Si vis pacem, para bellum

Le vaisseau venait de franchir paisiblement les limites du Chaos vers l’Espace Sauvage, dans un océan infini d’espace sans vie ou presque, des mondes perdus, des routes inexistantes. Un large secteur en peine, sans ressources, où les rares peuples existants, primitifs, ne connaissaient des voyages stellaires que les lueurs de vaisseaux égarés ou de quelques pillards en vadrouille sur leurs terres limitées. L’Espace Sauvage, immense, comptait un très grand nombre de systèmes désolés et délaissés par les colons, en recherche d’une vie meilleure. Ils valaient à ce supra-secteur son nom et certainement le mépris y étant associé, par les autres Bordures et plus encore, par le Noyau. Vitiate contemplait, par une large baie, depuis son fauteuil, les étoiles disparates et la géante gazeuse près de laquelle ils avaient stoppé. A une distance respectueuse, tant l’attraction puissante de cette planète attirait à elle les astéroïdes errants et autres objets stellaires en dérive. La géante possédait une rotation folle, ses cyclones géants, visibles même d’ici, balayant violemment sa surface et les gaz dont elle était composée. L’un de ces mondes  pouvant être exploité pour ses ressources et pourtant ignoré de tous.

Tant occupé à contempler l’espace, plongé dans ses pensées, il songeait à l’existence passée d’une toute autre manière, désormais… Ses objectifs avaient tant changé… Les combats passés, les adversaires dont il s’était préoccupé, tous lui semblaient sans intérêt, malgré leur retour dans ce temps, pour certains d’entre eux. Le défi nouveau, présenté face à lui, ne cessait plus de l’obnubiler. Jamais il n’avait encore été confronté à un problème de cette valeur et avec tant d’enjeux. C’était… D’une telle fascination… Toute son attention et ses pouvoirs étaient concentrées sur ces objectifs. Il prenait son temps. C’est au cours de son voyage de retour et de ses méditations, installé entre autres dans la tête de son cher pion, qu’il avait eu la surprise de découvrir par hasard la première personne concernée par la prophétie. Un tel coup de chance qu’il s’était d’abord refusé à y croire. Il l’avait observée, à travers les yeux et l’esprit de son pion, il l’avait flairée, oubliant même, sur le moment, l’autre petite surprise, le tout frais rejeton de son pion. Puis l’évidence s’était imposée. Une telle aubaine qu’il en était demeuré pantois.

A quel point la Force se moquait-elle de l’univers, pour lui avoir offert si vite et tôt cette première opportunité ?

Bien entendu, il ne s’en était pas aussitôt pris à ce premier outil. Il lui suffisait, pour le moment, de savoir ce qu’elle était. Son nom, son visage et son aura étaient désormais gravés dans sa mémoire et serviront plus tard. Les deux autres outils, tout comme l’emplacement de la planète, lui restaient inconnus. Il possédait un certain soupçon, vis à vis de la seconde, sans avoir encore de preuves plus formelles. Ce n’était, néanmoins, qu’une question de temps… Possédant déjà d’autres moyens, quoi qu’encore moins sûrs, d’obtenir des informations, cette voie était déjà ouverte. Il était patient. Un léger son l’informa à ce moment qu’un autre de ses pions était arrivé. Il lui ouvrit, depuis son fauteuil, puis l’observa avancer. Il avait su que la demoiselle avait rencontré la petite nature, bien évidemment. Tous deux s’intéressaient à l’une de ses petites expériences… Laisser cette affaire-là se faire lui convenait, il était curieux de découvrir comment cette gamine et son pion allaient s’en sortir. Vitiate n’avait aucune intention d’intervenir, à moins que ce ne soit pour éviter un gâchis inutile.

« J’ai progressé sur l’origines des failles, » commença-t-il d’emblée, sans se préoccuper des politesses. « Il semble bien que leurs ouvertures soient volontaires et non une défaillance. Bien que cela reste à confirmer avec certitude, ce n’est plus qu’un point de détail, désormais. Le fait est qu’il est possible de s’en servir, si nous y prenons avec suffisamment de méthode et de travail. Et ainsi créer un univers entièrement nouveau, où nous pourrons sceller des avancées majeures. Le chemin ne fait que s’ouvrir. Pouvez-vous imaginer un monde entièrement reconstruit, l’Histoire bouleversée ? Vous pourriez y vivre, en suivant cette voie. Un univers où votre peuple n’aurait pas disparu. »

Visas avait reçu le message bien en avance, pour lui laisser le temps de naviguer au travers de l’Espace Sauvage jusqu’aux coordonnées qui lui étaient parvenues. Son état de santé s’était amélioré avec le temps, au point qu’elle n’ait plus besoin d’être suivie de partout par son droïde médical. La Force s’était faite moins tempétueuse, au point qu’il n’y avait plus que de rares artefacts venant parfois flouter sa vision. La vie, au quotidien, était de nouveau devenue agréable, bien que cela ne l’ait pas beaucoup aidé dans ses récentes pérégrinations. Les quelques pions à sa disposition lui avaient été d’une piètre assistance à dénicher une force vive pouvant être utile dans ces régions reculées. Elle-même était une piètre négociatrice, n’ayant guère d’attrait pour les relations sociales. Hormis cette découverte sur cette planète miteuse, et sa rencontre avec le seigneur Scourge, il n’y avait pas grand-chose à retenir de ces derniers mois. Aussi attendait-elle beaucoup de cette entrevue avec Vitiate, après que ce dernier soit parti dans son coin poursuivre leur quête commune. Une quête dont elle n’avait rien su faire, de son côté.

Sa navette sortit de vitesse-lumière à bonne distance de la géante gazeuse, dont la majesté rayonnait autant dans les champs du visible que dans celui de l’invisible. Le vaisseau attendu était déjà là, dans une orbite lointaine, à l’abri des troubles que pouvaient provoquer cette planète qui tournoyait sur elle-même à toute vitesse. Elle pouvait déjà sentir sa présence alors qu’elle approchait, avant de venir y amarrer sa navette. Avant de quitter le bord, elle détailla son droïde médical, éteint et rangé dans un coin, pour plus qu’il ne la dérange. Ne plus avoir à supporter ses jérémiades au quotidien était un grand soulagement à lui tout seul. Visas navigua ensuite dans les couloirs, suivant l’aura de l’Empereur Immortel comme ces vieux navires des contes suivaient la lumière des phares. La porte de la grande pièce dans lequel il se trouvait s’ouvrit devant elle, et la miraluka entra sans flancher, son observation figée sur le vieux sith. Elle avait dépassé ses propres craintes vis-à-vis du puit profond qu’il était dans la Force, et n’avait plus le moindre complexe à s’y laisser captiver ; à l’étudier dans ses moindres détails.

« J’ai progressé sur l’origines des failles » Visas inclina la tête, intriguée, et ramena ses mains gantées devant elle, l’une dans l’autre. Elle s’était attendue à ce qu’il lui annonce une bonne nouvelle, mais pas de sitôt dans leur conversation. Vitiate allait droit au but, une chose qu’elle appréciait grandement. Cela s’annonçait intéressant. « Il semble bien que leurs ouvertures soient volontaires et non une défaillance. Bien que cela reste à confirmer avec certitude, ce n’est plus qu’un point de détail, désormais. Le fait est qu’il est possible de s’en servir, si nous y prenons avec suffisamment de méthode et de travail. Et ainsi créer un univers entièrement nouveau, où nous pourrons sceller des avancées majeures. Le chemin ne fait que s’ouvrir. Pouvez-vous imaginer un monde entièrement reconstruit, l’Histoire bouleversée ? Vous pourriez y vivre, en suivant cette voie. Un univers où votre peuple n’aurait pas disparu. »

Elle continua de marcher dans sa direction, le pas plus lent, alors qu’elle digérait les informations, qu’elle analysait les possibilités sans limites que cela leur ouvrait, sans vraiment se poser de question sur le pourquoi du comment. La chose était là, à priori à leur portée. Il serait stupide de ne pas s’en saisir, de ne pas l’exploiter. La miraluka s’arrêta à deux bons mètres de l’Empereur Immortel, et se laissa glisser sur le côté, autour de la table et vers un autre fauteuil situé là. Elle s’y installa doucement, avant de doucement tirer son voile en arrière pour laisser apparaître le bandeau de couleur sombre qui s’étirait sur l’arête de son nez et couvrait l’endroit où aurait dû se trouver ses yeux ainsi que les premières mèches de sa chevelure sombre. Retrouver son peuple avait toujours été un de ses objectifs principaux, bien qu’elle n’ait jamais vraiment déterminé en quoi cela pourrait bien lui être utile. Peut-être était-ce une forme de nostalgie du temps perdu, rien de plus… L’idée de pouvoir le voir ressurgir lui plaisait énormément, mais elle savait aussi très bien que les choses ne pouvaient être aussi simples.

« Bien que retrouver mon peuple soit un objectif qui me tienne à cœur, je ne suis pas certaine qu’ils soient très enclins aux changements. Ils ont toujours été très ancrés dans la lumière, neutres, et craintifs de la véritable puissance de la Force. A raison, étant donné les ravages qu’elle peut nous causer lorsqu’elle est mal maitrisée. » Elle en avait fait les frais sur Katarr, et savait à quoi s’attendre. Il y avait aussi le risque de les voir plonger tout simplement dans la folie, ou de se laisser appâter par la tentation d’un pouvoir sans partage. Ils ne feraient jamais ce choix d’eux-mêmes, à moins que la chose dont parlait Vitiate puisse également permettre de changer leur façon de penser, ou même de vivre ; de réécrire leur Histoire dans l’intégralité, et de balayer tout le reste d’un revers de main. « A moins que ce que vous évoquiez permette de les rendre disons… plus compréhensifs et acquis à notre vision de la galaxie, ce n’est pas quelque chose que je recommanderais de faire. Sans parler qu’il leur faudrait un leader, une personne charismatique et puissante pour tenir les rennes. »

Une chose dont elle ne se sentait pas capable, en l’état actuel des choses. Ces résultats récents en étaient un parfait exemple. Mais ce n’était pas grand-chose, en comparaison du pouvoir sous-entendu dans les propos de Vitiate. S’ils pouvaient vraiment réécrire l’Histoire de tout un peuple selon leurs souhaits, alors les possibilités étaient tout simplement infinies.

« Si ce que vous affirmez est vrai, et que nous pouvons bien nous servir des failles pour façonner une galaxie nouvelle, vidée des petites natures inutiles et incapables d’évoluer et de s’adapter à la vision que nous souhaitons lui donner, alors nous ne devons pas hésiter, quel que soit le moyen. Il faudra, bien sûr, définir les détails de ce que nous souhaitons obtenir.»

Elle se redressa, et posa ses mains devant elle, ses doigts jouant distraitement avec le tissu de son voile, son attention toujours captivée par le froid glacial et la noirceur profonde qui émanaient du sith. Visas n’était pas prête à y plonger dedans, mais elle en donnait certainement bien l’impression malgré elle. Elle ne savait pas ce qu'elle souhaiterait vraiment. Retrouver son peuple ? Probablement. Le dominer ? Dans quel but ? Et pour le reste ? Elle n'avait jamais eu dans sa vie la possibilité de faire un choix. Il n'y avait que depuis peu, depuis qu'elle avait rencontré Vitiate, qu'elle avait la sensation d'être libre de prendre ses propres décisions. Mais même là, elle n'avait pas la moindre idée de ce qu'elle pouvait bien en faire...

« Par ailleurs, » reprit-elle plus trnaquillement, en se reconcentrant, prête à se servir une tasse de thé si Vitiate avait pris soin d’en faire préparer. « Si nous pouvons effectivement maitriser cette puissance, ne pourrions-nous pas tout simplement recréer et façonner l’Histoire à volonté, encore et encore, et apprendre de chacune de ces évolutions jusqu’à trouver l’équilibre parfait ? Ou bien la chose est telle qu’elle ne pourra-t-elle être tenté qu’une seule fois ? »

Expérimenter, tel un univers dans un bocal, reproduit à l’échelle un, et ce des infinités de fois serait extraordinaire. Un pouvoir sans limites où ils pourraient définir et façonner l’avenir en étudiant les scénarios les uns après les autres en faisait disparaître les nuisibles et les gêneurs, ou tout simplement semer le chaos dans des régions entières. C’était… c’était presque inconcevable, et parfaitement excitant.

Elle aurait cligné des yeux si elle l'aurait pu, pour se reconcentrer, et fronça plutôt le nez. C’était sans doute se projeter très loin. La simple idée de pouvoir juste modifier l’Histoire telle qu'elle était actuellement et acter des faits ou des bouleversements majeurs était déjà bien suffisante et représentait en soi une forme de pouvoir absolu qu’elle était prête à comprendre, et à ne surtout partager avec personne d’autres que son associé. Ce serait bien trop dangereux de laisser des petites natures toucher à ce genre de choses…

« Mais si nous le pouvons, d’autres pourraient également en être capable, avec les bonnes informations. Comment pouvons-nous nous assurer que ce savoir ne s’ébruite pas ? Comment avez-vous fait, d'ailleurs, pour découvrir tout cela ? »

Les pions avaient, bien souvent, du mal à rêver, à imaginer, à extrapoler, à tout simplement se laisser aller au cœur de leurs plus sombres désirs, en retirer les objectifs ultimes guidant leurs pathétiques existences. C’est pour cela qu’ils restaient des objets manipulables… Sans cesse hésitants, sans cesse à se poser des limites, plutôt que penser d’emblée aux différentes sources de réussite. Cependant, dans une certaine mesure, ils étaient amusants. Lorsqu’ils pensaient, faussement, avoir enfin gagné un semblant de pouvoir et de contrôle, qu’ils s’imaginaient supérieurs à d’autres pions, ignorants les chaînes les entravant lourdement, encore et toujours. Misérables, ne pouvant se libérer. Il l’observait, l’écoutant, silencieux, sentant à quel point elle errait sans pouvoir se fixer à un objectif. L’exemple parfait de l’outil, vide de sens, seulement utile pour servir des intérêts supérieurs à lui. D’un certain point de vue, c’était fascinant. Les Sith n’avaient de cesse de courir après la liberté, de se libérer de leurs chaînes, mais si peu y parvenaient. L’immense majorité se couvrait elle-même d’entraves, tout en se croyant pourtant libre, incapable de prendre ses propres décisions. Bien souvent, ce n’était guère le pouvoir, qui manquait à ses confrères et consœurs, mais bien le désir. Cet objectif brûlant balayant votre existence, vous poussant et vous galvanisant. Voilà ce qui différenciait véritablement un Seigneur d’un pion.

« Si nous pouvons effectivement maîtriser cette puissance, ne pourrions-nous pas tout simplement recréer et façonner l’Histoire à volonté, encore et encore, et apprendre de chacune de ces évolutions jusqu’à trouver l’équilibre parfait ? Ou bien la chose est telle qu’elle ne pourra-t-elle être tentée qu’une seule fois ? Mais si nous le pouvons, d’autres pourraient également en être capable, avec les bonnes informations. Comment pouvons-nous nous assurer que ce savoir ne s’ébruite pas ? Comment avez-vous fait, d'ailleurs, pour découvrir tout cela ? »

D’autres pourraient, en effet. Sidious, par exemple, il possédait le pouvoir et la puissance nécessaire, pour cela, seul autre Seigneur Noir digne de ce nom, dans cette galaxie. S’il pouvait exister d’autres seigneurs de la même trempe, aucun d’entre eux n’avait décidé de se révéler, à moins que se contenter d’une petite vie tranquille dans leur coin ne leur suffise. Des cas certes rares mais bien existants, il y avait assisté, il y a longtemps… Plagueis était puissant également mais ne s’intéressait pas du tout aux failles, son seul plaisir était de s’amuser avec ses proies, qu’importe la destinée de la galaxie. Les Jedi… Coincés dans leurs beaux principes, ils n’oseraient pas modifier en masse les destinées d’autant de peuples, ce serait contraire à l’ensemble de leurs croyances et principes. Il y en avait bien une, parmi eux, que ça ne gênerait pas autant. Hélas, elle restait chez eux, à ne rien faire ou presque, quel gâchis immense.

« L’équilibre parfait revient à laisser les différentes parts subsister. J’avais créé cet équilibre, par le passé, à une échelle restreinte. Seuls quelques réfractaires au bon sens s’y opposaient parfois, poussières infimes dans un monde de paix. »

Zakel était parfait. Un mélange précisément équilibré entre Lumière et Obscurité. Un Empire où chacun restait à sa place, en totale sécurité, sans qu’aucune voix ne s’élève contre le pouvoir absolu puisque nul n’avait aucune raisons de le faire. Vitiate avait bien conscience que ce monde idéal l’avait apaisé, lui-même. Ce que rien ni personne n’était parvenu à accomplir jusqu’alors. Tout cela aurait pu durer plus longuement encore si ses deux imbéciles de fils n’avaient pas été si impatients.

« Quant à la manière de découvrir tout cela, il suffit de prendre un grand soin dans les recherches et expérimentations, tout en sachant se faire quelques alliés appréciables. Il existe des peuples très attachés aux valeurs de puissance et de pouvoir. Il serait douteux que d’autres parviennent à s’en faire apprécier de la même façon. Peut-être Sidious le pourrait-il, s’il parvient à franchir cette étape. Veillez à toujours vous en méfier. Bien que certains imbéciles le sous-estiment, il est un Seigneur puissant et hautement doué en manipulations de l’ombre. Ce n’est pas un adversaire à négliger. »

Il marqua une très brève pause, tout en couvant d’un regard inquisiteur son pion. Les Siths présents étaient de vulgaires Furies, plus ou moins intelligentes ou utiles. Plagueis était… Un ami particulier. Sidious, au contraire, était un véritable ennemi, digne de ce nom. Vitiate avait toujours juré aussi aberrant que stupide les quelques purs imbéciles observer à dénigrer ou se moquer de cet adversaire, ignorant son pouvoir. Une telle attitude vous condamnait automatiquement à échouer, sous la plus grande des humiliations.

« Trois nouvelles cibles doivent être repérées, avant d’être capturées et rassemblées, une fois l’heure venue. Je sais où se trouve l’une d’entre elles et où elle compte se rendre, elle pourra être récupérée plus tard. La seconde m’est encore inconnue. La troisième… est à confirmer. Il s’agit d’une vieille Jedi du passé, ayant elle aussi vrillé autrefois dans le Côté Obscur. Elle se nomme Kreia. Je l'ai affronté récemment, dans la tête d'un pion. »

« L’équilibre parfait revient à laisser les différentes parts subsister. J’avais créé cet équilibre, par le passé, à une échelle restreinte. Seuls quelques réfractaires au bon sens s’y opposaient parfois, poussières infimes dans un monde de paix. »

Visas ne « voyait » pas du tout à quelle partie de l’histoire il faisait référence, lui qui avait vu défiler les millénaires. Elle n’était pas certaine non plus de véritablement saisir le sens de « l’équilibre » auquel il faisait référence. Elle peinait, d’ailleurs, à l’imaginer en parfait équilibriste entre la Lumière et l’obscurité, lui qui n’était rien d’autre dans la Force qu’une énorme fosse sombre, malaisante et malsaine. Un gouffre qui ne l’effrayait plus, cependant, et dont elle n’hésitait plus à en observer les contours, sans jamais, par bon sens, se risquer à « jeter un regard » au-delà. S’il faisait référence à la manière dont il avait su gérer le bas peuple et les enfoncer dans une forme de complaisance sans faire le moindre usage de ses pouvoirs, elle se devait de baisser son voile devant pareil entreprise. La plupart des politiciens s’y cassaient les dents ; elle, n’y avait pas la moindre expérience, ou même compétence. Du reste, il lui semblait impossible d’obtenir un jour une vision aussi claire et large que Vitiate, lui qui avait pu étendre ses connaissances, son observation sur des vies entières. Elle, n’aurait jamais ce temps ; et même si on le lui offrait, elle n’était pas certaine de vouloir en connaître les conséquences. Car la Force donnait rarement, elle demandait toujours quelque chose en échange.

Ainsi, donc, voulait-il restaurer ce qu’il avait connu à une époque, mais à une échelle plus vaste encore ? Amener cet « équilibre » à toute la galaxie, en balayant définitivement les derniers réfractaires à sa vision. Visas pouvait le comprendre, mais ne voyait pas ce qu’elle avait à y gagner elle, là-dedans. Hormis la tentation à peine voilée lancée par Vitiate, celle de pouvoir faire revivre son peuple, et le modeler à son image. C’était tentant, très tentant de leur faire comprendre que leur vision de la Force était fausse, et leur peur du Côté Obscur infondée ; mais pour quelle finalité ? Qu’avait-elle à y gagner de plus, sur le long terme ? Elle ne le saisissait pas, et n’avait jamais en vérité jamais eu à songer à aussi long terme. Toute sa vie avant Nihilus avait été rythmée par la méditation, et la symbiose avec la Force Vivante ; Après Katarr, elle n’avait vécu qu’au jour le jour, à traquer et assassiner les derniers jedis survivants… Se projeter aussi loin, c’était juste impossible. Tout ce dont elle était certaine sans vraiment savoir pourquoi, ni même se demander pourquoi, c’est qu’elle avait ce désir de l’aider dans sa quête. D’aller de l’avant.

Son absence de réponse claire à ses questions, cependant, avait tendance à l’irriter et la frustrer peu à peu. Comme souvent, Vitiate se contentait de rester vague, ou de se répandre en formules de styles qu’il n’était pas simple pour elle d’interpréter. Bon, c’est vrai, il était facile de comprendre le sous-entendu, qu’il avait trouvé un peuple, ou le représentant d’un peuple qui appréciait les personnes fortes et puissantes… Mais encore ? Ils étaient censés être associés dans cette affaire, non ? Et celle-ci était de la plus haute importance pour eux deux ! Elle ne cherchait pas à savoir sur quel monde il s’était rendu exactement, ni qui lui avait donné ces informations ; Visas savait bien que, par simple méfiance, il ne le lui dirait pas. Ils restaient deux sith travaillant ensemble, il y avait des principes et des préjugés à respecter. Cependant, le sentiment qui l’accaparait souvent en sa présence était qu’il ne lui révélait rien, absolument rien. Comment, dans ces conditions, pouvoir atteindre de concert leurs objectifs ?

Visas fronça le nez et se pinça les lèvres en y songeant, l’impression qu’ils perdaient ainsi en efficacité bien présente dans son esprit. Heureusement, en effet, que Sidious n’était sans doute même pas au courant de tout cela, ou bien il aurait pu les devancer aisément. Ceux qui le sous-estimait étaient, effectivement, des imbéciles sans conscience. Ce type avait berné tout l’Ordre Jedi, éliminé son Maitre et assis son pouvoir sur toute la galaxie. Certains l’oubliaient assez vite...

« Trois nouvelles cibles doivent être repérées, avant d’être capturées et rassemblées, une fois l’heure venue. Je sais où se trouve l’une d’entre elles et où elle compte se rendre, elle pourra être récupérée plus tard. La seconde m’est encore inconnue. La troisième… est à confirmer. Il s’agit d’une vieille Jedi du passé, ayant elle aussi vrillé autrefois dans le Côté Obscur. Elle se nomme Kreia. Je l'ai affronté récemment, dans la tête d'un pion. »

La miraluka aurait hausser un sourcil si elle l’avait pu. Il avait… « affronté » cette personne ? Par l’intermédiaire d’un… « pion » ? Ok, ok… Shan lui avait dit que Vitiate était redoutable, un véritable expert des manipulations mentales. L’intéressé ne s’en était d’ailleurs jamais vraiment caché. D’après les rumeurs, qui semblaient fondées, il avait pris le contrôle de peuples entiers. Ce n’était donc pas si impressionnant, dit comme ça. Heureusement, elle ne faisait pas partie de ces gens là, et donc… hé attendez une minute, il n’aurait pas osé quand même, si ? Il n’aurait pas osé faire ça, elle l’aurait probablement senti. Non ? Elle sentit son sang faire un tour, l’inquiétude monter mais essaya de se rassurer en se disant qu’ayant elle-même la faculté de plier l’esprit des faibles à sa volonté, ainsi que d’observer d’autres sensitifs à travers la galaxie, elle aurait sans doute remarqué une intrusion de ce genre dans son esprit… Mais… était-ce vraiment le cas ?

Visas essaya de ne plus y penser, et se laissa aller contre le dossier de son fauteuil. Elle ne voulait pas donner l’impression d’être distraite, alors que le sujet abordé était important. Elle ne voulait pas non plus qu’il se demande ce à quoi elle pouvait bien songer… Donc… Déjà, elle ne saisissait pas trop quel était le rapport entre la révélation qu’il venait de lui faire sur les failles, et le besoin de réunir ces trois personnes au même endroit. Sous-entendait-il qu’ils étaient des sortes de « clés » de l’Espace-Temps ? Qu’une fois réunis, ils provoqueraient une réaction de la Force qui leur permettrait d’accomplir ce dont il avait parlé ? Peut-être sous la forme d’un rituel ? Cela, elle pouvait l’envisager sans doute plus aisément que d’autres, de par sa « vision » particulière, et son lien étroit avec l’entité. La Force offrait tant de possibilités, des plus crédibles, aux plus abstraites.

Ensuite, elle trouvait les informations une fois encore assez vagues, bien qu’il soit bon d’entendre que l’une d’entre elle serait facile à trouver et capturer. La seconde serait sans doute la plus délicate, s’ils n’avaient aucune piste pour commencer. Quant à la troisième, le nom ne lui disait pas grand-chose, mais le reste l’intriguait. Elle aurait entendu parler d’une jedi devenue sith puis revenue vers la lumière si cela s’était produit avant elle. Revan avait été de ceux-là. Ce qui voulait dire que c’était soit une personne venant de son époque, soit d’un futur à celle-ci. Or, hormis Nihilus et Sion, elle n’avait brièvement connu qu’une seule autre Sith. Aussi demanda-t-elle plus de détails à son sujet, et fut surprise par la manière claire et précise avec laquelle Vitiate décrivit la psyché de la personne qu’il suspectait d’être leur troisième cible. L’esprit et l’aura ne lui était pas anodins, pas moins que la manière, mais rien n’était moins sûr pour autant. Cependant, il serait stupide de ne pas s’en assurer…

« Il se pourrait que j’ai déjà croisé cette dernière personne, d’où je viens, » finit-elle par dire, songeuse, en se frottant les doigts dans son gant. « Il n’y avait qu’une poignée de sith, dont une autre femme dont la psyché pourrait correspondre à votre description. Je ne l’ai vu que brièvement, mais il m’est possible de la chercher au travers de la Force par l’intermédiaire de son empreinte. Si elle est là, je la trouverais peut-être. »

Plus décomplexée que lors de leur première rencontre, elle n’hésita pas cette fois-ci à lui décrire comment il lui était possible de traquer les auras à travers la galaxie, sans la moindre considération pour les distances, à condition d’avoir déjà visualisé cette aura, ou bien parce que celle-ci était si atypique qu’elle devenait aisément discernable dans la nasse. Visas était bien sûr parfaitement inconsciente que Vitiate savait déjà tout cela, et sa mémoire altérée, complètement aveugle au fait qu’elle avait déjà utilisé cette méthode pour l’aider à retrouver Plagueis. Aussi poursuivit-elle, avançan en exemple à quel point il serait aisé pour elle de traquer l’aura de son interlocuteur, tellement celle-ci était remarquable. D’ailleurs, plus elle y pensait et en parlait, et plus elle songeait à comment il serait aisé pour elle de suivre ses moindres faits et gestes, peut-être même au travers du Chaos. Comme Nihilus à sa façon, il était si ancré et si puissant dans le Côté Obscur qu’il était difficile pour elle de ne pas le remarquer, même à des années-lumière d’elle.

« Il me faudra du temps, cependant. Son aura a probablement été altérée depuis, mais le cœur de son empreinte est resté la même. Il y a aussi une personne parmi les jedi présents que j’ai longtemps été ordonnée de traquer : Meetra Surik, surnommée l’Exilée. Passer par elle permettra de s’en assurer. Dès lors, s’il s’avère que cette Kreia est bien celle que cherchons, nous pourrons suivre ses moindres faits et gestes et déterminer où, quand et comment nous souhaiterions la récupérer. »

Il restait à savoir désormais comment s’assurer qu’elle était la troisième cible qu’ils recherchaient.

« En revanche, sans plus d’information concernant la seconde personne que vous avez mentionné, je ne vois pas comment je pourrais vous aider à la retrouver. Tout comme il me sera impossible de savoir si cette Kreia est bien notre troisième cible sans quelques détails supplémentaires. Savez-vous ce que nous devrons faire, d’ailleurs, lorsque nous les aurons toutes les trois réunies ? »

L’ex-petite Révanite l’amusait toujours, il serait facile de croire que la Force elle-même avait décidé de l’aider dans ce chemin insidieux… Quelle était la probabilité que l’une des trois cibles, à peine présentées par la prophétie, se révèle ainsi à lui dès les jours suivants, par l’intermédiaire d’un pion infecté il y a si peu ? Vitiate n’aurait osé penser que sa chère petite nature lui soit de nouveau utile si rapidement, après qu’il ait eu la gentillesse d’abattre Plagueis. Certes, il aurait pu simplement ordonner à un de ses sbires d’abattre le Sith d’un tir de blaster en plein cœur mais où aurait été l’amusement, en s’y prenant ainsi ? Le principe des Furies n’était pas seulement de s’en servir pour réaliser quelques tâches insignifiantes ici et là ou encore de les envoyer se débarrasser de quelqu’un lorsque l’envie de s’en charger soi-même manquait. Jouer avec était plaisant. Son petit Scourge avait une place toute particulière, dans son cœur, bien qu’il ne soit pas en mesure de réaliser comment et encore moins pourquoi. Quel dommage qu’il soit si naïf. Quel dommage, également, qu’il ne parvienne jamais à se poser la moindre question, se contentant de foncer bille en tête, la bave aux lèvres, pour ne réfléchir qu’une fois l’erreur effectuée. Fort heureusement, sa perfection en tant qu’assassin compensait son manque flagrant de neurones en état optimal de fonctionnement.

Sa plus récente victime était moins idiote que lui. Ce qui n’était, de toute manière, pas compliqué. Il ressentit l’inquiétude soudaine, dans son esprit, d’avoir été possédée, sans qu’elle n’ose ouvertement poser la question. En soi, le simple fait d’au moins s’interroger sur le sujet la rendait plus maligne que bien d’autres Furies, Skywalker en tête. Ainsi que sa crétine de fille. Enfin, cette dernière avait l‘avantage d’être bien plus utile, ainsi que sa délicate épouse trop nerveuse pour son propre bien. Ces deux-là lui servaient beaucoup et elles pourront même servir d’autant plus s’il devait arriver un… Disons, un accident, aux Mondes du Noyau. Cette part de son plan se déroulait sans accrocs aucun, un fait assez rare pour le souligner. Les Rebelles comme les Jedi les laissaient en paix, si ce n’est quelques petites anicroches ou attentats sans importance. Palpatine était plus gênant. Il y réfléchit, tout en répondant aux questions de son jeune pion sur la psyché de cette Kreia. Il restait, bien sûr, à confirmer qu’il s’agissait d’elle. Le seigneur Sith n’excluait pas la possibilité d’une autre personne venue de ces failles encore inconnue, vivant secrètement, quelque part. Sur des territoires aussi étendus, aussi bouleversés, se cacher n’avait rien de particulièrement ardu. Du moins, pour ceux capables d’utiliser leurs cerveaux… Certains n’en étaient malheureusement pas capables, comme la petite nature, Skywalker et l’entièreté de sa descendance.

Visas poursuivit sur sa lancée, pensant avoir déjà rencontré cette cible potentielle par le passé, puis expliquant ce qu’elle était capable de faire. Il écouta sans interrompre, l’air impassible. Ce pouvoir avait déjà été très utile, en effet. Un don rare, complexe, à double-tranchant. Les auras « remarquables » devaient être rares que troublantes, par ailleurs… Mmh, il était possible que son bon ami scientifique ne revienne pas avec une aura des plus attrayantes et discrètes, pas après ce qui s’était produit. Lui qui ne sentait déjà pas la rose lorsqu’il maniait ses pouvoirs, qui sait ce que cela donnera une fois de retour parmi eux ? Jamais un Sith n’aura si bien porté son nom.

« Il me faudra du temps, cependant. Son aura a probablement été altérée depuis, mais le cœur de son empreinte est resté la même. Il y a aussi une personne parmi les jedi présents que j’ai longtemps été ordonnée de traquer : Meetra Surik, surnommée l’Exilée. Passer par elle permettra de s’en assurer. Dès lors, s’il s’avère que cette Kreia est bien celle que cherchons, nous pourrons suivre ses moindres faits et gestes et déterminer où, quand et comment nous souhaiterions la récupérer. En revanche, sans plus d’information concernant la seconde personne que vous avez mentionné, je ne vois pas comment je pourrais vous aider à la retrouver. Tout comme il me sera impossible de savoir si cette Kreia est bien notre troisième cible sans quelques détails supplémentaires. Savez-vous ce que nous devrons faire, d’ailleurs, lorsque nous les aurons toutes les trois réunies ? »

« Pas encore, cela, je compte le découvrir. Le temps n’est pas un problème. S’il s’avérait qu’il ne s’agit pas d’elle, cela ne ferait que temporairement ralentir notre avancée. Vous devrez prendre garde à cette cible, elle est également capable de pénétrer les esprits sans une once de difficulté et de s’y promener pour en martyriser le sens, ainsi que les buts. Ce n’est toutefois pas le seul. Un enfant, récupéré par les Jedi, de quinze ans, possède cette même capacité et peut rentrer dans les âmes sans difficultés, malgré son jeune âge. Même un esprit parfaitement entraîné contre ce type d’intrusion peut être percé par ce gamin. Je lui accorde un vif intérêt. »

Ce n’était d’ailleurs plus un secret pour les Jedi, ils ne devaient pas être naïfs à ce point. Ou peut-être que si, allez savoir… Il avait ressenti, chez cette Kreia, lors de leur court affrontement, comme une « retenue ». Sans qu’il ne sache si ça ne provienne simplement d’une habitude prise durant les entraînements ou d’autre chose. Une retenue que ne possédait absolument pas l’enfant et qui, aux yeux, de Vitiate, le rendait plus dangereux. Un pouvoir brut et non contrôlé, ou trop peu, représentait toujours une menace. Comme sa chère petite Vaylin, par exemple, son enfant favorite.

« Tout cela est une course au long terme. Un autre problème, plus pressant, gêne sa poursuite. Je possède deux pions en place, dans les Mondes du Noyau, efficaces dans leur domaine. Mais pour qu’elles continuent de l’être, il faudrait s’occuper d’une nuisance. Elles ont déjà un plan, pour s’en débarrasser, mais si celui-ci échoue, la tâche vous reviendra. Vous aurez autant de quoi exploiter vos capacités que suivre un but. Si je ne m’abuse, c’est cela qui semble vous manquer. Je suppose que vous n’aviez jamais eu le loisir de réfléchir à vos propres désirs. »

Visas laissa un léger rictus se dessiner sur ses lèvres. Elle avait pensé que le sith avait autant obtenu les informations sur les clés à trouver, que sur leur finalité. Entendre le contraire était navrant, mais pas contraignant. Comme il le disait lui-même, le temps n’était pas un problème, du moins pour le moment. En effet, tant qu’ils étaient les seuls à posséder ces informations, il n’y avait pas de quoi s’inquiéter, ou même paniquer comme les esprits faibles avaient souvent tendance à le faire. Il faudrait néanmoins le cas échéant trouver une nouvelle piste, or celles-ci pouvaient être nombreuses et ils ne disposaient pas des noms de tous les sensitifs venus des failles, ce qui risquait de ralentir encore plus leurs recherches. C’est pourquoi Visas comptait bien s’y mettre au plus vite, car il lui faudrait également du temps pour trouver le bon état d’esprit, et commencer ses recherches à traves les filaments de la Force Vivante. Même si elle avait déjà « vu » l’aura de leur cible par le passé, la retrouver pourrait s’avérer long et difficile.

« Vous devrez prendre garde à cette cible, elle est également capable de pénétrer les esprits sans une once de difficulté et de s’y promener pour en martyriser le sens, ainsi que les buts. Ce n’est toutefois pas le seul. Un enfant, récupéré par les Jedi, de quinze ans, possède cette même capacité et peut rentrer dans les âmes sans difficultés, malgré son jeune âge. Même un esprit parfaitement entraîné contre ce type d’intrusion peut être percé par ce gamin. Je lui accorde un vif intérêt. »

Tiens, cela lui semblait sentir le vécu. Ainsi le grand empereur immortel se méfiait d’un gamin de quinze ans, récupéré par les jedis de surcroit ? Si Visas avait pu hausser un sourcil ou cligner des yeux, elle l’aurait sans doute fait. Ce n’était pas qu’elle n’était pas sotte ou négligente elle-même, au point de sous-estimer un pauvre adolescent mais elle aurait pensé qu’avec son expérience, son interlocuteur avait déjà tout vu, et tout vécu. Qu’il puisse lui « accorder un vif intérêt » était aussi étrange que dérangeant. Il devait à sa façon tenir se gamin en très haute estime pour qu’il vienne à demi-mot la prévenir du danger qu’il pouvait représenter pour elle, comme pour lui. Visas prit bonne note de ces informations, elles pourraient lui être utile plus tard, au besoin. Peut-être même contre son associé, si le besoin venait à se présenter. Pour l’instant, ce n’était pas un réel danger. Son don ne la liait pas à sa cible, et cette dernière n’avait aucun moyen de remonter jusqu’à son esprit de cette manière. Tout au plus pourrait-elle se rendre compte qu’elle est observée, et dans une moindre mesure encore, déterminer où elle se trouvait à l’instant donné.

C’était là une chose qu’elle n’avait encore jamais observé, ni même ressenti. Toutes les cibles de son temps, l’Exilée comprise, ne l’avait jamais vu venir, ni jamais su qu’ils avaient été observés à leur insu. Le gamin n’était d’ailleurs pas sa cible, et ne pourrait très certainement pas intervenir. Il restait à voir s’il préférait le garder loin de lui, ou chercher à le récupérer au plus vite pour s’assurer qu’il ne représente plus une menace pour leurs projets communs. Si tel était le cas, et que leur cible initiale se révélait être la bonne, peut-être pourront-ils trouver un moyen de les enlever tous les deux. Ca risquait de compliquer la chose, surtout que les jedis ne devaient pas être assez ignorant pour ne pas avoir pris en considération les dons du gamin, mais ce n’était pas impossible à mettre en œuvre plus tard. Elle allait commencer par le commencement : déterminer si la personne qu’ils ciblaient était bien celle qu’ils recherchaient. Puis elle passerait à la suivante, celle dont ils ignoraient tous. C’est seulement avec les trois cibles parfaitement identifiées qu’un plan pour les rassembler pourrait être préparé.

« Tout cela est une course au long terme. Un autre problème, plus pressant, gêne sa poursuite. Je possède deux pions en place, dans les Mondes du Noyau, efficaces dans leur domaine. Mais pour qu’elles continuent de l’être, il faudrait s’occuper d’une nuisance. Elles ont déjà un plan, pour s’en débarrasser, mais si celui-ci échoue, la tâche vous reviendra. Vous aurez autant de quoi exploiter vos capacités que suivre un but. Si je ne m’abuse, c’est cela qui semble vous manquer. Je suppose que vous n’aviez jamais eu le loisir de réfléchir à vos propres désirs. »

Visas était d’accord avec sa vision. Tout cela allait prendre du temps, ce qui impliquait de régler d’accomplir d’autres tâches dans un temps intermédiaire. Elle se redressa légèrement, en l’écoutant lui avouer qu’il possédait d’autres pions, cette fois-ci dans le Noyau, ce qui l’amena à se demander encore combien d’autres personnes étaient à son service, et surtout, de quelle manière. Son angoisse de tout à l’heure refit aussitôt surface et-… hein… quoi ? Elle écarta légèrement les lèvres, de surprise. Comment pouvait-il dire… Elle baissa très légèrement le menton, en refoulant aussitôt panique, angoisse et incompréhension. Ces sensations n’avaient pas leur place là, maintenant. Pas alors qu’il venait de planter son verbe là où ça faisait le plus mal… Visas serra son voile plus fermement entre ses mains. Elle ne se souvenait plus si elle lui avait parlé de son époque, de ce qu’elle avait vécu. Elle doutait avoir abordé le sujet en détail, ne serait-ce que pour éviter de donner des armes à un sith qui pouvait déjà se débarrasser d’elle d’un revers de main. Etait-elle si… expressive ? Ou bien était-il déjà dans sa tête ?

« C’est plus compliqué que ça, » balaya-t-elle d’un revers de main hasardeux, après un léger blanc, en essayant de détourner la réalité. Elle allait devoir faire une longue introspection, pour s’en assurer.

Aborder le sujet maintenant ne servirait à rien d’autre que de s’affaiblir devant lui ; confirmer son soupçon. De plus, étant donné l’appétence de son interlocuteur pour la théâtralité, il laisserait sans doute planer le doute pour se divertir. Ce n’était pas qu’elle n’avait pas de désirs, c’est que… Elle poussa un léger soupir, en relevant le menton vers le sith. C’était vrai. Toute sa vie n’avait été que calvaire, après Katarr. Elle n’avait jamais plus eu d’envie, de souhait, d’objectifs autre que celui de mourir. Cela avait quelque peu changé, avec les failles. Mais elle n’avait jamais retrouvé pleinement sa propre volonté. Elle avait erré sans but réel, avant de rencontrer son associé : elle était retournée sur Katarr, pour accepter ce qui s’y était passé et y refermer la profonde blessure qui l’avait si longtemps hanté, puis avait un petit bout de chemin avec l’autre miraluka, avant que celle-ci ne disparaisse pour de bon et ne balaye avec elle les premiers signes de sa renaissance. Avec Vitiate, elle avait retrouvé un cadre, des objectifs à remplir. Une sorte de satisfaction personnelle. Mais non, elle n’avait retrouvé ses aspirations, en dehors de ce qu’elle avait déjà longuement souhaité.

Elle poussa un nouveau soupir, d’exaspération cette fois-ci. Il était préférable de se concentrer sur la tâche à venir, l’élimination de cette nuisance. Surtout si celle-ci pouvait venir compromettre leur entreprise. Son conflit interne, ses faiblesses, ses buts inavoués ne pouvait pas l’intéresser.

« Qui sont ces pions, dont vous parlez ? » finit-elle par demander, en supposant qu’il ne lui répondrait sans doute pas, s’il ne souhaitait pas révéler tous ses atouts, et si, effectivement, il ne la considérait pas vraiment comme une associée, mais comme un pion, elle aussi ; Sacrifiable, et auquel il ne fallait pas trop en dire au cas où il tomberait entre de mauvaises mains. « Et cette cible, qui est-elle et quel est son rôle, dans cette affaire ? Comment souhaitez-vous vous en débarrasser ? »

Bien entendu, tout était toujours si compliqué pour les natures simples et sensibles, elles luttaient à contre-courant plutôt qu’apprendre à le maîtriser. Leur faible condition ne leur permettait point de sortir l’esprit d’une telle débâcle. Un tel gâchis se retrouvait également dans l’esprit de sa chère petite nature, plus encore ces derniers temps. Ses récentes rencontres sociales ne lui avaient guère fait du bien, il en avait oublié tous les principes fondateurs et essentiels lui ayant autrefois permis de gravir les échelons. Une faiblesse pourtant inhérente aux Jedi… Ah, ce stupide groupe dans lequel il s’était perdu n’avait guère dû l’aider. Revan n’avait, après tout, jamais compris l’essence même de l’équilibre et encore moins y accéder, il avait toujours cru qu’user simplement des pouvoirs liés à la fois à la lumière et l’obscurité suffisait. Cette croyance bien naïve, qu’l avait voulu transmettre aux disciples assez faibles pour vouloir le suivre, les avaient tous conduits droit dans un mur. Vitiate avait détaillé tout cela dans l’esprit de son pion favori comme il aurait observé un nouveau nid étrange de minuscules insectes, impropres à la survie, finissant de se consumer eux-mêmes dans les cendres de leur propre folie. Se fourrer là-dedans était une bine curieuse idée, qu’il n’aurait pourtant guère cru, de la part de sa petite nature, sans y assister par lui-même. Son pion était-il si naïf ou manipulable… Ou bien n’était-ce que passager ? C’était à espérer.

« Qui sont ces pions, dont vous parlez ? Et cette cible, qui est-elle et quel est son rôle, dans cette affaire ? Comment souhaitez-vous vous en débarrasser ? »

Sa petite nature restait, certes, moins manipulable que celle voilée… Du moins, elle avait appris à se méfier de lui, le craindre et le haïr, au fil des siècles, comme elle avait su apprendre que se trouver des alliés pour vaincre était une nécessité. Brave petit. Pourvu, désormais, qu’elle retrouve une mentalité plus ancienne, à présent qu’elle se délestait des boulets tels que Revan et ses alliés. Côtoyer ce garçon avait toujours été une lourde erreur, que ça soit pour les Jedi, les naïfs ayant voulu le suivre dans la guerre, de près ou de loin, puis pour de nouveaux naïfs de leurs jours. Vitiate avait toujours trouvé incroyable que malgré un passif aussi bourrin et chargé, des personnes puissent continuer de lui faire confiance. Enfin… Ce n’était là que de la sélection naturelle.

« Vous trouverez aisément des informations sur elles en grattant un peu, » glissa-t-il d’un ton badin, comme s’il discutait de la pluie et du beau temps. « Elles dirigent Alderaan, un charmant petit couple de femmes. Mon ami Sidious s’est par ailleurs persuadé que je les ai possédées, car il sait qu’elles attisent mon intérêt. Ce n’est guère une nécessité, cela dit, dans de nombreux cas. Ces deux femmes sont des Sith et il est indispensable que des Sith ayant une forte appétence en politique demeurent dans de tels secteurs et y travaillent. Cet Empire peut s’effondrer, se diviser, renaître sous une nouvelle forme, qu’importe, tant que le Côté Obscur y demeure puissant et solidement ancré. Ce n’est guère une mince affaire, les Jedi ont souillé le Noyau bien trop longtemps. Sidious y travaille avec acharnement depuis plus de vingt ans et il est souhaitable que de jeunes atouts soient prêts à poursuivre ce travail s’il chute. »

Une chute précoce serait dommageable, cependant. Les deux femmes débutaient leur travail sur d’autres mondes que le leur, les affaires avançaient bien, mais elles n’avaient pas encore l’aura de Sidious ni son expérience en la matière.

« La cible est le père adoptif de l’une des deux, Bail Organa. Sidious souhaite le récupérer pour faire joujou avec, j’imagine que cela le détendra, après tant de dures journées de travail. Mais cet homme sait bien se cacher. »

L’interrogation subsistait, au cœur de ses pensées. Le doute, et la méfiance vi-à-vis de la teneur de la relation qu’elle entretenait avec Vitiate. En principe une association pour aller de l’avant, comprendre et utiliser le phénomène lier aux failles à leur avantage, était-ce toujours vraiment le cas ? Pouvait-elle réellement obtenir ce qu’elle voulait de cette affaire, ou bien n’était-elle qu’un pion supplémentaire dans un jeu plus grand, et dont il tirait les ficelles ? Il avait présenté le champ des possibilités qu’une telle entreprise pourrait ouvrir selon son point de vue, en touchant chez elle un point sensible, une espérance qu’elle avait jusque là pensait vaine, et dont elle avait appris à se désintéresser avec le temps. Il avait certes ouvert la question, mais posée comme ça, sans réel temps de réflexion, elle n’avait pu lui donner des idées concrètes. Après avoir perdu pendant des années ne serait-ce que l’envie d’accomplir ses plus sombres désirs ou de suivre ses propres objectifs, il lui était difficile de se projeter aussi loin, et avec une telle grandeur. Que pouvait-elle bien obtenir, tout avait été perdu. Et cette nouvelle vie, cette nouvelle opportunité, elle n’arrivait pas à la saisir. A se donner un réel but.

Elle restait extrêmement curieuse quant à ces failles et trouvait le pouvoir qui les entouraient absolument fascinant. Elle pêchait cependant toujours à savoir comment l’exploiter, et à quel dessein. Vitiate parlait d’équilibre, d’un nouveau départ. Mais quelle pouvait-être sa place, là-dedans ? A chaque fois qu’elle y songeait, elle se retrouvait dans le flou, incapable de se projeter. Comme un blocage, impossible à surmonter. Pourtant, rien ne l’était réellement. Peut-être que malgré les épreuves subies ; malgré la solitude ressentie et la haine qu’elle vouait à Nihilus pour ce qu’il lui avait fait ; peut-être qu’elle s’était simplement habituée à suivre ; Et à s’en contenter du moment qu’on la laisse tranquille… D’où, peut-être là aussi, sa soudaine inquiétude à la possibilité que Vitiate ait pu franchir les barrières de son esprit. Si suivre ou s’associer à d’autres pour les aider dans leurs buts ne la dérangeait pas, elle était désireuse de garder son libre-arbitre retrouvé en arrivant par les failles ; Incapable, hélas, de se rendre compte qu’elle l’avait d’une certaine façon déjà perdu de nouveau.

Les réponses de Vitiate à ses questions suffirent à partiellement recentrer ses gyroscopes, tout en la laissant encore plus dans le flou de ce qui la tracassait depuis son arrivée. Il était évident qu’il parlait de Leia Organa, bien qu’elle ait peu d’informations sur cette femme avec qui elle était apparemment en couple. Cela, elle l’apprenait, ayant passé ces derniers temps loin du centre de la galaxie. Il faut dire qu’elle ne s’était que guère intéressé à la vie politique et la situation de la guerre entre l’Empire et la Rébellion dans le Noyau et sa périphérie ; Hormis pour les choses aussi cruciales comme le bouleversement qu’avait provoqué la « trahison » de Leia Organa. C’était une zone dont elle s’était extirpée très tôt en arrivant dans ce temps, justement pour éviter de rester une cible au milieu d’un nid de vipère, puis se désintéresser des jedis, et de l’Exilée. Elle trouva amusant, cependant, qu’il désigne Sidious comme son « ami », après ce qu’il avait pu en dire à son sujet plus tôt. Il était évident qu’à défaut de le voir comme un allié fiable, ce qu’il n’était très certainement pas vu son passif, il le respectait pour ce qu’il avait pu accomplir seul. Visas aussi, devait bien admettre son efficacité.

Ses propos eurent aussi l’effet pervers, mais rassurant, d’apaiser les doutes qui subsistaient dans son esprit vis-à-vis de leur partenariat tout en renforçant la méfiance qu’elle pouvait avoir à son égard. S’il estimait peu nécessaire de venir posséder les siths ouvrants actuellement dans son intérêt, alors sans doute n’avait-il rien tenté à son encontre personnellement. Pour le moment, en tout cas. La conclusion qu’elle en tirait était que cela pouvait tout à fait changer du jour au lendemain.

Du reste, il serait effectivement dommageable que les efforts fournis par Sidious ne soient pas repris au cas où l’Empire devrait s’effondrer. En revanche, elle ne comprenait pas encore l’objectif visé par Vitiate dans cette affaire, hormis s’assurer que ses pions prennent la suite et continue le travail mené pour éradiquer les millénaires de présence jedi. Peut-être était-ce seulement cela. Somme toute pas de quoi véritablement la concerner, elle n’avait jamais eu la moindre appétence pour les affres de la politique, ou même pour toute forme avancée de sociabilisation.

« La cible est le père adoptif de l’une des deux, Bail Organa. Sidious souhaite le récupérer pour faire joujou avec, j’imagine que cela le détendra, après tant de dures journées de travail. Mais cet homme sait bien se cacher. »

Bail Organa… Visas n’avait jamais entendu parler de cet individu auparavant, mais il devait nécessairement avoir un lien avec Leia Organa. Elle ne serait néanmoins pas surprise de découvrir qu’il avait gouverné la planète avant elle, ou même l’Empire. Un rebelle, sans le moindre doute. Qui devait également se terrer auprès d’eux, désormais. Ce qui allait compliquer la tâche, car les jedis ne seraient sans doute pas très loin, vu les liens qu’avait le personnage.

« S’il est intimement convaincu, même à tort, que vous possédiez les corps de Leia Organa et de sa compagne, il pourrait utiliser cette cible pour miner leur influence et leurs efforts dans le Noyau. Y impacter nos intérêts. Je ne suis pas certaine qu’il soit sage de le lui livrer vivant, mais je présume que le livrer mort ne le satisferait pas vraiment. Le mieux serait sans doute de s’assurer qu’il le récupère dans un état où il ne lui serait d’aucune utilité contre vos deux pions. » Si possible incapable de délivrer le moindre discours, ou de servir à autre chose qu’un simple souffre-douleur pour détendre Sidious. Là encore, la façon de s’exprimer de Vitiate à son sujet l’amusait. « Je serais curieuse de savoir quel plan elles ont établi, pour le capturer, mais je présume qu’en discuter avec les intéressées est hors de question pour le moment. Cependant, s’il parvenait à s’enfuir, il serait alors plus simple de le suivre et d’établir un autre moyen pour moi de m’en débarrasser. »

Cela n’allait pas l’empêcher d’y réfléchir plus longuement plus tard. L’endroit et le moment n’étaient sans doute pas les mieux trouver pour se projeter. Il restait d’abord à voir si le plan initial prévu par Organa et sa compagne allait fonctionner. Et si des jedis allaient s’interposer. Ce serait un bon moyen d’estimer les risques pour la suite.

« Vos plans pour le Noyau me font penser que le Chaos est une zone déjà reculée, avec l’Espace Sauvage. Les peuples qui y vivent m’ont semblé plus prompts à la méfiance et à la violence, potentiellement plus susceptibles aux effets du Côté Obscur. Avez-vous songé à établir d’autres pions dans ces régions ? Mes connaissances les concernant sont assez limitées, et mes récents voyages n’ont pas été très fructueux. Hormis pour ce sith assez atypique, trouvé par hasard. »

Le terme était un euphémisme. Elle avait plutôt erré sans réels buts, et les rares fois où elle avait tenté quelque chose, elle avait d’û soit s’absenter, soit laisser les quelques sbires à sa disposition d’en charger. Sans grands succès.

Vitiate ne fit qu’un simple et léger mouvement de tête, peu inquiet vis à vis de ce sujet. Certes, il y a un an, il aurait pu s’en préoccuper, aujourd’hui, ce n’était plus guère le cas. Organa ne représentait déjà plus le moindre problème, son influence sur l’esprit de son pion avait été brisée, à force de temps et d’un travail minutieux, au fil des semaines, chez sa tendre fille. Les liens de cette nature devaient être dénoués avec le plus grand des soin, en prenant son temps, tout en douceur, pour que cela soit efficace et il savait être patient. Un travail qu’il n’avait cependant pas achevé sur le lien l’unissant à son cher frère. Au cas où, simplement, il pourra en avoir un jour besoin. Mmh, tiens, cela lui faisait songer… Palpatine recherchait-il toujours ce gamin ou avait-il laissé tomber l’affaire… ? Peu probable. La destruction de son joujou destructeur de planètes l’avait beaucoup énervé, après tout. Son malheureux confrère devait être si frustré de ne pas juste pouvoir étriper le gamin en bonne et due forme, s’il lui mettait la main dessus, ça serait prendre le risque de le voir revenir plus âgé et donc mieux entraîné par une faille. Étant donné ce qu’il avait découvert dans les esprits du père, brièvement, puis de la fille, Vitiate doutait que le fils soit parvenu à comprendre à quel point Sidious brûlait de le capturer. Comme c’était mignon.

« Je serais curieuse de savoir quel plan elles ont établi, pour le capturer, mais je présume qu’en discuter avec les intéressées est hors de question pour le moment. Cependant, s’il parvenait à s’enfuir, il serait alors plus simple de le suivre et d’établir un autre moyen pour moi de m’en débarrasser. Vos plans pour le Noyau me font penser que le Chaos est une zone déjà reculée, avec l’Espace Sauvage. Les peuples qui y vivent m’ont semblé plus prompts à la méfiance et à la violence, potentiellement plus susceptibles aux effets du Côté Obscur. Avez-vous songé à établir d’autres pions dans ces régions ? Mes connaissances les concernant sont assez limitées, et mes récents voyages n’ont pas été très fructueux. Hormis pour ce sith assez atypique, trouvé par hasard. »

Oui, par hasard. C’était également un pur hasard si sa petite nature s’était retrouvée dans de telles zones. Chacun avait ses petits jouets et manières de se détendre, n’est-ce pas ? La petite nature ne lui servait quasiment qu’à cela, le distraire. Il était autant amusant de le savoir se débattre à baver sur son compte et l’intérêt de le mettre hors d’état de nuire que l’observer accomplir les pires bavures possibles en courant. Non seulement il avait indirectement permis à Plagueis de sortir de son tombeau mais il avait aussi participé à l’empoisonnement en le tuant. Décidément, dès qu’il approchait de près et même de loin le sorcier Sith, un malheur suivait aussitôt. Ou plutôt, dès qu’il approchait un membre de leur Ordre, tout court.

« Le Chaos n’a guère besoin d’aide, pour s’adonner à la puissance du Côté Obscur, » sourit-il légèrement. « Très rares y sont les peuples neutres, aucun ne peut croire en la paix sans la guerre. Une fois le Noyau parfaitement corrompu, la galaxie sera officiellement prise entre deux feux. »

Sidious devrait d’ailleurs le remercier. l’Empereur Immortel avait longuement travaillé à occuper une partie des ennemis de son confrère. Certes, non pas par bonté d’âme ou une quelconque alliance, simplement car cela servait ses intérêts. Il admettait, cela posé, avoir eu la partie facile. Les peuples belliqueux étaient si aisés à convaincre, d’autant mieux ceux de cette douce et si vaste région. Il était bien plus long et pénible de créer la discorde au sein d’une union de peuples s’entendant correctement, y compris de manière imparfaite. Les Grandes Républiques et Empires étaient plus longs à briser, Sidious comme lui-même pouvaient en témoigner. A côté, le Chaos était ridiculement simple à malmener. La méfiance et l’isolement dont se paraient tous ces peuples pour se défendre étaient autant leurs forces que leurs faiblesses.

« Une dernière chose. Veillez à encourager, voire aider, les personnalités ou factions ayant des envies de vacances, loin des grands rassemblements politiques, en-dehors des Mondes du Noyau. L’établissement d’un nouvel ordre ne pourra se faire sans quelques fractures et en se débarrassant des branches les plus pourries. Il faut parfois savoir recommencer avec petit, avant d’agrandir son ombre. »

Visas fit une légère moue, quelque peu surprise du manque de considération que pouvait avoir son associé vis-à-vis des risques que la capture par Sidious de l’ancien vice-roi d’Alderaan pouvait avoir pour ses pions sur place. Il y avait tant de manière de l’utiliser, en dehors de son lien père-fille sans doute déjà brisé par son attachement au Côté Obscur : le simple fait d’annoncer que Bail Organa avait été capturé par sa fille pouvait provoquer des réactions à double-tranchants. Les rebelles ou même les jedis pourraient décider de s’immiscer dans cette affaire et mettre en échec leurs plans dans la région. Sidious pouvait également l’utiliser pour créer un contre-pouvoir, ou même aller pur et simplement à l’encontre des décisions qui avaient mené à l’exil de père pour l’intronisation de sa fille. Qui sait ce qu’un sith de sa trempe pouvait décider de faire, s’il se sentait acculer de toutes parts… Non, si Organa et sa compagne ne parvenait pas à faire le travail elles-mêmes, elle n’hésiterait pas à le liquider si l’occasion venait à le lui permettre. En mettant les formes, bien sûr, pour que l’on ne puisse pas venir accuser ce… « charmant petit » couple d’en être responsables.

La miraluka voyait plusieurs façons de faire, en commençant par faire accuser d’autres factions rivales pouvant souhaiter des actions plus fortes de la part des rebelles, ou encore en provoquant tout simplement un malencontreux accident… Avec tous les longs couteaux et les loups sauvages qui parcouraient la galaxie dans cette période trouble, toute méthode restait crédible.

« Le Chaos n’a guère besoin d’aide, pour s’adonner à la puissance du Côté Obscur. Très rares y sont les peuples neutres, aucun ne peut croire en la paix sans la guerre. Une fois le Noyau parfaitement corrompu, la galaxie sera officiellement prise entre deux feux. »

Elle opina doucement du chef, n‘ayant pas d’avis contraire sur le sujet, avant de venir doucement repositionner son voile sur la tête, par-dessus sa chevelure de jais. Il était vrai que toutes les peuplades ou petites factions qu’elle avait pu croiser lors de ses périples étaient traditionnellement isolationnistes, pour ne pas dire xénophobes. Visas n’avait pas connaissance de la moindre nation pacifique. Elle tira doucement sur l’extrémité ornée de son voile, pour le tendre le long de l’arête de son nez et masquer définitivement son bandeau et son visage atrophié caché en-dessous. Le plan de Vitiate ne manquait pas de finesse, et la miraluka se sentit quelque peu porté d’enthousiasme à l’idée de le voir se réaliser. C’était une drôle d’idée, qu’elle balaya aussitôt de sa réflexion mais qui resta accroché au fond de sa pensée. Il ne faisait pas de doute que rayer définitivement Bail Organa de l’équation ferait légèrement avancer cet objectif. Ça, et orienter les indécis ou laissés pour compte loin de l’Empire, de la Rébellion ou de tout autre organisation qui n’était pas sous leur contrôle, ou jouait à leur insu dans leur jeu. L’idée fit son petit chemin dans son esprit, parce qu’elle faisait sens et semblait parfaitement réalisable, bien qu’elle ne sache trop comment elle pouvait y aider.

« Veillez à encourager, voire aider, les personnalités ou factions ayant des envies de vacances, loin des grands rassemblements politiques, en-dehors des Mondes du Noyau. L’établissement d’un nouvel ordre ne pourra se faire sans quelques fractures et en se débarrassant des branches les plus pourries. Il faut parfois savoir recommencer avec petit, avant d’agrandir son ombre. »

Visas esquissa un fin sourire, amusée de constater que son associée semblait visiblement pensée aux mêmes effets, pour obtenir les mêmes conséquences. Elle n’était pas certaine, en revanche, d’être la plus à même de s’impliquer dans une telle entreprise. D’ordinaire, les gens avaient tendance à l’éviter, tout comme elle savait apprécier sa solitude. Les résultats dans le Chaos n’avaient pas été très probants, mais en y réfléchissant Vitiate avait raison, le Chaos n’était pas propice à cela. Il était déjà fracturé, il n’y avait plus grand-chose à y accomplir. Les franges du Noyau, en revanche… C’était un coin qu’elle connaissait mieux.

« Bien que ce ne soit pas là mon point fort, je vais voir ce que je peux y faire, » répondit-elle, étonnamment plus intéressée qu’elle ne l’aurait cru, avant que cette brève réalisation ne se dissipe aussitôt, avant qu’elle n’ait pu s’en saisir.

C’était un territoire qu’elle ne maitrisait pas, elle ne pouvait donc, après tout, que s’améliorer. Sans parler que la négociation et la discussion n’étaient pas les seuls outils à sa disposition, pour cela. Il existait bien des moyens de pressions plus… insipides ou directs pour forcer la main des esprits faibles, mais d’autres devait être travaillé de façons plus directes... Cette pensée en fit germer une autre, qui elle-même raviva un intérêt quel avait pu avoir récemment à la suite de ses péripéties dans le Chaos, et qu’elle avait depuis laissé en désuétude au tréfonds de son esprit.

« Nul doute que certains seront faciles à convaincre, que ce soit par coercition directe ou indirecte, ou même par choix. L’Empire et la Rébellion ont assez fait de ravages pour cela, » ajouta-t-elle en agitant négligemment sa main gantée, ce désir oublié se faisant un peu plus exaltant. Son associé était par ailleurs le plus à-même de l’aider. Il était regrettable qu’elle n’ait as cru en sa proposition plus tôt, par manque d’assurance et de confiance. « Ce qui me fait songer que j’aurais sans doute besoin de votre guidance et ainsi que de votre expertise dans deux domaines, à commencer par celui de la sorcellerie… Il se trouve que je me suis retrouvé confronté à certaines… anomalies dans le Chaos. Des anomalies que mes… lacunes dans le domaine ne m’ont pas permis de cerner autant que je l’aurais dû. » C’était là un euphémisme grossier. Cette chose avait manqué de la tromper pour de bon, ce qui l’avait laissé inexorablement frustrée. Il était hors de question qu’elle se fasse piéger à nouveau de la sorte ! « J’aimerais également que vous m’en appreniez plus sur la maitrise des esprits. Vous êtes, après tout, un expert dans ce domaine. Or, bien que débattre avec esprits faibles puissent être distrayant un temps, il devient parfois lassant de devoir attendre qu’une petite nature prenne conscience de sa situation, et de sa condition. Dans notre intérêt commun, j’aimerais pouvoir accélérer ce processus, si vous le voulez bien. »

Elle laissa là sa requête en suspens, un peu surprise elle-même d’avoir osé faire cette demande, alors qu’elle s’en serait sans doute sentit incapable quelques mois plus tôt. Peut-être que leur association lui apportait du bon à elle aussi, malgré tout ; une envie de progresser, naissante, qu’elle n’avait pas eu depuis fort longtemps…


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Connaissances sur les factions moins aggressives du Chaos : 15.