Les longues opérations extérieures n’avaient pas encore repris, même si la situation globale s’était stabilisée. Enfin, pour être plus juste, certaines opérations prioritaires poursuivaient leurs cours mais encore trop étaient suspendues. Et avec ce qui se passait dans le Chaos, les dernières informations reçues, le corps des diplomates était devenu très actif. Et surtout celui des espions, bien que ça soit moins avoué. Une période très troublée… Et l’occasion aussi de travailler sur d’autres sujets. A la suite d’une permission, l’occasion officielle et tout à fait ordinaire de quitter l’équipage ou les collègues habituels. Vah’nya en avait profité pour aller voir Tayla et les enfants. Et aussi la petite bouille du couple mixte, chez eux car sa maman venait juste de partir à la maternité.

Suite à ça, elle était partie avec Eli dans une petite navette, pour ce qui était réellement prévu, direction la planète Ool. Cette affaire-là la stressait un peu, depuis qu’elle savait que le lieutenant les « étudiait ». Bien sûr, elle comprenait l’intérêt et l’importance de cette mission, c’est juste que… Bon, parfois, ça la lassait, d’être vue comme un sujet d’étude, en plus d’être surprotégée. Heureusement, son ami ne la traitait pas comme une simple créature à examiner et lui parlait normalement depuis toujours. L’amirale Ar’Alani aussi était très gentille et ouverte ! Pour d’autres, ça… Dépendait des situations. La Flotte était si rigide avec les règles les entourant que c’était souvent assez pesant. Avoir des amis ou des proches sur qui compter, pour compenser, était indispensable. Elle rentra les coordonnées exactes du ranch, tandis qu’ils s’éloignaient de la base.

Je ne me souviens pas de cet endroit ou d’un autre, lâcha-t-elle tout à coup sans réfléchir. Tu vas trouver ça étrange, mais, enfin… Je ne sais pas, j’ai très peu de souvenirs de cette période-là. Les souvenirs les plus clairs sont ceux des premiers voyages faits en hyper-espace, sur le vaisseau diplomatique où j’avais débuté, toute petite. Je ne vois pas ce qu’on va bien pouvoir y trouver.

L’obsession du secret était encore plus forte et ils n’avaient pu, évidemment, parler à personne d’autres que l’amirale de ce projet et des recherches associées. Vah’nya voyait mal ce que son ami pourrait bien trouver, avec toutes les données compilées et celles qu’il devait récupérer en plus. Encore moins ce qu’elle-même était sensée apporter dans cette histoire. Elle ne savait pas d’où lui venait son don, pourquoi il était resté, ni comment s’assurer que ça reste chez d’autres.

Pourquoi c’est aussi différent des autres, à ton avis ? soupira-t-elle en lançant un bref regard vers Eli, installé dans le siège co-pilote. Regarde, Thrass et Lorana, par exemple, ça les a suivi de l’enfance à l’âge adulte. Mais nous, pourquoi on serait « limité » dans un seul don et pourquoi ça disparaît ?

Ce serait pas mal d’avoir à disposition également d’autres données sur le restant des sensitifs, entraînés ou non, et sur les autres navigateurs, pour aider à trouver un schéma, un pattern… Ou simplement faire des comparaisons et trouver des liens ou causes. Il se cala un peu mieux dans le siège, le questis entre les mains, plongé dans ses données. Vah’nya avait pris les commandes de l’appareil, directement. Ils étaient partis d’une base militaire proche de leur destination, le voyage devrait être court. Il releva juste la tête de ses chiffres lorsque Vah’nya exprima, tout à coup, ses interrogations. Il ne trouvait pas si étrange, personnellement, elle était si jeune, lorsqu’elle avait fait sa formation de navigatrice. La mémoire n’était pas si bonne, à cet âge, pour retenir beaucoup de souvenirs précis !

"Pourquoi c’est aussi différent des autres, à ton avis ? Regarde, Thrass et Lorana, par exemple, ça les a suivi de l’enfance à l’âge adulte. Mais nous, pourquoi on serait « limité » dans un seul don et pourquoi ça disparaît ?"

"Je n’en sais rien, encore," dit-il en secouant légèrement la tête. "Peut-être qu’il existe simplement différentes façons d’être sensible à la Force ou attaché à elle… Ou ça dépend de ‘entraînement reçu, de la façon dont on s’en sert ou encore de la manière dont on l’exerce. Ou d’autres choses, on ne peut pas le dire pour le moment. Tout ce qui est sûr, c’est que ton don et celui des autres petites est détectée au même âge, environ, que pour les Jedi, par exemple. Et que c’est issu de la même force galactique… On finira par en savoir plus, ne t’en fais pas."

Il lui fit un sourire se voulant rassurant. Pas d’inquiétude… Ce qui serait bien, ça serait d’ajouter à l’étude menée Lorana et son mari, justement, ainsi que Rhonn et sa famille, s’ils acceptaient. Pour élargir le champ des données. Il se replongea dans ses chiffres, échangeant de temps en temps avec son amie sur tout ça, le temps du voyage. Ils avaient pu gagner pas mal de temps en partant d’un autre monde que Copero, heureusement. A leur arrivée en orbite de la planète, ils croisèrent assez vite quelques cargos agricoles, en partance. Puis deux vaisseaux de tourisme, alors qu’ils s’étaient juste enfoncés dans l’atmosphère de la planète et progressaient en direction de Pomprey. Eli n’était jamais venu sur ce monde et d’après ce qu’il avait lu dessus, il y avait peu d’habitants. Un monde principalement agricole, avec aussi quelques usines et mines. Touristique, également. Bien que le tourisme devait lui aussi beaucoup souffrir des troubles.

Ils passèrent la ville, pour partir directement vers le ranch. Ils avaient rendez-vous avec le couple propriétaire des lieux, les attendant déjà à l’extérieur, lorsque Vah’nya posa en douceur la navette sur leur terrain. Le ranch semblait très grand, isolé dans une vallée tranquille, près d’un lac, entouré de hautes montagnes. Dès l’étape formelle des saluts, Eli sentit comme un froid. Une méfiance ordinaire, ils devaient tous deux se demander pourquoi lui, un Humain, participait à cette affaire et si c’était bien sûr. Sans compter le grincement dans l’air, au moment où ils réalisaient qu’il était bien forcé d’utiliser leur surnom directement, s‘ils n’avaient pas envie qu’il écorche leur nom complet en boucle. Il avait du mal à déterminer l’âge du couple, plus de soixante ans, à son avis. Vah’nya n’était qu’à peine plus à l’aise que lui.

"Rentrons, nous serons plus à l’aise," déclara Bomarmo après cette longue étape d’accueil. "Sans vouloir être indiscret, comment un Humain a-t-il pu intégrer la Flotte de Défense ?"

"Par hasard," avoua-t-il avec un sourire contrit. "Je faisais partie de l’armée impériale, dans l’Espace Intérieur. Suite à diverses missions, changements et problèmes survenus là-bas, je ne pouvais plus y rester. C’est mon supérieur hiérarchique qui m’a envoyé dans l’Ascendance. Il vient d’ici lui-même et m’a adressé à l’amirale Ar’Alani."

Il ne savait pas vraiment ce qu’ils pouvaient penser de Thrawn, s’ils étaient eux aussi d’humeur à le voir comme un fauteur de troubles graves, aussi n’osait-il pas s’étaler sur les détails. Encore moins mentionner Plagueis, qui avait beaucoup joué dans l’affaire.

"Combien de jeunes filles accueillez-vous dans le programme, aujourd’hui ?"

Ne pas s’en faire… On le lui répétait souvent. Elle répondit à son sourire malgré tout, c’était gentil de vouloir la rassurer. Peut-être que des réponses supplémentaires les attendaient, sur ce voyage, peut-être pas, elle s’efforçait de ne pas trop espérer. Elle fit au mieux, jusqu’à leur arrivée, pour enfouir les trop nombreuses questions et une part de ses espoirs, afin de ne pas être déçue. Néanmoins, dès qu’ils se posèrent et arrivèrent devant le ranch, avec le couple venu les accueillir, elle ne put s’empêcher d’être de nouveau assaillie d’interrogations. Était-ce ici ou sur une autre site qu’elle-même avait été formée ? Comment cela s’était-il passé, exactement ? Était-ce la meilleure des solutions ou existait-elle une nouvelle manière de former les futures navigatrices ? Était-il bien de placer si jeunes les petites sélectionnées ?

Bomarmo et Borika leur firent un accueil très formel, classique mais leur méfiance envers Eli se fit ressentir très vite. Bien entendu… Elle dissimula un petit sourire, à la réponse qu’il donna alors qu’ils entraient finalement dans le ranch. Pour être vague, c’était vague, il résumait énormément. La maîtresse des lieux indiqua ensuite qu’ils avaient seulement trois petites en formation au ranch, pour le moment. Une de quatre ans, une de tout juste cinq ans et une de six ans, qui allait partir bientôt en service sur un vaisseau, dès qu’une tutrice sera nommée. C’était très peu… Dans le couloir où ils passèrent, tout à coup, les murs furent entièrement recouverts de dessins, du sol au plafond. Certains très élaborés, d’autres étaient des dessins d’enfant. Curieux. Elle ralentit le pas pour observer tout ça, s’attirant un petit regard en biais de Borika, qui stoppa le pas également.

C’est le travail de la principale professeure des petites, expliqua-t-elle en désignant les dizaines de dessins. Nous avons accepté de les accrocher dans ce couloir, étant donné qu’elle en a déjà recouvert entièrement les murs de sa chambre.

Vah’nya se dit avec amusement qu’il y en a un qui serait déjà planté et coincé dans ce couloir durant quelques heures, s’il tombait sur ça. Ils suivirent le couple dans un bureau confortable, où ils s’installèrent autour d’une table basse, dans des fauteuils. C’est là qu’ils purent prendre le temps de parler de leur mission. Pourquoi ils avaient été envoyés ici, ce qu’ils recherchaient et comment, les attentes et espoirs… Eli s’occupa principalement de détailler le tout, après tout, elle n’était là qu’en soutien, avec l’espoir que sa « situation particulière » puisse aider, qu’un indice finisse par être dévoilé. Mais elle n’était pas à l’aise… Cet endroit la mettait mal à l’aise, pour une raison qu’elle ne s’expliquait pas. Le couple n’était pas désagréable, pourtant. Mais ce n’était pas eux, c’était l’endroit lui-même.

Bien que tout ça était également le travail du couple, depuis des années visiblement, ils avaient du mal avec le fait qu’un Humain soit en plein dedans et vienne jusqu’ici pour cela. Rien que le fait qu’il soit au courant les gênaient certainement. C’était une difficulté attendue. Il avait fallu du temps avant qu’Eli ne soit accepté dans l’équipage, plus de temps encore pour que les blagues xénophobes cessent, elle ne s’étonnait donc pas du tout que des personnes soient choquées de le voir mêlé à une affaire aussi tendue et secrète. En revanche, aucun des deux ne se permit la moindre remarque contre Eli, ni même une attitude hostile, en-dehors de la méfiance. Même s’ils avaient clairement des difficultés face à cette situation, ils adoptèrent une attitude aussi posée que possible.

En plus de ces données supplémentaires à recenser, ajouta-t-elle au fil de la conversation, nous essayons de savoir si, avec une approche différente, ce don peut se fixer dans le temps ou si ce n’est qu’une question de hasard. Ou d’un problème particulier. En changeant ou ajoutant certains exercices, dans le programme d’entraînement, pour une ou deux petites, pour test.

Un début de test, en tout cas, ils ne risquaient pas d’avoir le résultat en moins de trois jours…

Très bien. Nous ferons notre possible pour vous y aider. Dans un premier temps, vous allez pouvoir rencontrer les enfants.

Il faudra faire attention, de ne pas leur faire comprendre qu’elles étaient, elles aussi, des sujets de test, des cobayes… Pour ne pas les blesser ni leur faire peur. Ils allaient rester quelques jours, seulement. Ce sera suffisant pour ce qu’ils avaient à faire. L’analyse des données en question prendra bien plus de temps et pouvait se faire ailleurs sans que ça ne pose de soucis. Après avoir discuté des méthodes à suivre, puis de leur organisation de manière plus générale, ils quittèrent le boulot, pour aller à la rencontre des petites et de leur professeur, dans une autre partie du ranch. Vah’nya remarqua quelques photos de famille, au passage. Leurs hôtes avaient des enfants, dirait-on bien. Un garçon et une fille, selon les clichés ici et là. Une fille qui semblait avoir son âge, son frère était un peu plus âgé.

Ces clichés la laissèrent un instant songeuse… Fonder une famille était un sujet auquel elle pensait, parfois, surtout en voyant les enfants des autres. L’envie d’être mère n’était pas mirobolante, en elle, pour le moment. Mais surtout, elle se demandait comment ça pourrait bien être compatible avec la vie qu’elle menait. Elle détacha vite le regard de ces photos, avant qu’on ne la remarque. Ça ne la regardait absolument pas, après tout. Mais ça contribuait au sentiment de malaise global…

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Réaction du couple : 5. Ont des enfants, oui .

Juste trois petites, pour ce lieu-ci, c’était peu, surtout si l’une d’entre elles devait bientôt partir. En allant dans leur bureau, ils passèrent dans un grand couloir entièrement recouvert, sur les murs, de multiples dessins. Présentant tous les niveaux. Le résultat des efforts de la professeure des enfants, selon leur hôte. Sympathique, elle avait dû y passer un temps conséquent, dans sa vie. Une fois tous installés, il commença par plus détailler la raison de leur venue et ce qu’ils contaient faire. Même s’ils les sentaient toujours sur leurs gardes, il fit mine de rien. Tant que tout le monde restait poli et qu’ils pouvaient travailler ensemble malgré tout, ça ne le dérangeait pas. Déjà habitué à ces réactions, sans compter qu’il y avait bien pire. Bien entendu, il réaffirma qu’il avait bien compris l’importance de conserver le secret sur tout cela, ils y feront très attention.

Ils parlèrent aussi de la façon dont ils allaient s’organiser, puis de ce qu’ils allaient mettre en place, avant de pouvoir partir à la rencontre des enfants et de leur professeur. Eli réfléchissait à quelle méthode employer, pour la suite, pour mieux analyser ce qu’ils allaient récupérer… Il ne prêta pas une grande attention à ce qui les entouraient, ne se sentant pas en danger, dans cet endroit. L’école en question se trouvait dans une toute autre partie du ranch, à l’arrière. Dans une petite salle, aménagée comme un salon, trois petites filles étaient assises sur des coussins, avec des jouets et des fiches colorés, où étaient inscrites les lettres de l’alphabet. Accompagnées par une jeune Chiss, qui devait avoir son âge, à peu près. La professeure envahissant les couloirs de dessins, sans doute.

Les trois petites furent presque aussitôt effrayées, lorsqu’il les salua, ça se voyait sur leurs visages comme un livre ouvert… Voyant ça, il resta en retrait autant que possible, pour ne pas les angoisser plus que ça. Navré de leur fait peur, bien qu’il n’ait rien fait pour. La professeur se présenta comme étant Ami’che’ri, avec un grand sourire. Ce qui le surprit, sur le coup. Il faut dire qu’il tombait rarement sur des Chiss très… Hum… Expressifs. Encore moins face à lui. Les petites ne restèrent pas longtemps avec eux, leur tutrice les enjoignit assez tôt à aller jouer dans une autre pièce. Eh bien, il devra faire attention à ne pas trop les approcher, si elles avaient déjà peur. Le couple les laissa à son tour, en indiquant qu’ils les retrouveront tout à l’heure. Bien. Il reporta son attention sur la tutrice des enfants, pensant qu’elle aussi avait dû être une sky’walker, pour se retrouver à ce poste.

Ils se présentèrent de nouveau, calmement, exposant pourquoi ils se trouvaient ici. C’est durant cette phase de saluts et présentations qu’il eut la confirmation qu’elle aussi avait bel et bien servi comme navigatrice, il y a quelques années.

"Nous avons pu découvrir vos œuvres, à notre arrivée," commença-t-il pour détendre l’atmosphère. "Vous en faites également un métier ?"

Il ne serait pas étonné qu’elle vende ses peintures, étant donné certaines aperçues dans ce couloir. C’était toujours surprenant, d’ailleurs, de voir l’évolution, entre les premiers dessins clairement faits durant l’enfance et les tableaux affichés à côté.

A chaque fois qu’elle voyait une petite navigatrice, Vah’nya sentait son cœur se serrer douloureusement. Elles étaient comme des petites sœurs, pour elle… Comment allaient-elles bien vivre si elles tombaient sur un équipage sévère ou condescendant, sur une nourrice qui ne s’occupaient pas assez d’elles ou pire encore, s’ils leur arrivaient malheur, qu’elles étaient enlevées ou blessées ? De plus en plus, elle regrettait qu’il n’y avait pas plus de personnes comme elles, adultes et formées, pouvant s’occuper de ce travail, au lieu de s’en remettre à des petites comme ça… Mais pour ça, il fallait comprendre pourquoi elle était encore seule et comment faire en sorte que la tendance s’inverse. En attendant, elle devait refouler ses sentiments. Ce dont les petites avaient surtout peur, pour le moment, c’était d’Eli. Il devait leur apparaître comme un fantôme, le pauvre.

Leurs hôtes les laissèrent, peu de temps après les fillettes. Puis ils purent commencer à discuter avec Micheri. Une ancienne collègue, elle aussi. Vah’nya retint de nouveau un soupir, en se disant que si elle aussi avait conservé son don, ça aurait fait une fillette de moins dans le programme. Mais elle avait l’air tout de même plus… Plus… Heureuse, finalement, que bien d’autres « anciennes ». Plus détendue, c’était évident, plus confiante dans son attitude et ses gestes. Ce qui avait le don de perturber Vah’nya, car elle n’avait tout simplement jamais eu l’occasion de rencontrer une ex-navigatrice capable de sourire aussi simplement. Elle se demandait où elle avait servi, pour être comme ça aujourd’hui. Ou alors, elle avait eu une nounou en or, et surtout, la même durant des années.

Nous avons pu découvrir vos œuvres, à notre arrivée. Vous en faites également un métier ?

Oh, non, pas du tout, ce n’est que pour le plaisir, ça me détend. Venez donc vous asseoir !

Définitivement bizarre… Vah’nya faillit lui poser la question puis se ravisa, en se disant que ça serait assez grossier et que ça tomberait comme un cheveu sur la soupe. De toute manière, ils devaient avant tout discuter du travail. C’est à ça qu’elle s’employa, une fois installés tous les trois dans un coin de la pièce, sur de plus gros coussins. Les informations sur les petites, l’âge auquel elles avaient été trouvées, les informations connues sur leurs familles respectives, leurs parents, la fratrie s’il y en avait. De temps en temps, la jeune professeur lui lançait des longs regards, puis finit par lui demander, plus franchement, comment elle avait bien pu conserver son don. Que répondre ? Juste qu’elle n’en savait rien. Mais qu’ils allaient tenter de le découvrir. Elle prit une petite inspiration, se décidant à se lancer, car sinon, ça allait lui rester coincé en tête encore longtemps.

Vous me semblez plus à l’aise que d’autres anciennes navigatrices, que j’ai pu parfois rencontrer. Vos expériences passées étaient bonnes ?

Oui et non. Enfin, pas durant les toutes premières années, ça s’est arrangé ensuite.

Elle leur adressa un autre sourire, tout en décrivant ce qu’elle avait vécu, pour sa part, lorsqu’elle était enfant. En l’écoutant, Vah’nya lança un long regard vers Eli, puis ne put retenir un soupir. C’était quand même bizarre, dès qu’une histoire un peu… Hum… Étrange ou « douteuse » ressortait, il y avait toujours les mêmes personnes impliquées dedans ! On savait qui avait l’art et la manière de contourner les règles, par le passé. Au moins, Eli pouvait se détendre et donner plus de détails sur ce qui l’avait amené ici, lui-même, ce n’était pas la professeur qui allait l’embêter sur le sujet.

Ce sont toujours les mêmes, qui se retrouvent mêlés à des histoires improbables ou bizarres, soupira-t-elle, en pensant à ce qu’avait du endurer leur amirale, à l’époque. D’ailleurs, Eli, pourquoi avait-il décidé de t’enlever, de base ?

Une passion, somme toute, très bien. Ils s’installèrent et se mirent à travailler, sur les premiers éléments qu’elle pouvait leur donner. Il commença par compiler les données de base, sur les petites, ce qui prit déjà un moment. Des chiffres venant s’ajouter à tout le reste, une masse n’ayant pas encore livré beaucoup de secrets. Contrairement à ce qu’il avait observé chez d’autres sensitifs, à l’occasion, le facteur héréditaire entrait bien moins en ligne de compte, avec les petites Chiss. Ce qui était bien dommage, d’ailleurs, ceux travaillant sur ce sujet auraient fortement appréciés que ça soit le cas. Mais beaucoup moins les navigatrices elles-mêmes, à son humble avis. Nami’che’ri en venait à se poser les mêmes questions que Vah’nya, forcément. Mais ce fut finalement son caractère qui poussa sa collègue à sortir de sa réserve et lui demander quelles étaient ses expériences passées.

Il fut d’abord surprit, lorsqu’elle commença son récit, puis comprit très vite pourquoi ça lui était tombé dessus, lorsqu’elle mentionna pour quel officier elle avait servi. Bah tiens, comme par hasard ! Il eut un rictus amusé, sans faire de commentaires, malgré tout. Au moins, Thrawn ne lui avait pas laissé de mauvais souvenirs. Et ça confirmait à Eli, même s’il s’en doutait déjà, que même dans l’Ascendance, son ami était déjà un vieil habitué des méthodes particulières, que ce n’était pas seulement la faute de ses « attaques préventives », s’il avait fini comme ça. Il y avait des gens, comme ça, ils étaient incapables de s’en empêcher. Même si ça n’empêchait pas de faire un bon officier, ça pouvait rendre la vie plus ou moins infernale.

"Ce sont toujours les mêmes, qui se retrouvent mêlés à des histoires improbables ou bizarres. D’ailleurs, Eli, pourquoi avait-il décidé de t’enlever, de base ?"

"Comment ça, enlev…"

"Non, non ! Enfin, pas dans le sens où vous l’entendez. J’ai juste prononcé le nom de votre peuple devant lui, le premier jour, et j’étais en plus le seul à pouvoir communiquer clairement. Mes chefs m’ont nommé comme traducteur et plus tard, c’est lui qui m’a fait changer de voie. C’est une longue histoire."

Il avaient tous les trois vécus des affaires plus ou moins légales, avec Thrawn, on dirait bien, tant il avait l’art et la manière de jouer avec les règles. Vah’nya lui avait déjà raconté quelques exemples, elle le partagea aussi avec Micheri, comme lui-même le fit dans la foulée. Petite séance ragots d’improvisée, le pauvre devait en avoir les oreilles qui sifflent. Ils étaient en plein à échanger sur ça lorsqu’un léger toussotement les interrompit. Borika était à la porte, depuis il ne savait combien de temps. Hum, c’est vrai qu’ils avaient légèrement dévié, dans la conversation passant du travail à ça. Elle leur demanda s’ils voulaient venir manger avec eux, ce soir, ou s’ils préféraient rester entre « membres de la Flotte », Vah’nya et lui. Eh bien, les deux cas allaient… Il attendit l’avis de son amie, avant de répondre. Micheri, de son côté, sortait, ce soir, avec des amis.

C’est en sortant de la pièce qu’ils tombèrent sur un nouveau venu. Un envoyé du clan Stybla, visiblement, richement habillé, qui se présenta formellement, annonçant qu’il était venu pour une visite de contrôle, étant donné qu’ils devaient se rendre ici. Ils ne perdaient pas de temps… La discussion qui s’amorça fut d’abord très froide, ce dont il ne tint toujours pas compte. Néanmoins, la situation se décanta assez vite, leur homme ne demeura pas si longtemps que cela bien froid. Bizarre, d’ailleurs, de la part d’un Chiss, mais bon. Eli lui souriait tranquillement, comme avec n’importe qui, en lui parlant. C’était un petit détail, mais ça marchait bien, avec la plupart de ceux qu’il rencontrait. Peut-être car ce peuple n’avait pas l’habitude qu’on lui sourit tranquillement, aussi.

"Nous ne dérangerons pas l’entraînement ou la vie de ces petites, le temps que nous resterons ici," assura-t-il avec confiance. "Vous pouvez compter sur nous."

Comment ça, enlev…

Non, non ! Enfin, pas dans le sens où vous l’entendez. J’ai juste prononcé le nom de votre peuple devant lui, le premier jour, et j’étais en plus le seul à pouvoir communiquer clairement. Mes chefs m’ont nommé comme traducteur et plus tard, c’est lui qui m’a fait changer de voie. C’est une longue histoire.

Comment ça… C’est tout ? Elle n’avait jamais songé à lui poser la question avant et fut éberluée par la réponse. Elle l’écouta donner plus de détails, sur cette histoire-là. Puis Micheri en fit de même, avec un amusement visible, même si elle fut plus sérieuse et inquiète sur certains passages. A les écouter, tous les deux, la jeune femme fut rassurée. En comparaison, elle avait vécut bien moins de choses, en côtoyant l’amiral, et surtout, des choses moins graves ou houleuses. Il fallait bien dire aussi qu’elle ne s’était jamais retrouvée sous la houlette directe de Thrawn et imaginait déjà les cheveux blancs que se serait fait l’amirale Ar’Alani à cette seule idée. Ce n’était pas plus mal, à bien y réfléchir ! Ils discutèrent tout un moment, avant que Borika ne revienne et leur demanda s’ils voulaient manger avec eux, ce soir. Oh, heu… Pourquoi pas, après tout.

Dès leur sortie, elle découvrit qu’un nouveau visiteur était arrivé. Un politicien haut placé du Clan Stybla, venu voir ce qu’il en était, de leur présence ici. Rapide, celui-là… Le ranch était bien plus surveillé encore qu’elle ne l’avait cru. Cela dit, très vite, leur homme se détendit, alors qu’Eli gérait la situation. Ça, c’était un pouvoir que son ami avait avec beaucoup de monde, il arrivait à charmer sans trop de peine son entourage et se faire accepter… Même avec des membres de leur peuple très peu réputés pour se laisser amadouer facilement. Une sorcellerie pure et simple, à ses yeux, même si ça aidait beaucoup, comme ici. Ça ne marchait pas avec tout le monde, ça, d’accord, mais quand même ! Elle ne dit pas grand-chose, durant tout ce temps, ne se détendant qu’après le départ du politicien.

Comment fais-tu ça ?

Un ton à la fois las, impressionné et blasé. Sauf qu’il ne parut comprendre sa question. Mais enfin, c’était évident, ce dont elle parlait ! Elle désigna le politicien Stybla s’éloignant dans la cour, par la fenêtre, avant de reporter le regard sur son ami.

Comment fais-tu ça ? répéta-t-elle en laissant retomber sa main. Tu arrives à détendre beaucoup de personnes juste en leur souriant et en parlant… Qu’est-ce que c’est que ce pouvoir ? Ça marche avec plein de monde ! Où as-tu appris cette sorcellerie ?

"Comment fais-tu ça ?"

"Comment je fais quoi ?"

Eli stoppa son mouvement, surpris à la fois par la question et le ton employé. Elle fit un geste vers le Stybla partant vers sa navette, par la fenêtre, sans qu’il ne comprenne plus ce qu’elle voulait dire. Eh bien ? Il n’avait rien fait, justement ! Ils avaient dû discuter… Quoi, quinze minutes, en tout et pour tout ? Juste le temps de le rassurer. Il avait dit quelque chose qu’il ne fallait pas ou fait quelque chose de mal ? En aussi peu de temps ? C’était bizarre, leur visiteur n’avait pas eu l’air offensé, pourtant, durant cette conversation, à moins qu’il ne l’ait très bien caché. Après tout, il avait montré d’abord sa méfiance, il ne se serait certainement pas gêné pour le lui faire remarquer, s’il avait jugé ses paroles déplacées.

"Comment fais-tu ça ? Tu arrives à détendre beaucoup de personnes juste en leur souriant et en parlant… Qu’est-ce que c’est que ce pouvoir ? Ça marche avec plein de monde ! Où as-tu appris cette sorcellerie ?"

"Hein ? Mais je n’ai rien fait. Ce n’est pas moi qui les détends, juste comme ça, ils l’étaient déjà d’avance. Il suffit de discuter tranquillement pour que ça se passe bien, ensuite, que ça continue comme ça. En plus, que ça marche avec plein de monde, c’est très exagéré ! Ça n’avait pas marché du tout avec… Heu…"

C’était quand, la dernière fois, qu’il s’était pris la tête avec quelqu’un… ? Il fit signe à Vah’nya de patienter, juste une petite minute, le temps qu’il réfléchisse. Il y avait plusieurs personnes qui l’agaçait, mais de là à en arriver à une attaque verbale et frontale, hum… Bon, là, comme ça, il ne se souvenait plus d’exemple concret mais restait certain qu’il y en avait. Il avait déjà hurler sur quelqu’un, à part Plagueis, évidemment. Quand et où, impossible de s’en rappeler, ça lui reviendra plus tard.

"Là, je n’ai pas d’exemples," admit-il en rougissant légèrement, "mais ça reviendra, laisse-moi juste y réfléchir. Et puis, bon, ce n’est rien de bizarre ou particulier, de toute façon ! On y va ? Nos hôtes vont nous attendre."

Il fit un signe du bras pour la laisser passer devant, dans le couloir, puis suivit. Tout en se repassant mentalement toutes les personnes l’énervant, s’il y en avait un ou une avec qui il avait fini par se disputer.