Enterrement de Mara Jade

Nirauan est une planète d’ordinaire calme et isolée. L’agitation principale se fait à la base installée dans les montagnes et la roche, dont une petite partie reste encore en construction. Non loin de la base, dans les gorges, une cérémonie a été mise en place. Un bûcher funéraire a été dressé, sur lequel est étendue le corps d’une jeune femme rousse, âgé de dix-neuf ans, Mara Jade.

Les personnes présentes à la cérémonie se sont réunies en cercle autour du bûcher, pour la cérémonie, avant que le feu ne soit mis au corps. La fin d’après-midi approche lentement, le soleil déjà bien baissé n’attend plus qu’à peine la gorge où se déroule cérémonie. Les lumières installées, non agressives, entourent particulier le bûcher dressé au centre.

La Mort n’est que la continuité de la Vie.

Son maître lui avait dit ça, il y a bien longtemps, lors de l’enterrement d’un ami proche, alors qu’il avait quinze ans. Ce n’était pas juste pour le réconforter, il avait raison, la mort n’était pas la fin de tout. Sogua se tenait vers l’arrière de la petite assemblée, les bras croisés, portant le regard sur le bûcher funéraire qui avait été dressé au centre. Ce n’était pas la première cérémonie de ce genre à laquelle il assistait, il en avait vu une très grande, tout petit, de nombreuses autres les mois suivant la catastrophe car beaucoup étaient morts de leurs blessures, puis quelques autres encore, les années suivantes, à cause d’accidents ou de maladies, liées à l’air devenu vicié en surface. C’était donc une scène presque… Il était tout à fait horrible de le dire ainsi, mais c’était une scène presque banale. Ordinaire. Et au fond, elle l’était. Ils finiront absolument tous dans ce même état.

Ce qui était moins ordinaire, c’était la façon dont cette jeune femme avait achevé sa vie. Ce qui était à retenir, c’est qu’elle avait résisté, avant de mourir, alors qu’ils auraient pu assister à l’hommage funèbre de bien plus de personnes. Comme celui du petit garçon, en plus. Sogua lança un regard en biais dans la direction où se tenait l’enfant, accroché à son père, plissant un peu le regard en se disant qu’il était heureux qu’il ait au moins un membre de sa famille auprès de lui. Qu’il y avait-il de pire de se retrouver complètement seul ? En revanche, là où le choc allait être grand à surmonter, c’était d’avoir vu sa propre mère vous attaquer. Possédée ou non. Ce genre d’image brûlait votre esprit, il espérait que le petit arrive à surmonter ça. Le Chiss détourna le regard, le baladant un court instant sur la petite foule, puis de nouveau sur le bûcher.

Les paroles prononcées, les gestes, les rites… Il ne connaissait pas très bien les coutumes Jedis de ce temps, mais finalement, il n’y avait pas sensiblement de très grosses différences. Pour sa part, il ne comptait pas parler. Car il ne connaissait rien de cette jeune femme, à part son nom, et ne pouvait donc rien dire. Être là, en ce moment, n’était que par respect, mais que faire d’autre ? Il décroisa lentement les bras, ramenant les mains dans le dos, toujours en se tenant un peu à l’écart.

Très souvent, quand il voyait des scènes comme ça, ben se demandait ce qui était le pire, entre avoir eu et perdre ou bien ne jamais avoir eu du tout. Avec ses amis, au temple, ils s’étaient demandés ça, parce qu’il y avait quelques orphelins et un qui n’avait jamais connu ses parents. Donc c’était quoi, le mieux ? Si on n’avait jamais eu de famille, on ne souffrait pas, ou alors, on souffrait quand même justement parce qu’on restait tout seul ? Mais si on avait des parents et qu’on les perdait, on avait très mal aussi. Il ne savait pas. La question lui retournait sans cesse en tête. Il était debout tout près de papa et lui serrait la main, l’air abattu, en regardant le corps de maman qui reposait sur le bûcher. Même s’il avait toujours su que ça pouvait se terminer comme ça un jour, il n’avait pas voulu croire que ce serait si tôt. Et si brusquement. Et qu’il n’aurait même pas le temps de lui dire au revoir ou au moins de lui faire savoir qu’il l’aimait.

Pourquoi ça finissait toujours comme ça ? Pourquoi il devait y avoir la guerre ?

Il savait bien que c’était « normal », pourtant. Que c’était comme ça. Que la vie et la mort s’entremêlaient sans cesse et qu’ils devaient tous s’y faire. Il savait très bien qu’à cause de l’existence menée par ses parents, la mort n’était jamais très loin. Il savait qu’attirer des ennuis était presque une règle de base, dans sa famille. Il savait aussi qu’espérer vivre vieux n’était la première option envisagée. Pourtant, les larmes continuaient de couler, en silence, il ne faisait rien pour les essuyer ou les stopper. Il se contentait juste de rester là à regarder, à serrer la main de son père, et à ne pas écouter les paroles creuses des adultes autour de lui, parce que ça ne voulait rien dire. C’était fini et c’est tout. Son cœur lui faisait très mal, mais il savait déjà que ça passera, avec le temps, et qu’il avancera quand même. En grandissant. Sauf s’il mourrait lui aussi avant.

C’était pour ça aussi qu’il ne voulait pas devenir Jedi ou même commencer à s’entraîner, pour ça qu’il refusait la Force et tout ce qui allait avec. Avec tout ça, on n’en arrivait qu’à plein de guerres, puis à la mort, et c’est tout. A quoi ça servait, sinon ? Ils devaient apprendre à combattre, puis ils étaient envoyés mourir, et si on a une famille, elle vous est arrachée tout d’un coup. Puis on est encore seul. Il leva le nez vers son père, entrouvrant la bouche pour lui demander d’arrêter la guerre, puis la referma, sans prononcer un seul mot. Papa lui avait déjà expliqué pourquoi il ne pouvait pas juste tout stopper. Alors, à la place, Ben se rapprocha un peu plus de lui, sans lui lâcher la main, agrippant l’autre contre un bout de sa tunique, puis il posa la tête contre lui. La force, c’était la guerre et c’est tout…

-------------
Dés, avaler le choc : 8 (avec le malus)

Eh bien… Cela avait été le mariage le plus mouvementé auquel il n’avait jamais assisté. Le plus bizarre aussi. Commencer par une ambiance très joyeuse puis finir sur un enterrement, c’était très particulier. A présent, il regardait le corps étendu de la jeune femme, tout en se tenant en retrait, à l’arrière des Jedis et rebelles présents. Il ne l’avait pas connue, n’avait appris son nom que pendant la mêlée lorsqu’une des Jedis l’avait crié, et n’avait pas non plus réellement compris ce qui l’avait finalement tué. Si c’était cette possession en elle-même ou encore autre chose, à cause de la Force ou de l’Empereur. Il compatissait pour les Jedis, mais ne pouvait, en revanche, pas être réellement triste pour Mara, sans l’avoir connue. Être là ce soir n’était qu’un simple signe de respect, et également, dans le fond, le signe d’une nouvelle transition. La vie allait complètement changer. A nouveau.

Le sentiment principal qui primait était tout de même le soulagement, même s’il ne le montrait pas, restant le visage neutre dans son coin. Cette fois, c’étai bel et bien fini, la rupture était bel et bien consommée, il ne s’agissait plus de faire valoir des illusions et faux-semblants. D’organiser il ne savait quelle mission en couverture. Il était soulagé, en fait, d’être finalement clairement catalogué comme traître et déserteur, car ça signifiait qu’il n’aura plus jamais besoin de cacher quoi que ce soit de son ressentiment envers cet Empire, peu importe son interlocuteur. Il baissa un peu la tête, les yeux fermés et bras croisés, écoutant les paroles des Jedis, plus bercé par elles que très attentif. C’était leur cérémonie, après tout, pas question de s’y immiscer et encore moins dire quoi que ce soit.

La nuit tombait peu à peu, avec elle, le froid, et une ambiance plus morose et mystique. Eli rouvrit les yeux, regardant sans les voir les torches allumées, et leur lumière vibrante. Il pensait surtout à ce que Thrawn lui avait demandé un peu plus tôt… Une idée qui ne l’enthousiasmait pas du tout, autant être clair, il avait déjà eu du mal à parler de ça à des proches, alors en parler à toute la galaxie ? Et puis, en quoi son témoignage sera considéré comme ayant la moindre valeur, maintenant qu’il était désigné comme traître ? Et même, quoi dire, exactement ? Que le cinglé lui était tombé dessus chez lui, dans les débuts de la pandémie, et qu’il avait… Hum… Il sentait des frissons lui remonter le long de la colonne vertébrale à la seule idée de détailler ça dans une vidéo. Mais au moins parler de ce qu’il avait vu sur Lysatra ?

Disons qu’il verra après la cérémonie… d’une certaine manière, ce serait aussi la dernière action qui reviendrait lui jeter Plagueis dans la figure, et après ça, il pourra peut-être mieux l’oublier. C’était ridicule, de toute façon, il était grand temps de passer à autre chose. Le fou, lui, l’avait sûrement oublié depuis très longtemps. Pas vrai ? Il relâcha un petit soupir, tout en regardant vaguement les Jedis. Eux, par contre, allaient devoir continuer à se farcir les siths encore longtemps. Tous étaient-ils comme Plagueis, d’ailleurs, ou n’était-il tombé que sur l’exception … ?