Ce n’était pas ce que la consort souhait, loin de là. Il leur fallait quelqu’un de fiable, de performant, de compétent, et de stable. Quelqu’un de dévouée dans son travail, apte à résoudre les problèmes avant qu’ils ne se développent, et qui faciliterait le travail de la famille royale.

Combien allait-il falloir le supporter donc ? Pas bien longtemps, si possible. Takara devrait trouver un moyen, donc, si la situation ne se réglait pas d’elle-même. Mais plus elle écoutait Isobel, et plus cet homme lui semblait être un cas désespéré. Elle haussa tout de même un sourcil, en l’entendant de parler de rumeurs, qui circuleraient au sein du palais… Des rumeurs à quel propos ? De quoi représenter un danger probable, si son fiancé semblait plus prompt à les croire qu’à écouter sa future femme ! La sith renifla, avant de faire un ou deux pas en avant, pour se porter un peu à hauteur d’Isobel, sans pour autant empiéter de trop dans son espace personnel.

Inspirant profondément, Takara ravala encore un peu sa satisfaction à l’entendre vider son sac de la sorte, sans chercher à masquer son énervement. Il n’y avait qu’à la regarder agiter les mains, ou encore la rougeur de son visage, pour en lire la sincérité, et la profondeur. Oui, cela la hantait. Au final, Takara ne trouvait que peu d’intérêt aux raisons invoquées. Que les hommes puissent penser que les femmes n’avaient pas leur place au travail n’était pas une nouveauté, surtout dans les Mondes du Noyau, ou les sociétés trop ancrées dans les traditions. Il était plus intéressant de s’attarder sur les conséquences, ou peut-être sur les informations qu’Isobel continuait de lâcher à son sujet, sans s’en rendre nécessairement compte, et qui ne tombaient pas dans l’oreille d’une sourde.

« Pardon… Je ne dois pas vous ennuyer avec ça. »

Que nenni, au contraire ! Le fait qu’elle n’ait rien provoqué autour d’elle, malgré son état, montrait que le travail qu’elle avait abattu depuis leur voyage sur Coruscant commençait à porter ses fruits. Ca, plus tout le reste, suffisait amplement à la sith, qui se força à tirer un sourire réconfortant et compréhensif sur ses lèvres.

« Non, vous ne m’ennuyez pas, Isobel. Vous aviez besoin de relâcher ce que vous aviez sur le cœur. C’est toujours plus aisé de le faire en présence de quelqu’un. »

Et cela l’arrangeait, qu’elle le fasse en sa présence, surtout.

« Pour le reste, il est évident que ce n’est pas à vous, qui êtes installée ici depuis longtemps, et qui avez vécu au Palais, de vous adapter. C’est à lui de faire le nécessaire pour s’intégrer, et montrer sa volonté de vivre à vos côtés, quelque soit vos décisions. Vous savez ce qu’il faut faire, ou vous allez. Comment, lui, pour qui la vie au Palais lui était encore étrangère il y a peu, pourrait-il le savoir mieux que vous ? »

Elle soupira légèrement, avant de porter son regard un instant derrière elles, pour constater que le garde qui l’avait suivi était rester à distance, sans doute après avoir constaté qu’elle venait simplement discuter avec quelqu’un, dans les jardins. Elle lui fit signe de la main qu’il n’avait pas à rester là, avant de reporter son attention sur Isobel. Il était trop loin, de toute façon, pour entendre quoi que ce soit.

« Venez, sortez-donc de là, vous allez attraper froid. » fit-elle, en tendant la main à Isobel, qui avait toujours les pieds dans l’eau.

Elle ne la prendrait surement pas, elle n’en avait pas réellement besoin et n’oserait sans doute pas, mais c’était le geste qui comptait.

« Je croyais que les rumeurs à notre sujet avaient fait leur temps. Qu’est-ce donc qui semble tant le préoccuper, au point de vous considérer comme une moins que rien ? »

Peu importe ce qu'elles étaient, si elles portaient préjudice à Leia, ou à elle-même, alors elles devraient disparaître d'une façon ou d'une autres, et avec ses colporteurs, si nécessaire...

Tout de même, c’était… C’était trop… Bon sang… Elle se frotta le visage avec les deux, tout en pataugeant assez nerveusement au bord de la mare, sans même le réaliser. Le froid pourrait même faire un peu de bien. Les pans de sa longue robe blanche flottaient doucement dans l’eau et elle sentait cailloux et petites herbes, contre ses pieds et ses chevilles. Un frisson la secoua toute entière, alors que la colère retombait lentement et qu’elle reprenait ses esprits. Franchement… Elle ne devrait vraiment pas se mettre dans des téta pareils, encore moins s’énerver, ce n‘était pas ça qu’il fallait faire, ce n’était pas digne ou convenable ! En plus, déranger la reine consort au milieu de la nuit pour ça… Enfin, c’était elle qui était venue de son propre chef, soit, mais cela comptait tout de même. Elle hocha très vivement la tête à ce qu’elle répondit ensuite, d’ailleurs, toujours aussi outrée que qui que ce soit puisse se permettre de comment elle devait diriger sa propre vie. Bien entendu que personne, ni son fiancé, ni même ses propres parents ne pourraient le savoir ! Ils n’étaient pas dans sa tête, ils n’avaient aucune idée de ce qu’elle vivait et ressentaient, ils ne…

"Venez, sortez-donc de là, vous allez attraper froid."

Isobel prit la main tendue très machinalement, puis la relâcha, pour secouer un peu la robe où une algue s’était accrochée. Après la colère et le stress, qui retombaient, la fatigue et la lassitude reprenaient le dessus. Un ras-le-bol général s’installait, en vérité. Elle ne savait plus vraiment où elle en était, il s’était passé tellement de de choses, ces derniers temps ! Tout s’était enchaîné à une vitesse folle et ce qui arrivait avec son fiancé était la goutte d’eau qui venait tout faire déborder.

"Je croyais que les rumeurs à notre sujet avaient fait leur temps. Qu’est-ce donc qui semble tant le préoccuper, au point de vous considérer comme une moins que rien ?"

"Il a peur, c’est tout… Peur du changement, peur des rumeurs concernant votre pouvoir, peur car personne ne sait d’où venez et comment vous êtes arrivée si vite auprès de la reine, peur du changement, de… De tout."

Peut-être peur aussi de perdre le « contrôle » qu’il avait sur elle ou bien peur, plus simplement, qu’il ne lui arrive vraiment du mal ? Elle ne savait pas… et n’avait plus envie de le savoir. Les yeux fermés, elle inspira profondément et lentement, afin de chasser pour de bon toute trace de colère ou de perte de sang-froid. Ces derniers temps, elle cédait bien trop facilement à la colère, ça n’allait pas du tout ! Et c’était parfaitement contre-productif. Avec un peu de recul, la situation ne semblait pas si grave. Aldo devait aussi être dans une période où il s’agaçait d’un rien et peut-être qu’il allait réussir à revenir à la raison… S’il ne le faisait pas, alors qu’il faudra qu’elle envisage autrement la suite de leur relation. Cette idée lui donnait terriblement mal au cœur mais elle était certaine de ne pouvoir se marier avec un homme refusant ses propres choix de vie. Contre toute attente, le calme lui revint assez vite, sans qu’elle n'ait à batailler trop longuement. Par de vieux réflexes, une fois de plus.

"Je ne vais guère vous déranger plus longuement, tout cela va se régler… d’une manière ou d’une autre. Merci pour votre écoute, majesté."

Pour cette nuit, elle trouvera bien un endroit où passer ces quelques dernières heures de sommeil… Dans l’un des petits salons privés des servantes, peut-être, ça pouvait être une idée. Elle attendra que son fiancé quitte leurs appartements, demain matin, pour y rentrer, prendre une bonne douche et se changer.

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Etat / se reprendre : 4

La jeune sith ouvrit grandement les yeux de surprise, mais sans en tomber des nues pour autant, en sentant la main de sa suivante se refermer autour de la sienne. Voilà que c’était inattendu de sa part. Elle qui s’était montré particulièrement rigide sur le protocole depuis tout ce temps, voilà qu’elle venait le piétiner d’un seul coup, pour se mettre au sec hors de la marre. Le contact ne dura qu’un temps, cependant, et Takara fit aussitôt un ou deux pas en arrière, en faisant attention de ne pas trébucher dans l’herbe, ou sur une petite motte de terre. Elle, n’était pas pieds nus, quand bien même elle l’aurait apprécié. Elle, n’avait pas le bas de sa robe trempée et couverte d’algues. Il y avait quelque chose de satisfaisant, à voir Isobel dans cet état, à des années-lumière de ce qu’elle avait l’habitude d’être, et de montrer. Elle était en train de changer, d’évoluer. Il faudrait tout de même faire attention à ce que ça ne perdure, ou ne s’aggrave pas trop avec le temps. C’est pourquoi Takara ne fit aucune remarque sur ce qui venait de se passer, il n’était pas nécessaire d’enfoncer le clou en précisant à sa dame de compagnie qu’elle ne se comportait pas convenablement. Elle s’en rendrait compte d’elle-même plus tard, si ce n’était pas déjà le cas…

« Il a peur, c’est tout… Peur du changement, peur des rumeurs concernant votre pouvoir, peur car personne ne sait d’où venez et comment vous êtes arrivée si vite auprès de la reine, peur du changement, de… De tout. »

Takara renifla d’agacement, voilà qui n’était pas nouveau, mais qui expliquait beaucoup de choses. Beaucoup au Palais se demandait ce qu’elle était, et ce dont elle était réellement capable depuis qu’il avait été mis au jour qu’elle était elle aussi une sith. Elle qui pensait que ce genre de choses était derrière elle, et que la raison de la déférence de certain était désormais dû à son nouveau rôle au sein de la famille royale… Décidément, Plagueis et compagnie avait laissé une trace indélébile, au point que ses actes ne changeaient visiblement pas la donne, au moins la concernant. Peut-être faudrait-il faire encore plus… Mais d’un autre côté, il était difficile de le concevoir. Elle restait une sith, et la consort d’une reine désormais, ce n’était pas à elle de se plier au moindre petit caprice du petit personnel du Palais ! Se décalant légèrement de côté, avant de retrouver la stabilité du chemin pavé, Takara refoula encore un peu son amertume.

« C’est malheureux, bien que compréhensible. La nature humaine fait que l’on a peur de ce que l’on ne comprend pas. Il faudra, le moment venu, trouver un moyen de mettre un terme à ces rumeurs une bonne fois pour toute. »

Car il faudrait bien que cela cesse un jour. Du moins, partiellement. Que l’on ait peur de son pouvoir n’était pas dérangeant en soi, cela permettait de se faire respecter. Mais avoir peur qu’elle puisse être instable et agir contre les intérêts communs représentait un problème. Le réel problème, par ailleurs. Mais concernant le fiancé d’Isobel, cela ne durerait qu’un temps.

« Je ne vais guère vous déranger plus longuement, tout cela va se régler… d’une manière ou d’une autre. Merci pour votre écoute, majesté. »

« Cela ne me fait pas l’ombre d’un doute. Venez, rentrons à l’intérieur. » rétorqua-t-elle aussitôt, avant de l’inviter d’un geste de la main à l’accompagner pendant un temps.

Takara la raccompagna jusqu’à l’une des entrées du palais, où le même garde qui l’avait aperçu tout à l’heure la salua à nouveau. La consort s’arrêta à son niveau, avant de lui désigner Isobel, derrière elle, qu’elle n’aura évidemment pas lâché d’une semelle.

« Veillez à trouver un endroit approprié pour que Mademoiselle Mackay puisse passer la nuit en toute tranquilité. »

Il était, après tout, hors de question qu’elle dorme dehors, ou elle ne savait où. Elle méritait mieux que cela, même si d’autres ne le voyait pas comme ça. Puis elle se tourna vers sa suivante.

« Quand à vous, Isobel, prenez le temps de vous détendre. Nous nous reverrons demain matin. »

Pour sûr qu'elle allait se ressasser cette affaire, puis cette discussion, pendant un long moment, si ce n'est toute la nuit. Bah, ce n'était pas un moindre mal, cela lui forgerait son caractère, celui que la sith cherchait à faire émerger depuis quelque temps maintenant. Takara la salua d’un bref signe de tête, fit de même avec le garde, avant de prendre l’escalier qu’elle avait emprunté à l’allez, histoire d’éviter de croiser un maximum de monde. Leia, si elle n’était pas rentrée, ne tarderait plus, et la sith avait un nouveau sujet à évoquer avec elle, désormais.

Il était un peu plus de minuit passé, lorsque Leia put rentrer dans les appartements royaux. Assez lasse, elle ôta ses talons hauts dès l’entrée, en se tenant au mur, puis enleva la capeline de cérémonie en soie couvrant sa robe, pour la poser non loin. Les serviteurs la récupéreront demain matin pour la laver. Pas un bruit, Takara devait sans doute être à la bibliothèque ou peut-être à s’entraîner. Leia s’arrêta dans l’antichambre, devant le miroir, pour détacher ses cheveux, enlever pinces, aiguilles et petits bijoux, avec un certain soulagement, avant de se masser longuement la nuque. Puis elle alla dans la salle de bain pour se démaquiller et se nettoyer la peau. Le même rituel, tous les soirs, depuis qu’elle était devenu reine. Une fois démaquillée, elle coiffa ses longs cheveux bruns pour en enlever quelques nœuds puis se passa de l’eau sur le visage, pour se rafraîchir. Malgré l’’heure, elle n’avait pas tant sommeil que ça. Après une douche rapide, elle enfila une tenue de nuit confortable puis une robe de nuit par-dessus, pieds nus, puis s’installa tranquillement dans un fauteuil, dans leur chambre, près de la baie vitrée.

Une fois plus tranquille, elle parcourut sur un petit ordinateur les messages dont elle n’avait pas eu le temps de prendre connaissance dans la journée. Beaucoup concernant les déboires impériaux… La destruction de l’Étoile Noire avait causé un très grand bruit. Bien pire, les Rebelles s’étaient sentis pousser des ailes et les attaques se multipliaient. Bien que Alderaan – comme les Mondes du Noyau d’une façon générale – restaient relativement épargnés par tout cela, ça se rapprocherait, il était difficile de le nier. Ce qui l’amenait, une nouvelle fois, à hésiter sur le traitement qu’elle devrait appliquer contre les dernières poches de résistance sur leur planète. Contre son père adoptif. C’était délicat… Une partie non négligeable de la population était toujours loyale envers Bail, même s’il avait disparu, beaucoup n’accepteraient pas de le voir arrêté ou exécuté. Provoquer des tensions à cause de ça serait… Trop tôt… Bien trop tôt… Leur pouvoir restait très récent, donc sur un équilibre précaire. Les rumeurs étaient difficiles à faire taire. Elle devra en parler avec le Conseil, au plus tôt… Mais avant cela, sonder également son entourage sur ce sujet, connaître leurs positions.

Le bruit de la porte l’informa que son épouse était rentrée. Alors qu’elle lisait le rapport quotidien du capitaine de sa garde. Elle releva la tête, quand elle approcha, puis haussa un sourcil en voyant comment elle était présentée. En robe de chambre, couverte d’un châle, les vêtements un peu en vrac et défaits. Où avait-elle bien pu aller se promener dans une pareille tenue… ? Personne ne l’avait vue, n’est-ce pas ? Enfin, si elles s’évertuaient jour après jour à se plier aux rituels quotidiens codifiant leurs apparences, dans les moindres détails, ce n’était tout de même pas pour rien ! Elle ne semblait pas non plus très posée ni très sereine… Leia lui fit signe de venir s’asseoir dans l’un des fauteuils, sentant qu’elle voulait lui parler. Durant ce temps, elle éteignit le petit ordinateur puis le posa sur la table ronde en chêne près d’elle. Très bien, maintenant, qu’avait-il bien pu se passer… Elle espérait fortement qu’il n’y ait pas eu de nouveau un problème improbable, comme par exemple – à tout hasard – un Jedi idéaliste et cinglé venu prêcher la bonne parole dans les sous-sols de la bâtisse.

– Alors, quel est le problème, cette nuit ? Un nouveau Jedi est venu délivrer un message ? Un autre a fait des siennes en ville ? Vitiate est revenu dans le coin et veut raser la planète ?

Elle ne pensait bien sûr pas sérieusement la dernière option, voilà déjà longtemps que toute la ville serait en alerte, mais au point où elles en étaient, tout ça restait plausible malgré tout.

Takara esquissa un léger sourire en refermant la lourde double porte de leurs appartements derrière elle, la présence de son épouse pouvant se faire sentir à travers la Force. Voilà qui allait la détendre, après la discussion qu’elle venait d’avoir dans les jardins. Machinalement, elle ôte ses talons hauts à côté de ceux de Leia dès l’entrée, satisfaite de s’en débarrasser une nouvelle fois, tout en espérant que ce serait la dernière de la soirée. Pouvoir toucher à nouveau le sol de la plante des pieds faisait du bien. Passant une main dans ses cheveux pour dénouer le chignon qu’elle n’avait pas eu le temps de défaire plus tôt, elle passa dans le salon, pour y trouver sa femme, assise dans un des fauteuils, comme à son habitude lorsqu’elle rentrait le soir, malgré l’heure bien avancée. Son haussement de sourcil la stoppa dans son élan, avant qu’elle n’ait pu s’approcher assez pour l’embrasser. Il y eut un petit moment de flottement gênant, avant qu’elle ne se rappelle qu’elle avait peut-être quelque peu négligé sa tenue avant de sortir. Oui, bon, certes, mais elle avait fait attention à se faire discrète, plus elle n’avait pas voulu prendre le risque de voir Isobel s’éclipser avant d’avoir obtenu le fin mot de cette histoire.

Haussant brièvement les épaules avant de faire le tour du fauteuil, elle prit soin de se défaire du long châle qu’elle avait enfilé par-dessus sa robe de chambre, le laissant tomber sur le dossier, avant de s’installer, laissant soin à son épouse de terminer ce qu’elle avait à faire. Cela lui laissa tout juste le temps de voir venir la suite, et de laisser couler son agacement dans un profond soupir. Evidement, vu sa tenue, elle allait lui demander ce qui s’était passé. Ce qui n’était pas une mauvaise chose, il fallait aborder le sujet rapidement, pour pouvoir agir tout aussi vite, si besoin.

« Alors, quel est le problème, cette nuit ? Un nouveau Jedi est venu délivrer un message ? Un autre a fait des siennes en ville ? Vitiate est revenu dans le coin et veut raser la planète ? »

Takara eut un rire léger, avant de secouer doucement la tête. Non. Non, rien de tel, fort heureusement. S’il y avait bien eu un problème, il n’était pas de cet acabit là, mais restait tout de même assez important pour elles. Takara prit le temp de croiser sa jambe gauche sur la droite, et de passer une main distraite dans ses cheveux roux, qu’elle ramena par-dessus son épaule.

« Non, pas de Vitiate, pas de Jedi, ni de rebelles, fort heureusement. » commença-t-elle, tout en laissant tout de même transparaître sa contrariété. « J’ai aperçu Isobel dans les jardins tout à l’heure, depuis le balcon. Passablement agacée, pour ne pas dire au bord de la crise de nerfs. »

Pendant un bref instant, elle se demanda ce qui se serait passé si elle n’était pas descendue pour s’enquérir de son problème. Se serait-elle noyée dans la marre pendant la nuit, ou serait-elle retournée dans ses appartements pour mettre à mort son fiancé dans son sommeil ? Possible, le Côté Obscur pouvait pousser les gens à faire bien des choses, de ça il n’y avait pas à en douter. Ou bien elle aurait ruminer toute la nuit, avant de se pointer le matin pour remettre sa démission… Inacceptable, vu l’investissement qu’elle avait faite auprès de sa suivante, et compte tenu des plans qu’elles avaient pour Alderaan.

« Son fiancé commence à devenir une gêne, pour sa formation, et son travail. Il veut la pousser à quitter ses fonctions, et à l’éloigner le plus possible du Palais, et de nous. C’est inacceptable, cependant, c’était une réaction à prévoir. Isobel m’en avait parlé, à notre retour de Coruscant… »

Elle soupira une fois de plus, tournant plusieurs fois la langue dans sa bouche tandis qu’elle regardait une fois de plus la situation dans son ensemble. Elle prit le soin de répéter ce qu'Isobel avait pu lui dire, et d'expliquer la manière dont elle avait canalisé la situation, en appuyant sur la fierté de leur suivante, et en rabaissant son fiancé, que dans son état émotionnel, c'était la meilleur chose à faire. Que oui, donc, elle avait profité de son état de détresse pour servir leurs intérêts. Et alors ? Elle était une sith, pas un jedi naïf et idéaliste. Pour le reste, cet homme était un danger, un électron libre qui ne pouvait rester dans les pattes de sa dame de compagnie. Du moins, pas en l’état.

« Je ne pense pas qu’il se doute de la réalité, mais il remet en question ses capacités, et son intégrité. Il se méfie aussi de moi ; De nous, et remet en cause l’autorité de la Monarchie. Il répand aussi des rumeurs, et met à mal la stabilité et la confiance du personnel. »

Son regard se posa sur celui de sa femme, avant de fuir vers la baie vitrée, pour observer le ciel sombre, et couvert d’étoiles.

« Je me suis servi de la situation pour la convaincre qu’elle était la personne indispensable dans leur couple, mais je ne suis pas certaine que cela dure s’il persiste dans son entêtement. »

Nouvelle pause, avant de lâcher, froidement et implacablement :

« Cet homme est une bombe à retardement. Compte tenu du reste, il va falloir s’en débarrasser. Rapidement. »

De toutes les suivantes travaillant à leur service, jamais Leia n’aurait parié sur celle-ci, avec la mention crise de nerfs. Pas alors que la jeune femme faisait partie de celles ayant le sang-froid le plus exemplaire, en toute circonstance. Même s’il était vrai que sa vie avait été pas mal bouleversée ces derniers temps… Elle pouvait comprendre le chamboulement, le trop-plein d’émotions, la perte de contrôle, la sensation de voir votre vie vous échapper. D’autant plus pour une personne qui ne connaissait littéralement rien à tout cela et qui n’avait jamais été familiarisée à de tels dons. Elle s’attendait donc à ce que soit une sensation directement liée à la Force, peut-être une vision ou autre chose, qui avait rendu Isobel aussi nerveuse. Mais lorsque son épouse évoqua le fiancé, elle fut assez surprise. Voilà un problème qu’elle n’avait guère vu venir… Le trouble aurait pu si facilement venir de la Force elle-même et du manque de maîtrise de la jeune femme, dans les débuts, c’était normal. Mais qu’il vienne de l’entourage proche rendait immédiatement la situation plus délicate à gérer.

– Je ne pense pas qu’il se doute de la réalité, mais il remet en question ses capacités, et son intégrité. Il se méfie aussi de moi ; De nous, et remet en cause l’autorité de la Monarchie. Il répand aussi des rumeurs, et met à mal la stabilité et la confiance du personnel. Je me suis servie de la situation pour la convaincre qu’elle était la personne indispensable dans leur couple, mais je ne suis pas certaine que cela dure s’il persiste dans son entêtement.

C’était au moins une bonne chose que cet homme ignore la nouvelle nature de sa compagne et ce qui s’était produit sur Coruscant, ils pouvaient limiter les dégâts. Néanmoins, les rumeurs allaient effectivement bien vite et n’étaient pas toujours faciles à éteindre… Voilà qui rejoignait le problème auquel elle avait réfléchi tout à l’heure. Au fond d’elle, un certain ressentiment commença à grimper. Les efforts sur l’attitude, l’apparence et les mesures prises représentaient, chaque jour, une énergie non négligeable, elle ne pouvait tolérer que tout cela soit mis à mal par quelques mauvaises têtes. Son esprit sembla littéralement se refroidir alors qu’elle réfléchissait à la meilleure manière de régler définitivement ce problème-ci. Ce n’était pas un homme indispensable au Palais, il était arrivé récemment et n’avait pas d’accointances profondes avec beaucoup de membres du personnel, mieux implanté. Isobel devait rester, il n’était même pas envisageable qu’elle parte, mais cet homme, voyons voir…

– Cet homme est une bombe à retardement. Compte tenu du reste, il va falloir s’en débarrasser. Rapidement.

– Il doit être possible de l’influencer pour le faire attaquer, au nom des Rebelles locaux, une personnalité influente du palais, devant témoins.

Elle n’avait pas encore d’idées précises sur ce qu’elle comptait faire, simplement des pistes. Se contenter de le renvoyer sous un prétexte quelconque ne ferait que naître un sentiment d’injustice dans le palais, sans oublier que ça ne couperait pas pour de bon la jeune suivante de lui. Pire encore, il pourrait alors la retourner contre eux. Il fallait être plus fin… Elle reprit son petit ordinateur pour afficher la liste des employés du palais et la parcourir tranquillement, en cherchant qui pourrait être la cible idéale. Evidemment, ladite cible ne sera pas sacrifiée, simplement blessée… Pas même gravement. Une cible qui bénéficiera ensuite d’un soutien psychologique, évidemment, pour passer outre cette terrible affaire. C’était la moindre des choses !

– Le mieux serait qu’il agisse durant un moment important de la vie du Palais, pour la symbolique. On peut aussi se servir au passage d’un ou deux autres dissidents, déjà sous surveillance, dans le personnel, pour qu’il n’agisse pas seul, ce sera plus crédible. Et les faire sauter avec lui. Il peut ensuite être condamné à la prison ou banni à vie de cette planète, peu importe. Tant que ses actes marquent assez les esprits, la population réprouve bien plus ce type d’actes violents que les changements dans la vie du palais ou dans la royauté. Mmh… Que dis-tu de lui, comme cible ?

Elle tourna l’écran, pour lui montrer la tête du Chambellan, sur sa fiche. C’était un vieil homme, au service du palais depuis quasiment quarante ans, désormais. Connu, respecté, assez doux, il pouvait être une cible facile pour des terroristes car il ne pouvait plus vraiment se défendre. De plus, il était très apprécié de la population car il organisait souvent de petits festivals culturels.

– Mieux vaut qu’Isobel ne soit pas présente, durant l’attaque. Elle est encore un peu, disons, fragile, pour l’exposer de plein fouet à des émotions trop violentes, avec ce qu’elle développe actuellement. Une idée d’où l’envoyer en attendant ?

« Il doit être possible de l’influencer pour le faire attaquer, au nom des Rebelles locaux, une personnalité influente du palais, devant témoins. »

Takara haussa un sourcil, face à cette remarque. Voilà qui était inattendu, pour le coup, venant de son épouse. Leia avait certes beaucoup changé, avec son aide, mais c’était la première fois qu’elle lui suggérait une approche aussi directe, vis-à-vis d’un gêneur, au sein du Palais. D’ordinaire, elle faisait soit preuve d’un peu plus de parcimonie, soit elle se contentait de lui demander de réfréner ses ardeurs. La sith n’avait elle-même pas vraiment réfléchit à une méthode pour évincer le fiancé d’Isobel jusqu’à présent, et n’avait pas envisagé de mesures s’en prenant directement à lui de la sorte. Cependant, elle devait l’admettre, cette proposition lui plaisait particulièrement. L’influencer, en soi, ne devrait pas être difficile, à moins qu’il ne se révèle être un peu trop dur du cerveau. La Force, sur ce point, pouvait faire des merveilles lorsque le sujet n’en faisait pas qu’à sa tête. Parfois, les esprits faibles pouvaient se montrer si contrariants…

Ce ne serait pas le cas cette fois-ci. Que soit elle, ou bien Leia qui doive sans charger, il n’y aurait pas de demi-mesure. Takara, d’ailleurs, ne ressentait absolument aucun remord à agir comme ça dans le dos de sa dame de compagnie, pour façonner le reste de sa vie. Isobel devait rester au Palais, elle était bien trop précieuse pour la voir s’éclipser dans la nature. C’était pour le mieux, pour tout le monde.

Elle ramena doucement les doigts de sa dextre à la commissure de ses lèvres, laissant frotter le pouce contre la peau, le regard posé sur le coin de l’ordinateur que consultait Leia, perdue dans sa réflexion à mesure que son épouse développait son idée. Son attitude, depuis quelques temps, lui plaisait beaucoup, à mesure qu’elle s’était habitué à ses pouvoirs, et à sa nouvelle condition, tant en qualité de souveraine, que de sith. Sa proposition était retorse ; de jouer de cette manière sur la mise en scène autant que sur le scénario, en proposant au passage d’en profiter pour se débarrasser de quelques autres gêneurs déjà identifié depuis quelque temps, mais lui plaisait de plus en plus. Oui, il n’y avait rien de tel qu’une agression gratuite, à un moment symbolique, pour emmener d’un seul coup l’opinion de tous de son côté. Il fallait donc trouver la victime parfaite, en dehors de son épouse ou d’elle-même, pour atténuer au maximum les répercussions que cela pourrait avoir chez Isobel. Il fallait qu’elle soit choquée par les actes de son fiancé, bien sûr, mais il ne faudrait pas, en effet, qu’elle puisse s’imaginer qu’il s’agisse d’un coup monté de leur part ! Auquel cas elle se détournerait d’elles, ce qui n’était pas envisageable !

« Je pense que ça pourrait faire l’affaire, oui. » dit-elle, en laissant sa main reposer délicatement sur le dosser du fauteuil, et en s’avançant au bord pour observer la fiche du Chambellan.

C’était une bonne victime, en effet. Lui, ou le Doyen, qui se méfiait encore un peu d’elle, mais que son épouse appréciait beaucoup. C’est pourquoi elle n’avait pas suggéré son nom.

« Il doit être possible d’influencer Monsieur Nileseal et ses complices dans le courant de la nuit, lorsqu’il y a peu de personnel dans les couloirs, pour qu’ils s’en prennent à notre victime. Peut-être en essayant de le poignarder, pour rendre la scène encore plus poignante. En prenant soin à ce qu’ils soient convaincus que c’était leur idée, et qu’elle était préméditée. »

Ce serait encore plus simple de leur suggérer la tentative de meurtre s’ils étaient endormis, et il faudrait faire attention, en effet, à ne pas se faire remarquer. C’était, de toute façon, la meilleure façon de procéder si elles souhaitaient éviter d’éveiller les soupçons.

« Mieux vaut qu’Isobel ne soit pas présente, durant l’attaque. Elle est encore un peu, disons, fragile, pour l’exposer de plein fouet à des émotions trop violentes, avec ce qu’elle développe actuellement. Une idée d’où l’envoyer en attendant ? »

Elle se recula à nouveau dans son fauteuil, hochant la tête, tout en se pinçant les lèvres. Bien sûr qu’il vaudrait mieux qu’Isobel ne soit pas présente à ce moment-là. D’abord pour pouvoir manipuler l’esprit de son fiancé, puis ensuite pour éviter d’assister en direct à l’attaque. Comme Leia l’avait si bien dit, elle n’était pas dans les bonnes conditions pour endurer la chose sans ciller. L’éloigner était une nécessité évidente. En revanche, Takara n’avait pas jusqu’alors réfléchit à une raison crédible de la maintenir éloignée d’elles pendant un laps de temps suffisamment long pour qu’elles puissent agir. Il faudrait, d’ailleurs, l’éloigner suffisamment du palais pour qu’elle ne puisse pas entrer en contact direct avec son fiancé. Enfin, il faudrait que cette mission soit assez importante pour toucher à la fierté du travail bien accompli qui la guidait à longueur de journée.

Elle avait bien une idée, finalement. Cela ferait plaisir à son épouse, pour sûr. Elle, était plus réservée.

« Je pense toujours que c’est encore un peu trop tôt, qu’il reste des choses à régler, mais peut-être que nous pourrions l’envoyer prospecter les orphelinats d’Alderaan et de Delaya. Que nous préférons la voir s’acquitter de cette tâche, car nous avons confiance en elle pour revenir vers nous avec une liste plus objective que celle de l’Intendance. »

Le sujet avait resurgi après le mariage, dans la continuité des obligations de la famille royale. Takara n’était toujours pas convaincue que le temps soit venu pour cela, mais ça pourrait faire l’affaire pour tenir Isobel loin du palais pendant quelques temps.  Adopter était un sujet de désaccord entre elles depuis un moment, et ce malgré qu’elles soient toute les deux d’accord sur le fait qu’elles souhaiteraient que ce soit une fille, plutôt qu’un garçon.

A cela s’ajoutait l’Intendance, qui revenait régulièrement leur suggérer qu’ils pouvaient s’occuper de la tâche, pour ensuite leur proposer ce qu’ils pensaient être les meilleurs prétendants. Cela avait tendance à l’agacer, comme s’ils pouvaient savoir ce qu’elles souhaitaient réellement… Alors, peut-être qu’elle pourrait se satisfaire de l’occasion pour leur couper l’herbe sous le pied…

« La tâche serait assez conséquente pour l’éloigner à temps plein pendant quelque jours, notamment pour se rendre sur Delaya ; et assez importante pour accaparer pleinement son attention. Elle ne devrait pas pouvoir s’y soustraire, même en apprenant la nouvelle de l’action de son fiancé… »

Et elles, pourraient venir la ramasser à la petite cuillère si nécessaire, tant que cela servait leurs intérêts...

– Je pense toujours que c’est encore un peu trop tôt, qu’il reste des choses à régler, mais peut-être que nous pourrions l’envoyer prospecter les orphelinats d’Alderaan et de Delaya. Que nous préférons la voir s’acquitter de cette tâche, car nous avons confiance en elle pour revenir vers nous avec une liste plus objective que celle de l’Intendance.

Leia haussa légèrement les sourcils, de nouveau, car elle ne s’était pas attendue à ce que son épouse avance ce sujet-là, plutôt qu’une quelconque autre mission, diplomatique par exemple, pour éloigner Isobel plusieurs jours du palais. La perspective d’une adoption lui avait toujours arraché pas mal de grimaces, même avant leur mariage. Pour sa part, la reine y voyait une simple obligation, tout comme elle aurait eu à cœur de porter elle-même son enfant si elle avait épousé un homme. Avoir un héritier ou une héritière ne se discutait pas, après tout. Elle-même avait été adoptée et s’il lui avait fallu bien du temps avant de trouver sa place et ne plus se sentir prisonnière de son destin, elle avait fini par accepter les choses. Elle n’aurait pas forcément songé à confier à cette tâche à l’une des suivantes, mais après tout, pourquoi pas ? Repérer des enfants pouvant convenir allait prendre un moment… Bien assez de temps pour organiser leurs affaires et empêcher la jeune femme de revenir en courant si elle apprenait trop tôt ce qui s’était produit. Leia aurait même été prête à l’envoyer dans la Bordure… Quoi que, le voyage aller et retour était trop long.

– La tâche serait assez conséquente pour l’éloigner à temps plein pendant quelques jours, notamment pour se rendre sur Delaya ; et assez importante pour accaparer pleinement son attention. Elle ne devrait pas pouvoir s’y soustraire, même en apprenant la nouvelle de l’action de son fiancé…

– Le mieux serait d’agir durant les préparatifs de la Geshla… Le Chambellan doit réunir pas mal de monde, ce sera plus marquant. Si j’ai bonne mémoire, la première réunion d’ampleur doit se tenir d’ici trois ou quatre jours…

Elle le vérifia rapidement sur l’ordinateur, tout de même. En ce moment, avec la belle saison de retour sur leur région et la capitale, les fêtes en tous genres foisonnaient littéralement. Il y avait pas mal de célébrations directement liées à des fêtes de saisons, de récolte et autres, mais aussi des célébrations religieuses et deux autres trois festivals d’art, à venir. En résumé, il s’agissait de la période la plus chargée de l’année et celles où la royauté ne pouvait pas chômer. Parfois, Leia trouvait presque étouffante l’obsession de leur monde pour l’art… Surtout dans pareille période, où elle avait le sentiment que la vie entière de la planète ne tournait plus qu’autour de ça. Enfin… Au moins, cela offrait certaines opportunités intéressantes, elle n’allait pas s’en plaindre.

– Fin de semaine, dans cinq jours, confirma-t-elle en redressant la tête. Cela nous laisse du temps pour préparer Isobel et lui donner les indications et surtout, du temps pour s’occuper de l’esprit ces jeunes gens. Je te laisserai t’occuper de ce point.

Elle était plus formée qu’elle sur un tel terrain. Bien que Leia sentît, au fond d’elle, le désir de s’y mettre, de plus en plus pressant, elle n’était pas assez entraînée pour réussir de tels tours. Influencer une personne, sur le moment, n’était pas si compliqué, mais l’influencer plus profondément pour commettre de tels actes était encore autre chose. Peut-être y parviendra-t-elle un jour… Une telle idée lui plaisait, elle ressentait comme un attrait nouveau et saisissant, pour de telles manipulations mentales… tel un nouveau terrain de jeu potentiel… Ce à quoi elle n’avait jamais vraiment pensé jusqu’ici. De toute manière, il fallait bien du temps, du travail et beaucoup d’efforts pour de tels sujets. Sans oublier tout ce qu’elle avait déjà à traiter… La vie sera déjà plus facile lorsque Isobel sera formée, elles pourront alors lui déléguer certaines tâches et se décharger un peu. *Utiliser des pions utiles…* finalement… Les embrigader ou les former soi-même… Les… Elle se reprit, avec une petite moue et un léger mal de tête, chassant ces pensées envahissantes. Il n’était pas question de faire d’Isobel une Sith, juste de… Mais…

– Navrée, la journée a été longue et il est tard, soupira-t-elle en se frottant un peu les yeux. On pourra finaliser cela demain.

« Le mieux serait d’agir durant les préparatifs de la Geshla… Le Chambellan doit réunir pas mal de monde, ce sera plus marquant. Si j’ai bonne mémoire, la première réunion d’ampleur doit se tenir d’ici trois ou quatre jours… »

Takara ne fut pas surprise de voir son épouse lui répondre aussi rapidement, avec une telle précision, et sans réelle hésitation. C’était, plutôt une habitude, au contraire, de la voir aussi concernée par les activités du Palais, et de son monde en général. D’autres, à sa place, se serait contenter de profiter un maximum de leur position sans s’intéresser pour un crédit aux obligations associées. Pour sa part, Takara eut un moment de réflexion avant de souvenir en quoi consistait la Geshla, tant les cérémonies et célébrations commençaient à s’enchainer, depuis quelque temps. La période était plutôt chargée, ce qui expliquait, comme ce soir, leurs longues veillées. C’était un mal nécessaire, néanmoins, pour maintenir la vision qu’elles voulaient donner, et avancer plus librement dans leurs plans. La patience, dans ce contexte, était particulièrement importante. Dommage qu’elles aient à se presser, concernant le fiancé d’Isobel. Avec du temps, elles seraient parvenues à le raisonner, quitte à utiliser la puissance de la Force à l’insu de la concernée.

Quelques jours représentaient un délai plutôt court, mais acceptable dans ces conditions. Takara libèrerait Isobel plus tôt dans les jours précédant son départ en mission, et l’exécution de leur plan. Cela permettrait de la soulager un peu, mais aussi de donner l’impression de faire un effort dans le sens de la résolution de leurs problèmes de couple. De quoi jeter un peu mieux le discrédit sur son fiancé, lorsqu’il passerait à l’acte…

« Fin de semaine, dans cinq jours. Cela nous laisse du temps pour préparer Isobel et lui donner les indications et surtout, du temps pour s’occuper de l’esprit ces jeunes gens. Je te laisserai t’occuper de ce point. »

« Cinq jours, donc… Il faudra envoyer Isobel dans trois, en lui expliquant que l’on y réfléchissait depuis quelques temps, mais que l’on avait hésité à lui confier la tâche. »

Elle agirait pour le mieux ensuite, sans doute en passant dans l’esprit de chacun de ces jeunes gens, pour modeler leurs pensées de sorte que l’acte paraisse prémédité. Il ne fallait pas, en effet, que l’attaque sorte de nulle part, sans un minimum d’organisation. Il fallait que, le moment où ils parleraient, leurs versions se tiennent. D’où sa suggestion de faire cela pendant leur sommeil, quitte à les forcer, là encore par une forte suggestion, à aller se mettre au lit. Il était dommage, néanmoins, que Leia n’ait pas souhaité profiter de l’occasion pour se prêter à l’exercice. Les occasions de le faire était assez rare, après tout, au sein du Palais, de s’entrainer à de telles choses sans que cela ne finisse par se voir. Mais vu l’importance de cette manœuvre-là, elle comprenait qu’elle ne veuille pas prendre de risques. L’objectif était primordial, l’incertitude n’avait pas sa place. Cela, Takara l’approuvait. Elle regarda par la suite son épouse en silence pendant un instant, attendant une réponse qui ne vînt pas, avant que Leia ne finisse par se reprendre.

Navrée, la journée a été longue et il est tard. On pourra finaliser cela demain. »

La sith eut un sourire compréhensif. Avec la saison en cours, les journées se faisait effectivement de plus en plus longue, et sans réel temps morts. Elle aussi, commençait à accuser un peu le coup, et la fatigue s’accumulait, et ces petites absences se faisaient plus courantes. Il était cependant inutile de s’alamer, son épouse accusait simplement le coup, peut-être plus qu’elle, et les médecins non plus, ne semblaient pas s’ne inquiéter…

Takara se glissa hors de son fauteuil, doucement, pour venir se porter auprès de sa femme, et déposer un léger baiser sur son front, et l’inviter à se lever elle aussi, en lui prenant la main. Elle la relâcha ensuite, peu après.

« Je sais. Nous avons toutes les deux besoin d’un repos bien mérité. Demain en sera pas plus calme qu’aujourd’hui. »

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PS : Fin pour toutes les deux.