Détendue, les mains croisées dans le dos contre le tissu de sa robe, Takara avait posé son regard sur l’extérieur, et les trois sommets qui dominaient les montagnes bordant la capitale, depuis une bonne vingtaine de minutes. Inexpressive, ses pensées étaient ailleurs, sur une vision lointaine où une multitude de vaisseaux et navires en tout genres s’envolaient vers les étoiles pour ne jamais revenir. Un exode du dernier recours, alors prévu de longue date, avec son épouse. Avec le soutien des Rist, et la volonté de tout un peuple. Leur peuple. Une nécessité éventuelle, pour protéger leur pouvoir, autant que leurs ressources. Désormais, développer plusieurs plans concurrents, en simultanés, était un impératif, et ces vaisseaux qu’elle voyait disparaître à travers les nuages de feu ne tomberaient pas du ciel. Cela faisait partie des nombreuses choses à régler, à moyen comme à long terme. Ce n’était pas une finalité non plus, plutôt un plan du dernier recours qui, dans le réel, s'esquissait tout juste. Rien ne pressait par ailleurs, mais elle s’en assurerait. Il fallait d’abord finir de consolider leur position sur Alderaan, étendre définitivement leur influence sur l’ensemble des parties et consolider leurs ressources. Une fois la base solidifiée, elles pourraient tourner définitivement leur attention vers l’extérieur, en utilisant leur nouvelle relation avec les Rist, et en parasitant définitivement leur réseau d’influence. L’Empire ne tomberait pas de sitôt, et les rebelles ne tenteraient rien contre eux avant un certain temps. Quand au problème que représentait Bail Organa, il serait bientôt réglé.

Takara sortit de sa rêverie en sentant l’attraction de cette fin d’après-midi approcher des appartements royaux, mais ne cilla pas d’un pouce lorsqu’Isobel en franchit les portes. Elle ne commença à lentement pivoter qu’une fois qu’elle eut parcourue une bonne distance dans sa direction. Elle se décala de la baie vitrée, pour venir la toiser de toute sa hauteur, accentuée par les hauts talons chaussés depuis tôt ce matin. Toujours inexpressive, comme si sa Première Suivante n’était pas présente sous son regard inquisiteur. Elle songea un instant au travail accompli sur son pion, et tout ce qui restait encore à faire. A ce qu’elle était déjà et serait bientôt, à leur service. Ce qu’elle allait leur apporter, une fois l’alliance définitivement scellée. Il aurait été bénéfique d’avoir pu s’installer plus encore dans son esprit, avant de devoir la laisser accomplir son Devoir. La confiance, en soi, n’excluait pas le contrôle ; Mais Takara n’avait pas encore assez d’expérience et ignorait totalement comment s’y prendre pour déposer une oreille indiscrète au tréfond de l’esprit d’Isobel. C’était un point sur lequel elle allait mettre l’accent, dans ses méditations futures. En attendant, la porte dérobée installée depuis les premiers jours serait là, à l’attendre, le moment venu.

« Il y a eu un nouveau développement, dont il est nécessaire de vous faire part, » finit-elle par dire, sur un ton particulièrement neutre, sans prendre la peine de la saluer.

C’était là une futilité, sa suivante connaissait sa place, et la considération qu’elle avait pour elle. Takara ne fit pas non plus de geste en direction des causeuses. Le décorum était important, aujourd’hui plus que tout autre jour. Les mains toujours croisées dans son dos, les épaules souples, la tête haute, la reine-consort n’avait pas pris la peine de poser les bijoux ni retiré la tiare, porté pour l’occasion. Elle ne s’adressait pas à la servante, mais à l’apprentie. A son investissement ; Son pion. A une sith en devenir. Il était dommage qu’elle ne lui ait pas enseigné comment converser aisément par la pensée, un oubli fort regrettable, maintenant qu’il était établi avec certitude que les Rist avaient infiltré les moindres recoins de ce Palais. Ce ne serait pas un problème cette fois-ci ; elle avait fait vérifier leurs appartements par trois fois, puis avait sonder elle-même les lieux comme les personnes s’étant chargés de ce travail, avant d’exiger la présence de son meilleur atout. Devoir s’en séparer si tôt était une petite déception, il restait tant à faire, y compris plusieurs choses dont elles devaient discuter une fois cette affaire réglée. Il ne s’agissait, cependant, que d’un vulgaire contre-temps. Sur le moyen comme le long terme, cela ne changerait rien. Le temps, justement, jouait en leur faveur.

« L’entrevue avec la Maison Rist nous a permis de parvenir à un accord qui renforcera notre position, ainsi que celle d’Alderaan. » reprit-elle, sans prendre la peine d’entrer dans les détails.

Ceci pouvait attendre encore un peu, que le premier point ait été réglé. Pivotant à nouveau, les talons claquant inévitablement sur le parquet, Takara fit doucement le tour des fauteuils, et de la table basse, pour revenir contempler l’extérieur, tournant sans crainte le dos à son pion, laissé-là derrière, à sa place. Son regard se posa sur le lac en contrebas, dont les berges lointaines se dessinaient, au pied des montagnes. La vue, pour une fois, la désintéressait. Elle se remémorait parfaitement chaque détails de l’entrevue avec Alexam Rist.

« En échange de leur soutien, nous avons convenu d’une méthode ancienne, pour sceller définitivement cette alliance. Le fils aîné du Patriarche Rist est toujours célibataire. Dans l’intérêt d’Alderaan, vous allez l’épouser.» annonça-t-elle plus franchement et avec autorité, tout en se retournant à nouveau pour faire face à Isobel. « Je ne doute pas une seule seconde que vous ferez votre Devoir. »

Envers Alderaan ; Envers Leia ; Envers Elle.

Takara la toisa du regard, le visage alors de nouveau plus détendu, moins expressif. La décision était irrévocable. Les modalités avaient déjà été discutées avec les Rist, il n’y avait rien à y rajouter, si ce n’est discuter des modalités négociées avec les Rists, la concernant. Elle pouvait bien avoir des questions ou des interrogations. C’était légitime, compte tenu de la situation. Mais certainement pas la moindre inquiétude, ou protestation. C’était là le quotidien des petites natures, elles se créaient des problèmes futiles alors que les solutions étaient pourtant si simples.

Takara estimait qu’Isobel était au-dessus de ceux-là.

C’était là la toute première invitation officielle, émanant d’une des grandes familles de Coruscant… les précédentes invitations n’avaient concerné que des fêtes plus globales, assemblant le gratin de divers mondes du Noyau. Les efforts portaient peu à peu leurs fruits. Assise à côté de l’Intendant, dans son bureau, pour lire les informations concernant cette famille, sur son ordinateur. Il pointa aussitôt un encadré sur les relations officielles de cette famille, en lançant que deux d’entre elles étaient fortement hostiles à Alderaan. Les autres oscillaient entre avis neutre, froid, méfiant ou tranquillisé. Avant que leurs majestés ne reçoivent ces invitations, l’intendance procédait à un écrémage, afin de s’assurer que les personnes invitant et le lieu choisi ne représentaient aucun danger pour la famille royale. La famille Xona, comme de nombreuses autres, possédait une forte influence. Cependant, beaucoup des autres familles invitées ne portaient pas Alderaan dans leur cœur. Mmh…

« Pas de danger immédiat, » marmonna l’intendant en tapotant son crayon contre un dossier, bras croisés sur son bureau. « Cependant, les invités les plus défavorables à cette venue pourraient tendre un piège politique sans peine, ils sont assez nombreux et unis pour cela… D’un côté, c’est une belle occasion, d’un autre, s’immiscer dans la politique Coruscantii, dès à présent, est un pari très risqué. »

« Ce sera à leurs majestés de juger, » répondit-elle en lisant le dossier. « Il y a beaucoup de contres, plus que d’avantages. Faites transmettre l’invitation et ajoutez le dossier. »

Les autres invitations étaient sur la planète elle-même et parfois, des voisines, des cas plus simples à traiter. Ils terminèrent ce travail en un peu moins de deux heures, préparant le travail et intégrant déjà au planning les invitations acceptées d’office, pouvait-on dire. Isobel le salua tranquillement, en quittant le bureau, puis consulta l’heure. Il allait bientôt être temps de se rendre au rendez-vous fixé par la reine-consort. Elle eut le temps de passer par le bureau central des Suivantes, tout d’abord, pour vérifier si tout allait bien et si aucun message urgent ne les attendaient. Lisbeth était installée à un des bureau, hochant vaguement la tête à son arrivée, plongée dans de la paperasse. Un seul message restait en attente, concernant une commande, rien de très pressant. Elle quitta rapidement les lieux pour se rendre dans les appartements royaux, ne croisant que les gardes habituels. La reine-consort se trouvait près des baies, dans l’une des pièces les plus au fond, donnant vers le sud et ses paysages. Une attitude devenue habituelle.

L’entretien avec les Rist… Un sujet ayant crispé beaucoup de dents, avant et après qu’il se soit déroulé. Isobel avait été très contrariée d’apprendre leur infiltration, même s’ils n’avaient pas encore de preuves formelles, au sein du Palais. La légèreté haïssable de Bail Organa leur avait laissé le champ libre durant des années, bien plus qu’il n’en faut, pour installer des pions, au-delà de tout soupçon. Cela dit, ils étaient des alliés importants, désormais. Et ils devront le demeurer tant que ça nécessaire. La jeune femme haussa légèrement les sourcils, face à l’annonce que lui lâcha la reine-consort par la suite, sur cette situation. Conclure ce genre d’accord avec un serviteur inclus dans le lot était… Plus le moins surprenant. A moins que… Bon sang… Les petits déchets…

« Donc ces serpents savent ce que je suis, » lâcha-t-elle d’un ton écœuré.

Même ça, malgré toutes les précautions prises depuis toujours. Ce qui impliquait, possiblement, qu’une des Suivantes soit corrompue, voire soit elle-même une espionne. Eh bien, Isobel savait ce qu’elle allait faire, dès ce soir et cette nuit… Il faudra simplement qu’elle dépose Waljan chez sa nourrice habituelle, celle qui veillait sur lui lorsque sa mère avait un imprévu ou une mission urgente. S’assurer de ce ménage-là la défoulera. Surtout en comprenant que ça impliquait qu’elle doive sûrement faire un enfant pour le rejeton du serpent Rist.

« Combien de temps reste-t-il avant le mariage ? Si ce n’est pas assez, il faudra la possibilité de revenir à certaines occasions, sans que ça n’éveille les soupçons, pour poursuivre le ménage au Palais. »

Takara savoura intérieurement le manque de réaction de son pion, ce dernier ne haussant que vaguement un sourcil face à une information qui aurait fait paniquer la moindre petite nature, le moindre esprit faible. Il n’y eut chez elle pas la moindre remise en question, pas le moindre doute sur qui avait bien pu suggérer une telle idée au cours de cette entrevue ; qui avait bien pu la proposer ell, et pas une autre. Un fin sourire satisfait se dessina sur le visage jusqu’alors inexpressif de la reine-consort. Isobel était belle et bien au-dessus de ces gens-là. Elle l’avait bien modelé, à son image, pour qu’elle devienne l’outil qui leur serait le plus utile ; Parfait. De chez elle ne s’échappait qu’une simple colère, une simple frustration tournée vers cette Famille qui, comme elles l’avaient longtemps soupçonné en espérant avoir tort, avait répandu son venin un peu trop loin, jusque dans leur foyer. Bien, qu’elle se laisse étreindre par ces émotions brûlantes. Elle allait enfin pouvoir comprendre ce qu’il y avait de si exaltant à être Sith. A pouvoir subtilement manipuler son entourage, pour atteindre son propre dessein. Ou plutôt, dans son cas, celui de ses reines.

« Donc ces serpents savent ce que je suis... » finit-elle enfin par dire, laissant cette amalgame d'émotions bouillantes s'échapper, écœurée.

Elle devait penser que tout ce secret n’avait servit à rien, bien évidemment. Takara aussi y avait songé, sur l’instant, avant de prendre conscience de toutes les opportunités que cette révélation leur offrait.

« En effet. Du moins pense-t-il le savoir, » » rétorqua-t-elle, sans se déparier de ce sourire, satisfaite de les voir penser qu’ils savaient vraiment tout. Eux, qui ne savaient pas ce qu’étaient réellement un Sith. Ce qu’était réellement la Force. Ils n’avaient pas la moindre conscience du loup qu’il s’apprêtait à laisser entrer dans la bergerie.

« Combien de temps reste-t-il avant le mariage ? Si ce n’est pas assez, il faudra la possibilité de revenir à certaines occasions, sans que ça n’éveille les soupçons, pour poursuivre le ménage au Palais. »

Takara pivota à nouveau, pour se décaler lentement sur la gauche, les bras de nouvelles croisées dans le dos. Isobel, chère Isobel… Toujours aussi prompt à vouloir résoudre leurs problèmes. A ne pas perdre de temps, alors que justement, ce dernier n’était pas vraiment un problème.

« Un mois, peut-être deux. Cela n'a pas encore été décidé, il y a une dernière modalité, à régler, » reprit-elle d’une voix plus lasse, dénouant les bras pour venir appuyer son désintérêt d’un geste de la main. Elle allait y venir, plus tard. Chaque chose en son temps. « Parlons plutôt de ce qu'il est attendu de vous... Les Rist semblèrent peu surpris que l'on propose votre nom, et  il est évident qu’ils savaient pour vos actions récentes, contre les derniers extrémistes présents sur notre monde. Il ne serait pas étonnant qu’ils soient parfaitement au courant des entrainements que vous avez suivi ici, au Palais… C'est une chose qui joue doublement en notre faveur. »

Takara s’arrêta, tournant la tête vers sa suivante, lui jetant un regard entendu, dépourvu de la moindre haine, de la moindre colère. Juste cette satisfaction retrouvée, cette détermination d’avoir parfaitement contrôle de la situation, autant que de ses émotions. Puis de repartir doucement, vers la droite cette fois-ci, le claquement de ses talons donnant de l’écho à ses propos, alors qu’elle enchainait ses petits déplacements. Pour finalement s’immobiliser, face à Isobel. Droite, assurée.

« Premièrement, cela focalisera leur attention sur vous, et facilitera l'infiltration et le conditionnement du petit personnel de leur Maison. Cette affaire doit par ailleurs commencer au plus tôt, par le bas, pour que le poison se répande sans soupçons. Ils s’attendront plutôt à ce que vous vous en preniez directement à eux. C’est pour ça qu’il sera attendu de vous que vous soyez des plus subtiles avec votre futur époux comme son entourage. Pour étouffer leurs soupçons, et doucement ancrer votre présence, dans leurs esprits. »

Il faudrait au moins cela, pour duper une Maison spécialiste de l’espionnage, au protocole particulier, soumis à un contrôle interne très strict. Venir pourrir la base, pour doucement remonter les racines puis le tronc, tout en endormant les feuilles et les branches serait sans doute la meilleure manière de soumettre l’arbre à leur volonté.

« Vous serez satisfaite d’apprendre que nous avons négocié pour que Waljan reste à vos côtés, et poursuive sa scolarité au Palais. Nous allons vous trouver une demeure à proximité, où vous vous installerez avec votre époux. Cela nous permettra de garder un œil sur lui, tout autant que sur vous. »

Takara finit par faire un pas en avant, invitant d’un geste de la main sa suivante à s’asseoir, tout en restant elle-même debout. Elle aurait aimé pouvoir garder un œil indiscret au travers de l’esprit d’Isobel, mais cela devrait attendre. Pour le moment, la garder elle et son futur époux près du Palais aiderait à les influencer.

« Il faudra, bien entendu, que vous leur donniez un héritier légitime qui sera éduqué au Palais, cela va de soi, » précisa-t-elle, en venant s’arrêter derrière-elle, le dos tourné, pour contempler son reflet dans un des nombreux miroirs, les doigts de sa dextre venant négligemment jouer avec un des bijoux de sa sénestre. « Vous ferez en sorte de retarder cette étape autant que vous le pourrez, assez pour vous laisser le temps d'établir subtilement la base de votre futur pouvoir. » Comme future cheffe de Maison et alliée inaliénable des Organa. Toujours avec subtilité, bien entendu. Et surtout, pour s'assurer que les Rists ne l'assassinerait pas une fois l'enfant né. « Il a été convenu que vous fassiez tous les deux connaissance au cours d'une mission commune, pour le compte des Rist et qui pourrait nous servir. Leur réseau a découvert un nouveau groupe de réfractaires aux changements, sur notre monde. Vous devrez les éliminer ensemble, discrètement, pour prouver votre valeur. »

Une promenade de santé, pour une Sith. Alexam Rist lui-même avait décrit cette étape comme une pure formalité. D’un pas lent, la reine-consort revînt se positionner face à Isobel, le visage à nouveau drapé derrière un masque inexpressif, ne jetant qu’un vague regard au service à thé présent sur la table basse, devant sa suivante.

« Ce qui nous ramène à votre inquiétude préalable, » reprit-elle, en restant debout, dans sa position de dominance, son regard désormais plus ferme venant se poser sur le visage de son pion. Il allait falloir trouver quelqu’un de fiable, pour la remplacer, au quotidien… « Il va effectivement falloir nettoyer ce qui traîne dans nos couloirs. Intelligemment. Il est probable qu'une suivante sous votre responsabilité soit une espionne. Trouvez-là, évincez-là, et renforcez le conditionnement des autres. Rien de ce qui se dit entre nous, ou au sujet d'Aylin, ne doit plus jamais quitter ces murs. »

Elle ne laisserait personne s’approcher ou découvrir les secrets de sa fille, jamais. Le moindre intrus parvenant jusqu’à sa chère Aylin finirait en bien mauvaise posture… Trancher avec la tête d’un tel imbécile ne lui poserait guère de problème de conscience.

« Pour les autres, identifiez-les, faites-les surveiller, mais ne tentez rien contre eux. Ils pourraient se révéler être plus utiles où ils sont, vivants, que morts. Certains pourraient à leur insu nous aider à retourner le propre réseau des Rist contre eux, à leur transmettre de fausses informations. Seuls les cas les plus critiques, ou qui peuvent être éliminés sans risques d’éveiller l’attention devront être limogés. Si possible en même temps que d'autres espions au service de nos ennemis, ou d’autres Maisons. »

« Un mois, peut-être deux. Cela n'a pas encore été décidé, il y a une dernière modalité, à régler. Parlons plutôt de ce qu'il est attendu de vous... Les Rist semblèrent peu surpris que l'on propose votre nom, et il est évident qu’ils savaient pour vos actions récentes, contre les derniers extrémistes présents sur notre monde. Il ne serait pas étonnant qu’ils soient parfaitement au courant des entraînements que vous avez suivi ici, au Palais… C'est une chose qui joue doublement en notre faveur. »

Humph. Bien qu’elle resta coite, alors que la reine continuait de sourire avec un air détendu et entendu, ça ne l’empêchait pas de réfléchir à toutes les futures manières d’en finir avec le Patriarche Rist, si possible, de la façon la plus douloureuse possible. Un sort sans doute identique à celui attendant bail Organa, seul et unique responsable de ces énormes failles de sécurité dans le Palais. La reine poursuivit, sur ce qui était attendu d’elle, dans un premier temps, contre les gens de cette maison. Une infiltration douce, somme toute, longue… Très bien… Elle ignorait encore quel était le comportement exacte que devait tenir l’épouse d’un héritier, dans cette famille ou dans les grandes familles, d’une façon plus générale. La place exacte et les tâches associées. Tout cela ne l’avait jamais intéressée, puisqu‘en tant que suivante, elle n’avait pas à s’en soucier. Il lui faudra se renseigner, sur tout cela, afin de ne pas commettre d’impairs et pire encore, perdre du temps. La reine consort finit par parler de Waljan, confirmant qu’il pourra poursuivre son parcours au palais, puis qu’eux-mêmes resteront à proximité. Si les Rist avaient accepté cela, c’est qu’ils devaient vouer une parfaite confiance à leur réseau d’espionnage infiltré en ces lieux. Elle retint un petit reniflement de mépris puis s’assit, toujours assez écœurée.

Retarder la venue d’un héritier légitime, mmh, il faudra qu’elle voit combien de temps cela sera possible. Cette idée ne l’emballait pas le moins du monde… Adopter Waljan lui avait permis de combler le désir d’être mère sans pour autant subir tous les inconvénients d’une grossesse. Avec son travail ordinaire, son travail plus secret et le reste l’attendant désormais chez les Rist, se retrouver enceinte ne fera que compliquer les choses et tout rendre beaucoup plus risqué et pénible. Il conviendra de trouver un juste milieu, entre la patience avant tout projet de bébé et éviter qu’on ne l’accuse d’être infertile. Tss, cela l’agaçait bien plus qu’un mariage arrangé… Elle chassa cette idée, pour le moment, en se concentrant sur ce qu’ajoutait sa majesté. Une mission commune, très bien, un simple détail dans ce résumé des événements. Un tel détail qu’elle était même surprise que la reine l’aborde, plutôt que de se contenter d’une simple note ou d’un ordre bref, le soir convenu. Au moins, une fois cela posé, elle en revint au principal problème. Enfin. Pour cela, en revanche, Isobel n’avait pas besoin d’ordres, il était déjà clair et net que celle ayant osé divulguer des informations n’allait guère faire long feu, entre leurs murs. Qu’aucune des autres n’aura l’occasion de le faire.

« Pour les autres, identifiez-les, faites-les surveiller, mais ne tentez rien contre eux. Ils pourraient se révéler être plus utiles où ils sont, vivants, que morts. Certains pourraient à leur insu nous aider à retourner le propre réseau des Rist contre eux, à leur transmettre de fausses informations. Seuls les cas les plus critiques ou qui peuvent être éliminés sans risques d’éveiller l’attention devront être limogés. Si possible en même temps que d'autres espions au service de nos ennemis, ou d’autres Maisons. »

« Très bien. »

La mission commune avec Rist, un détail. L’apprentissage supplémentaire à effectuer avant le mariage, un détail. Traquer cette suivante traîtresse et lui faire la peau, ça, en revanche, c’était ce qu’elle jugeait le plus pressant et n’avait qu’une seule hâte, sortir d’ici pour s’en occuper. Fouiller dans l’esprit de toutes, repérer le rat, par tous les moyens possibles. Puis lui faire regretter ses actes avant de l’achever. Il était bien dommage qu’elle ne puisse en faire de même contre les autres rats, mais soit, s’ils pouvaient servir, comme le pensait la reine consort…

« Il y a-t-il une autre mission urgente dont vous souhaitez que je m’occupe ? »

« Il y a-t-il une autre mission urgente dont vous souhaitez que je m’occupe ? »

« Deux, pour être exacte. La première, sera de trouver la personne la plus apte à vous remplacer, à mes côtés. » rétorqua-t-elle, en se décalant légèrement sur le côté. Une formalité, très certainement. « La seconde représente plus une quête personnelle, qu’une mission en tant que telle. Mais qui devra être menée au plus tôt, avant que les Rists ne se mettent à épier tous vos faits et gestes. »

C’était à craindre, maintenant que l’accord était scellé. Alexam Rist voudra tout savoir sur la vipère qu’il acceptait dans son foyer. Il fera épier ses moindres faits et gestes. C’est pourquoi il allait falloir agir plus vite que lui ? sur cette affaire. Takara aurait aimé avoir plus de temps, laisser encore quelques mois pour continuer à bien former Isobel dans la voie qui était désormais la sienne. Elle faisait bien sûr des merveilles sur les esprits faibles du Palais, mais cela ne faisait pas d’elle une véritable Sith, cette Furie dont Leia et elles avaient besoin, pour le futur. Quoique Furie n’était pas le terme tout à fait exact, la concernant… Bref, cette chose ne pouvait plus être repoussée à plus tard, désormais. Les priorités avaient changé, les cartes rebattues. Cela faisait partie du jeu, et elles se devaient de s’adapter, sans rechigner.

« Il s'agit d'un rite de passage que vous auriez dû à accomplir d’ici quelques mois, » fit-elle, en se déplaçant pour récupérer sur l’une des commodes un bloc de données préparé pour l’occasion. « Notre dernier long voyage vous a initié au pouvoir qui sommeille en vous ; un pouvoir que vous n’avez cessé de développer au cours des derniers mois, à ma grande satisfaction. Bientôt, vous dominerez les Rists et rendrez les choses encore plus faciles pour nous toutes, sur Alderaan. »

Takara appréciait l’état d’esprit de son pion. Il était seulement dommage qu’il n’y en ait qu’un seul comme elle, avec ses compétences, et ses dons. Le feu ardent et la hargne déterminée qui régnait chez Isobel aurait un impact significatif dans cette quête. Ses émotions influeront sur ses décisions, ainsi que sur son choix final. Un choix qui l’accompagnera par la suite, telle une extension de sa volonté. Isobel ne tenterait jamais rien contre elles, de cela la reine-consort s’en était parfaitement assurée. Il n’y avait pas de risque à lui faire miroiter, et même lui donner plus de pouvoir, et de responsabilités.

« Vous marchez à présent sur la voie des Sith. C’est pourquoi vous allez récupérer dès maintenant le cristal de votre futur sabre-laser. Un véritable cristal, et non un facsimilé fabriqué de toutes pièces. »

Sa suivante trouverait peut-être cela trivial, si l’on considérait les tâches à venir, ainsi que ses nouvelles responsabilités. Mais si elle avait bien suivi les leçons qu’elle lui avait donné, et les connaissances sur les siths qu’elle lui avait transmise et demandé d’étudier soigneusement, elle saurait qu’il s’agissait là d’une étape importante. Une forme de reconnaissance du travail accompli. Elle devait aussi savoir, donc, que les siths utilisaient en abondance des cristaux synthétiques fabriqués à partir de roches et autres composants pour palier à l’absence de véritables cristaux naturels reflétant leur vision et leur usage de la Force. C’était inexact, et n'avait que peu de respects pour ces gens-là. Hormis pour son épouse, qui n'avait pas eu d'autre choix que de récupérer une arme que Sidious avait bien voulu lui donner.

Revenant vers elle, le mépris perceptible dans son aura, la reine-consort tendit le bloc de données à son pion avant de reprendre son chemin pour se repositionner face à sa suivante, son sabre laser tenu au creux de ses mains.

« Il existe un lieu où mon peuple minait autrefois de véritables cristaux imprégnés de la Force. Avant que nous nous retrouvions sur ce monde que nous avons observé ensemble. Un endroit souvent repris dans les récits, et les écrits. Phaegon III. Vous allez vous rendre sur ses lunes. Dans les puits de mines de l'une d'entre elle, vous trouverez des gisements de lignan, des cristaux d’un rouge vif, dont la présence en veines résonne dans la Force. Vous méditerez sur place, pour trouver celui qui vous correspond le plus. »

Takara la laissa éventuellement consulter le bloc de données dès à présent, sous ses yeux, si elle le désirait. Son sourire s’était effacé, mais pas sa satisfaction d’avoir pu mettre un véritable pied dans la fourmilière Rists et de s’apprêter à s’y installer confortablement par l’intermédiaire d’Isobel et du personnel de maison dont elles allaient reconditionner l’esprit avec le temps.

« Mais faites attention, » reprit-elle néanmoins, en revenant se positionner vers la baie vitrée, une petite grimace aux coins des lèvres, car ces galeries sont très certainement hantées par le Côté Obscur de la Force. Ecoutez ce qu’il a à vous murmurer, mais ne vous laissez pas submerger par ce qui vous entoure. »

Cette information n’était bien évidemment pas présente dans les données qu’elle avait fourni à Isobel. C’était un détail qu’elle aurait dû garder pour elle, en d’autres circonstances. Ce rite restait un test, une épreuve dont laquelle bien des tyros -ou initiés- ne revenaient jamais. Ces mines étaient sans doute hantées par les esprits des mineurs qui y avaient péris pour récupérer ces cristaux au nom des siths, pendant la Grande Guerre. Or son pion était bien trop précieux pour être gâché de cette manière…

« SI jamais vous veniez à avoir l’impression de perdre pied, ne prenez aucun risque et faites demi-tour. Cela voudra simplement dire que vous n’êtes pas prête. Votre vie nous est plus précieuse que votre fierté, ou qu’un cristal de sabre-laser, » rajouta-t-elle plus fermement, en tournant la tête vers sa suivante assise plus loin dans le grand salon. Il était hors de question qu’elle meurt bêtement pour si peu, et cette expérience lui permettrait malgré tout d’évaluer sa progression dans le conditionnement et la structuration de son esprit.

« Les écrits et les récits n’indiquaient pas sur quelle lune se trouvait les mines, ni dans quelles régions. Mon impression, cependant, est que vous devriez visiter les zones polaires de la deuxième lune. Commencez vos recherches par là-bas, une fois que vous aurez régler le problème de la traitresse dans nos rangs. »

C’était un rite de passage qu’elle avait prévu depuis le début pour sa première suivante. La reine-consort en était venue à cette conclusion après avoir longtemps étudié les descriptions faites dans ces récits, la constitution des lunes de Phaegon III selon les cartographes. Et la sith avait aussi méditer un certain temps sur cette question, la réponse s’étant trouvé au creux de son arme depuis le début.

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Intuition sur la localisation des mines : 3

Trouver une remplaçante, ça, elle s’en faisait malheureusement une raison et espérait bien que la prochaine se montre à la hauteur de la tâche. Étant tout particulièrement perfectionniste et attentive aux détails, Isobel rechignait intérieurement à laisser aussi directement une autre personne reprendre son poste sans avoir le temps de la former, la modeler, la préparer à sa manière. Bref, passons ce détail, la seconde chose semblait plus importante. Un rite de passage, donc… Bien qu’elle ne sache pas encore de quoi il s’agissait, elle pouvait déceler chez la reine l’agacement que cela arrive si tôt. Comme toujours, les travers et manœuvres politiques avaient le don de tout bouleverser, bousculant les plans et les esprits, ravageant les voies parfaitement tracées. Bien qu’ils s’y attendaient sans cesse, cela restait particulièrement exaspérant. Elle tiqua légèrement lorsque la reine consort annonça quelle était la quête en question. Tôt, en effet, surtout considérant tout ce qu’il restait à accomplir. Néanmoins, il était complètement inenvisageable de laisser les Rist s’intéresser à de tels sujets ou pire encore, obtenir des connaissances là-dessus. Ces chiens en savaient déjà bien trop.

Cela dit, on lui avait enseigné que les Sith possédaient des cristaux artificiels. Il en existerait des naturels ? Prenant le bloc de données, tout en écoutant la reine consort, elle se demanda pourquoi, dans ce cas, ce type de cristaux n’était guère utilisé, en leu et place des synthétiques, par les Sith. Phaegon III… Le voyage devrait prendre de deux à trois semaines, ce qui signifiait qu’elle devra avoir déniché une remplaçante valable avant, il était impensable de laisser plusieurs Suivantes se suivre en alternance, plutôt qu’une personne désignée et prête à répondre de jour comme de nuit. C’était le protocole, toutes les Suivantes avaient la même formation, mais une d’entre elle devait être assignée personnellement à sa Majesté, comme Première Suivante. Elle consulta les données en travers, pour le moment, afin de repérer le plus important. Une simple méditation permettrait donc de « savoir » quel cristal prendre ? Cela lui semblait très flou. Pas de quoi hésiter à s’y rendre mais de quoi lourdement s’interroger sur ce qu’elle allait bien découvrir sur place.

« Mais faites attention, car ces galeries sont très certainement hantées par le Côté Obscur de la Force. Écoutez ce qu’il a à vous murmurer, mais ne vous laissez pas submerger par ce qui vous entoure. Si jamais vous veniez à avoir l’impression de perdre pied, ne prenez aucun risque et faites demi-tour. Cela voudra simplement dire que vous n’êtes pas prête. Votre vie nous est plus précieuse que votre fierté ou qu’un cristal de sabre-laser. »

« Très bien. »

Des lieux hantés par le Côté Obscur, si elle avait pu vaguement en entendre parler au cours de sa formation, elle ne s’était jamais approchée de l’un d’entre eux, renforçant le flou complet sur ce qui l’attendait, au cours de ce voyage. Les zones polaires de la seconde lune… Facilement trois semaines de voyage pour le seul aller… Puis des mines… Mmh, en plus du voyage aller et retour, le temps passé sur place sera lui aussi long, sans nul doute. Il lui restait donc à dénicher à la fois la traîtresse et la future remplaçante, aussi vite qu’il lui sera possible. En plus de passer plus de temps dans les âmes de ses adorables consœurs, autant pour s’assurer de leur loyauté que pour renforcer leurs convictions.

« Je me mettrai en route dès lors que les affaires urgentes auront été réglées, vous aurez la confirmation de l’identité de la traîtresse au plus vite. Ainsi que de ma remplaçante. Si vous le permettez, à présent, je vais me mettre à ce travail. »