La jeune fille ravala sa réflexion et s’accroupit, tenant à prendre au moins un instant pour consoler la petite, de ce départ très brusque, lui assurer qu’elle la reverra très vite et que Loree allait bien s’occuper d’elle. Un bisou dans les cheveux pour la rassurer puis elle dut la laisser. Soit, c’était normal, ça faisait partie de la vie du palais mais Miri avait toujours du mal avec les instants où il fallait brusquer autant la petite princesse. Ce n’était encore qu’une enfant ! Elle ne pouvait pas comprendre l’urgence de certaines journées ni tous les protocoles, alors la ballotter comme un vulgaire sac… La rouquine avait fini par s’attacher à la fillette, sans doute plus que de raison, elle s’agaçait donc facilement si quelqu’un, même ses propres mentors, voulaient la brusquer. Enfin… Elle suivit Lisbeth hors de la pièce, lançant un regard derrière elle, puis accélérant le pas. Lâchant un maigre et vague sourire à la réflexion suivante. Son contrôle sur sa propre prise de poids étant assez… Limité, pour ainsi dire, il n’y avait rien à y répondre. Pour l’heure, en tout cas, ce n’était pas son poids qui la perturbait mais plutôt les nombreuses interrogations quant à ces prochaines heures. Après tout, ça n’avait rien à voir avec son travail de ces derniers mois ou ce qu’elle devait faire au quotidien pour s’occuper de la jeune princesse.

Lisbeth se voulait rassurante, tout en courant à moitié dans les couloirs avec elle, jusqu’à arriver aux appartements royaux. Elle reprit son souffle en arrivant devant les double-porte, hochant la tête avec un pincement à la gorge. Jouer un rôle, comme du théâtre, pour prétendre être la reine-consort et donner le change de loin, soit, elle l’avait bien compris et intégré, s’était entraînée pour cela et avait répété jusqu’à la nausée, pour calquer ses gestes sur celle qu’elle devait imiter. La partie qui l’inquiétait le plus était le « Une sith ». Car malgré les heures passées à observer la reine-consort, Miri n’avait pas encore remarqué ni compris les détails, dans son attitude ou ses actions, qui faisaient ressortir le côté sith en question. Elle ne voyait aucune différence, car la consort se comportait comme une politicienne, une leader, une femme… Mais en quoi cette histoire de sith changeait quoi que ce soit, au quotidien… ? Elle ne réalisait aucune action bizarre ! La seule fois où ce côté s’était clairement dévoilé, c’était durant l’horrible attentat du musée ! Et depuis… Miri n’avait jamais observé quoi ce soit qui puisse faire ressortir cette particularité. Et de toute façon, elle n’avait aucune idée de ce qu’une sith était censée faire, tout court, pour se montrer telle quelle au peuple.

Enfin soit. Du théâtre. C’était comme du théâtre. Une façade, une illusion à présenter à tous, un joli mirage, rien de plus, rien de moins. On ne lui demandait pas de prendre des décisions ou d’accomplir des actes importants, juste d’imiter et présenter une image parfaite de celle qu’elle imitait, c’est tout. Elle marcha à vive allure derrière le paravent, jetant un œil à la tenue qu’elle devra porter aujourd’hui. Une robe longue, très belle, fendue sur le côté, dans des tons bordeaux, rouge et noir. Le genre de robe qu’elle avait déjà vu en vitrine des magasins de luxe, délicatement brodée, travaillée à la main. Elle en vint à se demander, avec la finesse de la tenue, de se demander si elle était capable de rentrer dedans, avant de se souvenir que tout était conçu selon les mensurations personnelles. Très bien. Elle s’assit devant la coiffeuse, croisant son propre regard, concentré mais où régnait toujours une lueur d’inquiétude. Alors que la servante commençait à s’activer, en lui brossant les cheveux, la jeune fille s’employa à faire disparaître cette peur. Du théâtre. Tout allait bien, puisqu’elle n’avait pas à réellement endosser de telles responsabilités mais simplement donner l’illusion qu’elle le faisait.

« Que ressentez-vous, Miri à l’idée d’être reine ? De tenir le rôle d’une sith ? Ne soyez pas inquiète. Nous allons travailler cela ensemble, désormais. »

« Je suis prête, majesté, vous ne serez pas déçue. »

Prête pour assumer un rôle de loin, soit, mais prête malgré tout, ce n’était là qu’une première étape. En revanche, l’autre question continuait de lui tarauder l’esprit. Imiter la reine-consort dans ses attitudes et expressions, elle en était capable, surtout si, comme pour les événements prévus, personne n’aura l’occasion de l’approcher de trop près et s’apercevoir de la supercherie. Mais le reste…

« Si je peux me permettre, majesté, hum… Que dois-je faire, plus précisément, pour tenir le rôle d’une Sith ? Vous agissez comme une femme normale. »

C’est bien parce qu’il était trop tôt pour cela que Miri posait la question, elle sentait que c’était très important, qu’elle avait besoin de mieux l’appréhender, justement, pour ne pas commettre d’impairs. Tromper une personne plus expérimentée sur le sujet, bien sûr qu’elle ne le pouvait pas et en était bien consciente. Dans ce grand jeu des apparences, le moindre petit détail comptait. Donc un état d’esprit, un code… Pour le moment, ça restait très flou. Soit, pour les prochains jours, en eux-mêmes, comprendre au mieux tout cela n’était pas important, en revanche, ça pourrait vite le devenir. Elle l’observa dans le reflet du miroir, essayant de capter au moins un détail mais rien ne sortait de l’habituel. Toutefois, dans ces circonstances, alors qu’elle-même ne devait pas remuer d’un cil tant que le maquillage n’était pas terminé, l’observation n’avait rien d'évident. Puis à peine facilitée lorsque la reine-consort s’approcha dans son dos. Avec le temps, d’accord… Miri fut déjà plus étonnée, même si elle parvint cette fois à ne pas le montrer, que la jeune femme ne se vexe pas qu’on ne remarque rien, bien au contraire. Elle n’avait pas caché ses dons, pourtant, lors de l’attaque terroriste. Donc c’était un pouvoir qu’il fallait imposer ou cacher, pour elle ?

La jeune fille s’efforça de chasser ces interrogations-là de son esprit, pour le moment, il y avait plus pressant sur quoi s’interroger. La journée à venir, pour débuter. Elle reposa le regard sur son propre reflet, impressionnée par le travail de la maquilleuse, qui parvenait avec son seul talent à effacer les signes de l’adolescence, pour les affiner en contours plus adultes. C’était très troublant, au fond, cette sensation de devenir une autre personne, même pour un temps limité, le masque se renforçait peu à peu. Elle se répétait en boucle ses leçons, mentalement, tous les conseils et consignes donnés pour cette journée, se remémorant ce qu’elle avait détaillé comme mimiques ou manières de marcher, chez la reine-consort. C’était dommage qu’il n’existe pas de moyens de communiquer mentalement avec les gens ou être dans leurs têtes pour connaître plus précisément leurs manières, ça serait bien plus facile de les imiter. Dans le roman qu’elle lisait le soir, en ce moment, le héros avait cette capacité et c’était super utile. Enfin bon… La technologie actuelle ne permettait pas ça et de toute façon, même si elle le pouvait, qui l’accepterait, il y aurait trop de dérives malsaines.

« L’apparence est importante, mais elle ne fait pas tout. Nul doute que Lisbeth a veillé à ce que vous étudiez vos fiches... Que pouvez-vous me dire sur Eldegas, et la région que nous allons visiter ? Pourquoi est-il nécessaire de redynamiser l’économie locale, et que disent les retours, sur les sondages, concernant l’opinion locale sur les actions de l’Etat ? »

« La région se relève difficilement de la récente catastrophe, » commença-t-elle alors qu’une autre suivante venait prendre le relais pour la coiffer. « Elle est avant tout rurale et les habitants y sont très attachés, les mesures de protection et d’éloignement temporaire ont été dures à supporter. Surtout, il y a toujours eu une fracture causée entre les locaux et les habitants de la capitale, car la région du Juran est plus attachée à sa propre culture artistique, centrée sur la nature, qu’à celle des régions plus riches d’Alderaan, où l’art contemporain leur semble vide de valeurs concrètes. L’opinion locale est très mitigée, aujourd’hui. Plus de la moitié de la population reste distante et attend de voir si les choses vont évoluer favorablement, pour l’économie et pour la reconnaissance de la culture locale. Le restant, même s’ils sont moins nombreux, s’impliquent plus qu’auparavant dans les actions mises en place par le gouverneur régional.  »

Associations, fêtes culturelles, aides financières pour le re-lancement des activités agricoles, dédommagements pour ceux ayant perdus des bêtes de leurs élevages à cause de l’empoisonnement… Le Juran était l’une de ces nombreuses régions agricoles d’Alderaan, éloignées de la capitale, dont les préoccupations du quotidien étaient forcément différentes de celles des villes riches et peuplées de leur monde.

« Une visite officielle peut rassurer les populations locales et rappeler qu’elles ne sont pas oubliées, dans le plan de relance économique. Ainsi que relancer la culture artistique locale, pour adoucir le ressentiment contre l'élitisme de la capitale. »

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Dés, Eldagas, 13

Une fois Miri laissée entre les mains d'Elenys et son équipe, Lisbeth avait accéléré la cadence. D'un claquement de mains, elle avait sonné le branlebas de combat parmis les autres suivantes concernées par le déplacement officiel de la Reine-Consort. Chacune d'entre elle connaissait sa mission sur le bout des doigts, et toutes, comme elle, était déterminées à la mener à bien. La perfection était essentielle, le travail nécessaire. Les distractions, inutiles. Elles devaient tout faire pour que Sa Majesté se sente à l'aise, et que son voyage se déroule dans les conditions idéales. Méthodiquement, elle donna les dernières instructions, s'assura que chacune d'entre-elles étaient parfaitement apprétées, et que toutes étaient discrètement armées. L'ensemble sous la vigilance de celle qu'Isobel avait désigné comme sa remplaçante, dans la gestion des affaires de la Reine-Consort.

Cela fait, elle prit soin de se changer elle-même, conformément au protocole définit pour l'occasion. Une robe traditionnelle, dans le même style que celles sélectionnées pour Sa- 'Leurs' Majestées, d'un ton blanc cassé. Le temps de corriger légérement le teint de son maquillage, de se glisser dans une nouvelles paire assorties, et la voilà qui filait déjà dans les couloirs. Première destination, les bureaux de l'Intendance. Il fallait prevenir les officiels du Juran, notamment le gouverneur, qu'elles allaient avoir un peu de retard. Rien d'inquiétant, elles étaient encore dans des délais raisonnables. Il n'était pas rare que leurs Majestés laissent trainer les choses, ne serait-ce que pour souligner qu'elles restaient les maitresses du temps, ici, sur Alderaan. Elle laissa le personnel s'occuper de cette tâche, mais veilla à ce qu'elle soit accomplie avant de disparaître d'un pas vif vers le parvis du Palais, où attendaient, à l'abri des regards, les différents speeders préparés pour l'occasion.

Marrov l'attendait à l'ombre du véhicule royal en compagnie de la remplaçante d'Isobel, sa garde déployée et prête à se mettre en route. Lisbeth le rejoigna d'un pas décidé, pour obtenir les dernières informations de sécurité.

« La voie est ouverte er sécurisée. Rien ne nécessite de changer le protocole, ou l'itinéraire prévu, » annonça-t-il sobrement, en lui montrant le tout sur une carte. « Savez-vous quand Sa Majesté sera prête ? Je sais bien que la menace est inexistante depuis que ces rats rebelles ont été reteouvés morts dans les montagnes mais plus nous patienterons et plus nous attirerons l'attention. »

Lisbeth agita la main comme pour apaiser ses inquiétudes, avant de jeter un regard avisé aux véhicules et au personnel de la Garde. Tout devait être impeccable. Irréprochable. Parfois, elle se demandait comment avait bien pu faire Isobel, avant de se rappeler qu'avec toujours plus de travail, toujours plus de persérévance et de dévotion au service de leurs Majestées, rien n'était impossible.

« Bientôt. Nous finalisons les préparatifs en ce moment même. Dîtes à vos hommes de se préparer au départ. »

Une fois Marrov de retour au travail, elle fit demi-tour pour rassembler les dernières informations, les dernières modifications. Le tout, avant de filer rapporter le tout à Sa Majesté. Une fois la salle atteinte, les portes de la pièce s'ouvrirent devant elle. Lisbeth se glissa à l'intérieur, son regard filant vers la Reine-Consort, après avoir effectué sa révérence.

« Avez-vous la moindre question ? La moindre appréhension, Miss Assiah ? »

La question posée à son apprentie la fit s'arrêter et regarder sur le côté. Lisbeth se figea alors instant, et son regard initialement exigeant s'arrondit brièvement en la découvrant ainsi apprétée et maquillée. Le résultat était... sidérant. A un point qu'elle en oublia un instant ce qu'elle était venue dire. C'était, après tout, bien la première fois depuis fort longtemps que le Palais formait une doublure pour le compte de la famille Royale. Néanmoins, près un léger mouvement de tête, Lisbeth finit par s'approcher de la véritable Reine-Consort, celle-ci restant somme toute reconnaissable pour celles et ceux qui la cotoyaient quotidiennement. En son absence, cependant, il semblait désormais comme évident que Miri pouvait d'ors et déjà semer une certaine confusion dans les rangs.

« Hum... Votre Maj-, » commença-t-elle, avant de tourner la tête vers Miri, qu'Elenys finissait d'apprêter. « Mmh... Majestées. Les officiels de la région de Juran ont été informées de notre retard et attendent votre arrivée avec impatience. Fort heureusement, le capitaine Marrov m'a informé que l'itinéraire prévu sera respecté, ce qui nous permettra de combler légèrement ce délai. Le convoi est prêt à partir dès que vous le jugerez nécessaire. Votre Première Suivante vous attend sur le parvis. »

Son regard glissa furtivement de la reine vers sa doublure. Laquelle allait lui répondre. Sa Majesté, ou son perturbant reflet ?

Bien, au moins, elle avait bien compris et intégré les problématiques locales et ce qui était mis en place pour y remédier. Apparence, protocole, stre… Hum, oui, mais elle se contrôlait. De toute façon, ce n’est pas comme si elle avait le choix. La tension lui rongeant le ventre n’était pas visible, en extérieur, cachée par les expressions qu’elle avait appris à maîtriser, grâce à ses cours de théâtre. Ce qui ne l’empêchait pas de bien la ressentir et ce qui aura sans nul doute des effets une fois la pression enfin relâchée. L’habitude devrait apaiser tout cela… Normalement. Miri avait aussi lu beaucoup de choses, sur les suivantes et doublures de la reine de Naboo, pour se préparer au mieux. Là-bas, contrairement à ici, c’était une riche tradition et leur prouesse dans le domaine était un exemple à suivre. Bien sûr, le livre ne traitait pas de tous les trucs et astuces utilisées mais Miri était certaine pour autant que le maquillage en faisait partie. Quoi de plus rapide et simple pour modifier une personne à un point extrême, après tout.

Elle s’observa un instant dans le miroir, tout en écoutant sa majesté, sans se reconnaître. Juste un rôle… Le rôle de la reine-consort, rien de plus, rien de moins. Juste une pièce de théâtre. La centrale étant la première étape, une visite officielle des plus classiques, sur la forme, plus importante sur le fond pour son aspect politique. Miri comprenait les enjeux, grâce à ses cours, pour autant, ça restait compliqué de les évaluer correctement, dans leur ensemble, de réaliser pleinement tous les embranchements et implications. Avec l’âge et l’expérience… Elle se leva enfin, puis fit quelques pas pour se mettre plus à l’aise et tester ses mouvements. Saluer, souri… Enfin, pas vraiment souriante, la reine-consort souriait bien moins que la reine Leia et quand elle le faisait, ça ne donnait pas un sentiment très chaleureux, plutôt un sourire protocolaire, habituel chez de nombreux nobles, d’ailleurs. La jeune fille ayant le sourire bien plus facile, elle avait dû s’entraîner à ce rictus plus froid.

« Nous alternerons toutes les deux les saluts à la foule lorsque notre convoi traversera les vallées du Juran en direction de Belleau-a-Lir mais vous resterez à bord du speeder lors de nos multiples arrêts. En revanche, vous serez dans la suite royale, à ma place, lors de la représentation à l'Opéra de Belleau-a-Lir. Vous agirez comme Miss Cidiir vous l'a appris et tout se déroulera pour le mieux. Une fois la représentation terminée, nous rentrerons. Avez-vous la moindre question ? La moindre appréhension, Miss Assiah ? »

Elle secoua légèrement la tête pour dire non, toujours stressée mais prête à y aller. Sa mentore arriva au même instant, alors que la jeune fille essayait de s’assurer être bel et bien à la même hauteur que celle qu’elle devait imiter, désormais. Allez… Mine de rien, ça sera vraiment les expressions les plus dures à contrôles, plus que la gestuelle. Pour ça, elle l’avait tant et tant répété que ça devrait bien se dérouler. Y compris les petits tics d’attitude que tout le monde avait. Ceux-ci ne se remarquaient que lorsqu’ils manquaient, laissant une étrange impression à votre interlocuteur, même s’il ne pouvait immédiatement déterminer ce qui le gênait.

« Hum... Votre Maj-, Mmh... Majestées. Les officiels de la région de Juran ont été informés de notre retard et attendent votre arrivée avec impatience. Fort heureusement, le capitaine Marrov m'a informé que l'itinéraire prévu sera respecté, ce qui nous permettra de combler légèrement ce délai. Le convoi est prêt à partir dès que vous le jugerez nécessaire. Votre Première Suivante vous attend sur le parvis. »

« Très bien. »

Son esprit « glissa » légèrement vers l’état presque méditatif qu’elle adoptait toujours, lors de ses leçons d’imitation, comme si elle sortait hors de son propre être, mentalement, pour laisser un autre schéma de pensée prendre la place. Même une fois dans le speeder, elle resta concentrée sur cette attitude et surtout, sur le regard, hum… Plutôt froid, honnêtement, à maîtriser. Il serait plus facile d’imiter Dame Leia, mais soit, puisque le hasard en avait décidé ainsi. Le convoi se mit en route avec une rigueur impeccable, comme toujours au balai, où tout devait être parfaitement orchestré. Miri ne dit pas grand-chose, pour ne pas dire rien, le temps du trajet, réfléchissant aux conséquences de cette nouvelle catastrophe récente, dont la planète commençait à se relever. A vrai dire, elle s’inquiétait surtout qu’il n’arrive encore autre chose et que le peuple en souffre, une fois de plus… C’était ce qui les menaçait le plus. Car même si l’Empire tombait, elle ne pensait pas que Alderaan et les planètes autour chutent avec elle. La protection, le commerce, les communications… Les structures étaient toutes en place depuis des siècles et très solides.

« La vallée, » murmura-t-elle finalement en observant par la fenêtre du speeder.

Un endroit familier, qui lui aurait arraché un sourire attendri dans de toutes autres circonstances. Las, il n’était pas temps pour ça, plutôt celui de jouer un rôle et suivre le déroulé prévu.

Miri fut légèrement surprise par cette réaction, car établir un constat n’avait pas grand-chose à voir avec du sentimentalisme. Sans réagir, toutefois, car ce n’était pas la première fois, très loin de là, que la reine-consort avait des réactions un peu bizarres. Ce devait être lié à ses trucs de Sith, comme elle se disait à chaque fois. Elle était plutôt concentrée sur le paysage et les infrastructures se révélant peu à peu, ravie intérieurement car cette région n’avait attendue que trop longtemps plus de moyens techniques et matériel, pour son développement. Qui sait, peut-être que cela allait encourager en plus l’installation de nouvelles entreprises, voire même la natalité. Quoi que sur ce dernier point, l’Empire l’encourageait déjà à un point tel que les familles et jeunes couples se sentaient harcelés. Il était dur d’échapper à la propagande impériale, même au sein du Palais, pourtant mieux préservé, ils étaient tous touchés quotidiennement. Miri n’osait donc pas imaginer ce que subissaient les habitants à l’extérieur.

Elle revint à des préoccupations plus actuelles lorsque la navette vint doucement se poser sur la baie d’atterrissage, avec la foule, la garde d’honneur, les élus et responsables locaux. C’était assez étrange, de découvrir tout cela de ce point de vue. Enfin, elle devra vite s’y habituer. Le protocole à suivre lui était bien collé en tête, elle l’avait appris et répéter par cœur, avec sa mentor. Déjà, elle aperçut dans la foule des têtes familières, dont elle avait pu étudier les dossiers. Aux débuts de cette préparation, elle s’était inquiétée qu’une personne ici puisse la reconnaître, en l’ayant vu par hasard un autre jour avant son départ pour la capitale ou elle ne savait où. Lisbeth lui avait assuré que ce n’était pas possible. Car entre le maquillage, les expressions travaillées pour imiter la reine-consort et le fait que personne ne s’attendra à voir une doublure, toutes les précautions étaient prises. Les deux femmes sortirent les premières, après que le garde ait ouvert la porte.

« La gouverneure est en poste depuis le début de la Crise. C’est la Reine qui l’a nommée, et nous est donc redevable. La majeure partie des invités également. Gardez néanmoins votre façade et ne vous laissez pas surprendre. A votre retour, si votre prestation a été adéquate, nous parlerons un peu plus de l’état d’esprit qu’il vous faut développer. »

Miri répondit poliment et brièvement, comme à son habitude, avant de prendre une très légère inspiration puis sortir. Une pièce de théâtre… Comme pour chaque situation tendue ou stressante, elle compensait avec un petit exercice de méditation mentale, que son père lui avait enseigné toute petite. Ça l’aidait à conserver ses moyens et s’appliquer au mieux. A mesure, elle appliquait les différentes mimiques ou mouvements de la reine-consort, suivant qui elle avait en face et comment. Par chance, la femme à imiter parlait en général bien moins que la reine Leia et toujours d’une manière bien plus directe. Moins politique, finalement, elle était plus franche. Le rôle était donc plus simple à conserver. Malgré le poids des regards, elle finit par les oublier, pour se concentrer sur l’instant présent. Couverte par les apparences et ne risquant rien dans ce genre de situation… Ce n’était pas ici qu’ils risquaient une attaque. Le plus dur, au final, était d’éviter de sourire souvent, car sa majesté ne le faisait pas souvent en public. Enfin… Elle le faisait mais hum, ça lui donnait l’air un peu malsain.

Cette première étape servit en tout cas à la rassurer sur sa capacité à imiter la reine devant un public, ça mordait à l’hameçon. Si la jeune fille n’aimait toujours pas l’idée de mentir à tout le monde, elle comprenait pourquoi il fallait le faire et les besoins de sécurité de la famille royale. Toutefois, cela avait beau être une expérience agréable, Miri ne voudrait pas de ça en permanence. La vie tranquille, dans l’ombre, c’était bien aussi.

Iisa et Lisbeth étaient déjà dans leur élément, prêtes à tenir leur rôle respectif. La première devant se tenir au plus proche de la Reine-Consort, la seconde plus en retrait, à son grand damne, mais prête à se porter à leur hauteur au moindre signal. Son élève allait devoir faire sans son soutien direct, mais elle avait confiance. Miri avait été parfaitement préparée pour cet instant. Un véritable bourrage de crâne. Heureusement, la jeune fille était très réceptive. Face à elles se trouvaient, en plus de la gouverneure et ses invités, quelques holocaméras présentes pour immortaliser l’évènement, toutes pour des journaux locaux, contrôlés et censurés par les services du Palais. Sur ce point, il n’y avait absolument rien à craindre. Il y a des mois que leurs Majestés avaient subtilement museler les organes de presse encore virtuellement indépendants, après la tentative d’assassinat odieuse menée contre la Reine-Consort. Heureusement, et au grand soulagement des deux femmes, la menace terroriste était désormais inexistante.

Iisa referma la porte du speeder derrière Miri, laissant la véritable Reine-Consort seule à l’intérieur. Elle réprima un soupir d’encouragement personnel, et croisa subtilement le regard de Lisbeth, qui se glissa souplement à sa suite tandis qu’elle-même venait rattraper la jeune Miri qui, décidemment pleinement dans son rôle et imitant Sa Majesté avec une étonnante perfection, avait filé tout droit sans même les attendre. Mais pas si vite, jeune fille ! pensa-t-elle, alors que Lisbeth, elle, masquait habilement sa fierté derrière cette expression signature, contrôlée et maitrisée, des suivantes royales d’Alderaan. C’est qu’il s’agissait de la première fois depuis fort longtemps que Palais employait une doublure et Miri tenait son premier rôle avec une maitrise des plus satisfaisantes. A tel point qu’aucun des officiels, pas même la gouverneure Fallix n’avaient remarqué la supercherie.

Celle-ci s’était par ailleurs approché la première, offrant à Miri une parfaite révérence avant de s’écarter de quelques pas pour lui présenter un à un les officiels qui l’accompagnait pour cette occasion qu’elle annonçait mémorable et unique. La presse, plus disciplinée que les tabloids de Coruscant, se contenta de quelques holophotographies officielles dont la plupart seront censurées par le Palais de sorte que personne ne puisse découvrir la supercherie. Iisa retînt intérieurement son souffle, mais Miri navigua cette première partie de la visite, probablement la plus compliquée, avec une aisance remarquable. Derrière elles, Lisbeth se contentait de rester en retrait, mains croisées. Bien. La nouvelle première suivante appréciait ce qu’elle voyait. Finalement, la gouverneure Fallix finit par inviter la Reine-Consort et sa délégation à la suivre pour commencer la visite. Toujours avec un peu de retard, mais rien de grave.

De derrière, Lisbeth suivit le déroulement de la première partie de la visite en silence. Mentalement en revanche, elle se répétait chaque pas, chaque mouvement de tête, chaque expression que son élève devait tenir alors que la gouverneure et le maître d’œuvre expliquaient, depuis les hauteurs de la centrale, les problématiques environnementales et techniques qu’ils avaient dû surmonter dès le début du projet jusqu’à la fin des travaux. C’était une scène qu’elles avaient travaillée et répéter au Palais avec Miri, et la remarque que cette dernière devait alors dire, au sujet de leur réalisation en un temps record, malgré les contraintes de la Crise. Elle sentit ses mains se crisper, en imaginant un instant qu’elle ait pu l’oublier, et se surpris presque à murmurer ces mêmes paroles pour elle seule. Elle poussa ensuite un discret soupir, pour se reprendre en main. Tout allait bien se passer. Tout était prêt. Elle était prête. Enfin, non, pas encore… Mais Miri allait s’en sortir. Au moins pour aujourd’hui.

« Votre Majesté, si vous le voulez bien, nous allons à présent vous faire visiter les machineries. C’est impressionnant, vous allez le voir ! Ensuite, nous vous présenterons la salle de contrôle, d’où vous aurez les honneurs d’inaugurer le complexe. » annonça soudainement la gouverneure avec un élan d’enthousiasme peut-être légèrement déplacé, et sans que Lisbeth n’ait pu entendre si Miri avait dit quelque chose.

Et en effet, et comme il était prévu dans le déroulé, ils finirent par se diriger vers une entrée presque anodine donnant sur un ascenseur et une cage d’escaliers. Iisa jeta un bref regard vers le bas, et les marches qui s’annonçaient sans fin. C’est évidemment par l’élévateur qu’ils descendirent presque cent-cinquante mètre plus bas, dans une succession de pièces immenses au cœur desquelles se trouvaient des machineries dont le gigantisme parvînt même à impressionner la nouvelle Première Suivante tandis que, à côté d’elle, la « reine-consort » se voyait assaillie d’informations par un maitre d’œuvre qui ne parvenait pas à contenir sa fierté d’avoir mené à terme un chantier aussi titanesque. Elle profita de l’instant pour jeter un regard derrière elle, et vers Lisbeth dont le visage de façade, en apparence parfait, ne suffisait pas à cacher à un regard avisé, habitué et affuté, l’anxiété qui l’habitait. Nul doute qu’elle aurait voulu donner un peu d’air à son élève sous un prétexte, mais Iisa se contenta de lui jeter un regard plus dur, pour qu’elle se ressaisisse immédiatement. Le doute n’avait pas sa place chez une suivante, l’inquiétude encore moins ! Si la petite avait besoin d’un peu d’air, c’était à elle de le faire savoir, et non l’inverse.

Sa Majesté avait été clair sur le sujet : il s’agissait là d’un test, et Iisa comptait bien pousser la jeune fille dans ses retranchements. Du moins, un peu. Parce qu’elle ne laisserait bien évidemment pas la jeune Miri se planter, et interviendrait à sa demande ou si la situation l’exigeait. Il était hors de question qu’elle ait à devoir expliquer à la Reine-Consort qu’un incident était arrivé parce qu’elle avait manqué de vigilance.